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- N° 169 (mai 2002)
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LE GENRE ASCODESMIS (PEZIZALES) NOUVEAU POUR LA BELGIQUE
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Résumé
Deux espèces du genre Ascodesmis ont récemment été observées en Belgique : A. microscopica et A. nigricans. Toutes deux sont décrites et figurées sur base de ces récoltes et confrontées aux données antérieures. La récolte rapportée à A. microscopica pose le problème des limites de cette espèce par rapport à A. sphaerospora qui ne diffère de la première que par la forme des spores. Décrites comme subglobuleuses à faiblement ellipsoïdes (rapport L/l < 1,15) chez A. sphaerospora, celles-ci présenteraient des formes un peu plus ellipsoïdes chez A. microscopica (rapport L/l > 1,2). Nos observations ne permettent pas de confirmer cette distinction : en conséquence, nous proposons de les mettre en synonymie.
Abstract
Summary : The genus Ascodesmis (Pezizales) new to Belgium
Two species of Ascodesmis (A. microscopica and A. nigricans) were quite recently and for the first time collected in Belgium. Both are described and represented according to these collections and collated with previous data. The findings about A. microscopica lead to the borderline case with A. sphaerospora which is supposed to differ only from the former by the ascospore forms : these are described as subglobose to slightly ellipsoid (ratio L/l < 1.15) in A. sphaerospora while they are reported as a bit more ellipsoid (ratio L/l > 1.2) in A. microscopica. Our observations do not allow to separate both taxa at specific level : A. sphaerospora is thus regarded as a synonym of A. microscopica.
Table des matières
1 Actuellement placé dans une famille monotypique, les Ascodesmidaceae Schroet., le genre Ascodesmis Tiegh. est très isolé parmi les Pezizales en raison de l’ultrastructure de l’asque et des ascospores, alors qu’il a été longtemps placé à côté de la famille des Ascobolaceae ou même au sein de celle-ci, dans une sous-famille (VAN BRUMMELEN 1967, 1981). Par ailleurs, les apothécies sont réduites à un bouquet d’asques et de paraphyses implantées sans la protection d’un excipulum, sur un hypothécium restreint. Comme c’est fréquemment le cas, une telle disposition reproductrice minimale a poussé nombre d’auteurs à voir dans cette structure le modèle le plus primitif chez les Ascomycètes, alors que d’autres, tout aussi nombreux, l’interprètent comme le résultat d’une spécialisation engendrant une régression drastique!
2 En fait, la position taxonomique isolée du genre Ascodesmis tient d’une part à l’origine de l’ornementation sporale qui dérive directement du matériau constitutif de la paroi secondaire originelle, tandis que c’est exceptionnellement la partie interne de cette paroi qui se différencie pour donner la paroi proprement dite; d’autre part, l’ontogénèse de l’opercule et la structure du sommet de l’asque (absence d’entonnoir et de tractus apical) s’écartent des modèles rencontrés ailleurs chez les Pezizales (VAN BRUMMELEN 1978).
3 Les six espèces que compte actuellement le genre sont toutes coprophiles aussi bien sur déjections de carnivores que d’herbivores; il arrive aussi qu’elles soient isolées à partir d’échantillons de sols, vraisemblablement souillés par des excréments. Cet habitat limité aux substrats formés de déjections ou enrichis en matières fécales et donc hautement spécialisé suggère un besoin en éléments qui pourraient être fournis par des bactéries.
4 Malgré le nombre restreint de localités recensées, leur distribution semble très large (Europe, continent américain et, dans une moindre mesure, Asie, Afrique et Australie); cette répartition à première vue sporadique et, donc, cette apparente rareté tiennent essentiellement à la dimension ténue des apothécies dont le diamètre excède exceptionnellement le quart de mm, ce qui rend peu probable leur repérage sur le terrain.
