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- Volume 21 (2025)
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L’Être et le Néant : une ontologie dualiste ?

Résumé
Cet article examine le problème du dualisme dans L’Être et le Néant de Jean-Paul Sartre, question qui traverse l’œuvre depuis l’introduction jusqu’à la conclusion. L’objectif principal est de vérifier si la division sartrienne entre pour-soi et en-soi constitue effectivement un véritable dualisme ontologique. Pour ce faire, je me confronte à la critique de Maurice Merleau-Ponty, notamment celle développée dans Le Visible et l'Invisible, qui représente le diagnostic dualiste le plus élaboré concernant la philosophie sartrienne. L’analyse se structure autour de trois questions fondamentales : premièrement, l’en-soi et le pour-soi sont-ils réellement dépourvus de toute communauté ontologique ? Deuxièmement, peut-on considérer comme équivalents les couples « pour-soi/en-soi » et « être/néant », comme le propose Merleau-Ponty ? Troisièmement, les autres modes d’être présents dans l’ouvrage peuvent-ils être réduits au couple strict en-soi/pour-soi ? L'examen de ces questions permet de mettre en évidence les limites de la lecture dualiste, dans la mesure où la définition rigoureuse des modes d’être du pour-soi et de l’en-soi s’avère plus complexe qu’une simple opposition binaire. Cette investigation révèle en réalité une multiplicité de modes d’être dans l’ontologie sartrienne.
Table des matières
1Le problème du dualisme traverse L’Être et le Néant. Ses toutes premières lignes affirment que la pensée moderne a réalisé un véritable progrès qui aurait permis la suppression d’un certain nombre de dualismes classiques, pour présenter ensuite une division de modes d’être qui a été considérée par la plupart des critiques comme la base d’un nouveau dualisme, cette fois-ci sartrien : à savoir la scission entre les régions ontologiques du pour-soi et de l’en-soi. Dans l’« Introduction » de L’Être et le Néant, Sartre affirme avoir divisé le « concept d’être » en « deux régions d’être absolument tranchées » et « incommunicables », même s’il envisage que les deux régions « puissent être placées sous la même rubrique »1, sans pour autant nous expliquer ce qu’il voudrait dire par là. Il nous dit seulement que « nous ne pourrons véritablement saisir le sens de l’un ou de l’autre que lorsque nous pourrons établir leurs véritables rapports avec la notion de l’être en général, et les relations qui les unissent2 ». Encore dans l’« Introduction », Sartre semble à la fois renforcer et éviter le dualisme entre le pour-soi et l’en-soi. Le renforcer, lorsqu’il dit que le pour-soi est « radicalement autre » que l’en-soi, qui lui est « opposé »3. Et l’éviter, au sens où il est attentif au danger d’avoir « fermé toutes les portes et que nous nous soyons condamné à regarder l’être transcendant et la conscience comme deux totalités closes et sans communication possible4 ». Cependant, malgré cette précaution, ce qui est frappant c’est que l’on peut encore retrouver ce problème dans la « Conclusion » de l’ouvrage : « Mais après description de l’en-soi et du pour-soi, il nous avait paru difficile d’établir un lien entre eux et nous avions craint de tomber dans un dualisme insurmontable5 ». Il s’agit ainsi d’une question qui traverse L’Être et le Néant, en posant un problème auquel Sartre était attentif, mais qu’il n’a pas forcément réussi à résoudre. Mais qu’est-ce qu’un dualisme ?
2Gilles Deleuze indique que la notion de dualisme a en général au moins trois sens différents : « 1) tantôt il s’agit d’un véritable dualisme qui marque une différence irréductible entre deux substances, comme chez Descartes, ou entre deux facultés, comme chez Kant ; 2) [tantôt] il s’agit d’une étape provisoire qui se dépasse vers un monisme, comme chez Spinoza, ou chez Bergson ; tantôt il s’agit d’une répartition préparatoire qui opère au sein d’un pluralisme. C’est le cas de Foucault6 ». On sait que Sartre a considéré ses analyses introductives comme provisoires, superficielles et incomplètes7, notamment parce que, selon ses propres termes, elles sont réalisées par le biais d’une « mauvaise perspective8 ». Mais est-ce que cela veut dire que le dualisme établi dans l’« Introduction » sera ensuite abandonné, complexifié, dépassé ? Cette scission initiale aura-t-elle été une étape provisoire vers un monisme ou une opposition qui opère au sein d’une pluralité comme c’est le cas chez Foucault selon Deleuze ?
3Dans cet article, j’entends examiner brièvement si la division sartrienne entre pour-soi et en-soi constitue effectivement un véritable dualisme, au sens que Deleuze donne à ce terme. Ce faisant, nous pourrons aussi contester certains points cardinaux de la critique menée par Merleau-Ponty qui est sans doute celle qui fait le plus clairement un diagnostic dualiste à propos de L’Être et le Néant, notamment parce que cette critique a fonctionné comme un contrepoids essentiel pour que Merleau-Ponty puisse créer sa propre philosophie. Déjà en 1945, deux ans après la parution de L’Être et le Néant, Merleau-Ponty soulignait, dans le texte « La querelle de l’existentialisme », que « le livre [L’Être et le Néant] reste trop antithétique9 ». Cette position critique est la clé de son opposition à la philosophie sartrienne, en passant d’une forme plus discrète dans la Phénoménologie de la perception, où Merleau-Ponty adresse la critique à une liberté « sans racines », vers une approche plus combative dans Les Aventures de la dialectique avec sa contestation de la théorie de l’action pure, pour aboutir enfin dans Le Visible et l’Invisible, où on retrouve une version plus sophistiquée de sa critique du dualisme sartrien. En somme, il s’agirait pour Merleau-Ponty d’un véritable dualisme, selon les définitions de Deleuze, qui compromet toute la lecture de L’Être et le Néant, même si Sartre a défini ses analyses introductives comme « provisoires ».
