Fédéralisme Régionalisme

1374-3864 2034-6298

 

depuis le 05 février 2011 :
Visualisation(s): 4972 (32 ULiège)
Téléchargement(s): 0 (0 ULiège)
print
print
Anne-Emmanuelle Bourgaux

La Belgique, Etat failli ou fédération… para-fédérale ? Le comité de concertation comme illustration des jeux du droit

(Volume 18 : 2018 — Le fédéralisme coopératif comme terrain de jeu du droit — Trop de jeu dans la structure juridique fédérale : un "jeu" dangereux)
Article
Open Access

Introduction : la Belgique, État failli ? Retour sur le Belgium Bashing

1Les Belges manient à merveille l’autodérision, composante essentielle du surréalisme. Ils sont moins habitués à être au centre des attentions. Longtemps, la complexité institutionnelle belge a été un paravent efficace face aux regards extérieurs. L’attaque de la rédaction de Charlie hebdo du 7 janvier 2015 va changer la donne.

2Celle-ci n’a pas seulement été le point de départ d’une vague d’attentats sur toute l’Europe. Elle a également été le détonateur d’un mouvement de Belgium Bashing sans précédent. Il va de l’article de Tim King, Belgium, Failed State, paru au lendemain de l’attaque de début 2015 à Paris1, à celui de Jean Quatremer, La Belgique, près de défaillir ?, publié à la suite des attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles2. D’une langue à l’autre, d’un pays à l’autre, la racine est la même : il est question d’échec, de faillite, de défaut, de déclin et presque déjà de disparition.

3Il faut reconnaître que la Belgique a tendu plusieurs bâtons pour se faire battre. Au départ, les critiques se focalisent sur les thématiques sécuritaires. Mais les dossiers qui questionnent le fonctionnement institutionnel belge se multiplient.

4Cette année 2015 se termine mal : la Belgique est la risée du monde en se présentant sans position officielle à la COP-21 à défaut d’un accord politique entre ses différentes composantes3. L’année 2016 ne s’annonce pas plus prometteuse : en janvier, plusieurs tunnels servant au trafic urbain bruxellois s’écroulent à défaut d’entretien et doivent être fermés. Parallèlement, le grand projet RER4 s’enlise. Lancé en 2004, il vise justement à améliorer l’offre ferroviaire pour accéder à Bruxelles. En 2016, son achèvement du côté wallon est reporté pour des raisons budgétaires5. Vers Bruxelles ou dans Bruxelles, en voiture ou en train, la mobilité est donc menacée d’immobilisme. Le casse-tête de la circulation bruxelloise est désormais épinglé par les guides touristiques aux côtés de nos fiertés nationales6.

5Face à la multiplication et l’internationalisation des critiques, la Belgique n’est pas restée inactive, quelle que soit la composante concernée. Sur le plan de la sécurité, une commission d’enquête parlementaire a été créée au sein de la Chambre fédérale dans l’objectif de faire la lumière sur les circonstances ayant mené aux attentats du 22 mars7. En ce qui concerne les tunnels bruxellois, une commission spéciale a été mise en place au sein du Parlement régional bruxellois8. Quant au report du chantier du RER, il a donné lieu à des débats intenses entre la Ministre fédérale et les députés9 au sein de la Chambre des représentants, chambre basse de l’autorité fédérale. Quelques mois plus tard, ce dossier couplé à celui des déficiences de l’aéroport national de Zaventem en matière de sécurité aboutiront finalement à la démission de cette Ministre10.

6Au sein de chaque entité concernée, les moyens classiques du contrôle parlementaire ont donc été actionnés : chacun s’est livré, de son côté, à un travail d’auto-questionnement. Mais qu’en est-il d’une réflexion collective sur la manière de fonctionner ensemble au sein de la Fédération belge ? Que nous disent ces dossiers successifs sur les failles de la gouvernance multi-niveaux en Belgique ?

7Depuis la fin du XXème siècle, le caractère coopératif du fédéralisme belge et ses vertus sont mis en avant par les gouvernants belges successifs de part et d’autre de la frontière linguistique, de part et d’autre de l’échiquier politique11. Malgré ce leitmotiv, l’accumulation des dysfonctionnements du fédéralisme belge incite à questionner ce dernier précisément sous l’angle de la coopération, en particulier de son organe central sur le plan gouvernemental : le comité de concertation.

8Nos réflexions collectives sur le fédéralisme coopératif dans une perspective comparée sont l’occasion de revenir sur la face obscure du fédéralisme coopératif belge, derrière la luminosité de ses bons sentiments12. Dans cette optique, les différents dossiers déposés «à charge» de la Belgique n’incitent pas tant à s’interroger sur l’éventuelle faillite étatique de la Belgique. Mais plutôt sur les défaillances de son fédéralisme coopératif.

9Au centre du fédéralisme coopératif belge, nous retrouvons un acteur central : le comité de concertation. Pour ceux et celles qui sont attentifs aux jeux du droit, le comité de concertation belge est un précieux sujet d’étude. En tant qu’organe plongé dans l’ombre, il permet de scruter les jeux laissés entre les multiples pièces de la mécanique fédérale belge et d’en tester les rouages. En tant qu’organe réunissant les représentants des nombreux exécutifs du pays, il permet d’observer les jeux des acteurs politiques qui font (dys)fonctionner la Fédération.

10Pour mener à bien cette mission d’observation, nous rappellerons d’abord les caractéristiques du fédéralisme belge, modèle atypique parmi les fédérations (I). Nous nous pencherons ensuite sur le comité de concertation en tant qu’organe para-fédéral entendu dans son étymologie grecque, ce qui mettra l’accent sur sa position d’entre-deux et de compromis (II). Nous aborderons enfin ce comité de concertation en tant qu’organe para-fédéral dans son étymologie latine, ce qui mettra au jour les tensions et contradictions dont il est porteur (III).

1. La Belgique, un Etat para-fédéral ?

11Avant d’être la cible d’un feu nourri de critiques, la Belgique faisait sourire. Ce petit pays au centre de l’Europe a été, dans le passé, l’objet de toutes les convoitises extérieures13. Indépendante depuis seulement 1830, elle devient peu après le centre de tous les appétits intérieurs. Dans un pays où sont parlées trois langues officielles, c’est un modèle atypique qui va être construit pour apaiser les tensions centrifuges (I.1.) au sein duquel le fédéralisme coopératif occupe une place de choix (I.2).

1.1.La Belgique, fédération atypique

12Le modèle institutionnel belge est atypique à plus d’un titre.

13D’abord, la Belgique est un Etat fédéral à double strates. La Belgique n’est pas divisée en un type d’entités fédérées mais en deux : les Communautés et les Régions14. Cette division complexe est le résultat d’un compromis historique : celui de combiner les deux modèles institutionnels défendus de part et d’autre de la frontière linguistique, et non de préférer l’un à l’autre.

14Ensuite, le principe de l’équipollence des normes15 et le principe de l’exclusivité des compétences16 impliquent qu’aucune hiérarchie n’est instaurée entre les différents acteurs de la gouvernance multi-niveaux belge, ni en faveur de l’autorité fédérale, ni en faveur de l’une ou l’autre autorité fédérée. Ces caractéristiques dessinent donc les contours d’un espace institutionnel potentiellement très conflictuel.

1.2 Fédéralisme coopératif et para-légalité

15Dans ce contexte, le fédéralisme coopératif va occuper une place de choix. Théoriquement, la coopération au sens large permet de construire des ponts malgré les digues. D’accorder les vues malgré les divergences. D’unir les forces malgré les prés carrés. Le fédéralisme coopératif parie sur les vertus de la négociation, de la collaboration et du compromis pour arrondir le tranchant d’une répartition des compétences aiguisée et huiler les grincements de rouages institutionnels enchevêtrés.

16Que nous apprend une analyse du fédéralisme coopératif belge sous l’angle de la para-légalité ?

17A sa seule évocation, le préfixe para- nous dévie de la voie principale. Hors des sentiers battus. Le long des chemins de traverse. A l’audace qu’il nous promet s’ajoute l’aventure de sa richesse étymologique. Le préfixe para- s’enorgueillit de deux origines étymologiques. De ses origines hellènes, il provient du grec παρά, ce qui signifie «à côté »17. De sa filiation romaine, il est issu du latin paro, ce qui veut dire «contre»18.

18Dans cette étude, nous montrerons que l’organe-phare du fédéralisme coopératif belge, à savoir le comité de concertation, témoigne de tensions para-fédérales entendues dans les deux sens du terme.

19En écho à la racine grecque παρά, le comité de concertation accueille un para-fédéralisme défini comme un fédéralisme de l’à-côté, de l’entre-deux au sein duquel se noue le fameux compromis «à la belge» qui, longtemps, a caractérisé le fragile équilibre belgo-belge. En soi, rien de surprenant pour un pays qui a inscrit le compromis dans son ADN19 ? A son paroxysme, cette tension para-fédérale entraîne la Belgique dans les à-côtés du fédéralisme, mais peut-être aussi dans ses ornières (II).

20En mémoire des origines latines paro, le comité de concertation devient également l’arène d’un para-fédéralisme animé non par la négociation et le compromis, mais par la confrontation et le conflit, voire par la contradiction. Poussée dans ses limites, cette tendance para-fédérale du fédéralisme coopératif ébranle l’efficacité mais aussi le sens du fédéralisme belge (III).

2. Le comité de concertation, organe para-fédéral (origine grecque)

21En principe, le comité de concertation est l’organe central en matière de négociation et de coopération. Comme l’annonce avec volontarisme le site du Premier Ministre, cet organe est en charge des «différents dossiers qui, dans le cadre d’une bonne gouvernance, nécessitent une collaboration entre les différents niveaux de pouvoir»20. Dans un pays où la répartition des compétences emprunte au savoir-faire ancestral en matière de dentellerie21, la plupart des grands enjeux de société du futur mobilisent des compétences disséminées entre les différentes entités (vieillissement de la population, enjeux climatiques, mobilité du futur, société algorithmique, …).

22A cette position politique centrale correspond pourtant une attention juridique périphérique. Privé de reconnaissance constitutionnelle, le comité de concertation fait l’objet d’une réglementation légale famélique. Ce statut en clair-obscur s’observe à différents niveaux : sa composition (II.1.), ses missions (II.2) et son fonctionnement (II.3).

2.1 Une composition à géométrie variable

23La composition du comité de concertation connaît une version officielle (II.1.1.). Et une version officieuse (II.1.2). Nous les passerons successivement en revue.

2.1.1 Une composition officielle

24Le comité de concertation est composé de douze membres issus des différents exécutifs du pays22.

25Une parité est instaurée entre les représentants de l’autorité fédérale et ceux des entités fédérées. Cette parité découle directement de la loi23.

26En outre, une certaine répartition linguistique est organisée par la loi, sans pour autant que la parité soit consacrée expressis verbis.

27Parmi les représentants des entités fédérées, cette parité linguistique est imposée : aux côtés des deux représentants du Gouvernement flamand24 (tous les deux néerlandophones) et des deux représentants du Gouvernement wallon et du Gouvernement de la Communauté française25 (tous les deux francophones), la loi impose au Gouvernement bruxellois de désigner le Ministre-Président et «un de ses membres appartenant à l’autre groupe linguistique»26.

28En ce qui concerne les représentants fédéraux, la loi n’impose pas expressément cette parité27. Elle découle indirectement du fait qu’outre le Premier Ministre, les représentants fédéraux doivent être désignés par arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres. Or, ce dernier répond à une exigence constitutionnelle de parité28.La composition de la représentation fédérale au sein du comité depuis 2014 illustre ce propos. Outre le Premier Ministre belge qui est francophone, trois ministres fédéraux néerlandophones et deux ministres fédéraux francophones ont été désignés pour siéger au sein du Comité de concertation29.

2.1.2 Une composition officieuse

29Nous évoquions la composition alchimique du comité de concertation. Pour une entité du pays, cette composition s’avère même sulfureuse. Contrairement aux autres entités et en rupture du principe d’égalité, la Communauté germanophone ne fait pas partie des douze membres du Comité de concertation30. Elle est affublée d’un statut au rabais qui lui est spécifique.

30Depuis 1983, la loi institutionnelle sur la Communauté germanophone prévoit qu’elle possède seulement une voix délibérative dans un cas déterminé : l’hypothèse d’un conflit d’intérêts31 auquel elle serait partie32.En 2007, ce droit de vote limité est confirmé par un vote à la majorité spéciale33.