5 À notre connaissance, les inventaires publiés ne font pas mention de la présence du genre Ascodesmis en Belgique. Néanmoins, les collections du Jardin Botanique National (BR) renferment un échantillon relativement récent dont il sera fait mention ci-dessous. Dernièrement, la récolte fortuite, dans une même localité brabançonne, de deux espèces appartenant à ce genre nous a incité à la présente mise au point.
6Les descriptions suivantes correspondent exclusivement au matériel récolté personnellement; elles sont suivies de remarques critiques issues de la confrontation de nos observations avec les données antérieures.
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Ascodesmis microscopica (Crouan) Seaver - Fig. 1
7Apothécies solitaires, superficielles ou très légèrement immergées, sessiles, (125-)310(-400) m de diamètre et (125-)205(-330) m de hauteur, hyalines, devenant plus brillantes avec la saillie des asques, pulvinées ou plus souvent en forme de dôme, formées d’un bouquet de (6-)35(-63) asques entourés de nombreuses paraphyses. Hyménium fortement convexe, ponctué par la réfringence des asques mûrs longuement en saillie. Hypothécium formé d’un faux-tissu massif d’hyphes à parois minces étroitement agencés de (5,5-)7,3(-10) m de diamètre. Excipulum absent. Asques octosporés, assez longuement claviformes, largement arrondis au sommet et pourvus d’un opercule presque aussi large que l’asque, à base brusquement atténuée en un pied court, parfois fourchu, (58-)65(-72)x19-)23,8(-26,5) m. Ascospores disposées irrégulièrement dans l’asque, souvent bisériées du moins dans le haut, subglobuleuses à brièvement ellipsoïdes [rapport L/l : (1,00-)1,14-1,16(1,40)], d’abord entièrement hyalines, paraissant brunes à maturité en raison de la coloration prononcée de l’ornementation, (10,0-)12,6-14,5(-16,0) x (9,0-)10,6-12,4(-13,7) m (non compris l’ornementation), dépourvues de guttules; ornées d’alvéoles formées par un réseau assez régulier de crêtes et d’épines [hauteur : (1,23-)1,32(-1,5) m] parfois crochues situées aux intersections du réseau ainsi que de verrues, de courtes épines et (ou) de crêtes menues dans les alvéoles.
8Paraphyses nombreuses, 25 à 82 m de long, 4-5- septées, rarement ramifiées à l’extrême base, hyalines, d’un diamètre de 3-4 m, faiblement élargies au sommet (6 m), pourvues de vacuoles et de petites guttules.
9Habitat.- Sur fiente de tourterelle turque, au sol sous leur perchoir habituel dans un jardin d’agrément.
10Matériel examiné.- Ottignies-Louvain-la-Neuve (Limelette), 20. VIII. 2001 ( J.R. De Sloover 01C 35 ).
11Discussion
12 Si l’on se réfère à la monographie de VAN BRUMMELEN (1981), quelques divergences apparaissent à l’analyse de notre matériel; elles concernent d’une part des éléments mineurs telles la forme et la dimension des apothécies ou le nombre d’asques par apothécie, d’autre part des caractères plus significatifs tels que la couleur et la forme des ascospores. Ce dernier critère joue un rôle majeur dans la délimitation des espèces et nos observations à ce sujet conduisent à des nouvelles perspectives.
13 a. Décrites comme cylindriques ou obconiques pour s’aplanir ensuite légèrement avec l’âge, les apothécies que nous avons étudiées montrent constamment une forme de coupole presque hémisphérique à maturité, lisse au début et devenant progressivement grenue avec l’émergence des asques mûrissant;leur apparence initiale est toujours d’un blanc laiteux mat pour s’éclaircir ensuite et devenir hyalines et brillantes dès le moment de la saillie des asques.
14Fig. 1. Ascodesmis microscopica.- a. Apothécie.- b. Faux-tissu de l’hypothécium.- c. Paraphyses.- d-f. Asques à maturité.- g. Asque émettant ses ascospores.- h-i. Deux ascospores, chacune en coupe optique et en vue polaire.- j-p. Ascospores en vue polaire (en p type d’ornementation aberrant). (D’après De Sloover 01C 35).