4Aussi faut-il passer par la critique de Merleau-Ponty si on prétend faire face au problème du dualisme dans L’Être et le Néant. Pour ce faire, force nous sera de répondre, après quelques considérations sur une telle critique dans Le Visible et l’Invisible, aux questions suivantes : 1) L’en-soi et le pour-soi n’ont-ils effectivement aucune communauté ontologique ? 2) Pouvons-nous considérer comme équivalents le couple « pour-soi/en-soi » et le couple « être/néant », comme le fait Merleau-Ponty ? 3) Les autres modes d’être que l’on retrouve tout au long de L’Être et le Néant peuvent-ils être réduits au couple strict en-soi/pour-soi ? Il me semble que la réponse à ces trois questions est essentielle pour comprendre le problème du dualisme dans L’Être et le Néant.
Quelques considérations sur la critique du dualisme sartrien dans Le visible et l’invisible.
5Dépasser la structure « sujet-objet » est, selon Levinas, « l’idée fixe de toute la pensée contemporaine10 ». En ce sens, nous ne pouvons pas surestimer l’influence de l’idée heideggérienne d’être-au-monde — cette conception offrant précisément une voie pour dépasser le dualisme — sur les phénoménologues français, malgré le fait que, selon une affirmation de Jean-Luc Marion, en France, la phénoménologie « sera une phénoménologie du sujet ou elle ne sera pas11 ». Sartre et Merleau-Ponty, notamment, se sont donné pour tâche, à partir d’une lecture tout à fait particulière du concept d’être-au-monde, de résoudre le problème à la fois de l’idéalisme et du réalisme. Chacun des deux a pensé à sa manière l’expérience originelle de l’être-au-monde comme une alternative à la conception d’un sujet séparé des choses qui se présentent soit en lui, soit devant lui. Dans la dernière période de sa pensée, où le manuscrit publié sous le titre de Le Visible et l’Invisible figure comme un texte fondamental, Merleau-Ponty interroge l’expérience primordiale d’être-au-monde afin de dépasser ce problème majeur. À ce titre, Merleau-Ponty nous dit :
Nous voyons les choses mêmes, le monde est cela que nous voyons : des formules de ce genre expriment une foi qui est commune à l’homme naturel et au philosophe dès qu’il ouvre les yeux, elles renvoient à une assise profonde d’« opinions » muettes impliquées dans notre vie. Mais cette foi a ceci d’étrange que, si l’on cherche à l’articuler en thèse ou énoncé, si l’on se demande ce que c’est que nous, ce que c’est que voir et ce que c’est que chose ou monde, on entre dans un labyrinthe de difficultés et de contradictions.12
6Bien que Sartre et Merleau-Ponty partagent le sentiment qu’« il suffit d’ouvrir les yeux et d’interroger en toute naïveté cette totalité qu’est l’homme-dans-le-monde13 », pour Merleau-Ponty, Sartre n’arrive pas à sortir de ce labyrinthe de difficultés et de contradictions ; le problème consiste à comprendre ce que signifient ce nous, cette chose ou monde et ce qu’est voir. À cet égard, Le Visible et l’Invisible constitue la forme la plus élaborée de la critique de la philosophie sartrienne menée par Merleau-Ponty. Malgré la difficulté que peut présenter la lecture d'un manuscrit – fût-il déjà largement retravaillé –, le deuxième chapitre intitulé « Interrogation et dialectique » développe une argumentation rigoureuse contre les notions les plus fondamentales de L’Être et le Néant, à savoir précisément les concepts d’être et de néant. L’ambition de Merleau-Ponty dans ce texte est de montrer que la philosophie de Sartre ne rend pas compte de notre expérience concrète de l’ouverture au monde impliquée dans ce qu’il appelle la foi perceptive. Celle-ci relève d’une foi et non d’un savoir, dit Merleau-Ponty, parce que « le monde ici n’est pas séparé de notre prise sur lui14 » ; il s’agit d’une ouverture initiale au monde antérieure à toute réflexion, « une adhésion qui se sait au-delà des preuves, tissée d’incrédulité, à chaque instant menacée par la non-foi »15. Nous examinerons plus loin les raisons pour lesquelles Merleau-Ponty estimait que Sartre, en demeurant finalement idéaliste, avait échoué dans sa tentative de penser concrètement l’expérience d’être-au-monde et de dépasser le dualisme entre sujet et objet. Afin de présenter cette critique, nous ferons d’abord quelques remarques sur la conception merleau-pontienne de la négativité sartrienne et du dualisme qui en découle entre être et néant, sans oublier les problèmes que soulève selon Merleau-Ponty la théorie sartrienne du rapport à autrui.