31En pratique cependant, il semble que cette entité soit assise à la table du comité de concertation comme les autres entités, tout en ne possédant que ce droit de vote limité. Nous l’apprenons de la bouche d’un député lors des travaux parlementaires de cette loi de 2007 : «en ce qui concerne le comité de concertation, l’orateur atteste, pour y avoir de nombreuses fois participé, que le Président du Gouvernement de la Communauté germanophone était chaque fois invité et présent»34. Il s’agit d’un intéressant cas de jeu du droit : face à un principe juridique excluant, les acteurs consacrent une pratique incluante.

32On comprend donc que ce même orateur estime « préférable de voir cette pratique traduite dans une loi»35 et se félicite que le projet qui lui est soumis «confirme [… cette] pratique»36. Le législateur rate cependant l’occasion d’ajuster le droit et la pratique. Sans doute pour ne pas déséquilibrer la symétrie paritaire de l’édifice tracé sur le papier, le législateur se borne à confirmer ce statut au rabais, sans accorder au Gouvernement de la Communauté germanophone un statut équivalent à celui des autres entités au sein du comité de concertation.

33Cet épisode illustre à merveille la profondeur de l’ombre qui entoure le comité. Quel est le sens d’une réforme qui avalise, par loi spéciale, un principe inadapté à la pratique suivie depuis de nombreuses années ? On ne peut ici qu’avancer une hypothèse : celle qu’au fond, les acteurs politiques ne sont pas pressés de supprimer l’écart qui existe entre droit et pratique car cet écart offre les possibilités d’un mouvement, d’une flexibilité et d’une souplesse que la rigidité du droit supprime37.

34Comme nous allons le voir à présent, ce choix est réitéré pour les missions du comité.

2.2 Des missions insaisissables

35Les missions du comité de concertation sont de deux types. Tout d’abord, le comité joue un rôle préventif et défensif dans un cadre juridique précis (II.2.1.). Ensuite, le comité prend en charge une mission positive de coopération entre entités dans un cadre juridique évanescent (II.2.2.).

2.2.1 Une mission défensive précise

36Les missions précises du comité de concertation sont d’ordre défensif et interviennent dans un champ conflictuel particulier : ce que les Belges appellent le « conflit d’intérêts», c’est-à-dire un conflit de nature politique et non juridique.

37Il s’agit du rôle historique joué par le comité de concertation en matière de prévention et de règlement des conflits d’intérêts entre les différentes composantes de la Fédération, rôle octroyé par le législateur fédéral ordinaire de 198038. Contrairement aux conflits de compétences considérés comme des conflits de type juridique et confiés à ce titre à des organes juridictionnels39, les conflits d’intérêts sont, à l’origine40, pensés comme des conflits de nature politique et, à ce titre, laissés à des organes politiques. La loi organise d’ailleurs une certaine hiérarchie entre le conflit d’intérêts et le conflit de compétences : quand le second est constaté, le premier doit lui céder la place afin de laisser les organes juridictionnels trancher41.

38Un bon exemple valant un long discours, le fameux «dossier BHV» a donné lieu à plusieurs conflits d’intérêts visant à s’opposer au vote unilatéral de la scission de l’arrondissement électoral Bruxelles-Halle-Vilvorde (BHV) autour de Bruxelles par la majorité flamande de la Chambre des représentants42. La dimension politique du conflit s’illustre bien ici : dans ce conflit, personne n’a jamais mis en doute la compétence juridique du pouvoir fédéral pour scinder cet arrondissement électoral43. Ce qui était reproché, c’est un grief de type politique, à savoir que cette scission porterait gravement atteinte aux intérêts de telle ou telle autre entité.

39Pour en revenir au comité de concertation, son rôle est central dans la procédure de prévention et de résolution du conflit d’intérêts. En cas de conflit d’intérêts entre deux parlements44 ou deux gouvernements45, une procédure exceptionnelle de suspension de la décision litigieuse peut être provoquée par la partie qui se sent gravement lésée par cette décision. Pendant cette suspension, les parties en conflit sont invitées à trouver une solution entre elles par le biais de la concertation. Si cette dernière échoue, le comité de concertation prend une décision dans un délai fixé par la loi spéciale.

40La loi laisse dans le doute le point de savoir si le comité de concertation opère comme un organe de prévention ou de règlement du conflit d’intérêts46. Comme le comité de concertation est habilité par la loi à «rend(re) une décision»47 dans les conflits d’intérêts dont il est saisi, il semble s’identifier à un organe qui «règle» les conflits d’intérêts. Mais comme nous le verrons, dans la plupart des cas, le comité de concertation reste incapable d’adopter une décision48, ce qui implique que le conflit d’intérêts se perpétue. Dans cette optique, il semble davantage s’identifier à un organe qui aurait vocation à empêcher l’émergence de ce type de conflit.

2.2.2 Une mission positive évanescente

41Le rôle défensif joué par le comité de concertation en cas de conflit d’intérêts entre entités est donc réglé par la loi de manière précise dès 1980. Il ne s’agit pourtant que de la pointe de l’iceberg du rôle qu’il joue en matière de relations entre entités. Peu à peu, le comité sort de ce cadre défensif et conflictuel pour endosser un rôle positif dans la collaboration entre entités. Même si le fonctionnement opaque du comité empêche les chercheurs d’avoir une vue précise sur ces activités49, dès les années nonante, les chiffres attestent que la grande majorité des dossiers dont est saisi le comité relève de la «simple » concertation hors procédure de conflit d’intérêts50. Cette évolution se fait cependant par à coup et selon des dispositions légales passablement obscures. Si l’on osait, nous dirions que la face obscure du comité (la défense) est inondée de lumières légales, tandis que sa face solaire (la coopération) est plongée dans l’ombre. Cette mutation d’un organe défensif vers un organe collaboratif s’est opérée en plusieurs étapes.

1980 : une ébauche

42On retrouve dès 1980 une ébauche de cette mission positive. A cette date, le législateur habilite le comité de concertation à régler un conflit plus spécifique – mais toujours au titre des conflits d’intérêts. Quand une entité doit, pour exercer ses compétences, impliquer une autre entité de manière plus ou moins étroite (en l’informant, en la concertant, en l’associant, …) et qu’elle ne respecte pas cette obligation, l’entité lésée peut saisir le comité de concertation. A l’époque, les cas dans lesquels le législateur impose à une entité d’en impliquer une autre sont encore peu nombreux. Mais le mécanisme est efficace : tant que le comité ne constate pas l’accomplissement de la procédure obligatoire, la décision de l’entité en défaut est suspendue sans qu’aucun délai maximal ne soit fixé par le législateur de 198051.

1988 : un étape en trompe-l’œil

43La réforme institutionnelle de 1988-1989 marque une nouvelle étape en trompe-l’œil. De manière spectaculaire, le chapitre II de la loi du 9 août 1980 consacré aux «conflits d’intérêts» est rebaptisé «De la concertation et de la coopération entre l’Etat, les Communautés et les Régions»52. Du même coup, le comité de concertation, dont la composition est réglée dans ce chapitre, semble sortir de son carcan conflictuel originel pour atteindre une mission générale de collaboration dans la Fédération. Mais quelles sont ces nouvelles missions ?

44Enthousiaste, le législateur de 1989 est moins loquace quand il s’agit de donner un contenu à son effet d’annonce. Il prévoit la possibilité de créer au sein du comité des conférences interministérielles53.

45Pour le surplus, il se borne à étendre le rôle que jouait déjà le comité de concertation depuis 1980 à l’égard de toutes les «procédures de concertation, d’association, de transmission d’information, d’avis, d’avis conforme, d’accord, d’accord commun, à l’exception des accords de coopération» nouvellement prévues par la loi54. Vu la multiplication des cas de procédures obligatoires, le comité est donc appelé à intervenir de manière plus fréquente dans le fonctionnement de la Fédération.

46Mais c’est toujours dans le cadre défensif défini en 1980 – et d’ailleurs, toujours sous la section des «conflits d’intérêts», ce qui est source de confusion55. Contrairement à ce qui est annoncé en fanfare, ses missions ne sont pas définies de manière positive par le législateur. En outre, le législateur introduit un délai maximal durant lequel la décision litigieuse déférée au comité de concertation pourra être suspendue56. Au lendemain de la réforme de 1988-1989, la position du comité de concertation gagne en influence. Mais il perd en efficacité puisque désormais, la suspension qui menace l’entité défaillante sera limitée dans le temps.

1993 : du conflit d’intérêt à la loyauté fédérale

47La réforme institutionnelle de 1993 fait date dans l’histoire du fédéralisme belge. Mais non dans l’histoire du comité de concertation.

48D’abord, le Constituant s’empresse de consacrer la nouvelle compétence d’avis du Sénat dans la procédure de conflit d’intérêts 57, mais non celui – pourtant central - du comité de concertation.

49Ensuite, le concept de «loyauté fédérale» est inscrit dans la Constitution «en vue d’éviter des conflits d’intérêts»58. Cela va paradoxalement obscurcir le corpus juridique relatif aux conflits d’intérêts, non sans dommage pour le comité de concertation qui y règne jusqu’alors en maître.

50Définie comme «un engagement de ne pas porter atteinte à l’équilibre de l’ensemble et à ne pas mettre en péril les intérêts des autres composantes de l’Etat »59, l’articulation de cette nouvelle notion avec celle du conflit d’intérêts est longuement discutée : quelle sanction doit punir la violation de la loyauté fédérale ? Si celle-ci «ne peut intervenir que dans le cadre des conflits d’intérêts», quelle est sa plus-value pour le vivre-ensemble fédéral ? Des propositions sont formulées visant à distinguer les deux notions et à renforcer le contrôle du respect de la loyauté fédérale afin que cette dernière ne soit pas un «système hypocrite »60, ou «un vœu pieux»61. Malgré elles, le Constituant se borne à ériger la loyauté fédérale en «fil conducteur pour le conflit d’intérêts»62 et à juxtaposer les deux notions63.

51Au terme des travaux de 1993, le comité de concertation reste donc dans l’ombre, malgré la proposition d’un sénateur de le «repenser»64. Non seulement le Constituant ne dissipe pas les brumes qui entourent les missions du comité de concertation. Mais en outre, il les épaissit. Doit-on considérer que, par ricochet, le comité de concertation devient le gardien de cette nouvelle loyauté fédérale et, dans l’affirmative, avec quelles conséquences juridiques ? Doit-on, au contraire, se borner à constater que la loyauté fédérale relève, comme certains l’invoquent à l’époque, de la «soft law »65, la reléguer dans l’inconsistance juridique et en déduire le statu quo sur le plan du rôle du comité de concertation ? Comme le craignent certains déjà à l’époque, ce nouvel article constitutionnel en patchwork «amène plus de confusion que de clarté »66.

2014 : le rendez-vous manqué

52La Sixième Réforme de l’Etat de 2010-2014 est, pour le comité de concertation, l’occasion d’un nouveau rendez-vous législatif manqué. Les négociateurs semblent avoir pris la mesure de la nécessité de remédier au paradoxe selon lequel l’organe-pivot en matière de fédéralisme coopératif agit juridiquement en roue libre. L’accord politique entre les différents partis politiques s’engage à «précis(er) au plan légal, le rôle et le fonctionnement du Comité de concertation en tant que point central de concertation, de coopération et d’impulsion de stratégies coordonnées notamment pour répondre aux objectifs européens, dans le respect des compétences de chacun»67. Mais plutôt que de détailler les missions du comité de concertation, le législateur spécial va se borner à retranscrire expressis verbis ce passage de l’accord politique. Dans le nouvel article 31/1 de la loi du 9 août 1980, le Comité de concertationest désormais désigné comme « le point central de concertation, de coopération et de coordination entre l'Etat, les communautés et les régions pour réaliser des objectifs communs ou individuels, dans le respect des compétences de chacun»68.

