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- Volume 37 (2019)
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Valorisation des tiges de cotonnier dans la chaîne de valeur de panneaux de particules en Afrique de l’Ouest
Notes de la rédaction
Reçu le 12.03.18 et accepté pour publication le 7.06.18
Résumé
Le présent article analyse la possibilité de valoriser les tiges de cotonnier à travers leur insertion dans la chaîne de valeur des panneaux de particules. L’étude a été réalisée dans trois pays producteurs de coton de l’Afrique de l’Ouest (Bénin, Mali et Togo) et a pris en compte trois catégories d’acteurs à savoir 320 producteurs de coton graine, 148 fournisseurs ou commerçants de panneaux de particules et 435 utilisateurs de panneaux de particules. Les résultats ont montré que le potentiel de production annuelle de tige de cotonnier dans ces trois pays est de plus de 1,33 million de tonnes. Environ la moitié des cotonculteurs (51 %) ont déjà des pratiques de valorisation des tiges de cotonnier. La disponibilité de tige de cotonnier pourrait servir de matière première pour la fabrication locale de panneaux de particules, qui pourrait alors se substituer aux importations et représenter un marché potentiel et une opportunité réelle d’accroître le revenu des producteurs de coton. La formation des producteurs de coton sur la conservation des tiges de cotonnier est nécessaire pour une production de panneaux de particules de qualité et compétitive.
Abstract
Valorisation of Cotton Stems in the Particle Board Value Chain in West Africa
This article analyzes the possibility of valorizing cotton stems through their insertion in the value chain of particle boards. The study was carried out in three West African cotton producing countries (Benin, Mali and Togo) and took into account three categories of stakeholders namely 320 seed cotton producers, 148 suppliers or traders of particle board and 435 particle board users. The results showed that the annual technical potential of cotton stem in these three countries was about 1.33 million tons. About half of cotton producers (51%) already had valuation practices for these stems. The availability of cotton stems could be used as raw material for particle boards, which could be a substitute for imports, and represents a potential market and a real opportunity for increasing the income of cotton producers. Training of cotton producers on the conservation of cotton stems is necessary for the production of quality and competitive particle board.
Table des matières
Introduction
1Le coton est l’une des principales cultures d’exportation en Afrique de l’ouest. Il est cultivé en premier lieu pour sa fibre largement utilisé dans l’industrie textile pour la fabrication d’une gamme variée de produits (tissus, coton hydrophile, coton tige, serviettes, etc.). La graine de coton est aussi commercialisée, bien que sa valeur commerciale soit plus faible que celle de la fibre (1). La graine est utilisée principalement pour la fabrication d’huile et d’aliment du bétail (tourteau), mais également de savon et comme bio carburant (9, 21, 23). Ainsi, la vente du coton graine est quasiment la seule source de revenu issue de la production du coton graine pour les producteurs.
2Les tiges de cotonnier, en revanche sont traditionnellement brûlées dans les champs afin de limiter les risques phytosanitaires ou sont pâturées par les animaux (13, 14, 15, 20). Des études ont rapporté les effets bénéfiques des tiges de cotonnier sur la restauration de la fertilité des sols, et elles ont recommandé leur valorisation agronomique (15). Depuis quelques années, les recommandations sont formulées pour éviter de brûler les résidus de cotonnier afin de réduire la minéralisation du carbone, et encouragent les producteurs à recycler la matière organique en l’incorporant dans le sol, bien que leur dégradation se révèle très lente (16). Cependant, la tige de cotonnier possède elle aussi des caractéristiques recherchées dans l’industrie du bois (19). De ce fait, elle pourrait être valorisée en rentrant par exemple dans la fabrication de panneaux de particules utilisés dans les secteurs de l’ameublement et de l’immobilier (19). Cette valorisation offre une fenêtre d’opportunités aux petits producteurs de coton de disposer d’un revenu supplémentaire à travers la commercialisation des tiges de cotonnier sans pour autant compromettre leur utilisation comme élément fertilisant des sols. Ce complément de revenu serait profitable aux petits cotonculteurs d’autant que ces derniers font déjà face à une baisse du rendement du cotonnier à l’hectare, liée à plusieurs facteurs (8). Le développement et la promotion d’une chaîne de valeur de panneaux de particules à base de tiges de cotonnier devient une opportunité économique à saisir pour relancer les filières cotonnières déjà confrontées de plus en plus à une faible productivité et compétitivité. Les politiques de soutiens de certains pays (Union Européenne et USA) en faveur de leurs cotonculteurs affaiblissent davantage la durabilité des filières cotonnières africaines (7, 22). Cet article analyse les possibilités de valoriser les tiges de cotonnier afin de développer une chaîne de valeur de panneaux de particules dans trois pays producteurs de coton en Afrique de l’Ouest, Bénin, Mali et Togo.