15Largeur et hauteur des apothécies sont très nettement supérieures1 aux données de la littérature : 125 à 400 μm de diamètre contre les 50 à 250 signalés dans la monographie; de même, dans le matériel observé, la hauteur atteint le double (300 μm) de celle que signale VAN BRUMMELEN (1981). Le nombre d’asques par apothécie peut dépasser les 60 dans notre matériel, alors que VAN BRUMMELEN en indique de quelques-uns à plus de 30. Les dimensions plus accusées des apothécies dans notre matériel de même que le nombre d’asques ne font vraisemblablement que refléter des conditions trophiques plus favorables.
16Par ailleurs, les spores, décrites comme hyalines devenant rapidement brun chocolat sont, dans notre matériel, hyalines à brunâtre très clair, la teinte brune, manifeste à faible grossissement, étant le fait de l’ornementation plus que de la paroi sporale elle-même, comme l’avait déjà remarqué van Tieghem (fide VAN BRUMMELEN 1981).
17b. Ascodesmis microscopica est, de l’aveu même du monographe (VAN BRUMMELEN 1981), un taxon étroitement apparenté à A. sphaerospora; cet auteur estime cependant pouvoir les maintenir séparés au niveau spécifique sur base de la forme plus globuleuse des spores de ce dernier et de l’ornementation de celles-ci en alvéoles plus régulières. Néanmoins, l’examen des circonstances particulières dans lesquelles OBRIST (1961) a créé le binome A. sphaerospora ainsi que les résultats de nos observations tendent à nuancer cette façon de voir.
18c. En 1916, SEAVER croit reconnaître Ascobolus microscopicus Crouan dans des récoltes du continent américain et établit la combinaison Ascodesmis microscopica (Crouan) Seaver; à cette occasion, il décrit les spores comme ‘parfaitement globuleuses’. Cette affirmation ne repose cependant sur aucune mesure détaillée, en l’occurrence indispensable; de plus, les dessins de spores présentés (pl. 172) sont exécutés à une échelle telle qu’il aurait été techniquement impossible de faire apparaître, le cas échéant, le caractère faiblement ellipsoïde de celles-ci.
19 Lorsque OBRIST (1961) reprend l’étude du genre Ascodesmis, il refuse l’affectation du matériel étudié par SEAVER à A. microscopica (Crouan) Seaver, en prenant argument de la production, chez ce taxon, d’une gaine périsporiale absente sur le matériel du nouveau monde ainsi que de la forme ‘typiquement ellipsoïde’ de ses spores, caractère lui paraissant contraire à la description de SEAVER tout autant d’ailleurs qu’à celle des frères CROUAN (1857). OBRIST (1961) crée alors un nouveau taxon, A. sphaerospora Obrist, dont le type est en fait le spécimen original étudié par SEAVER (1916) et dont la spécificité se fonderait, d’une part, sur la différence entre la longueur et la largeur des spores qui devrait être inférieure à 1,5 m, et d’autre part, sur leur plus grand diamètre qui serait au plus de 12,5 m (ornementation non comprise). Ce faisant, cet auteur reconnaît néanmoins la variabilité considérable du nouveau taxon, notamment quant à la forme de ses spores: celle-ci varie en effet en fonction de la nature du milieu de culture, les milieux gélosés tendant à produire des formes plus ellipsoïdes. Il faut encore ajouter que A. microscopica n’était apparemment pas connu de OBRIST et que celui-ci a attribué à A. sphaerospora des récoltes qui, par après, se sont révélées relever sans hésitation de A. microscopica!