7En premier lieu, nous pouvons dire avec certitude que la philosophie de Sartre se démarque des philosophies modernes du sujet, qui voient dans la réflexion le lieu primordial d’une expérience originaire. Cependant, pour Merleau-Ponty, même si Sartre a privilégié une expérience qui serait préréflexive et majoritairement irréfléchie, il finit par manquer l’expérience de l’ouverture au monde. Cela parce qu’il propose une solution qui, malgré son opposition à celle de la philosophie réflexive, aboutit à une inversion du problème. Non seulement, elle ne le résout pas, mais le radicalise. Ainsi, de la même façon que Heidegger disait de la maxime sartrienne « l’existence précède l’essence » que « le renversement d’une proposition métaphysique reste une proposition métaphysique16 », Merleau-Ponty soutient
[qu’en] inversant les positions de la philosophie réflexive, qui mettait tout le positif au-dedans et traitait le dehors comme simple négatif, en définissant au contraire l’esprit comme le négatif pur qui ne vit que de son contact avec l’être extérieur, la philosophie du négatif passe le but : encore une fois, bien que ce soit maintenant pour des raisons opposées, elle rend impossible cette ouverture à l’être qui est la foi perceptive 17.
8En d’autres termes, tandis que la philosophie réflexive suspend la foi perceptive afin de trouver dans le sujet réfléchissant les règles de l’accès au monde, la philosophie sartrienne et son primat de la négation comme accès préréflexif à l’être, finit par vider le sujet d’une telle manière qu’elle présente en réalité une affirmation totale de la positivité, geste qui l’empêche de comprendre le rapport sujet-monde comme une expérience effective. Selon Merleau-Ponty, les deux positions ont des conséquences équivalentes : si, d’un côté, le primat de la réflexion indique que « si nous cherchons des raisons, c’est parce que nous n’arrivons plus à voir, ou parce que d’autres faits, comme l’illusion, nous incitent à récuser l’évidence perceptive elle-même18 », de l’autre côté, la philosophie de la pure négativité — celle de Sartre — établit de même un sujet séparé du monde. Il ne le voit pas effectivement mais le survole, puisqu’il saisit des choses qui se situent justement devant sa vision panoramique et désincarnée. En somme, les deux positions sont les deux faces d’une même pièce, celle d’un sujet qui ne trouve pas d’adhérence au monde. C’est en ce sens que Renaud Barbaras affirme que « ce n’est qu’en apparence que la philosophie de Sartre fait alternative à la pensée réflexive »19. Elle présente en réalité sa forme la plus radicale dans la mesure où elle élève au maximum la dualité conscience-monde. La philosophie de Sartre agrandit la distance présupposée dans une telle dualité dès lors qu’elle établit un rapport « frontal » entre être et néant « sans même la médiation de l’essence20 », comme c’est le cas chez Husserl. Dans les deux cas se trouve donc conservée la dichotomie entre les plans irréfléchi et réflexif, les variations portant seulement sur la primauté accordée tantôt au réflexif dans les philosophies réflexives, tantôt à l'irréfléchi chez Sartre. Aucune des deux approches ne parvient à surmonter cette division et à penser l'ouverture au monde comme une unité qui ne privilégie ni ne sacrifie aucun des deux termes.
9À partir de cette brève introduction, nous pouvons identifier la raison pour laquelle l’échec de l’ontologie sartrienne réside dans ses bases mêmes, alors que, comme l’affirme Merleau-Ponty, « tout dépend ici de la rigueur avec laquelle on saura penser le négatif21 ». En définissant de manière générale la chose comme l’être en-soi, décrit comme « massif », « plénitude absolue et pleine positivité »22, et le sujet comme l’être pour-soi qui est le néant, Sartre instaure, selon Merleau-Ponty, une scission entre deux régions opposées — être et non-être — et comme telles irréconciliables. Si d’un côté, l’être est en-soi et ne contient en lui-même aucune négativité, de l’autre l’être pour-soi est pure négativité, pur néant. En effet, depuis La Transcendance de l’Ego, Sartre travaille à « vider » la conscience en l’affirmant comme pure translucidité sans aucun contenu ou zone d’opacité, aucune image, représentation ou ego qui puissent « habiter » la conscience. Le sujet est pure ouverture irréfléchie sur les choses et « pour que cette ouverture ait lieu, pour que décidément nous sortions de nos pensées, pour que rien ne s’interpose entre nous et lui, il faudrait corrélativement vider l’Être-sujet de tous les fantômes dont la philosophie l’a encombré23 ». Ainsi, Sartre comprend le rapport du sujet et du monde comme une ouverture qui est pur néant en ek-stase sur l’être, et pour rendre possible cet accès particulier il purifie la notion de subjectivité au point qu’elle ne peut plus être caractérisée précisément que par le rien, le vide, lequel a besoin de la plénitude du monde pour exister. Pour Merleau-Ponty cette solution « facile » transforme le négatif en une sorte d’essence, en retombant sur le positif. En d’autres termes, si le néant ne peut jamais être incorporé à l’être — qui est pure positivité —, s’il est toujours « derrière », ou soustrait à ce qu’il dévoile ou affirme, le sujet comme néant finit par être cette sphère de non-adhérence au monde. Il en résulte que cette région de négativité, qui ne peut être ni « sujet » ni « esprit », ni « ego », vu qu’elle est pur néant, réintroduit à la place même où l’on voudrait l’expulser un « fantôme de réalité » du type d’une res cogitans « très particulière, souligne Merleau-Ponty, insaisissable, invisible, mais chose tout de même24 ». Ce faisant, Sartre substantialise la subjectivité par excès de tentatives de la désubstantialiser, en postulant un néant hypostasié qui interdit tout mélange à l’être et, du coup, retombe dans le piège de la pensée du négatif radical :
Il y a dans la pensée du négatif un piège : si nous disons qu’il est, nous en détruisons la négativité, mais si nous maintenons strictement qu’il n’est pas, nous l’élevons encore à une sorte de positivité, nous lui conférons une sorte d’être, puisque de part en part et absolument il est rien. Le négatif devient une sorte de qualité justement parce qu’on le fixe dans son pouvoir de refus et d’élusion25.