Matériel et méthodes
Approche conceptuelle
3Cette étude mobilise l’approche chaîne de valeur. En effet, une chaîne de valeur agricole peut être définie comme l’ensemble des acteurs et des activités qui font passer un produit agricole de base du stade de la production dans les champs à sa consommation, processus dont chaque stade voit de la valeur être ajoutée au produit (5). L’approche chaîne de valeur permet de saisir les opportunités de marché en analysant l’offre des fournisseurs et la demande des consommateurs pour des produits spécifiques (10, 11, 12). L’analyse d’une chaîne de valeur ajoutée est un outil important de prise de décisions pour la promotion et le développement des chaînes de valeur (17). Elle étudie tous les éléments constitutifs de la chaîne de valeur et fait également ressortir les contraintes auxquelles font face les acteurs de la chaîne (4).
4En mobilisant l’approche chaîne de valeur, cette étude permet d’identifier les opportunités de marché en analysant les différentes étapes de la chaîne, allant de la production à la commercialisation, ainsi que les relations pouvant exister entre les acteurs. Le produit agricole concerné par cette étude est la tige de cotonnier, produite par les cotonculteurs. Ainsi, la commercialisation de panneaux de particules à base de tiges de cotonnier pourrait permettre de créer une nouvelle chaîne de valeur dans les filières cotonnières des trois pays concernés en servant de matière première dans la fabrication de panneaux de particules. La chaîne de valeur de panneaux de particules à base de tiges de cotonnier peut ainsi offrir des opportunités à la fois pour les producteurs de coton graine et pour les autres acteurs en aval pour les différentes formes possibles de valorisation. A ce jour, les panneaux de particules à base de tiges de cotonnier ne sont pas encore produits pour la commercialisation en Afrique de l’Ouest. Cette étude fait une analyse ex-ante de la chaîne de valeur des panneaux de particules à base de tige de cotonnier, en se focalisant sur l’analyse de la chaîne de commercialisation des panneaux de particules présents sur le marché des trois pays concernés, et dont les acteurs pourraient être les mêmes qui seront impliqués dans la commercialisation des panneaux à base de tiges de cotonnier. A cela s’ajoute l’analyse de l’offre potentielle de tiges de cotonnier afin d’apprécier sa disponibilité en quantité pour servir de matière première de base dans la fabrication des panneaux de particules. L’étude du marché des panneaux de particules identifie les acteurs et anticipe sur la demande des panneaux de particules à base de tiges de cotonnier.