53Un quart de siècle après la réforme de 1988, le législateur spécial consacre (enfin) le rôle central du comité dans le fonctionnement de la Fédération, dans un cadre dépassant largement les conflits d’intérêts tels que définis aux articles 32 et 33 de la loi du 9 août 1980. Ce faisant, le législateur spécial passe cependant du mutisme à la volubilité en s’abstenant de donner un contenu précis et de définir les missions concrètes qu’implique ce nouveau rôle. Sans doute absorbés par d’autres mesures ô combien plus controversées69, les sénateurs se bornent, pour appuyer leur proposition législative, à répéter quasi mot pour mot la formule légale qu’ils proposent70, elle-même reproduite de l’accord politique71... La reconnaissance légale du rôle du comité de concertation en sus des conflits d’intérêts est certainement positive. Mais n’aurait-il pas été heureux d’affiner la définition légale de ces missions plutôt que de se contenter de la formulation générale et vague de l’accord politique72, dont l’évanescence a comme seul mérite de ne fâcher personne73 ?

54La Sixième Réforme de l’Etat de 2010-2014 sort en partie de l’ombre le rôle-pivot du comité de concertation en matière de collaboration entre entités. Par contre, elle embrume indirectement son rôle historique en matière de conflits d’intérêts en confiant la loyauté fédérale à la garde de la Cour constitutionnelle74.

55Ce faisant, le législateur spécial estompe la summa divisio entre conflit d’intérêts (conflit politique) et conflit de compétences (conflit juridique) qui, comme on l’a vu75, est à la source de la création du comité de concertation. Jusqu’à présent, le système s’appuyait sur la dichotomie entre les deux types de conflits : à chaque conflit, son gardien. La juridictionnalisation de la loyauté fédérale vient brouiller les cartes. La loyauté fédérale devient une règle de répartition des compétences entre entités dont la Cour assure le respect. Mais elle reste liée également au conflit d’intérêts76. Se pose donc la question de l’articulation des rôles respectifs du comité de concertation, du Conseil d’Etat et de la Cour constitutionnelle.

56Cette difficulté s’aiguise quand on constate que le principe selon lequel le conflit de compétences prime le conflit d’intérêts est maintenu dans la loi du 9 août 198077. Or, cette règle de primauté est logique dans un système dichotomique qui divise et cloisonne les conflits entre entités en deux : elle vise à fixer la règle du jeu quand un conflit est mixte en donnant la priorité à la résolution juridique de ce conflit par un juge. Mais comment comprendre cette règle quand ces deux types de conflits sont décloisonnés ? Puisque tout conflit mettant en cause la loyauté fédérale est désormais mixte, quelle place est laissée au comité de concertation? A nouveau, les auteurs de la proposition n’apportent, dans leurs commentaires, aucune précision à la modification qu’ils suggèrent78.

57On l’aura compris : alors qu’il est central dans le fonctionnement concret de la Fédération, le comité de concertation peine à sortir des brumes juridiques dans lesquelles il est plongé dès ses origines. Longtemps confiné à un rôle négatif d’arbitre dans les conflits entre entités, il n’a été investi que récemment par le législateur d’un rôle positif, en tant que gardien de la collaboration entre entités. Il peine cependant à s’affranchir de cette histoire duale et traîne derrière lui des dispositions éparses, fruits de réformes successives, sans vision d’ensemble ni articulation cohérente.

2.3 Un cadre juridique incertain

58La loi du 9 août 1980 qui prévoit le comité de concertation à ses origines est une loi fédérale ordinaire, c’est-à-dire une loi fédérale qui est adoptée selon des conditions de quorum et de vote qui se calculent sur l’ensemble des membres de la Chambre ou du Sénat, sans protection des groupes linguistiques79. Concrètement, ce type de loi ne protège donc pas la minorité francophone.

59En 1993, le Constituant va modifier les règles du jeu : désormais, c’est par loi spéciale que la procédure relative au conflit d’intérêts devra être réglée80. Contrairement à la loi ordinaire, la loi spéciale est adoptée à des conditions de vote et de quorum plus sévères qui protègent les groupes linguistiques81.

60Les conséquences juridiques sur le comité de concertation se révèlent incertaines : quelles dispositions de la loi du 9 août 1980 doivent-elles être désormais gérées par loi spéciale ? On se rappellera en effet que depuis 1988-1989, le chapitre de la loi consacré aux « conflits d’intérêts» est rebaptisé et vise désormais de manière ambitieuse «la concertation et la coopération entre entités». Dès lors, juridiquement quelles dispositions de la loi sont visées par l’exigence constitutionnelle ? Faut-il limiter cette exigence juridique à la seule section de ce chapitre relative aux conflits d’intérêt ? Ou faut-il englober l’ensemble de ce chapitre, malgré le fait que son titre annonce un champ qui dépasse les conflits d’intérêts82?

61On l’aura compris : cette incertitude juridique sur le cadre sonne en écho à l’ambivalence des missions du comité de concertation. Pensé à l’origine comme l’arbitre des conflits entre entités, il tend au fil du temps à se sentir à l’étroit dans les limites de cette arène conflictuelle. Il peine cependant à se débarrasser des oripeaux de son uniforme. Cette incertitude juridique se ressent dans les modifications ultérieures83, en particulier lors de la Sixième Réforme de l’Etat

62A cette date, quand le législateur fédéral se propose d’investir le comité de la mission ambitieuse de devenir le « point central de concertation, de coopération et d’impulsion de stratégies coordonnées », il s’apprête à le décider par une loi ordinaire84. Il change finalement son fusil d’épaule en intégrant cette nouvelle mission dans une proposition de la loi spéciale sur la remarque du Conseil d’Etat85. Au niveau de la section de législation du Conseil d’Etat, le malaise est sensible. Après avoir posé que le règlement d’ordre intérieur «a vocation à s’appliquer en matière de prévention et de règlement des conflits d’intérêts» et, partant, doit être prévu par une loi spéciale86, elle énonce que ce nouveau rôle central en matière de coordination doit être également prévu par loi spéciale «car le raisonnement inverse, qui consisterait à affirmer qu'il ne relève pas de la matière de la prévention et du règlement des conflits d'intérêts, aurait pour conséquence que le législateur ordinaire, réglant le fonctionnement d'un organe réunissant tant l'autorité fédérale que les entités fédérées, serait incompétent pour adopter cet article»87. Seule certitude à la lecture de ce raisonnement au mieux ténébreux, au pire circulaire : le cadre constitutionnel est inadapté à l’évolution du comité de concertation vers un rôle constructif dans la fédération car il n’impose l’exigence de la loi spéciale que pour une partie des missions du comité.

63Finalement, les auteurs décident d’« ancrer ce rôle du Comité de concertation dans une disposition adoptée à la majorité spéciale, à côté de son rôle en matière de prévention et de règlement des conflits d'intérêts»88 et ce, « dans un souci de cohérence »89.

64Le plus cohérent aurait cependant été de profiter de la révision de l’article 143 de la Constitution pour confier au législateur spécial le soin de régler tout ce qui concerne le comité de concertation – et non seulement une partie de ses missions . Cela aurait préservé ce dernier de ce dédoublement de personnalité constitutionnelle dont le menace l’article 143 de la Constitution.

65Plus généralement, les négociateurs de la Sixième Réforme de l’Etat manquent l’occasion de repenser le cadre juridique qui balise le comité de concertation. Puisque l’ambition est d’officiellement l’investir d’un rôle-pivot positif et constructif dans les relations entre entités, n’aurait-il pas été cohérent de lui octroyer un véritable statut constitutionnel, en inscrivant son existence, sa composition et ses missions dans la Constitution elle-même ?

66Cette constitutionnalisation aurait permis de faire coup triple.

67D’abord, elle aurait clarifié le cadre juridique dans lequel évolue le comité de concertation, ce qui lui aurait donné les armes pour assumer un rôle central d’animation du fédéralisme coopératif. Comme on l’a vu, cette difficulté d’identifier la règle du jeu sinon hypothèque, du moins fragilise le dépassement du comité au-delà de son rôle défensif originel.

68Ensuite, inscrire le comité de concertation dans la Constitution aurait provoqué un véritable débat constitutionnel et une réflexion d’ensemble sur ce comité, rompant avec l’évolution cahin-caha qu’il a vécue jusqu’à présent.

69Enfin, cette constitutionnalisation aurait résolu un paradoxe. Depuis 2014, le comité de concertation est désigné comme le champion du fédéralisme coopératif. Mais le comité de concertation vit caché : pour le débusquer, il faut s’enhardir dans les coins et recoins d’une loi confidentielle (la loi du 9 août 1980). Dans de telles conditions, comment cet organe pourrait-il incarner les vertus des bonnes relations entre les nombreuses composantes de la fédération ? Concrètement, les Belges n’ont connaissance de cet organe que par à-coups, dans la presse, au gré des conflits qui émaillent la politique belge … Cette attention sélective envoie aux Belges un message paradoxal selon lequel le fédéralisme coopératif serait très important. Mais pas au point de le consacrer dans le texte le plus important de l’ordre juridique interne. En le privant de reconnaissance constitutionnelle, le monde politique prive donc le comité de concertation d’une consécration, d’une lisibilité et d’une visibilité qui lui sont indispensables pour assurer la mission de champion qui lui est dévolue.

70Dans la lignée de ses prédécesseurs, le Constituant de 2014 a préféré apporter une nouvelle pièce au patchwork juridique qui caractérise le comité de concertation depuis ses origines, sans repenser le modèle en profondeur90.

71Comme nous allons le voir à présent et sans surprise, le fonctionnement du comité de concertation est à l’image des autres traits qui caractérisent le comité : plongé dans l’ombre.

2.4 Un fonctionnement opaque

72Nous venons de montrer que les missions du comité de concertation restent, à ce jour, entourées de brumes. Son fonctionnement est, quant à lui, plongé dans la purée de pois.

73Quel est le fonctionnement du comité de concertation ? A quel rythme se réunit-il ? A l’initiative de qui ? Comment délibère-t-il et selon quelle procédure ? Quels sont les résultats de ses réunions ? Le législateur nous apporte deux réponses à ces questions fondamentales. Dans une perspective comparatiste, cela peut sembler déjà beaucoup. Mais comme on va le voir, cela n’est pas assez.

2.4.1 Un mode délibératif confus

74Dès 1980, le législateur impose que le comité de concertation délibère selon la procédure du «consensus»91.

75Cette exigence légale est problématique à un double titre. D’abord, cela hypothèque sérieusement l’efficacité du comité. Comme le comité est la réunion des différents gouvernements du pays92, cette exigence suppose que le comité n’est en mesure de décider que lorsqu’aucune entité ne s’oppose à cette décision. Dans un pays complexe comme la Belgique, cela réduit sensiblement sa marge de manœuvre. En général peu loquace, le législateur devient presque raffiné sur cette exigence de consensus. Pour ce qui concerne la position de la Région Bruxelles-capitale, le législateur précise que «(p)our empêcher que le consensus soit atteint dans les cas où le Comité doit, en vertu de la loi, décider selon la procédure du consensus, les deux membres de l'exécutif de la Région de Bruxelles-Capitale doivent rejeter la proposition soumise au Comité de concertation»93. Concrètement : les deux représentants (francophone et néerlandophone) de la Région bruxelloise devront tous les deux s’opposer à la décision pour la bloquer. Le désaccord de l’un deux ne suffira pas. A nouveau, on peut constater que le fédéralisme belge est un sport d’équipe … dont les règles ne s’appliquent pas de la même manière à tous94.

76Plus généralement, rappelons-nous qu’à l’origine, ses missions sont cantonnées à l’arbitrage des conflits d’intérêts95. Imposer le consensus s’apparente donc à vouloir résoudre la quadrature du cercle : par définition, si le comité est capable d’atteindre le consensus, c’est que les deux autorités en conflit ne sont plus en conflit. Du coup, quelle est la plus-value du comité de concertation ? En pratique, cette exigence explique que le comité de concertation est, dans la majeure partie des conflits d’intérêts qui lui sont soumis, incapable de les résoudre. Pour reprendre l’exemple du dossier B.H.V, l’impuissance du comité de concertation a abouti à l’escalade : quatre assemblées fédérées ont successivement voté une motion en conflit d’intérêts afin de suspendre, en cascade, la procédure parlementaire fédérale96.

77Par ailleurs, cette exigence de consensus est rendue délicate par les incertitudes du statut de la Communauté germanophone au sein du Comité que nous avons déjà évoquées97.  Jusqu’où s’étend le droit de vote de la Communauté germanophone ? Le législateur spécial a précisé que ce droit de vote est ouvert en cas de conflit d’intérêts «classique » visé par l’article 32 de la loi du 9 août 1980 et en cas d’inobservation des procédures de concertation au sens large visée par l’article 3398. Mais quid dans le cadre de la mission du comité en tant qu’organe-pivot du fédéralisme coopératif ?