10Or, si le néant peut être conçu de cette manière, comme une sorte d’essence, de chose, et finalement de substance, le dualisme qui a été établi entre être et néant — comme équivalents à en-soi et pour-soi, est alors, en réalité, un parallélisme. « C’est l’envers et l’endroit de la même pensée26 », dit Merleau-Ponty, à partir de laquelle un terme est « destiné27 » et mis en face de l’autre de sorte que la séparation n’est jamais défaite. En ce sens, Merleau-Ponty démontre la radicalité du fait que nous sommes bien ici « par-delà le monisme et le dualisme, parce que le dualisme a été poussé si loin que les opposés n’étant plus en compétition sont en repos l’un contre l’autre coextensifs l’un à l’autre28 ». Les opposés sont, en réalité, « en repos » l’un contre l’autre du fait qu’il n’y a que de la positivité ; et, pour cela même il n’y a que de l’en-soi qui « du fond de sa primauté, tolère d’être reconnu par le Néant29 », alors qu’il revient au pour-soi, pur néant, de seulement constater et de s’abstraire de l’être positif, de glisser sur sa surface. S'il est vrai qu'il n’y a que du positif et que le négatif n’est jamais que du non-être substantialisé, il faut conclure que cette théorie de la négativité pure constitue un véritable positivisme. Et ce, pour deux raisons : d’une part, cette théorie établit un parallélisme entre deux positivités, être et néant ; d’autre part, si le néant se limite au dévoilement de l'être, celui-ci demeure intact dans ce processus même, le néant restant à la « surface » de l’être sans pénétrer son noyau massif. C’est dans ce sens que Merleau-Ponty met en lumière la description de Sartre où il affirme que le dévoilement de l’être par le néant ne lui ajoute rien, ne l’affecte pas, ne le modifie pas. Si cela est vrai, nous sommes devant une phénoménologie aberrante qui établit que s’il arrive à quelque chose d’être perçu par quiconque, cette même perception « n’est pas constituti[ve] de son sens de chose30 », l’être est seulement dévoilé de sa nuit, sans être affecté, modifié, puisque « comme la relation entre conscience et être n’est pas une relation de constitution, mais seulement de négation, rien de réel ne peut advenir à l’être : nier l’être ne le modifie en rien31 ». Par ailleurs, nous avons vu que si le pour-soi est « pur néant », il ne subit pas non plus de modifications puisque, en étant pure négativité, il finit par être cette chose monstrueuse dont la substance réside en ne pas pouvoir être rien. Par conséquent, aucun des deux pôles n’est affecté, transformé, mélangé par cette « rencontre » entre étrangers. À cet égard, Merleau-Ponty a appelé négintuition cette négation radicale qui est le contrepoids de l’intuition de l’être, et c’est cette double face de la « rencontre » qui garantit à la fois l’autonomie et la co-extensivité des deux termes : intuitionner l’être, c’est affirmer sa positivité pure, nier à soi (négintuition) c’est l’impossibilité que le sujet soit quelque chose, ce qui fait que le sujet est justement cette impossibilité même.
11Nous entrevoyons pourquoi, pour Merleau-Ponty, la position « dogmatique » sartrienne, qui consiste à penser le négatif comme contradictoire à l’être, aboutit à empêcher essentiellement la tâche de la dialectique. Entre « l’être pur » et le « néant pur », il ne peut pas y avoir de passage, d’imbrication, il n’y a pas le mouvement et la transformation dont la dialectique se réclame. Entre le pur être et le pur néant, il n’y a de conciliation qu’« apparente », « ils ne sont pas vraiment unis »32. Il s’agit là d’une cohésion en même temps « rigide » et « fragile »33, puisque les deux termes se sollicitent mais seulement en tant qu’opposés absolus :
dès que l’un est nié, l’autre est là ; chacun d’eux n’est que l’exclusion de l’autre et rien n’empêche, en somme, qu’ils n’échangent leurs rôles : seule demeure la coupure entre eux ; de part et d’autre, tout alternatifs qu’ils soient ils composent ensemble un seul univers de pensée, puisque chacun d’eux n’est que son recul devant l’autre34.