Echantillonnage et collecte de données
5Cette étude a été réalisée dans trois pays producteurs de coton de l’Afrique de l’Ouest, à savoir le Bénin, le Mali et le Togo. Ces trois pays ont été choisis parce qu’ils abritent actuellement un projet sous régional dénommé « Valorisation des tiges de cotonnier pour la fabrication des panneaux de particules (VATICOPP) ». Les trois pays font partie des principaux producteurs de coton en Afrique de l’Ouest et la valorisation des tiges de cotonniers peut offrir des opportunités économiques et industrielles notamment pour les petits producteurs, les petits artisans et les menuisiers. La collecte de données a pris en compte trois catégories d’acteurs à savoir les producteurs de coton graine, les distributeurs ou commerçants de panneaux de particules et les utilisateurs de panneaux de particules (artisans, menuisiers, etc.). Au total, 903 acteurs ont été enquêtés dans les trois pays et répartis comme suit : 320 producteurs de coton, 148 fournisseurs ou commerçants de panneaux de particules, et 435 utilisateurs des panneaux de particules. Ainsi, la taille de l’échantillon au Bénin comme au Togo était de 360 acteurs, dont 100 producteurs de coton, 60 fournisseurs ou commerçants de panneaux de particules et 200 utilisateurs de panneaux de particules. Au Mali, elle comprenait 183 personnes enquêtées, dont 120 producteurs de coton, 28 commerçants et 35 utilisateurs de panneaux de particules. La production cotonnière étant plus importante au Mali comparée à celles du Bénin et Togo, le nombre de producteurs de coton enquêtés au Mali était plus important. Néanmoins, le nombre de commerçants et utilisateurs de panneaux de particules enquêtés au Mali était plus faible parce que le réseau existant de commercialisation et d’utilisation des panneaux de particules était moins dense comparativement au Bénin et Togo.
6L’échantillonnage a été aléatoire dans chacun des trois pays, tout en tenant compte de l’importance des zones cotonnières et des centres urbains. En ce qui concerne les producteurs de coton dans chacun des trois pays, toutes les grandes communes, zones ou coordination de production de coton graine ont été prises en compte. Pour les commerçants et utilisateurs de panneaux de particules, les grandes communes ou régions urbaines ont été prises en compte. Les offres individuelles et agrégées de tiges de cotonnier ont été estimées en se référant aux productions de coton graine par pays. Le potentiel technique de production de tiges de cotonnier a été calculé à partir des quantités de la production de coton graine et sur la base du rapport résidus/produits estimatif moyen de 2 (16); ce ratio a été utilisé pour extrapoler les offres agrégées de tiges de cotonnier. Les acteurs du marché des panneaux de particules ont été répertoriés et les liens ont été analysés se basant sur le cadre analytique retenu. La structure du marché des panneaux de particules a été analysée.
Résultats
Disponibilité de tiges de cotonnier comme matière première pour la fabrication des panneaux de particules
7Les productions de coton-graine ont fluctué au cours des neuf dernières campagnes de 2006-07 à 2014-15 au Bénin, au Mali et au Togo. Les statistiques de production fibres obtenues à partir des données du Comité Consultatif International du Coton (ICAC) ont servi à estimer les productions de coton graine en appliquant un taux d’égrenage de 42 % par pays et pour l’ensemble des trois pays. L’estimation de la production de tiges de cotonnier a été obtenue ensuite en appliquant le ratio résidus/produits moyen de 2 à la production annuelle de coton-graine de chaque pays et par an (16). Ainsi, la production moyenne annuelle de tiges de cotonnier est de 483.2000 tonnes au Bénin, 724.270 tonnes au Mali et 125.330 tonnes au Togo; soit un potentiel moyen productif de 1.332.800 tonnes de tiges de cotonnier entre la campagne cotonnière 2006-2007 et celle de 2014-2015 pour l’ensemble des trois pays étudiés (Tableau 1).
8Tableau 1. Estimation de la production des tiges de cotonnier (milliers de tonnes).
Pays |
2006-07 |
2007-08 |
2008-09 |
2009-10 |
2010-11 |
2011-12 |
2012-13 |
2013-14 |
2014-15 |
Moyenne |
Bénin |
494,4 |
542,4 |
432 |
326,4 |
288 |
360 |
504 |
595,2 |
806,4 |
483,20 |
Mali |
844,8 |
484,8 |
408 |
475,2 |
494,4 |
897,6 |
907,2 |
888 |
1118,4 |
724,27 |
Togo |
81,6 |
96 |
62,4 |
57,6 |
96 |
158,4 |
201,6 |
163,2 |
211,2 |
125,33 |
Ensemble |
1420,8 |
1123,2 |
902,4 |
859,2 |
878,4 |
1416 |
1612,8 |
1646,4 |
2136 |
1332,80 |
9 Source : Estimation des auteurs à partir des données de l’ICAC
10 https://icac.gen10.net/statistics/index
Valorisation actuelle des tiges de cotonnier par les cotonculteurs
11Respectivement 44 %, 52 % et 56 % des cotonculteurs enquêtés valorisent déjà les tiges de cotonnier au Bénin; Togo et au Mali (Figure 1). Ces proportions sont significativement différentes (p < 0,01). Ainsi, en moyenne pour les trois pays, environ la moitié (51 %) des producteurs de coton enquêtés déclarent valoriser déjà les tiges de cotonnier contre 49 % qui n’en font aucune valorisation. Les tiges de cotonnier non valorisées sont brûlées ou laissées sur les parcelles au champ, créant ainsi un manque potentiel de revenu à gagner pour les producteurs.