20d. A l’occasion de sa révision du matériel type de Crouan, LE GAL (1949) consigne intégralement dans sa publication les données brutes touchant les dimensions sporales chez un échantillon de 26 spores. Nous en avons extrait, d’une part, les valeurs moyennes et extrêmes et, d’autre part, les rapports L/l. Les résultats apparaissent au Tableau 1, par comparaison d’une part avec les autres données de la littérature, d’autre part avec nos propres mesures ainsi qu’avec le résultat d’observations transmises par van Brummelen (in litt.). La confrontation des données ainsi réunies montre d’une part que le matériel type étudié par LE GAL comme aussi toutes les récoltes rapportées à A. microscopica par van Brummelen sont caractérisées par des valeurs tenues pour représentatives de cette espèce (rapport moyen L/l = Q >1,20).
21 e. Dans sa monographie, VAN BRUMMELEN (1981) étend vers le haut la gamme de variation de la dimension des ascospores de A. sphaerospora, le grand diamètre montrant des valeurs allant jusqu’à 14 m. Par ailleurs, cet auteur ne fait plus aucune mention, en tant que critère différentiel, de la présence, chez l’espèce décrite par OBRIST, d’une ‘gaine périsporiale’. En fait, selon van Brummelen (in litt.), OBRIST pourrait avoir interprété comme périsporium la membrane externe délimitant la paroi secondaire sporale durant le développement de celle-ci; or celle-ci semble bien présente chez toute Pezizale!
22 Finalement, le seul critère différentiel entre A. microscopica et A. sphaerospora se trouve donc résider dans la différence entre le plus grand diamètre (longueur) et le plus court (largeur). VAN BRUMMELEN (1981) remplace, à bon escient, ce critère de différence entre longueur et largeur par celui du rapport de ces deux paramètres, quotient dont les valeurs se situeraient en dessous de 1,15 pour A. sphaerospora et au-dessus de 1,20 chez A. microscopica.
23 f. Lorsqu’il s’est agi de rapporter notre matériel à l’une ou à l’autre des deux espèces confrontées, le caractère différentiel le plus évident à tester et le seul à présenter une propriété quantitative était donc le quotient L/l : dans nos échantillons et selon nos mesures, ce rapport varie de 1,00 à 1,40, alors que, selon les observations réalisées par van Brummelen sur notre récolte, il atteint 1,16 à 1,31. Autrement dit, les populations de spores échantillonnées lors de nos mesures se caractériseraient par un plus large éventail de formes sporales, incluant à la fois des spores plus globuleuses mais aussi des spores plus largement ellipsoïdes que celui de van Brummelen dans la même récolte!
24 Se fondant sur l’examen de trois échantillons prélevés sur trois apothécies distinctes, les valeurs que nous avons observées concernent 70 spores (Tableau 1, De Sloover O1C35, échantillons A, B et C) : dans ces trois échantillons, les quotients moyens s’établissent de 1,16 à 1,14, soit clairement sous la valeur limite de 1,20 à partir de laquelle on aurait affaire à A. microscopica. Sur l’ensemble des mesures réalisées, cette valeur seuil n’est égalée ou dépassée que dans 23% des cas (16/70).
25 Par ailleurs, van Brummelen a obtenu, sur la même récolte, des dimensions sporales légèrement mais systématiquement inférieures, ce qui était d’ailleurs aussi le cas de ses résultats concernant le spécimen type de A. microscopica (PC-A2351) par rapport à LE GAL (1949) qui avait travaillé sur la même récolte (Tableau 1). Cette différence systématique vers des valeurs inférieures - de l’ordre de 1 à 2 µm sur les moyennes - présente cependant peu de poids discriminatoire étant donné la grande variabilité des paramètres mesurés. Par contre, chez ces spores subglobuleuses à faiblement ellipsoïdes, il est malaisé de fixer les dimensions exactes, particulièrement celles du grand axe, car celles-ci dépendent de l’orientation des spores dans la préparation (van Brummelen, in litt.). Néanmoins, en ce qui concerne le grand axe comme la largeur des spores de notre récolte, on observera que les écarts que nous relevons entre les valeurs les plus faibles et les plus élevées atteignent 5 µm, alors que, sur la même récolte, les mesures de van Brummelen ne font état que d’un écart de 2 à 3 µm, impliquant l’observation de populations de spores plus homogènes que celles que nous avons mesurées. Ces différences dans les résultats des mesures ne peuvent s’expliquer par le seul effet de l’orientation du grand axe des spores dans le milieu d’observation. Ces mesures mènent par ailleurs à un rapport L/l moyen légèrement supérieur à 1,2 (Tableau 1, van Brummelen : échantillons De Sloover 01C35 D et E). Se fondant sur ces résultats, van Brummelen (in litt.) attribue logiquement notre récolte à A. microscopica (Crouan) Seaver (sensu Le Gal, ajoute-t-il, mais cela nous semble superflu, l'interprétation du type d'Ascobolus microscopicus étant sans ambiguïté). Nous adhérons d’ailleurs à cette manière de voir étant donné les valeurs affichées par les résultats de nos mesures (1,14-1,16) qui tendent à se rapprocher de la valeur seuil (1,20) proposée pour séparer A. microscopica de A. sphaerospora.