78L’interprétation de ce statut sui generis n’est donc pas sans poser de sérieuses difficultés pratiques : comment apprécier si le consensus est atteint dès lors que l’étendue du droit de vote conféré à une des parties est vaporeuse ? Concrètement, lors de telle ou telle délibération, le silence du Gouvernement de la Communauté germanophone peut être le résultat de deux situations juridiques fort différentes. Il peut être l’expression d’un accord tacite dans les cas où le droit de vote de la Communauté germanophone est reconnu. Il peut être le résultat d’une incapacité juridique dans le cas contraire. Est-ce certain qu’en pratique, ces cas sont différenciés ?

79Plusieurs raisons plaident donc en faveur de l’octroi d’un siège à part entière au Gouvernement de la Communauté germanophone au sein du comité de concertation. Le principe de l’égalité entre entités fédérées. La conformité du droit positif à la pratique existante. La clarification des conditions procédurales qui doivent être observées par le comité. La résolution des problèmes pratiques causés par cette composition à géométrie variable.

80Enfin, nous sommes à nouveau face à la difficulté juridique causée par l’oscillation existentielle du comité de concertation entre prévention des conflits et encouragement de la coopération « positive »99. Cette exigence légale de consensus est formulée dans le cadre des missions originaires du comité de concertation, à savoir dans le cadre des conflits d’intérêts. S’applique-t-elle quand il intervient dans un autre cadre, en particulier celui qui a été dessiné en 2014 en matière de collaboration des entités ? La loi du 9 août 1980 est muette sur cette question. A nouveau, on ne peut échapper à l’impression que le comité de concertation grossit dans un costume trop étroit pour lui.

81Le mode délibératif du comité est donc frappé d’une double inconnue : selon quelle règle délibère-t-il et avec quelles parties ? Face aux incertitudes des réponses à apporter à ces questions, on ne peut exclure le caractère magique de son processus délibératif100.

2.4.2 Un comité en auto-gestion

82La seconde réponse que nous fournit le droit positif concernant le fonctionnement du comité de concertation … n’en est pas une.

83Alors que l’accord politique sur la Sixième Réforme de l’Etat s’engage à « précis(er) au plan légal (…) le fonctionnement du Comité de concertation»101, la loi spéciale qui exécute cet accord en 2014 se borne à renvoyer la tâche au Comité de concertation lui-même. Une nouvelle section prometteuse relative au « fonctionnement du comité de concertation » n’accueille qu’un article selon lequel « (l)e Comité de concertation établit un règlement d'ordre intérieur dans lequel les règles de fonctionnement du Comité sont arrêtées »102.

84Trois balises sont néanmoins posées par le législateur spécial : «dans le respect des modalités d’exécution arrêtées par chacun des gouvernements», ce règlement doit arrêter «les modalités de communication de l'ordre du jour et des décisions du Comité aux différents Parlements » et formaliser des procédures «afin de garantir la préparation en temps voulu des positions que les gouvernements défendront devant le Comité de concertation»103.

85En renonçant à arrêter lui-même les règles de fonctionnement du comité de concertation au profit d’une décision du comité, le législateur spécial se borne à entériner légalement la pratique antérieure104. Cela constitue un triple renoncement.

86D’abord, il s’agit d’un renoncement de la part de l’autorité fédérale au profit d’une forme de cogestion collective incluant les autres acteurs de la Fédération105. Cela vaut a fortiori si ce règlement requiert d’être adopté par consensus. Sur la base d’un raisonnement analogue à celui du Conseil d’Etat pour préconiser le recours au législateur spécial, le consensus s’impose à notre avis pour adopter ce règlement, y compris la Communauté germanophone «en ce qu’il a vocation à s’appliquer en matière de prévention et de règlement des conflits d’intérêts»106.

87Ensuite, il s’agit d’un renoncement du rôle du Parlement au profit du Gouvernement. Si le législateur spécial avait arrêté lui-même le fonctionnement du comité, le Parlement fédéral aurait été impliqué dans la fixation de ces règles. Il perd par contre tout droit de regard en habilitant le comité à les arrêter sans lui puisque ce comité est composé de manière intergouvernementale (et non interparlementaire). Ce déséquilibre entre pouvoirs s’accentue si l’on se rappelle que le législateur spécial de 2014 vise comme objectif de renforcer l’information des différents parlements. Comme le souligne très justement Yannick Peeters, en subordonnant cette information au comité, et donc aux différents gouvernements, cela laisse la possibilité à ces derniers d’amoindrir ou d’empêcher cette information, alors que le but initial est de la renforcer107.

88Enfin, en optant pour un règlement d’ordre intérieur, le législateur spécial opte pour un instrument infra-législatif  et se prive donc des garanties de publicité, de contrôle et de recours qu’aurait offerts une législation spéciale.

2.4.3 Un comité en roue libre ?

89A notre avis, les balises apportées par le législateur sur le fonctionnement du comité de concertation sont à la fois inadaptées et insuffisantes. La conséquence de cette paresse législative est que le comité de concertation est l’organe le plus opaque de tout le paysage institutionnel belge. Cet organe n’est entouré d’aucune mesure de publicité : il n’a pas de site propre108 et n’est pas référencé dans les sites institutionnels109. Tout au plus, un paragraphe lui est consacré sur une page de la chancellerie du Premier Ministre110. Ni les ordres du jour, ni les débats, ni les décisions ne sont accessibles au public, à l’exception de l’agenda qui, sous la législature 2014-2019, apparaît dans l’agenda publié en ligne sur le site personnel du Premier Ministre111, sans que cette publication ne découle d’une exigence juridique. Quant au règlement d’ordre intérieur, il n’est pas accessible au grand public puisqu’il ne fait l’objet d’aucune publication officielle, ni d’aucune publication en ligne.

90Dans ces conditions d’opacité qui n’ont rien à envier à l’Ancien Régime112, c’est donc uniquement du côté des travaux des chercheurs que l’on peut se tourner pour nourrir de données concrètes le droit positif, en particulier ceux qui ont, par leurs fonctions anciennes ou actuelles, des liens avec la pratique politique. On peut y trouver des données sur le volume et le type de dossiers traités par le comité113, sur le règlement d’ordre intérieur114, ou encore sur le nombre de conférences interministérielles créées au sein du comité115. Dans l’objectif d’apporter notre pierre à l’édifice, nous publions en annexe de la présente étude le règlement adopté en 2015 que nous avons obtenu des services de la Chancellerie116 (https://popups.uliege.be/1374-3864/index.php?id=1765&file=1&pid=1764 ). Ce mode de publicité n’est cependant, par définition, ni systématique, ni accessible au grand public .

91Comme on pouvait le craindre117, le règlement adopté par le comité en 2015 n’honore que très imparfaitement l’objectif du législateur spécial de 2014 visant à renforcer le rôle des parlements. En son article 17, il laisse à l’entière discrétion de chaque exécutif le soin de communiquer (ou non) les ordres du jour et les procès-verbaux du comité. En conséquence, à défaut de mesures de publicité propres au comité de concertation et en l’absence de mesures de publicité parlementaire sur ce sujet, le comité de concertation apparaît, pour les électeurs, aussi opaque qu’un conclave.

92Seule la presse permet d’en savoir plus sur la pratique du comité, ce qui délivre un aperçu sinon partial, du moins partiel de son fonctionnement. En effet, à défaut d’une publication officielle et systématique de l’agenda et de l’ordre du jour du comité, la publicité conférée à cet organe dépend du bon vouloir de ses membres qui, au gré de leurs intérêts politiques et au rythme des crises, braqueront (ou non) les projecteurs sur le comité avant et/ou après ses réunions en dévoilant la teneur de certains débats à la presse. Fait important à souligner, étant donné la bipolarité linguistique belge et les divisions idéologiques, la presse est fort divisée en Belgique. Ainsi, même ce choix de communication peut avoir pour effet d’exacerber les tensions au sein du comité.

93Partant, l’opacité du comité n’est pas seulement préjudiciable au contrôle politique que doivent exercer, dans une démocratie parlementaire, les parlementaires, les citoyens et la presse vis-à-vis de leurs exécutifs. Cette opacité revient en boomerang à la face du comité lui-même. Malgré les efforts du législateur spécial pour élargir le cadre juridique dans lequel il évolue au-delà des conflits d’intérêts, l’attention médiatique se focalise sur cette dimension conflictuelle au détriment de la mission de concertation et de coopération dont il est investi - et partant, la réalité tangible pour une majorité des citoyens reste ce sommet de l’iceberg.

94***

95Dans cette partie, nous avons vu que le comité de concertation fait l’objet d’incertitudes juridiques qui poussent à son paroxysme la tension para-fédérale entendue dans son étymologie grecque : organe du compromis et de l’entre-deux, le comité de concertation menace de basculer dans les ornières. Le costume taillé par le législateur pour le comité de concertation est à la fois trop petit et trop grand pour lui. Un costume trop petit car seul le versant défensif et conflictuel de sa mission fait l’objet d’une réglementation claire et précise tandis que le versant positif et collaboratif reste, pour sa part, largement plongé dans l’ombre. Un costume trop grand aussi car en pratique le comité continue de fonctionner comme un organe opaque, imprévisible et pour tout dire désuet, incapable d’être à la hauteur des défis lancés par la gouvernance multi-niveaux belge.

96Le comité de concertation est le seul organe réunissant les exécutifs des différentes entités de la fédération. A ce titre, son rôle est capital pour que les différents acteurs de la fédération sortent de leur pré carré, arrondissent les angles d’une répartition des compétences tranchante et fassent fonctionner de manière efficace un système fédéral que la complexité menace de paralysie.

97On peut cependant se demander si les incertitudes et les lacunes juridiques qui le caractérisent créent un environnement propice pour honorer les ambitions dont il est porteur. Officiellement, le fédéralisme belge promeut le fédéralisme coopératif. Mais en pratique, les règles du jeu coopératif sont obscures. Le comité de concertation est donc incapable de jouer son rôle de régulation.

98Nous venons de voir que le comité de concertation est un organe à la fois central et parallèle dans le fédéralisme belge, qui peut être croqué à partir de ses zones d’ombre et de ses demi-teintes. Cela dessine les contours d’un organe para-fédéral entendu dans son étymologie grecque.

99Nous allons voir à présent que le comité de concertation est aussi un organe para-fédéral en écho à son étymologie latine. Il n’est pas seulement l’à côté nécessaire d’un jeu fédéral risqué et crispé. Il est aussi le lieu d’une confrontation et d’un antagonisme entre acteurs qui menacent de transformer son arène en ring, et le jeu fédéral en sport de combat.

3. Le comité de concertation, organe para-fédéral (origine latine)

100Dans la pratique, le comité de concertation s’avère souvent incapable de produire le fameux «compromis à la belge» qui a longtemps caractérisé son système fédéral118. Plutôt que d’être la caisse de résonnance des différentes sensibilités (politiques, culturelles, linguistiques, philosophiques) qui trouveraient en son sein sinon un unisson, ou à tout le moins une harmonie, le comité de concertation abrite leur cacophonie.

101Cette tendance s’illustre dans les crises successives qui jalonnent la vie politique belge. Pour n’en prendre qu’un exemple, à la suite de l’effondrement des tunnels bruxellois paralysant (encore plus) la mobilité bruxelloise, le comité de concertation s’est réuni en date du 27 janvier 2016.

102Cette réunion a été commentée par la presse de la manière suivante : «Le comité de concertation pour les nuls: une vingtaine de ministres se réunissent sans rien décider. Puis ils s’engueulent via les médias»119.

103Cette tendance para-fédérale qui transforme le comité en organe de confrontation et non de collaboration questionne la nature de ce dernier sous trois angles : sa nature (inter)fédérale (III.1), sa nature (inter)majoritaire (III.2) et enfin sa nature intergouvernementale (III.3).

3.1 Le comité de concertation, un organe (inter)fédéral

104Comme nous l’avons déjà écrit, le comité de concertation dépend directement de la chancellerie du Premier Ministre fédéral120. Illustratif de cette dépendance étroite : l’agenda du comité est publié en ligne sur le site de ce dernier.