12Les tiges de cotonnier sont actuellement valorisées sous les formes suivantes : éléments fertilisants, aliments pour bétail, matériaux de construction, bois de chauffe, pacage d’animaux, production de potasse et vente (Figure 2). La valorisation des tiges de cotonnier comme élément fertilisant et aliment pour bétail (ruminants) s’observe dans les trois pays. Au Bénin, 52 % des producteurs valorisent les tiges de cotonnier en les utilisant comme fertilisant organique, contre 49% au Mali et 23 % au Togo. L’utilisation comme aliment pour bétail (ruminants) est pratiquée respectivement par 28 % des producteurs au Mali, 25 % au Bénin et 23 % au Togo. L’utilisation occasionnelle des tiges de cotonnier comme matériel de construction s’observe au Mali par seulement 3 % et au Togo par 2 % des producteurs de coton enquêtés. Au Bénin, cette forme de valorisation des tiges de cotonnier comme matériel de construction n’est pas encore observée. La valorisation par la vente de tiges de cotonnier en vue de gagner un revenu monétaire additionnel au revenu tiré de la vente de coton graine est pratiquée par 11 % et 5 % des producteurs respectivement au Togo et Bénin. La vente au marché des tiges de cotonnier n’a pas été observée chez les producteurs de coton enquêtés au Mali. Enfin, les tiges de cotonnier sont utilisées comme bois de chauffe par 42 % des producteurs enquêtés au Togo ou pour la production de potasse par 20 % de ceux enquêtés au Mali. Ces deux dernières formes de valorisation (bois de chauffe et production de potasse) n’ont pas été observées chez les cotonculteurs béninois.
13Figure 1 : Pourcentage de cotonculteurs valorisant ou non les tiges de cotonnier par pays.
14Bien que 51 % des enquêtés déclarent valoriser déjà les tiges de cotonnier, toute la production ne l’est pas et le reste est inutilisé sur l’exploitation agricole. Bien qu’une tranche de cotonculteurs au Bénin et au Togo vende déjà les tiges de cotonnier, aucun marché structuré de commercialisation de tiges de cotonnier n’existe actuellement dans les trois pays, et la proportion vendue reste encore très faible. Cependant, presque tous les producteurs des trois pays souhaitent mettre en marché leurs tiges de cotonnier si un marché existait et fonctionnait adéquatement.
Circuit de commercialisation des panneaux de particules
15Il n’existe à ce jour dans aucun des trois pays, ni dans la sous-région ouest africaine, une entreprise locale de fabrication de panneaux de particules. Pour l’instant, les panneaux de particules existants sur les marchés des trois pays proviennent des importations. Les panneaux de particules sont entièrement importés en majorité de la Chine ou encore de l’Inde soit directement des pays fabricants, ou par l’intermédiaire d’importateurs d’autres pays de la sous-région notamment de la Côte d’Ivoire ou du Ghana. Le circuit de commercialisation des panneaux de particules importés est pratiquement le même dans les trois pays et se résume dans la figure 3 ci-dessous.