26 g. Quant à A. sphaerospora, à côté des maigres données que OBRIST cite comme distinctives de cette dernière espèce, celles de VAN BRUMMELEN (1981) relatives au diagnostic spécifique (10,5-)11,5-13,0(-14,0) x (9,0-)10,0-11,5(-12,0) m se révèlent recouvrir partiellement mais largement la gamme des valeurs recensées chez A. microscopica. C’est également le cas des résultats de nos trois séries d’observations qui se situent dans la partie supérieure de la gamme des valeurs attribuées à A. sphaerospora, même si les résultats de van Brummelen sur la même récolte poussent, grâce au rapport des deux paramètres, à faire culbuter le diagnostic en faveur de A. microscopica.
27 h. La présentation graphique (Fig. 3) de la plupart des données mentionnées ci-dessus accentue encore les tendances dégagées jusqu’ici. Cette figure est inspirée de celle établie par OBRIST (1961, p. 946) : les quatre ellipses A, B, D et E tracées par cet auteur et censées envelopper divers nuages de points y ont simplement été reportées, les données brutes ne nous étant pas accessibles; ces ellipses de distribution se rapportent à A. porcina et A. nigricans (A), à A. sphaerospora (B) et à A. macrospora (D et E). Visuellement toutes quatre apparaissent relativement bien distinctes. La distribution des couples de données (∆) sporales (L et l) reprises d’après les indications fournies par LE GAL (1949) et relatives à A. microscopica sont comprises dans l’ellipse C, dont le tracé diffère quelque peu de celui donné par OBRIST. Enfin, les nuages de points (● et x) relatifs aux deux séries de mesures les mieux étoffées résultant de nos propres observations sont délimités par les enveloppes F et G et se rapportent donc aux séries A et B du tableau 1 (De Sloover 01C35). On notera que les ellipses E et D, ressortissant toutes deux à A. macrospora, semblent bien distinctes alors que l’une (E) concerne une souche observée sur son substrat naturel, l’autre (D) ayant trait à une culture. Par ailleurs, les nuages de points définis par les ellipses C, F et G et relatifs tous trois à A. microscopica sont largement imbriqués voire même superposés : l’un concerne la récolte type de cette espèce (C); les autres, deux échantillons prélevés sur deux apothécies différentes d’une même récolte (De Sloover 01C35). Enfin, si les trois nuages de points dont il vient d’être fait mention se superposent ne fût-ce que partiellement, ce recouvrement affecte également l’ellipse qui réunit les couples de données relatives à A. sphaerospora. Il est évident que seul un traitement statistique de l’ensemble de ces données peut conforter ou nuancer l’interprétation qui en est ici suggérée. Les mesures brutes nécessaires à cette opération ne sont cependant disponibles que pour les trois ensembles C ( 26 spores), F et G (respectivement 30 spores chacun) relatifs à A. Microscopica : les coefficients de corrélation calculés sur base de ces données sont très faibles à moyens ( respectivement 0,1, 0,45 et 0,42) et les limites de confiance se chevauchent très largement.