105On peut se demander si ce lien siamois entre le comité de concertation et le Gouvernement fédéral en général, avec le Premier Ministre en particulier, est de nature à créer les conditions d’un débat sinon serein, du moins déconflictualisé. En pratique, comment assurer à toutes les parties réunies autour de la table d’être dans des conditions égalitaires de discussion et de négociation ? Comment assurer la neutralité du cadre quand une seule d’entre elles détient le pouvoir de fixer l’agenda et l’ordre du jour ? Ceci vaut très certainement en cas de conflits au sens de la loi du 9 août 1980 et/ou en cas de crise. Mais cela vaut tout autant dans le cadre des missions positives de concertation et de coopération légalement confiées au comité depuis 2014 : pour que cette collaboration parte sur de bonnes bases, il est capital que le comité de concertation n’apparaisse pas comme l’instrument de l’un au détriment des autres.

106En imposant au règlement d’ordre intérieur de «garantir la préparation en temps voulu des positions que les gouvernements défendront devant le Comité de concertation»121, le législateur spécial de 2014 se fait le relais de cette préoccupation. La Sixième Réforme de l’Etat n’a cependant pas été l’occasion de mener une réflexion et une évaluation plus générales et substantielles des modalités d’organisation et du fonctionnement du comité122. S’y consacrer en dehors des périodes tendues de négociations communautaires et des chantiers institutionnels subséquents pourrait s’avérer très fructueux.

107Cette difficulté à penser le comité de concertation en dehors du champ presque domestique des services du Premier Ministre fédéral est étonnante. La Belgique connaît en effet un autre modèle caractérisé par un statut hybride entre le statut fédéral «pur» et le statut régional ou communautaire : le modèle « interfédéral », terme utilisé en Belgique pour désigner un organe fédéral dont la composition s’ouvre totalement ou partiellement à la représentation des entités fédérées. Troisième voie entre le maintien d’une compétence au niveau fédéral et sa régionalisation ou communautarisation, ces organes apparaissent au gré des réformes institutionnelles successives. On peut citer en exemple l’Agence pour le commerce extérieur, fruit des négociations de 2001 sur le commerce extérieur123 ou l’Institut pour l’avenir des soins de santé, fruit des négociations de la Sixième Réforme de l’Etat sur les soins de santé124. Ces organes hybrides sont créés et gérés par le pouvoir fédéral et les entités fédérées sur la base d’un accord de coopération, qui reçoivent ensuite l’accord (« l’assentiment ») des assemblées législatives respectives125.

108Appliqué au comité de concertation, ce modèle aurait l’avantage d’impliquer plus étroitement les entités fédérées dans la (co-)gestion du comité, par exemple par le biais d’une présidence tournante. En résulterait une plus grande responsabilisation des entités fédérées dans le fonctionnement du comité : quand on est co-responsable du fonctionnement d’un organe, il est plus inconfortable de concourir à son dysfonctionnement. En outre, autonomiser le comité par rapport au Premier Ministre permettrait de créer les conditions d’un espace neutre : le dialogue se noue plus efficacement à une table commune qu’à une table d’invités. Enfin, co-responsabiliser l’ensemble des acteurs de la Fédération dans le fonctionnement du comité permettrait d’espérer qu’il soit tiré de l’opacité dans lequel il est actuellement plongé. Le secret est l’arme du cachotier. En cas de partage du leadership, que reste-t-il à cacher ?

3.2 Le comité de concertation, un organe (inter)majoritaire

109Jusqu’il y a peu, la Belgique se caractérisait par une grande homogénéité des majorités politiques formées au niveau fédéral et fédéré. Concrètement, quand un parti politique montait au pouvoir au niveau fédéral, il tentait de monter aussi au pouvoir au niveau fédéré. Cette recherche d’harmonisation des coalitions découlait non pas d’une exigence juridique mais d’une pratique politique consistant, pour les partis politiques, à rechercher un maximum de participations gouvernementales. Souvent, ces coalitions en miroir ont été rendues possibles par le maintien d’une solidarité entre familles politiques de même couleur politique malgré leur scission linguistique. De même, cette pratique n’était concevable que si les résultats électoraux la permettaient.

110Depuis 2010, la montée en puissance de la N-VA (Nieuw-Vlaamse Alliantie126), parti nationaliste flamand, est venue bousculer ce schéma. Concrètement : les préférences politiques très contrastées des Francophones et des Flamands éloignent la perspective de coalitions homogènes. Sous la législature 2010-2014, la N-VA, principal parti flamand, fait partie de la coalition gouvernementale en Flandre mais elle est exclue de la coalition fédérée fédérale. A l’issue des élections de 2014, c’est l’inverse. Le Parti socialiste francophone est exclu de la coalition fédérale mais présent dans les majorités fédérées (wallonne, bruxelloise et francophone)127.

111A raison, Johanne Poirier s’inquiétait en 2014 des conséquences de ces majorités asymétriques sur le fonctionnement du fédéralisme de coopération128. Au sein du comité de concertation en particulier, l’asymétrie augmente la charge conflictuelle : le clivage fédéral/fédéré et le clivage francophone/flamand se doublent d’un clivage plus traditionnellement partisan.

112Ce contexte explosif s’ajoute aux fragilités qui ont déjà été décrites129 et hypothèquent les deux volets des missions confiées au comité : la prévention/résolution des conflits d’une part, et la coopération d’autre part130. Dans un tel contexte, le comité de concertation devient l’arène d’un combat des chefs dont les enjeux dépassent les dossiers institutionnels du moment. En effet, quand les coalitions gouvernementales sont (très) différentes, chaque parti a tendance à s’identifier à l’entité qu’il gouverne. Les clivages institutionnels et linguistiques qui divisent habituellement le comité sont alors doublés d’un clivage politique, ce qui rend la confrontation inéluctable.  

113Le dossier du CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement) nous en offre une belle illustration. Dans le processus d’assentiment et de ratification de ce traité commercial entre l’Union européenne et le Canada, la Région wallonne a fait de la résistance, menaçant de compromettre la ratification belge à ce traité131 et partant, le traité lui-même132. Le bras de fer qui s’est joué à cette occasion a abouti sur la table du comité de concertation.

114Le compte-rendu par la presse de la réunion du comité de concertation du 25 octobre 2016 tenu à la veille du Sommet européen sur le CETA133 résume celle-ci à un face-à-face musclé entre Paul Magnette, Ministre-Président socialiste de la Région wallonne, et Charles Michel, Premier Ministre fédéral libéral. Cette lecture évoque plus un duel à la Sergio Leone qu’un dialogue institutionnel. En particulier, comment atteindre l’exigence du consensus134 dans de telles conditions antagoniques ? Ici, le clivage fédéral/fédéré se doublait d’un clivage politique droite/gauche, voire d’un clivage francophone/néerlandophone puisque le dossier s’est divisé à 3 contre 3135. Sous les projecteurs de toute l’Europe et à la suite de l’annulation du Sommet européen prévu sur le CETA, un compromis se négocie dans les travées et est entériné lors d’une nouvelle réunion du comité de concertation136.

115Le dossier CETA a réussi à faire l’objet d’un accord entre les différents acteurs de la fédération. Il est cependant au mieux incertain que le mérite de ce déblocage puisse être attribué au travail délibératif du comité qui, dans cette affaire, semble avoir oscillé entre le ring de boxe et la chambre d’entérinement. En outre, l’accumulation depuis 2014 des dossiers dans lesquels les blocages ne sont pas surmontés137 illustre la difficulté, pour le comité, de jouer son rôle quand les majorités politiques sont différentes au sein des différents gouvernements.

116En 1993 déjà, lors des débats constitutionnels sur la consécration de la loyauté fédérale, un sénateur appelle à «repenser le comité de concertation» car «(j)suqu’à présent, il a toujours été composé en fonction de la majorité au pouvoir ». Et ce sénateur de s’interroger : «Mais que se passera-t-il lorsque des élections séparées interviendront et que des majorités différentes pourront apparaître ? »138. Comme nous l’avons vu139, cet espoir d’une réflexion approfondie sur la composition du comité est resté un vœu pieu.

117En juillet 2017, les libéraux francophones ont remplacé les socialistes au sein de la coalition régionale wallonne. Un pont politique existe donc à nouveau entre le Gouvernement fédéral et le Gouvernement régional wallon puisque les libéraux siègent dans ces deux gouvernements. Concrètement, cela signifie donc qu’au sein du comité, les divisions institutionnelles et linguistiques ne sont plus dédoublées par une division politique. Sans surprise, le comité de concertation est donc moins antagonique. Lors de la réunion du comité de concertation tenue au lendemain de ce bouleversement politique, certains, parmi les libéraux, se réjouissent d’avoir «entendu un ministre wallon (socialiste) dire «parfait» au sein du comité de concertation»140, ce qui suggère qu’un tel degré de « concertation » ou d’accord n’était pas intervenu depuis de nombreuses années.

118Le problème de fond reste cependant entier. L’évolution politique antagonique de part et d’autre de la frontière linguistique promet des lendemains asymétriques qui déchantent. Dans ce contexte, clarifier les missions, le cadre juridique et le fonctionnement du comité141 apparaît non seulement comme une nécessité mais comme une urgence : le conflit se love dans les imprécisions et les lacunes. Il en va de même de la clarification du statut du comité142 : tant qu’il sera identifié comme un service du Premier Ministre relevant de sa responsabilité directe, et non comme un organe interfédéral de la responsabilité collective de tous les exécutifs représentés, l’asymétrie transformera le comité en arène sur la base de clivages politiques.  

119Il reste cependant un angle selon lequel cette conflictualité mérite d’être évaluée : celui de la nature intergouvernementale de ce comité.

3.3 Le comité de concertation, un organe intergouvernemental

120Comme nous l’avons vu, le comité est exclusivement composé de représentants des différents exécutifs du pays, et non des différents parlements. Le rôle positif du comité en tant qu’animateur du fédéralisme coopératif a été (tardivement) consacré en 2014143.

121Dans le même temps, le Sénat belge a continué sa transformation débutée en 1993 en une seconde chambre fédérale composée des représentants des parlements des entités fédérées. La composition et le rôle du Sénat ont évolué au fil des diverses réformes ayant conduit la Belgique d’un État unitaire à la fédération actuelle. Depuis la 6e Réforme de l’État, le Sénat est exclusivement composé d’élus issus des parlements fédérés, selon une répartition complexe des entités fédérées qui provoque à la fois l’admiration et l’exaspération144.

122Le Sénat et le comité de concertation ont donc en commun de réunir les différents acteurs de la fédération. Entre eux, la lutte est cependant inégale.

123D’abord, l’affirmation du rôle central du comité en matière de fédéralisme coopératif relègue le Sénat à l’arrière-plan.

124Ensuite, depuis 2010-2014, les compétences du Sénat ont été drastiquement réduites et se limitent essentiellement à la Constitution et aux lois institutionnelles qui organisent le fédéralisme. Il a en outre été désigné pour élaborer des rapports d’information sur les questions relevant des compétences fédérales et fédérées145, ce qui le positionne comme un animateur de la fédération. Dans le même temps cependant, son droit d’initiative a été limité146, ce qui l’empêche d’être un moteur potentiel de réformes. Cela l’handicape pour devenir un lieu de dialogue constructif et crédible car le résultat de ce dialogue ne pourrait être concrétisé à son initiative.

125A raison pourtant, la Présidente du Sénat rappelle que contrairement au comité de concertation, le Sénat est de nature parlementaire, ce qui renforce les garanties démocratiques du dialogue entre entités147. Plusieurs des traits qui ont été épinglés dans cette étude tiennent en effet à la nature intergouvernementale du comité de concertation – c’est-à-dire dominé par les branches exécutives des composantes de la fédération –.

126L’opacité du fonctionnement du comité est le premier de ces facteurs. Le Sénat quant à lui reste heureusement soumis au principe de la publicité (de son agenda, de ses ordres du jour, de ses discussions et de ses décisions)148.

127De même, le dialogue institutionnel qui se noue en son sein présente davantage de garanties démocratiques. Par définition, le comité de concertation ne réunit que les majorités politiques qui forment les divers exécutifs, ce qui exclut d’office les différentes oppositions et encourage la logique de confrontation149. Au sein du Sénat par contre, l’opposition parlementaire est formellement et concrètement associée au dialogue. En outre, les clivages liés à l’éventuelle asymétrie politique tendent à se diluer puisque les sénateurs sont désignés sur la base du résultat des élections propres aux entités fédérées150. Autrement dit, l’estompement du clivage partisan est de nature à créer les conditions d’un dialogue institutionnel plus serein.