16Par exemple, le Togo importe ses panneaux de particules du Ghana et dans une moindre mesure de la Côte d’Ivoire. Les commerçants maliens importent les panneaux de particules de la Côte d’Ivoire principalement. Les panneaux de particules vendus sur le marché béninois sont tous importés de la Chine et du Ghana. Les semi-grossistes ou détaillants sont pour la plupart des quincailleries et magasins de vente de matériaux de construction, lesquels approvisionnent les utilisateurs et consommateurs. Les commerçants de panneaux de particules ont une clientèle très variée (Tableau 2). Au Mali, les clients des commerçants de panneaux de particules sont les menuisiers (86 %), les entreprises de BTP (12 %) et les particuliers (2 %). Au Bénin, les particuliers représentent 64 % des utilisateurs de panneaux de particules, 19 % sont des menuisiers et des entrepreneurs de BTP (15 %). Au Togo, les utilisateurs sont pour la grande majorité des menuisiers (89 %), les particuliers représentent 6 % de cette consommation alors que les entreprises des BTP constituent 3 %. Les panneaux de particules vendus sont utilisés dans la fabrication des meubles, de plafonds, de bâtiments, des cloisonnements, etc.
17Les prix moyens de vente des panneaux de particules varient en fonction des dimensions, des épaisseurs et des pays et tiennent compte des coûts d’importation, de transport et de logistique. L’étude de marché au Bénin a montré que les prix moyens de vente du m2 des panneaux de particules sont de 2.352 FCFA pour les panneaux de 3 mm d’épaisseur, 4.031 FCFA pour les panneaux de 6 mm d’épaisseur, et entre 7.055 à 10.414 FCFA pour les panneaux de 18 mm d’épaisseur.
18Figure 2 : Proportion de producteurs selon les formes de valorisation des tiges de cotonnier, par pays.
19Tableau 2. Pourcentage de chaque catégorie d’utilisateurs de panneaux de particules par pays.
Type d’utilisateur de panneaux de particules (%) |
|||||
Particuliers |
Entreprises de BTP |
Menuisiers |
Autres |
Total |
|
Togo |
6 |
3 |
89 |
2 |
100 |
Bénin |
64 |
15 |
19 |
2 |
100 |
Mali |
2 |
12 |
86 |
0 |
100 |
20Figure 3 : Circuit de commercialisation des panneaux de particules importés.
21Au Mali, les prix du m2 des panneaux de particules varient de 2.943 FCFA pour les panneaux de 5 mm d’épaisseur, 5.954 FCFA pour les panneaux de 10 mm d’épaisseur à 7.685 FCFA pour les panneaux de 15 mm d’épaisseur. Au Togo, les prix moyens du m2 varient de 7.685 FCFA pour les panneaux de 4 mm à 22.000 FCFA pour les panneaux de 20 mm d’épaisseur. On en déduit que les prix moyens de vente du m2 des panneaux de particules semblent être plus élevés au Togo comparés aux prix de vente moyens dans les deux autres pays. Le Bénin est le pays dans lequel les panneaux sont bons marchés. Enfin, nos analyses ont montré que les utilisateurs et consommateurs des panneaux de particules ont une perception positive pour acheter les panneaux de particules à base de tiges de cotonnier, lesquels ont exprimé une demande potentielle. En effet, au Bénin; 92,50 % des consommateurs et utilisateurs enquêtés ont exprimé leur désir d’acheter les panneaux de particules à base de tiges de cotonnier, 77 % au Togo et 100 % des enquêtés au Mali.
Types de panneaux de particules actuellement commercialisés
22Les panneaux de particules sont généralement fabriqués à partir des essences comme les résineux (pin ou sapin/épicéa); les feuillus tendres (peuplier, tremble, aulne); les feuillus mi-lourds (bouleau, frêne, hêtre, châtaignier) et les feuillus durs (charme, chêne). Les types de panneaux de particules sont fonction de leurs épaisseurs qui varient entre 4 mm et 20 mm. Les principaux types de panneaux de particules vendus au Mali sont les panneaux de 5 mm, 10 mm et 15 mm. Au Togo, une gamme très variée de panneaux de particules est vendue. Les épaisseurs des panneaux de particules varient entre 4 mm et 20 mm. Les petits commerçants s’approvisionnent auprès des grossistes à Lomé ou dans certaines grandes villes de l’intérieur comme Kara et Sokodé. Les panneaux de particules commercialisés au Bénin ont une épaisseur variant de 3 mm à 18 mm.