28 i. Un autre critère qualitatif utilisé par VAN BRUMMELEN pour séparer les deux taxons concerne l’ornementation sporale: celle-ci formerait un réseau alvéolé plus régulier chez A. sphaerospora. La comparaison des figures publiées relatives aux deux taxons laisse cependant sceptique: la taille moyenne des spores qui est réputée légèrement inférieure chez A. sphaerospora peut donner l’impression d’un réseau alvéolaire plus dense bien que le nombre moyen d’alvéoles par diamètre sporal soit équivalent à celui de A. microscopica; reste la régularité du réseau : d’après les figures dont on dispose, comme d’après OBRIST lui-même, la grande variabilité de la réticulation ne permet pas d’apporter d’argument dans un sens plutôt que dans l’autre.
29 j. Au terme de cette longue confrontation, il nous apparaît que A. microscopica et A. sphaerospora correspondent au mieux à deux taxons se situant aux extrémités d’un continuum de valeurs allant de celles qui caractérisent des spores subglobuleuses (A. sphaerospora) à celles qui définissent des spores plus ellipsoïdes (A. microscopica). On conçoit qu’il est difficile sur base de termes descriptifs (subglobuleux vs. ellipsoïdes) de distinguer des taxons; les paramètres (L et l et surtout le rapport de ceux-ci) tentent de quantifier des réalités difficiles à séparer.
30Nous serions enclin à rapporter l’ensemble du matériel classé sous les deux binomes susmentionnés à un seul taxon, en l’occurrence à A. microscopica (Crouan) Seaver. A. sphaerospora (c'est-à-dire A. microscopica sensu SEAVER) lui serait conspécifique et ne représenterait qu’une forme dont les spores moins typiquement ellipsoïdes pourraient être considérées comme subglobuleuses voire même comme globuleuses dans quelques cas extrêmes.
31 Bien que sporadique, la distribution d'A. Microscopica semble être cosmopolite : le matériel type provient de France (Finistère) ; ailleurs en Europe, il est signalé de Grande-Bretagne (CANNON & al. 1985), des Pays-Bas (ANONYME 2000 : deux localités dont une attribuée à A. Sphaerospora), de Norvège (KRISTIANSEN 1994, sub A. Sphaerospora), d'Allemagne (6 localités éparses dont deux attribuées à A. Sphaerospora : KRIEGLSTEINER 1993, JAHN & al, 1997), d'Italie (DOVERI al, 2000) et d'Espagne (y compris A. Sphaerospora, Guarro 1981 fide SIERRA LÓPEZ 1987). Outre ces localités européennes, il est connu du Canada, des U.S.A. mais aussi du Venezuela, du Brésil et de Lybie.
322. Ascodesmis nigricans Tiegh. - Fig. 2
33 Apothécies solitaires à grégaires, parfois confluentes, superficielles, sessiles, 200-250 m en diamètre, jusqu’à 180 m de hauteur, en dôme, blanc laiteux au début à hyalines à maturité, formées d’un bouquet assez lâche d’asques (16 à 25 par apothécie) et de quelques paraphyses. Hyménium convexe, ponctué de brun par les asques mûrs faisant saillie. Hypothécium réduit à un faux-tissu exigu composé d’hyphes à parois minces. Excipulum absent. Asques octosporés, trapus, de forme obovale dans la jeunesse à largement claviformes à maturité, amplement arrondis au sommet et s’ouvrant en un vaste opercule, à base se rétrécissant en un pied court parfois fourchu, (40-)45,5(-56) x (19-)25,9(-30) µm. Ascospores disposées de façon irrégulière dans l’asque, subglobuleuses à brièvement ellipsoïdes, d’abord hyalines, brunissant légèrement lors de la maturation, (10-)11,1(-12) µm (ornementation non comprise), dépourvues de guttules, ornées de bâtonnets anguleux (baculées) et, moins fréquemment, d’épines, isolés, parfois anastomosés, la plupart tronqués ou encore élargis en plateau au sommet. Paraphyses cylindriques, 1-2- septées, jusqu’à 55 µm de long, d’un diamètre de 3-4 µm, légèrement renflées au sommet (jusqu’à 7 µm), contenant quelques granules réfringents.