12On a donc affaire plutôt à une analytique qu’à une dialectique, parce que le néant ne « passe » pas dans l’être, il est seulement enlisé dans l’être35, ce qui caractérise un rapport typique des philosophies de la vision, où les étrangers se trouvent face à face. Il s’agit, de surcroît, d’une « folie de la vision36 » dans le sens d’une vision de survol, désincarnée, qui saisit le monde comme panorama, qui le trouve « où il est », le domine37. Pour Merleau-Ponty, le problème n’est pas à proprement parler la vision, mais le fait qu’elle soit associée à l’acte de néantisation de la conscience comme ce qui transforme la chose en-soi en monde vu. Le pour-soi, étant donné qu’il est un non-être, est ainsi celui qui voit au sens où il
oublie qu’il a un corps et que ce qu’il voit est toujours sous ce qu’il voit, qui essaye de forcer le passage vers l’être pur et le néant pur en s’installant dans la vision pure, qui se fait visionnaire, mais qui est renvoyé à son opacité de voyant et à la profondeur de l’être. Si nous réussissons à décrire l’accès aux choses mêmes, ce ne sera qu’à travers cette opacité et cette profondeur, qui ne cessent jamais : il n’y a pas de chose pleinement observable, pas d’inspection de la chose qui soit sans lacune et qui soit totale38.
13Contrairement à la philosophie de la vision panoramique qui « ignore en tout cas l’épaisseur, la profondeur, la pluralité des plans, les arrières-mondes39 », il faut selon Merleau-Ponty abandonner l’illusion de l’immédiateté préréflexive pure comme relation frontale et sans mystère, pour penser l’expérience concrète précisément à partir de ce qui a été supprimé : l’opacité du pour-soi et la profondeur de l’en-soi.
14La philosophie de la négativité et son inévitable ambivalence nous amène encore, selon Merleau-Ponty, à une conséquence importante, à savoir l’impossibilité de rendre compte de l’expérience d’autrui. Dans le même chapitre du Visible et l’Invisible, cette critique consiste en un dédoublement du problème de base de l’ontologie sartrienne qui, comme nous venons de le dire, présuppose une conception du sujet comme pur néant et de l’être en-soi comme pure positivité. Si l’ouverture au monde est pensée à partir de telles principes, elle se trouve dès lors empêchée d’accéder effectivement à l’altérité, parce que si on part de la division néant/être comme identique au couple conscience/monde, un tel rapport de survol est nécessairement solipsiste. Cela aboutit en premier lieu à ce que Merleau-Ponty appelle le « pouvoir d’ontogenèse » de la conscience sartrienne, qui est un pouvoir qu’a le sujet de donner du sens au monde. Le rapport conscience-monde forme ainsi une sphère close de sorte que le monde se dévoile dans une dimension « pour-soi » du sujet qui est « seul témoin d’ontogenèse40 ». En ce sens, autrui n’apparaît que comme deuxième témoin du monde du pour-soi, ce qui revient à dire que « ce sont toujours mes choses que les autres regardent et le contact qu’ils prennent avec elles ne les incorpore pas à un monde qui soit leur. La perception du monde par les autres ne peut entrer en compétition avec celle que j’en ai moi-même41 ».
15En second lieu, la position sartrienne concernant le rapport à autrui opère encore une fois la radicalisation de la séparation entre être et néant, mais désormais à travers les dimensions du pour-soi et du pour-autrui. Pour comprendre les grandes lignes de cette dimension du pour-autrui, nous pouvons résumer la position sartrienne de la manière suivante : l’apparition d’autrui est pour Sartre de l’ordre d’une rencontre, où il arrive au pour-soi de souffrir d’une objectivation de son être qui fait apparaître ce que Sartre nomme le « pour-autrui ». Cette « métamorphose » est souvent décrite par Sartre comme ce qui s’opère à partir d’une expérience de la honte dans laquelle, à travers le regard d’autrui, le pour-soi peut être vu, jugé, mesuré de la même façon que les choses du monde. Pour Merleau-Ponty, cette relation à autrui donne au pur néant qu’est le pour-soi une dimension de visibilité, de manière à l’inscrire dans un ordre objectif du monde. Ainsi, chaque pour-soi, dans son rapport à autrui, subit ou opère une objectification de l’autre, de façon qu’au moins quatre termes sont en jeu : « mon être pour moi, mon être pour autrui, le pour soi d’autrui et son être pour moi42 ». Par suite, il semble que cette sorte de « couche » du pour-autrui, au lieu de caractériser une expérience d’altérité, empêche cette expérience même, dans la mesure où chaque pour-soi ne se trouve pas en rapport avec l’autre proprement dit mais avec soi-même, avec son pour-autrui. Bref, comme le dit Merleau-Ponty, « je n’ai pas affaire aux autres, j’ai affaire tout au plus à un non-moi neutre, à une négation diffuse de mon néant43 ». Nous pouvons constater ainsi l’origine de cet étrange solipsisme qui n’est plus celui d’un sujet isolé du monde en doutant de son existence, mais celui d’un sujet solitaire dans un monde plein et positif, où tout ce « qu’il y a » vient du pouvoir d’ontogenèse de la conscience. Si autrui apparaît, dit Merleau-Ponty, « [il] reste un habitant de mon monde, mais il me rappelle très impérieusement que l’ipse est un rien44 ». Autrui constate ainsi que rien ne peut m’atteindre du « dedans », puisque son regard « ne fait que prolonger mon intime conviction de n’être rien, de ne vivre qu’en parasite du monde, d’habiter un corps et une situation45 ». C’est pourquoi déjà dans Les Aventures de la dialectique, Merleau-Ponty disait que s’« il y a chez Sartre une pluralité de sujets, il n’y a pas d’intersubjectivité46 ». Or, si chaque pour-soi est pouvoir d’ontogenèse de dévoilement de l’en-soi, et que le sujet est seulement nié à travers le regard d’autrui mais pas vraiment modifié en tant que négativité, il reste que l’intersubjectivité est pensée comme une relation entre « foyers de négativité47 », qui ne sont que « d’autres moi-même48 », donc comme une relation abstraite, logique et essentialiste.