128Par ailleurs, le rapport fusionnel que le comité de concertation entretient avec le Premier Ministre fédéral151 est évité quand le dialogue entre entités a lieu au sein du Sénat. En son sein, la dynamique coopérative est collectivisée, ce qui évite les désagréments d’une trop grande individualisation et personnalisation du processus. Bien sûr, on pourrait objecter à ceci que si le comité de concertation est trop étroitement lié au pouvoir fédéral, le Sénat ne l’est pas assez. Le Sénat est la seconde chambre fédérale mais en son sein, depuis la Sixième Réforme de l’Etat, il n’existe plus de sénateurs élus directement en tant que sénateurs fédéraux. En termes de jeu du droit, le constat est intéressant : pour organiser le dialogue entre ses institutions - et donc le bon fonctionnement de son fédéralisme -, la Belgique oscille entre la phagocytation et l’exclusion. Signe d’une difficulté à fixer les règles du jeu fédéral de manière sereine ?

129Enfin, il reste un dernier élément qui plaide en faveur d’une revalorisation du rôle du Sénat en tant qu’animateur du fédéralisme coopératif belge. La place des citoyens est différente face au comité de concertation et face au Sénat. On ne peut que constater avec vertige la distance abyssale qui existe entre les électeurs et le comité de concertation, organe intergouvernemental opaque. Face au Sénat par contre, les citoyens ne sont pas totalement démunis. Les citoyens jouissent d’un droit de pétition152. Ils peuvent être auditionnés dans le cadre des rapports informatifs qu’élabore le Sénat sur les dossiers de société impliquant la compétence de plusieurs entités153. Plus généralement, renforcer la place des électeurs au sein du Sénat via le tirage au sort154 et favoriser l’implication des citoyens dans la résolution des problèmes concrets que pose la répartition des compétences en Belgique155 serait de nature à donner un souffle non seulement au Sénat mais aussi au fédéralisme coopératif dont il est actuellement privé.

130Une étude universitaire menée à la suite de la Sixième Réforme de l’Etat est instructive à un double titre. Elle tend à relativiser les fractures communautaires et les forces centripètes qui seraient à l’œuvre au sein de la Belgique. D’abord, l’enquête menée auprès des élus interrogés sur l’avenir du pays nuance leur division en deux blocs homogènes selon un clivage communautaire/linguistique francophone/flamand, à l’exception des élus des partis nationalistes flamands. Ensuite, l’enquête menée auprès des électeurs révèle un décalage avec leurs élus, ces derniers ayant tendance à être plus régionalistes/communautaristes que les premiers, surtout en Flandre156. Concrètement, renforcer le rôle du Sénat dans le fédéralisme coopératif tout en revalorisant le lien entre les sénateurs et les citoyens pourrait donc se révéler décisif pour l’avenir du pays. En outre, cela serait de nature à donner un nouveau souffle au fédéralisme belge qui semble en bout de course : à défaut d’élus sénatoriaux fédéraux, qui, mieux que les électeurs eux-mêmes, pourraient porter la voix fédérale au sein de cette assemblée ?

131L’heure n’est cependant pas à la valorisation mais plutôt à la liquidation. Au lendemain des attentats de Paris de novembre 2015, le président du principal parti de Belgique proposait de supprimer le Sénat pour investir son budget dans la Sûreté de l’Etat,157 organe civil de surveillance et de renseignements. Cette proposition ne jette pas seulement de l’ombre sur l’avenir démocratique du pays, si l’on admet que remplacer des parlementaires par des enquêteurs n’est pas un signe de bonne santé démocratique. Cette proposition obscurcit aussi l’avenir institutionnel de la Belgique car seul le Sénat, en tant qu’assemblée réunissant les différentes entités du pays, permet à celles-ci de nouer un dialogue dans un cadre propice à l’adoucissement des multiples clivages qui travaillent la Belgique : majorité(s)/opposition(s), fédéral/fédéré, francophone/flamand, monde politique/citoyens.

Conclusions

132Dans toute gouvernance multi-niveaux, la collaboration entre entités est souhaitable. Dans la Belgique fédérale, caractérisée par le principe de l’exclusivité des compétences et de l’équipollence des normes, cette collaboration est une nécessité. A défaut, la gestion publique se transforme en casse-tête. Les relations entre entités, en compétition. Le rapport entre les citoyens et l’Etat, en incompréhension.

133Depuis les attentats de Paris en  2015, les regards extérieurs soupçonnent la Belgique d’être un Etat failli. A notre avis, ce n’est pas la faillite qui menace la Belgique, mais bien les défaillances de son fédéralisme coopératif.

134La tendance para-fédérale s’exprime au sein du comité de concertation, point central du fédéralisme coopératif, de deux manières.

135En écho à l’origine grecque de ce terme qui signifie «à côté», le comité de concertation est un organe de l’entre-deux et du compromis. Mais les inattentions et les incertitudes juridiques dont il est l’objet le livrent à l’inefficacité. Organe du semi-formel et du gris, il est attiré dans l’informel et l’informulé par l’opacité qui est sa marque de fabrique. Censé aboutir à une plus-value collective dans le fonctionnement de la Fédération belge, il est menacé d’indécision et d’inaction, ce qui aboutit in fine au conflit et au repli sur soi.

136En résonnance des sources latines de ce terme qui renvoient au contraire et à l’opposition , le comité de concertation est l’organe non de la collaboration mais de la confrontation. En raison des caractéristiques de son statut, il devient l’amphithéâtre des conflits et non l’architecte des solutions.

137Cette tendance para-fédérale n’est pas une fatalité. Il est nécessaire de clarifier et d’améliorer le comité de concertation afin qu’il puisse plus efficacement assurer le bon fonctionnement du fédéralisme coopératif belge. Il est aussi indispensable de démocratiser le fédéralisme coopératif en rendant au Sénat les moyens de jouer un rôle de débat, de réflexion et d’amélioration du modèle fédéral belge, notamment en impliquant plus étroitement les citoyens dans l’évaluation concrète du fonctionnement de la fédération.

138A défaut de réforme, la tension para-fédérale qui est à l’œuvre en Belgique risque de s’aggraver au fil du temps, substituant de manière durable le conflit au compromis, le blocage à l’action, la frustration à l’enthousiasme dont le fédéralisme belge était porteur à l’origine, de part et d’autre des frontières linguistiques. Pour faire fonctionner le fédéralisme belge, les acteurs ont certainement besoin d’une souplesse de jeu. Mais ils doivent également être soumis à des règles du jeu claires afin qu’elles puissent être connues, observées et revendiquées en cas d’inobservation. Seul un cadre juridique précis tend à l’égalité des armes. A défaut, le comité de concertation n’est pas un organe de régulation mais plutôt de confrontation. Il n’aide pas  à dépasser les solitudes institutionnelles. Il les entrechoque. Un jeu avec des règles floues n’est presque plus un jeu. C’est déjà une bataille.

Notes

1  King (T.) , «Belgium is a Failed State», 12/02/2015 in http://www.politico.eu

2  Quatermer (J.) , «La Belgique près de défaillir ? », 28/04/2016 in https://www.liberation.fr.

3  Sur ce sujet, voy. la contribution de Mathieu Dekleermaker dans ce numéro spécial.

4  Le projet RER (Réseau Express Régional) vise à améliorer l’offre de transports publics autour de Bruxelles en intensifiant l’offre ferroviaire et en coordonnant cette offre avec les autres moyens de transport (bus, tram, métro). Sur le plan institutionnel, ce plan nécessite la collaboration du pouvoir fédéral, des trois Régions, des provinces et des communes concernées. Lancé en 2004, sa finalisation est initialement prévue en 2012. Elle est actuellement estimée par le Ministre fédéral à 2024, par d’autres observateurs à 2031. Sur ce sujet : Lallemand (C.), «Le RER finalisé … en 2031 ? », 28/03/2018 in http://www.levif.be

5  J.C., «RER à Bruxelles : quel était le projet ? Qu’en est-il maintenant ?», 02/02/2016 in https://www.rtbf.be/info/

6  Le Routard Bruxelles 2017 épingle certains tunnels «fermés parce que vétustes» (Paris, Hachette, 2016, «Transports» ).

7  «Proposition visant à instituer une commission d’enquête parlementaire chargée d’examiner les circonstances qui ont conduit aux attentats terroristes du 22 mars 2016 dans l’aéroport de Bruxelles-National et dans la station de métro Maelbeek à Bruxelles, y compris l’évolution et la gestion de la lutte contre le radicalisme et la menace terroriste», Doc.Parl., Ch., 2015-2016, 1752/1 in http://www.lachambre.be/.

8  «Motion visant à instaurer une commission spéciale consacrée l’état des tunnels bruxellois», C.R.I., P.R.B. , 2015-2016, n°32, 29/01/2016, 77 in http://www.parlement.brussels

9  «Interpellations et questions jointes», C.R.I.COM , Ch. , Commission de l’Infrastructure, des Communications et des Entreprises publiques, 2015-2016, 02/02/2016, a-m. , n°329, 27 pp.

10  Arrêté royal «Gouvernement : Démission-Nomination» du 18 mai 2016, M.B., 19/04/2016 ; ALBIN Didier , «La démission de Jacqueline Galant en trois points», Le Soir, 16/04/2016 in http://www.lesoir.be

11  Le Premier Ministre Jean-Luc Dehaene, socio-chrétien et néerlandophone, défend qu’«un fédéralisme adulte a tout à gagner d’une coopération optimale»(28/06/1995, 11). Pour le Premier Ministre Guy Verhofstadt, libéral et néerlandophone, le «fédéralisme coopératif» est au centre du renouveau institutionnel et démocratique (14/07/1999, 16). Le Premier Ministre Elio Di Rupo, socialiste et francophone, en appelle à un «climat de coopération et d’émulation» entre entités (07/12/2011). Le Premier Ministre Charles Michel, libéral et francophone, défend la «coopération » et la «concertation» entre entités dans plusieurs politiques (emploi, pauvreté, sécurité - 14/10/2014, 6, 13, 17). Ces différentes déclarations de gouvernement fédéral se retrouvent in http://www.crisp.be.

12  Comme le souligne joliment Johanne Poirier : «Qui peut s’opposer à la collaboration entre pouvoirs publics ? Tout le monde est pour la vertu» (Poirier (J.), «Les accords de coopération dans le processus de réformes institutionnelles : instruments d’exécution ou d’ingénierie constitutionnelle ?» in Centre de droit public de l’ULB, Les accords du Lambermont et du Lombard – Approfondissement du fédéralisme ou erreur d’aiguillage ?, Bruxelles, Bruylant, 2003, 63).

13  Les différentes provinces qui composent la Belgique ont été successivement sous domination celte, romaine, franque, bourguignonne, espagnole, autrichienne, française, hollandaise.

14  Articles 1 à 3 de la Constitution belge. Le lecteur trouvera une version coordonnée de celle-ci in http://www.senate.be/

15  Chacune dans leurs matières, les communautés et régions ont la compétence d’adopter des « décrets », actes législatifs adoptés par les entités fédérées. Ces « décrets » sont dit « équipollents à la loi » (articles 127 à 130 et 134 de la Constitution) : ils ont dont la même valeur juridique que les lois fédérales. Pour sa part, « l’ordonnance bruxelloise » est l’équivalent du décret des autres régions et communautés, mais elle a été affublée d’un stigmate qui la singularise dans la hiérarchie des normes. Les autres normes législatives ne peuvent être contrôlées que par la Cour constitutionnelle. L’ordonnance peut, quant à elle, à certaines conditions, être contrôlée et écartée par le juge judiciaire (article 9 de la loi du 12 janvier 1989). Sous l’angle du jeu du droit, on peut donc constater que le fédéralisme belge est un sport d’équipe. Mais tous les joueurs ne sont pas soumis aux mêmes règles du jeu.

16  Le principe de l’exclusivité des compétences découle de la manière dont sont réparties les compétences en blocs distincts et séparés, de l’absence de la possibilité d’exercer des compétences concurrentes et de l’absence de règle de hiérarchie et/ou de primauté entres compétences qui seraient exercées concurremment. Pour une discussion de ce principe : Vanpraet (J.), De latente staatshervorming, Brugge, Die Keure, 2011, 614 pp. Depuis la Sixième Réforme de l’Etat : «Les défédéralisations à l’épreuve de l’homogénéité et de l’exclusivité des compétences» et «Conclusions » in Dumont (H.), Hachez (I.) et El Berhoumi (M.) (dir.), La Sixième Réforme de l’Etat : l’art de ne pas choisir ou l’art du compromis ? , Bruxelles, Larcier, 2015, pp. 97 à 137, pp. 230 et 231.