34Fig. 2. Ascodesmis nigricans.- a. Apothécie.- b. Paraphyses.- c. Asque à maturité.- d, e. Asques en cours de maturation.- f. Ascospore en coupe optique et en vue polaire.- g-j. Ascospores en vue polaire. (D’après De Sloover 01C34).
35 Habitat.- Sur déjections de tourterelle turque, dans la même récolte que A. microscopica mais complètement isolé de ce dernier.
36 Matériel examiné.- Ottignies-Louvain-la-Neuve (Limelette), 20.VIII. 2001 (J.R. De Sloover 01C 34 ).
37 Une récolte de H. Ruysseveldt (Avekapelle, 01.04.1998) déposée dans les collections du Jardin Botanique National (BR) et consignée dans la banque de données FUNBEL semble constituer la première observation de l’espèce – et du genre – en Belgique. Il s’agit en fait d’un taxon vraisemblablement cosmopolite, connu selon VAN BRUMMELEN (1981) par quelques collections des Pays-Bas, du Royaume-Uni, d’Allemagne, du Danemark, de Finlande et de France; plus récemment, il a été signalé en Espagne (VALLDOSERA & GUARRO 1985) et en Italie (DOVERI & al. 2000). Hors Europe, l’espèce est encore connue d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Nord.
38Fig. 3. Distribution des couples de mesures de longueur (L) et largeur (l) sporales (non comprise l’ornementation) chez cinq espèces d’ Ascodesmis : (A) A. nigricans et A. porcina (d’après OBRIST 1961), (B) A. sphaerospora (d’après OBRIST 1961), (C) A. microscopica (∆ : données de LE GAL 1949), (D & E) A. macrospora (D, en culture ; E, en nature), (F & G) A. microscopica ( ● et x : 2 échantillons de 30 spores, De Sloover 01C35).
39Tout en demeurant très largement fimicole, A. nigricans s’accommode de substrats extrêmement variés: excréments de chien, de renard, de rat, de mouton, de chèvre, de porc, d’âne, de crapaud mais aussi d’oiseaux tels autruche et moineau. Notre récolte sur fiente de tourterelle s’inscrit dans cette dernière catégorie plutôt moins bien représentée.
40Il est probable que les deux espèces du genre Ascodesmis étudiées ci-dessus soient plus fréquentes que le laissent supposer les rares observations rapportées; il est donc fort plausible qu’elles soient à nouveau observées en Belgique pour peu que soient assidûment recherchés les substrats adéquats. D’autres espèces encore, telles A. nana ou A. macrospora, connues des Pays-Bas, sont également susceptibles d’être repérées dans la dition.
REMERCIEMENTS
41 Le Dr. J. van Brummelen (Leiden) a accepté d’examiner notre matériel et nous a transmis de la documentation ainsi que des observations qui ont largement contribué à la prise de position personnelle soutenue ci-dessus; qu’il soit ici remercié de sa diligence habituelle et de sa confiance. Nous sommes encore reconnaissant envers A. Fraiture (Meise) qui a mis à notre disposition les collections du Jardin Botanique National (BR) et envers V. Demoulin et E. Vandeven qui, pour nous, ont, respectivement, consulté l’herbier mycologique de l’Université de Liège (LG) et interrogé la base de données FUNBEL (Antwerpse Mykologische Kring).
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Notes
1 Selon van Brummelen (in litt.), il est fort probable que ces tailles surdimensionnées par rapport aux données classiques doivent être mises sur le compte d’une confluence de 2 ou plusieurs apothécies, l’absence de tout excipulum rendant malaisé le repérage d’éventuels ascogones multiples.