Discussion
23La valorisation des tiges de cotonnier à travers leur introduction dans la fabrication des panneaux de particules apparait comme une opportunité et une alternative réelle pour améliorer le revenu des petits producteurs de coton. Malgré que les tiges de cotonnier puissent servir à divers usages, la grande part des tiges reste encore inexploitée et est brûlée en début de campagne cotonnière. Ainsi donc, ces tiges de cotonnier seraient disponibles pour être valorisées par d’autres moyens comme par exemple la fabrication des panneaux de particules, car il n’y a pas une grande concurrence autour de leur utilisation. La perspective de valorisation des tiges de cotonnier à travers leur mise en marché peut donc aider à améliorer la rentabilité de la production cotonnière à travers le complément de revenu qu’elle devrait générer à leur profit. De plus, aucune des formes actuelles d’usage de tige de cotonnier n’apporte un revenu monétaire direct aux producteurs, excepté la vente qui est actuellement pratiquée par un très faible nombre de producteurs. Ainsi, à la recherche d’un revenu supplémentaire, les producteurs pourraient mettre en marché des quantités non négligeables de tiges de cotonnier non encore valorisées; ce qui rendrait encore plus disponible la matière première pour les acteurs de la chaîne de valeur. Cette forme de valorisation marchande des tiges de cotonnier ne doit pas concurrencer les formes de valorisation non marchandes actuelles. Une complémentarité entre les deux formes de valorisation s’impose notamment pour garantir le maintien de la fertilité des sols pour les producteurs qui utilisent déjà les tiges de cotonnier comme éléments fertilisants, aliments pour bétail (ruminants), etc. Cependant, on ne pourrait tout à fait prédire le comportement des petits producteurs, face à l’avènement de ce nouveau marché. En effet, les producteurs restent rationnels mais pas prévisibles, leur prise de décisions étant liée à des facteurs et conditions qui leurs sont propres (18).
24La fabrication et la mise en marché de panneaux de particules à base de tiges de cotonnier ne seront rentables qu’à condition que ces derniers soient compétitifs en termes de qualité et de prix en référence aux panneaux de particules importés. Pour cela, les panneaux de particules à base de tiges de cotonnier doivent présenter des caractéristiques recherchées par les consommateurs et utilisateurs notamment en termes de résistance, dureté, étanchéité et propreté. L’incorporation des tiges de cotonnier, riches en lignocellulose, disponibles et moins chères devrait permettre de réduire les coûts de fabrication et rendre les panneaux de particules plus compétitifs sur le marché avec des prix de vente en dessous des prix actuels. Ces éléments sont sources d’avantages comparatifs pour une différenciation de la production et de la mise en marché des panneaux de particules à base de tiges de cotonnier pour les trois pays.
25En Afrique de l’Ouest, l’agriculture demeure une activité principalement familiale et les superficies cultivées sont souvent limitées. Ainsi, la disponibilité des tiges de cotonnier reste fortement dispersée. Ce qui pose un véritable problème pour l’insertion des petits producteurs dans une chaîne de valeur du fait des coûts supplémentaires générés par cette dispersion, pour sécuriser l’approvisionnement régulier des autres acteurs de la chaîne de valeur (3). Face à cette situation, le regroupement des producteurs en associations ou coopératives agricoles avec des règles de fonctionnement claires constitue un arrangement institutionnel qui présente de nombreux avantages en termes d’accès aux facteurs de production, au marché et à l’ancrage d’un partenariat avec les acteurs en aval de la chaîne de valeur qui permet d’assurer un niveau de revenu acceptable pour les producteurs (2, 3). Les filières cotonnières sont l’une des plus organisées en Afrique de l’Ouest, en ce qui concerne la production et la commercialisation du coton graine. La commercialisation des tiges de cotonnier pourrait donc être insérée dans ce cadre à travers une vente groupée des tiges de cotonnier par les membres des coopératives de commercialisation de coton graine, avec un prix d’achat compétitif obéissant à la loi de l’offre et de la demande, et négocié d’accord partie