17  Etymologie que l’on retrouve dans le terme paragouvernemental. Sur cette étymologie, voy. la lexicographie de ce terme et plus généralement du préfixe grec παρά in http://www.cnrtl.fr/.

18  Racine latine qui apparait dans les termes paratonnerre, paravent, parasol … (ibid.).

19  La Révolution belge de 1830, qui a permis à la Belgique d’accéder à l’indépendance, doit sa réussite à la solidité du compromis noué entre libéraux et catholiques. Par la suite, le «compromis à la belge» permet de surmonter les multiples clivages (linguistiques, philosophiques, culturels) qui mettent la Belgique sous pression en nouant des grands accords politiques. Pour certains, ce sens du compromis est en perte de vitesse : De Coorebyter (V.), «La Belgique entre compromis et ambiguïté», Pouvoirs , 2011, pp. 87 à 96.

20  http://www.premier.be/fr/comité-de-concertation

21  La dentelle a été un de nos fleurons, de Bruges (Flandre) à Binche (Wallonie) en passant par Bruxelles. Sur ce sujet : « The Belgian Federation: Tools of Appeasement; Instruments of Confrontation»dans Saxena (R.) ( dir.),Varieties of Federal Governance – Major Contemporary Models, Cambridge, Cambridge University Press, 2011, pp. 344–377.

22  Article 31 § 1er de la loi du 9 août 1980 de réformes institutionnelles. La composition du comité est prévue par la loi dès 1980. Sa physionomie actuelle date cependant de la réforme de 1989 (article 26 de la loi du 16 juin 1989 modifiant l’article 31 de la loi du 9 août 1980, op.cit.). Sur la réforme de 2007, voy. ci-après.

23  Six membres fédéraux, six membres fédérés (ibid.).

24  Article 31 § 1er 2) de la loi du 9 août 1980 de réformes institutionnelles.

25  Article 31 § 1er 3) et 4) de la loi du 9 août 1980 de réformes institutionnelles.

26  Article 31 § 1er 5) de la loi du 9 août 1980 de réformes institutionnelles.

27  Article 31 § 1er 5) de la loi du 9 août 1980 de réformes institutionnelles.

28  Article 99 alinéa 2 de la Constitution. Sur ce sujet : Reuchamps (M.), «La parité linguistique au sein du conseil des ministres», Res Publica, 2007, pp. 602-627.

29  Arrêté royal du 11 novembre 2014 portant désignation des cinq membres du gouvernement au sein du Comité de concertation, M.B. , 20/11/2014 ; arrêté royal du 28 juillet 2017 modifiant l’arrêté royal du 1 novembre 2014, M.B. , 04/08/2017. Pour l’accès au Moniteur belge : http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/welcome.pl

30  Article 32 § 1er de la loi du 9 août 1980 de réformes institutionnelles.

31  Sur cette notion, voy. ci-après.

32  Ancien article 67 § 3 de la loi du 31 décembre 1983 sur la Communauté germanophone.

33  Nouveau § 3 inséré à l’article 31 de la loi du 9 août 1980 inséré par l’article 2 de la loi spéciale du 20 mars 2007 (M.B. , 13/06/2007).

34  «Rapport», Doc.Parl. , Ch. , 2006-2007, 2608/2, 7.

35 Ibid.

36 Ibid.

37  In casu : ne pas reconnaître dans la loi la présence du Ministre-Président de la Communauté germanophone.

38  Articles 31 et 32 de la loi du 9 août 1980 de réformes institutionnelles. Pour l’accès à la version consolidée de cette loi : http://www.ejustice.just.fgov.be/loi/loi.htm. Ces articles figurent dans la loi d’origine (M.B. , 15/08/1980).

39  Par la Cour constitutionnelle (article 142 de la Constitution) ou par le Conseil d’Etat (article 160 de la Constitution).

40  Voy. cependant infra les développements sur la Sixième Réforme de l’Etat.

41  Article 32 § 4 à § 7 de la loi du 9 août 1980 de réformes institutionnelles (op.cit.).

42  Sur ce dossier : Blero (B.) «BHV, couronne d’épines de l’Etat fédéral belge», Pouvoirs, 2011/1, pp. 97 à 123 (en ligne) ; «La scission de la circonscription Bruxelles-Halle-Vilvorde», C.H.CRISP, 2015, n°2279, 54 pp.

43  Cette scission électorale concerne l’élection de la Chambre des représentants, chambre basse fédérale, et l’élection de la représentation belge au Parlement européen, pour lesquelles le niveau fédéral est exclusivement compétent.

44  Article 32 §1 à 1quater de la loi du 9 août 1980 (op.cit.).

45  Article 32 §2 à 4 de la loi du 9 août 1980 (op.cit.).

46  Le titre II de la loi du 9 août 1980 s’intitule de manière indifférenciée «De la prévention et du règlement des conflits».

47  Article 32 §1quater et § 2 de la loi du 9 août 1980.

48  Voy. infra II.4.

49  Ibid.

50  Emmanuel Vandenbossche cite les chiffres suivants pour la période 1994-2007 : 493 dossiers sont soumis au comité, dont seulement 15 concernent des conflits d’intérêt – nous supposons que sont visés les conflits prévus à l’article 32 de la loi du 9 août 1980 (Vandenbossche (E.), "De nieuwe regeling inzake het substitutierecht en het Overlegcomité", C.D.P.K., 2014, 215, NBP 51).

51  Article 33 de la loi du 9 août 1980, M.B. , 15/08/1980.

52  Article 25 de la loi du 16 juin 1989 modifiant l’intitulé du chapitre II de la loi du 9 août 1980 (M.B. , 17/06/1989).

53  Voy. infra point 2.1.3.

54  L’article 30 de la loi du 16 juin 1989 modifie l’article 33 de la loi du 9 août 1980 (M.B. , 17/06/1989).

55  L’article 33 reste inscrit dans la section relative à «la prévention et au règlement des conflits d’intérêts». L’article 33 vise les conflits liés au non-respect des procédures de concertation s.l. imposées par la loi. L’article 32 vise les conflits d’intérêts «classiques» qui supposent la lésion grave des intérêts d’une autre entité. Il existe donc une imprécision terminologique sur le point de savoir ce que recouvre légalement la notion de «conflit d’intérêts».

56  Depuis lors, ce délai est de 120 jours (article 33 dernier alinéa tel que modifié par l’article 30 de de la loi du 16 juin 1989, op.cit.). Pour rappel : aucun délai n’était fixé pour cette suspension en 1980.

57  «Révision du titre III, chapitre IIIbis», Doc. Parl. , S. , 1991-1992, 100 – 27/1.

58  Révision du 5 mai 1993 de l’article 143 de la Constitution, M.B. ,

59  «Rapport complémentaire», Doc. Parl., S. , 1991-1992, 100 – 27/8, 2.

60  «Rapport complémentaire», Doc. Parl., S. , 1991-1992, 100 – 27/8, 4.

61  «Rapport complémentaire», Doc. Parl., S. , 1991-1992, 100 – 27/8, 12.

62  «Rapport complémentaire», Doc. Parl., S. , 1991-1992, 100 – 27/8, 16.

63  L’article 143 de la Constitution se compose de trois paragraphes qui prévoient successivement : la loyauté fédérale (§1), le rôle du Sénat en cas de conflit d’intérêts entre assemblées (§2) et la compétence du législateur spécial pour régler les conflits d’intérêts (§3).

64  «Rapport complémentaire», Doc. Parl., S. , 1991-1992, 100 – 27/8, 8.

65  «Rapport complémentaire», Doc. Parl., S. , 1991-1992, 100 – 27/8, 17. Sur la loyauté fédérale en tant que soft law constitutionnel : Lejeune (Y.), «Le principe de la loyauté fédérale: une règle de comportement au contenu mal défini », A.P.T. 1994, p. 236 ; Ransson (A.-C.), «Le principe du «vivre ensemble» : une épopée constitutionnelle», C.D.P.K, 2012, 50 ; Dermine (P.), «La loyauté fédérale et la Sixième Réforme de l’Etat – Essai d’interprétation», A.P.T. , 2015, 213. Pour une typologie de la notion de soft law : Hachez (I.), « Balises conceptuelles autour des notions de « source du droit », « force normative » et « soft law » », R.I.E.J., 2010/2, pp. 40-56.

66  «Rapport complémentaire», Doc. Parl., S. , 1991-1992, 100 – 27/8, 18.

67  «Un Etat fédéral plus efficace, des entités fédérées plus autonomes», accord institutionnel pour la Sixième réforme de l’Etat», 10/10/2011, publié in http://www.lachambre.be/

68  Nouvel article 31/1 de la loi du 9 août 1980 inséré par l’article 61 de la loi spéciale du 6 janvier de 2014 relative à la Sixième Réforme de l’Etat (M.B. , 31/12/2014).

69  Par exemple, le transfert historique d’un pan de la sécurité sociale, à savoir les allocations familiales (article 12 de la loi spéciale du 6 janvier 2014 sur la Sixième Réforme de l’Etat, op.cit.).

70  «Proposition de loi spéciale relative à la Sixième réforme de l’Etat», Doc.Parl., S. , 2012-2013, 5-2232/1, 20.

71  «Un Etat fédéral plus efficace, des entités fédérées plus autonomes», accord institutionnel pour la Sixième réforme de l’Etat», op.cit.

72  Ibid.

73  Dans le même sens : Y. Peeters estime que cette réforme «ne change pas ou peu le fonctionnement et les missions du comité» Peeters (Y.), "Wat we zelf doen, hoeven we niet alleen te doen. Beschouwingen over het Overlegcomité, de federale loyauteit, de nieuwe samenwerkingsverplichtingen en de gezamenlijke decreten, ordonnanties en besluiten", inVelaers (J.), Vanpraet (J.), Peeters (Y.) et Vandenbruwaene (W.) (eds.), De zesde staatshervorming: instellingen, bevoegdheden en middelen, Antwerpen, Intersentia, 2014, p.929.

74  Témoin de l’embrouillamini légistique qui caractérise la Sixième Réforme de l’Etat : cette nouvelle compétence de la Cour constitutionnelle n’a pas été prévue par la révision de l’article 142 de la Constitution mais bien par la modification des articles 1 et 26 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 par les articles 47 et 48 de la loi spéciale du 6 janvier 2014 sur la Sixième Réforme de l’Etat (M.B. , 31/12/2014 – neuf lois spéciales traduisant cette réforme ont été adoptées et publiées aux mêmes dates). Pourtant, cet article 142 de la Constitution était ouvert à révision et a été révisé pour prévoir d’autres nouvelles compétences de la Cour (révision de l’article 142 de la Constitution du 6 janvier 2014 (aussi), M.B. , 31/12/2014 (aussi).

75  Voy. supra 2.2.1.

76  Article 143 § 1 de la Constitution. Sur ce lien brumeux : voy. supra 2.2.

77  Article 31 § 5 de la loi du 9 août 1980.

78  «Proposition de loi spéciale relative à la Sixième réforme de l’Etat», Doc.Parl., S. , 2012-2013, 5-2232/1, 20.

79  Article 53 de la Constitution.

80  Article 143 § 3 de la Constitution.

81  Article 4 de la Constitution.

82  Au sein de ce chapitre, seule la section 3 vise désormais les «conflits d’intérêt» et comprend les articles 32 et 33 de la loi du 9 août 1980. Si on limite l’intervention du législateur spécial à cette section, cette dernière ne s’impose pas, par exemple, pour la composition du comité de concertation réglée par l’article 31.

83  Après 1993, dans la majorité des cas, la loi du 9 août 1980 a été modifiée par loi spéciale. En 2003 cependant, c’est le législateur ordinaire qui s’est chargé de cette tâche L’article 11 de la loi ordinaire du 2 avril 2003 (M.B. , 14/05/2003) modifie l’article 32 §§ 6 et 8 de la loi du 9 août 1980 pour porter à cinq jours (et non à huit) le délai dans lequel le Conseil d’Etat doit rendre un avis au comité dans les cas définis par ces paragraphes. Sans doute, l’intervention du législateur ordinaire s’explique par le fait que cette modification intervient dans le cadre plus large d’une réforme du Conseil d’Etat qui est réglé par la voie de la loi ordinaire. Elle est cependant étonnante en regard de l’article 143 § 3 de la Constitution qui impose de régler la procédure en conflits d’intérêts par la voie du législateur spécial. Or, l’article 32 ainsi modifié fait clairement partie de la section 3 de la loi du 9 août 1980 relative aux conflits d’intérêts.