La multiplicité des modes d’être dans L’Être et le Néant
16Compte tenu de ces trois points, il nous est possible d’envisager les limites de la critique de Merleau-Ponty. À cet égard, on peut ajouter encore une conséquence de cette lecture dualiste de L’Être et le Néant : à savoir l’impossibilité de rendre compte de la richesse des modes d’être qu’on y trouve. Autrement dit, si on fait une lecture qui prend en considération les divers modes d’être décrits tout au long de l’ontologie sartrienne, celle-ci se révèle beaucoup plus complexe que l’on ne pourrait l’imaginer à partir d’une lecture dualiste. En premier lieu, parce que c’est n’est pas si simple de définir de manière rigoureuse — non seulement en ayant en vue l’« Introduction », mais aussi la suite de l’ouvrage —, les modes d’être du pour-soi et de l’en-soi. Ce couple de termes est souvent compris comme la version sartrienne de la dichotomie sujet-objet, comme nous pouvons l’observer à partir d’une affirmation d’Alain Badiou : « la conscience et son objet, l’idéation et l’idéat, le pôle noétique et le pôle noématique, ou, dans la variante sartrienne, le pour-soi et l’en-soi49 ». Une telle réduction tient au fait que Sartre lui-même a choisi ladite « mauvaise perspective » en partant d’un paradigme perceptif (l’être du percipere et l’être du percipi) pour présenter ces deux régions d’être au début de l’ouvrage. Dans l’« Introduction » donc, l’en-soi nous est d’abord présenté comme étant « l’être de cette table, de ce paquet de tabac, de la lampe, plus généralement l’être du monde qui est impliqué par la conscience50 ». En effet, le mode d’être de l’en-soi est sûrement un mode objectif parce que sa loi d’être c’est le principe d’identité, mais on ne peut pas en conclure pour cela que l’en-soi soit toujours un objet qui apparaît à la conscience perceptive, car il y a bien des modes d’être en-soi qui ne se donnent pas à travers ce type de relation entre un sujet et un objet. C’est ce qu’on peut observer par rapport à la définition sartrienne du passé –— il est un en-soi et son mode d’être ne peut pas être perçu, par exemple. À la différence de l’en-soi perçu, l’en-soi passé n’est pas un objet pour la conscience :
Ainsi n’y a-t-il pas thèse du passé et pourtant le passé n’est pas immanent au pour-soi. Il hante le pour-soi dans le moment même où le pour-soi s’assume comme n’étant pas telle ou telle chose particulière. Il n’est pas l’objet du regard du pour-soi. Ce regard translucide à lui-même se dirige, par-delà la chose, vers l’avenir. Le passé en tant que chose qu’on est sans la poser, en tant que ce qui hante sans être remarqué, est derrière le pour-soi, en dehors de son champ thématique, qui est devant lui comme ce qu’il éclaire51.
17On peut remarquer par là qu’on doit distinguer les spécificités des différents modes d’être qui sont placés sur la désignation d’en-soi. En même temps, on peut observer une difficulté de Sartre lui-même dans ce qui relève de ses définitions du passé comme en-soi, lorsqu’il nous dit aussi que « le passé que j’étais […] c’est un en-soi comme les choses du monde52 », c’est-à-dire sans faire la distinction que je viens d’indiquer, ou quand il dit, après avoir défini le mode d’être du passé comme un en-soi, que « le passé qui est à la fois pour-soi et en-soi ressemble à la valeur ou soi53 ». De même, l’être de la valeur est défini à plusieurs reprises comme un en-soi-pour-soi, alors qu’on trouve simultanément la valeur présentée comme synonyme du Soi. Ce dernier est parfois décrit à son tour comme un en-soi : « Ce que le pour-soi manque, c’est le soi – ou soi-même comme en-soi54 » ; « [la valeur] est comme l’en-soi absent qui hante l’être du pour-soi55 » ; pour ajouter ensuite qu’« il ne faudrait pas confondre, toutefois, cet en-soi manqué avec celui de la facticité. L’en-soi de la facticité, dans son échec à se fonder, s’est résorbé en pure présence au monde du pour-soi. L’en-soi manqué, au contraire, est pure absence56 ». Même sans entrer dans les détails de ce genre d’affirmation, on peut se demander quelle est la différence entre ces modes d’être en-soi placés sous une même définition. En outre, Sartre décrit des modes d’être qui ne sont pas vraiment un en-soi stricto sensu, mais qui se donnent comme une série de « figures » de l’en-soi : c’est le cas de l’objet psychique qui est une « ombre d’être »57, du ceci qui est une chose-ustensile, des en-soi fantômes qui sont une sorte de « néant-en-soi » qui composent la temporalité mondaine. Bref, il s’agit des modes d’être qui apparaissent comme contradictoires au cadre dualiste, mais qui sont pourtant des êtres réels et qui jouent un rôle fondamental dans l’ontologie sartrienne.