avec les acheteurs et les vendeurs (producteurs). Aussi, les tiges de cotonnier doivent être conditionnées de manière à en conserver toutes les propriétés physico-chimiques recherchées par les unités de fabrication des panneaux de particules. Cela exige un dialogue entre ces deux maillons de la chaîne de valeur. Cette étude a montré qu’il est possible de valoriser toute la quantité disponible et non utilisée de tiges de cotonnier pour fabriquer des panneaux de particules pour diminuer les importations et développer une chaîne de valeur innovante, profitable à tous les acteurs impliqués â savoir les producteurs de coton, menuisiers, entreprises de BTP, quincaillers, et les ménages. L’obtention d’un revenu complémentaire issu de la vente des tiges de cotonnier augmentera les revenus des cotonculteurs, confrontés de plus en plus à la baisse de leur revenu et de la compétitivité des filières cotonnières en Afrique de l’Ouest. Le développement de la chaîne de valeur de panneaux de particules à base de tiges de cotonnier peut offrir des moyens supplémentaires pour réduire la pauvreté dans les zones cotonnières des pays concernés (6). L’activité de récolte des tiges de cotonnier, un sous-produit du coton souvent ignoré dans la plupart des études économiques, offrira des perspectives de durabilité pour inclure davantage les femmes et les jeunes, lesquels sont spécialisés dans la récolte du coton (7). Cela pourrait contribuer à renforcer les performances économiques et sociales des filières cotonnières en Afrique de l’Ouest.
Conclusion
26L’utilisation des tiges de cotonnier comme matière première de base pour la fabrication de panneaux de particules permettrait de leur donner une valeur économique, et d’accroître le revenu des producteurs de coton. La production moyenne annuelle de tiges de cotonnier dans l’ensemble des trois pays garantit une disponibilité de matière première non négligeable pour la fabrication des panneaux de particules. Bien que plus de la moitié des producteurs de coton déclarent déjà valoriser les tiges de cotonnier, une très faible proportion de la quantité de tiges de cotonnier est valorisée réellement. Les panneaux de particules à base de tiges de cotonnier, est un nouveau produit qui pourrait facilement s’insérer dans un marché déjà existant, dominé essentiellement par les panneaux de particules importés. Ces panneaux de particules sont commercialisés par les quincailleries pour la plupart et utilisés par les menuisiers, les entreprises de BTP et les particuliers. La fabrication de panneaux de particules à base de tiges de cotonnier se révèle être intéressante et innovante parce qu’elle permet de valoriser un sous-produit du coton, les tiges de cotonnier, et de contribuer in fine à l’amélioration des performances économiques et sociales des filières cotonnières africaines. Cette valorisation locale des tiges de cotonnier est source d’avantage comparatif potentiel permettant de se différencier des panneaux de particules importés, et peut servir pour améliorer les compétitivités prix et qualité des panneaux de particules à base de tiges de cotonnier. Cependant, pour percer ce marché et gagner des parts de marché sur le long terme, une analyse approfondie de marché, complétée par une analyse financière, socio-économique et environnementale de cette chaîne de valeur, est nécessaire afin de s’assurer des potentialités de développement durable de ce type de valorisation. L’installation prochaine d’unités pilotes de fabrication des panneaux de particules à base de tiges de cotonnier dans chacun des trois pays permettra de réaliser cette analyse approfondie, laquelle est nécessaire pour confirmer ou non les compétitivités prix et qualité recherchées des panneaux de particules à base de tiges de cotonnier par rapport aux panneaux de particules importés.
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Pour citer cet article
A propos de : C.P. Kpadé
Béninois, PhD, Enseignant-chercheur, Université Nationale d’Agriculture, Kétou, Bénin. E-mail kpadepatrice1@hotmail.com
A propos de : A. Hougni
Béninois, PhD, Chercheur, Centre de Recherches Agricoles Coton & Fibres, Institut National des Recherches Agricoles du Bénin, Cotonou, Bénin.
A propos de : O. Sanogo
Malien, Ingénieur, Institut d’Économie Rurale, Attaché de recherche, Bamako, Mali.