18D’autre part, nous pouvons mettre en question aussi les définitions concernant le pour-soi. Ce mode d’être est désigné normalement comme le mode d’être de la conscience, c’est-à-dire comme la version sartrienne du « sujet ». Toutefois, ce n’est pas strictement pour se référer au « sujet » qu’on retrouve la désignation de pour-soi, mais aussi pour tout ce qui appartient à une région ontologique spécifique. Rappelons les quatre premières structures immédiates du pour-soi « sujet » : la présence à soi est pour-soi de même que le possible, la facticité est un en-soi néantisé, la valeur est un en-soi-pour-soi. En somme, dans la description même du pour-soi « sujet » on retrouve des structures spécifiques « pour-soi » et d’autres qui échappent en un certain sens à la description d’un pour-soi « pur », comme la facticité et la valeur. Celle-ci, par exemple, étant un en-soi-pour-soi, comment peut-elle être pour-soi ?
19Une dernière remarque importante concernant les définitions. Dans le cas de l’ego pour-autrui, on passerait à côté de la complexité des modes d’être en s'en tenant à une lecture dualiste. Suivons Sartre :
Pourtant cette limite hors d’atteinte qu’est mon Moi-objet n’est pas idéale : c’est un être réel. Cet être n’est point en-soi car il ne s’est pas produit dans la pure extériorité d’indifférence ; mais il n’est pas non plus pour-soi, car il n’est pas l’être que j’ai à être en me néantisant. Il est précisément mon être-pour-autrui, cet être écartelé entre deux négations d’origine opposée et de sens inverse58.
20Ni en-soi ni pour-soi, le moi-objet pour-autrui dépasse-t-il le dualisme ? Toutes ces questions montrent que si on fait ce que Beauvoir, en parlant justement de Merleau-Ponty, a nommé « le coup de la dichotomie59 », qui consiste à effectuer une lecture qui ne trouve que des dualismes, alors toute la diversité des modes d’être est perdue. Mais il n’est pas question ici de dire que le dualisme ressort seulement d’une mauvaise lecture. Comme je l’ai souligné plus haut, la question du dualisme traverse L’Être et le Néant et, en ce sens, j’y vois une véritable difficulté. Toutefois, le problème majeur ne réside pas, à mes yeux, dans un dualisme entre pour-soi et en-soi – pour toutes les raisons exposées précédemment –, mais plutôt, si l’on transpose la critique merleau-pontienne sur un autre plan, dans un possible dualisme entre être et néant au sein même de la réalité du pour-soi. Le problème paraît alors mieux posé. En d’autres termes, nous pouvons nous demander, après avoir compris que le pour-soi est en même temps être et néant, puisqu’il « n’est pas ce qu’il est et est ce qu’il n’est pas », comment ces termes se rapportent l’un à l’autre dans la réalité même du pour-soi ? S’excluent-ils ? Passent-ils l’un dans l’autre ? Sont-ils contemporains ? On peut également poser la question en termes de subjectivité et d’objectivité : si le pour-soi est en même temps pour-soi et pour-autrui, comment ces deux dimensions, décrites par Sartre comme incompatibles, peuvent-elles coexister dans un même être qui est pour-soi-pour-autrui ? Autrement dit, comment est-il possible que « cet étranger qu’on me présente je l’assume aussitôt, sans qu’il cesse d’être un étranger60 » ?
21Pour conclure, nous croyons finalement que L’Être et le Néant n’est pas une ontologie dualiste, en tout cas pas dualiste au sens d’un véritable dualisme entre le pour-soi et l’en-soi, mais en raison d’une incompatibilité entre être et néant — qui ne sont pas synonymes du premier couple —, il faut trouver un lien entre les deux termes, une manière de comprendre comment être et néant peuvent être effectivement en rapport constant, dans leur incompatibilité même. À cet égard, la philosophie sartrienne offre des pistes pour répondre à ce problème-là du dualisme, à condition de prendre en compte une notion très présente et opératoire dans son ontologie61 — notamment dans L’Être et le Néant —, mais jamais explicitement thématisée par Sartre, et que révèle l'affirmation suivante : « Ainsi suis-je sur le même plan objet spécifique et sujet libre mais jamais les deux à la fois et toujours l’un hanté par l’Autre62 ». Sans entrer dans le détail, je soutiens que c’est justement par la hantise qu’on peut comprendre le lien entre être et néant dans la réalité même du pour-soi, lui-même hanté par sa contingence originelle, par la valeur, par ses prochains et par son être-pour-autrui. Et c’est aussi par la hantise que l’on peut comprendre le monde comme champ phénoménal pratique, puisque si pour Sartre « être-dans-le-monde c’est hanter le monde63 », cela veut dire aussi que le monde « se dévoile comme hanté par des absences à réaliser et chaque ceci paraît avec un cortège d’absences qui l’indiquent et le déterminent64 ». Finalement, si le monde est l’être hanté par le néant, et s’il n’y a pas de néant qui ne soit hanté par l’être, on a affaire à une véritable hantologie65, pour utiliser un mot de Derrida. Je m’approprie ce terme dans un usage qui ne correspond pas au sens derridien, mais pour souligner non seulement son omniprésence — comme l’a remarqué Daniel Giovannangeli, « le terme hanter traverse L’Être et le Néant 66 » —, mais aussi pour mettre en évidence son importance dans l’économie conceptuelle de l’ouvrage. Cette hantologie dépasse un possible dualisme entre être et néant en affirmant la simultanéité des termes, qu’il s’agisse du mode d’être du pour-soi « sujet » ou de la compréhension du monde comme champ phénoménal. Elle permet en outre d’envisager une multiplicité de modes d’être à l’œuvre dans L’Être et le Néant, multiplicité qui serait exclue d’un cadre dualiste au nom du principe de contradiction. Ainsi, c’est par la hantise qu’on peut non seulement répondre aux lectures réductrices de l’ontologie sartrienne qui l’enferment dans un dualisme strict, mais surtout se donner les moyens de saisir la richesse de la multiplicité des modes d’être qui s’y déploie.
Bibliographie
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Notes
1 J.-P. Sartre, L’Être et le Néant, Paris, Gallimard, 2012, p. 30.
2 Ibid.
3 Ibid.
4 Ibid.
5 Ibid., p. 665.
6 G. Deleuze, Foucault, Paris, Minuit, 2004, p. 89.
7 J.-P. Sartre, L’Être et le Néant, p. 33.
8 Ibid., p. 37.
9 M. Merleau-Ponty, « La querelle de l’existentialisme », dans Sens et non-sens. Genève, Nagel, 1965, p. 125.
10 E. Levinas, L’Humanisme de l’autre homme, Paris, Fata Morgana, 2012, p. 29.
11 Jean-Luc Marion, cité par J. Benoist, L’idée de phénoménologie, Paris, Beauchesne, 2001, p. 16.
12 M. Merleau-Ponty, Le Visible et l’Invisible / Notes de travail, Paris, Gallimard, 2013, p. 17.
13 J.-P. Sartre, L’Être et le Néant, p. 38.
14 Ibid., p. 48.
15 Ibid., p. 47.
16 M. Heidegger, Lettre sur l’humanisme, Paris, Gallimard, 2008, p. 85. (Trad. A. Préau.)
17 M. Merleau-Ponty, Le Visible et l’Invisible, p. 120.
18 Ibid., p. 74.
19 R. Barbaras, De l’être du phénomène, Grenoble, Jérôme Millon, 2001, p. 143.
20 Ibid., p. 144.
21 M. Merleau-Ponty, Le Visible et l’Invisible, p. 77.
22 J.-P. Sartre, L’Être et le Néant, p. 32.
23 M. Merleau-Ponty, Le Visible et l’Invisible, p. 76.
24 Ibid., p. 76.
25 Ibid., p. 95.
26 Ibid., p. 77.
27 Ibid.; p. 90
28 Ibid., p. 79-80.
29 Ibid., p. 126 (je souligne).
30 Ibid., p. 76.
31 L. D. Moutinho, « O invisível como negativo do visível : a grandeza negativa em Merleau-Ponty », Trans/Form/Ação, vol. 1, n° 27, 2004, p. 12. (Traduit librement du portugais.)
32 M. Merleau-Ponty, Le Visible et l’Invisible, p. 96.
33 Ibid., p. 98.
34 Ibid., p. 103.
35 Ibid., p. 105; p. 117.
36 Ibid., p. 104.
37 À ce sujet, R. Barbaras affirme que la philosophie de Sartre n’est pas proprement fondée sur une méconnaissance de l’expérience, mais surtout sur une restriction à un seul type d’expérience : celle de la vision désincarnée, du face-à-face du sujet avec le monde. R. Barbaras, De l’être du phénomène, p. 149.
38 M. Merleau-Ponty, Le Visible et l’Invisible, p. 106-107.
39 Ibid., p. 95.
40 Ibid., p. 84.
41 Ibid.
42 M. Merleau-Ponty, Le Visible et l’Invisible, p. 110.
43 Ibid., p. 99.
44 Ibid., p. 85.
45 Ibid., p. 88.
46 M. Merleau-Ponty, Les Aventures de la dialectique, Paris, Gallimard, 2000, p. 284.
47 M. Merleau-Ponty, Le Visible et l’Invisible, p. 85.
48 Ibid., p. 100.
49 A. Badiou, Deleuze : la clameur de l’Être, Paris, Hachette, 1997, p. 35.
50 J.-P. Sartre, L’Être et le Néant, p. 29.
51 Ibid., p. 176 (je souligne).
52 Ibid., p. 151.
53 Ibid., p. 154 (je souligne).
54 Ibid., p. 125.
55 Ibid., p. 130.
56 Ibid., p. 125.
57 Cf. ibid., p. 196-197, p. 197; p. 199.
58 Ibid., p. 326 (je souligne).
59 S. de Beauvoir, « Merleau-Ponty et le pseudo-sartrisme », Privilèges, Paris, Gallimard, 1955, p. 230.
60 J.-P. Sartre, L’Être et le Néant, p. 314.
61 Sur la notion de concepts opératoires qui fonctionnent de manière implicite afin de soutenir les concepts explicites ou thématiques, voir E. Fink, « Les concepts opératoires dans la phénoménologie de Husserl », dans Husserl, Cahiers de Royaumont, Philosophie n°3, Paris, Minuit, 1959, p. 214-230.
62 J.-P. Sartre, Cahiers pour une morale, Paris, Gallimard, 1983, p. 101.
63 J.-P. Sartre, L’Être et le Néant, p. 284.
64 Ibid., p. 235.
65 Je développe cette lecture qui privilégie le thème de la hantise dans L’Être et le Néant comme dépassement du dualisme dans mon livre L’hantologie de Sartre : sur la spectralité dans L’Être et le Néant, Leuven, Peeters, 2021.
66 D. Giovannangeli, Le Retard de la conscience : Husserl, Sartre, Derrida, Bruxelles, Ousia, 2001.