84  « Proposition de loi relative à la Sixième réforme de l’Etat concernant les matières visées à l’article 77 de la Constitution», Doc.Parl., S. , 2012-2013, 5-2231/1, 22.

85  Voy. ci-après.

86  «Amendements », Doc.Parl., S. , 2012-2013, 5-2232/4, 28. Sur ce sujet : voy. infra point II.4.

87  «Amendements », Doc.Parl., S. , 2012-2013, 5-2232/4, 28. Nous avons vérifié la concordance entre la version française et la version néerlandaise afin de sonder si cette formule étonnante n’était pas due à une erreur de traduction.

88  Ibid.

89  «Amendements », Doc.Parl., S. , 2012-2013, 5-2232/4, 29.

90  Pourtant, le Constituant s’est penché sur l’article 143 de la Constitution. Il s’est contenté d’ajouter une pièce supplémentaire au bric à brac : un nouveau § 4 est inséré à l’article 143 de la Constitution pour exclure de la procédure en conflit d’intérêts les décisions fédérales portant sur les éléments du calcul de l’impôt des personnes physiques (révision de l’article 143 de la Constitution du 6 janvier 2014 (M.B. , 31/01/2014)).

91  Articles 32 et 33 de la loi du 9 août 1980 (op.cit.).

92  Sur la composition, voy. supra point 2.1.

93  Article 33bis de la loi du 9 août 1980 inséré par l’article 31 de la loi du 16 juin 1989 (op.cit.).

94  La même exigence n’est en effet pas imposée pour la représentation de l’autorité fédérale qui est représentée par six membres. Partant, l’opposition d’un de ces membres (et non de tous) suffirait à empêcher le consensus au sein du comité.

95  Voy. supra point 2.2.1.

96  Le conflit d’intérêt a été activé successivement par le Parlement de la Communauté française (9 novembre 2007), par l’Assemblée COCOF (9 mai 2008), par le Parlement de la Région wallonne (14 janvier 2009), par le Parlement de la Communauté germanophone (26 octobre 2009). La non-résolution de ce conflit a finalement abouti à la chute du gouvernement fédéral fin avril 2010, à des élections anticipées puis à la négociation de la Sixième Réforme de l’Etat qui a hypothéqué la constitution d’un gouvernement fédéral pendant 18 mois. Sur cette crise : Xhardez (C.), «540 jours de crise : un scénario made in Belgium» et Dumont (H.), « Un impossible dialogue ? Deux communautés dans la tourmente» in von Busekist (A.) (dir.), Singulière Belgique, Paris, Fayard, 2012, pp. 23 à 47.

97  Voy. supra 2.1.

98  Ibid.

99  Voy. supra point 2.2.

100  Nous empruntons cette formule aux sociologues afin de désigner un processus dont on peine à décrire la rationalité de manière objective, ici à partir du droit positif – ce qui n’excut pas toute rationalité. Sur ce sujet : Bourdieu (P.) , Ce que parler veut dire – L’économie des échanges linguistiques, Paris, Fayard, 1982, 243 pp. ; Cassirer (E.) , Le mythe de l’Etat, Paris, Gallimard, 1993, 402 pp. ; Weber (M.), Economie et société, Paris, Plon, Pocket, 1995, volume 1 et 2.

101  «Un Etat fédéral plus efficace, des entités fédérées plus autonomes», accord institutionnel pour la Sixième réforme de l’Etat», 10/10/2011, publié in http://www.lachambre.be/

102  Nouvel article 31ter de la loi du 9 août 1980 inséré par l’article 63 de la loi spéciale du 6 janvier 2014 relative à la Sixième Réforme de l’Etat (op.cit.).

103  Ibid.

104  Sur le Règlement d’ordre intérieur en vigueur en 1988, voy. ci-après.

105  Voy. cependant le statut de la Communauté germanophone, infra point 2.1.3.

106  Voy. supra 2.3

107 Peeters (Y.), op.cit. , 928.

108  La Belgique est le Royaume des organes, instituts, organismes, commissions, centres, … Nous n’avons pas trouvé d’équivalent au comité de concertation (absence de site spécifique et/ou de page sur un site institutionnel).

109  Voy. http://www.belgium.be/fr/la_belgique/pouvoirs_publics

110  http://chancellerie.belgium.be/fr/content/la-direction-générale-secrétariats-et-concertation

111  http://www.premier.be/fr/comité-de-concertation

112  Sur la (fragile ?) victoire de la publicité grâce aux Lumières sur le secret, allié de l’Ancien Régime : Habermas (J.), L’espace public – Archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, Paris, Payot, 1992, 324 pp.

113  Voy. supra point 2.4.3 les chiffres précieux fournis par Emmanuel Vandenbossche pour la période 1994-2007.

114  Le Règlement d’ordre intérieur du 7 juin 1988 est publié in Alen (A.), Dujardin (J .), La Réforme de l’Etat – La nouvelle Constitution et ses lois d’exécution, Bruxelles, E. Story-Scientia, CEPESS, 3ème édition, 1990, pp. 299 à 300. Nous avons écrit à l’adresse-mail mentionnée sur le page de la chancellerie du Premier afin d’obtenir un exemplaire du Règlement d’ordre intérieur. Sans succès.

115  A nouveau grâce à Emmanuel Vandenbossche, on apprend qu’en 2014, seize conférences interministérielles sont créées au sein du comité de concertation dans les domaines les plus divers (op.cit. , 217). Leur agenda, leur ordre du jour et leurs décisions ne font l’objet d’aucune publication officielle.

116  Un grand merci à ces services pour cette communication.

117  Voy. supra 2.4.2.

118  Sur cette capacité de la Belgique à trouver des compromis dans des négociations informelles : Deschouwer (K.), The Politics of Belgium: Governing a Divided Society , Houndmills: Palgrave Macmillan, 2012, 2nd ed.  

119  Tweet de Véronique Lamquin cité in V.La , M. Bn , «Polémique après le comité de concertation sur les tunnels : Chastel tacle Vervoort», Le Soir, 27/01/2016 (en ligne). Sur le même ton et avec presque les mêmes termes, Van de Woestyne (F.), «Edito : spectacle regrettable, lamentable, pitoyable », L.L.B. , 27/01/2016 (en ligne).

120  Voy. supra 2.4.3.

121  Nouvel article 31ter de la loi du 9 août 1980 (op ?ci

122  Pour rappel : dans la composition du comité, le Premier Ministre à un siège garanti par la loi au sein du comité de concertation. Les cinq autres ministres fédéraux sont choisis librement parmi le Conseil des ministres (voy. supra 2.1).

123  Article 92bis §3 d) de la loi spéciale du 8 août 1980 modifié par l’article 18 de la loi spéciale du 13 juillet 2001. Voy. le site de cette Agence : http://www.abh-ace.be/fr

124  Article 92bis §4isepties a) de la loi spéciale du 8 août 1980 inséré par l’article 43 de la loi spéciale du 6 janvier 2014 (op.cit.). La création de cet « Institut pour l’avenir» a été annoncée par la Ministre de la Santé en juillet 2016 dans le cadre d’une réforme générale de l’administration fédérale des soins de santé (MATHIEU Benoît , «La gestion des soins de santé sera-t-elle encore paritaire ?», L’Echo, 13/07/2016 - en ligne).

125  Par exemple, l’accord de coopération du 24 mai 2002 portant création de l’Agence pour le commerce extérieur a reçu l’assentiment parlementaire des trois Régions et du pouvoir fédéral.

126  Littéralement : la Nouvelle Alliance Flamande.

127  En 2017, les socialistes ont été remplacés par les libéraux au sein du Gouvernement wallon à la suite de scandales politico-financiers mais non au sein du Gouvernement de la Communauté française (Fédération Wallonie-Bruxelles) réunissant les Francophones wallons et bruxellois. Même au sein de l’espace politique francophone, il n’existe donc plus d’homogénéité politique.

128  «Fédéralisme coopératif et gouvernance multi-niveaux dans une approche comparative», première rencontre scientifique du G3, Montréal, 27-29/11/2017.

129  Voy. supra 2.

130  Voy. supra 2.2 .

131  En Belgique, les traités mixtes doivent être faire l’objet d’un assentiment parlementaire dans tous les parlements compétents dans les matières visées par le traité (article 167 de la Constitution). Un accord de coopération du 8 mars 1994 conclu entre l'autorité fédérale, les Communautés et les Régions règle les modalités de conclusion des traités mixtes (M.B., 17 décembre 1996).

132  Pour une chronologie de ce dossier brûlant : dossier «CETA : la Wallonie, seule face à l’Europe» in http://www.lalibre.be.

133  Montay (J.), «Un comité de concertation déconcertant», 25/10/2016  in https://www.rtbf.be.

134  Voy. supra 2.4.1.

135  A défaut de procès-verbal publique, c’est par la presse que l’on apprend qu’au sein de ce comité, trois entités votent pour le CETA, trois contre (ibid.) : autorité fédérale, Communauté flamande, Communauté germanophone contre Région wallonne, Région bruxelloise, Communauté française (Fédération Wallonie-Bruxelles). Si ces chiffres sont exacts, cela confirme que la pratique suivie au comité est de laisser voter la Communauté germanophone même en dehors de l’hypothèse juridique circonscrite du conflit d’intérêt (sur ce sujet : voy. supra 2.1. et 2.4).

136  «CETA : un compromis belgo-belge a été trouvé», 27/10/2016  in https://www.lesoir.be

137  Par exemple, le dossier des tunnels bruxellois, du RER ou de la COOP 21 (voy. l’introduction). Sur ce dernier sujet, voy. la contribution de Mathieu

138  «Rapport complémentaire», Doc. Parl., S. , 1991-1992, 100 – 27/8, 8.

139  Voy. supra 2.2.2.

140  Messoudi (I.) , «Comité de concertation : j’ai entendu un ministre wallon dire «parfait»», 06/09/2017 in https://www.rtbf.be.

141  Voy. supra 2.2., 2.3. et 2.4.

142  Voy. supra 2.4.3.

143  Voy. supra point 2.1.1.

144  Révision de l’article 67 de la Constitution du 6 janvier 2014, M.B. , 31/01/2014. Sur l’histoire de la transformation du Sénat depuis 1993 : Dumont (H.), Hachez (I.) et El Berhoumi (M.), , pp. 89-97 ; Laureys (V.),Van Den Wijngaert (M.) et Velaers (J.) (dir.), Le Sénat de Belgique – Une histoire, Bruxelles, Racine, 2016, pp. 171-355 ; Feyt (A.) et Vandernacht (P.), «La réforme du Sénat, un tableau inachevé … » in Sautois (J.) et Uyttendaele (M.) (dir.), La sixième réforme de l'État (2012-2013) - Tournant historique ou soubresaut ordinaire?, Bruxelles, Anthémis, 2013, pp. 81 à 102 ; Sägesser (C.) et Istasse (C.), «Le Sénat et ses réformes successives», C.H.CRISP, n°2219-2220, 2014, 114 pp.

145  Révision de l’article 56 alinéa 2 de la Constitution du 6 janvier 2014, M.B. , 31/01/2014. Pour prendre connaissance des travaux menés par le Sénat sur cette base, voy. «Rapports d’information» in https://www.senate.be/

146  Le Sénat conserve un rôle d’initiative essentiellement en matière constitutionnelle et à l’égard des lois institutionnelles qui règlent le fédéralisme (révision des articles 75 et 77 du 6 janvier 2014, M.B. , 31/01/2014).

147  «La fin du Sénat ? Christine Defraigne monte au créneau», RTBF, journal télévisé du 14/11/2014 in http://www.rtbf.be/video/detail_la-fin-du-senat-christine-defraigne-monte-au-creneau?id=1970915

148  Article 47 de la Constitution, article 34 de la loi spéciale du 8 août 1980, article 28 de la loi spéciale du 12 juillet 1989, article 43 de la loi du 31 décembre 1983.

149  Voy. supra point 3.2.

150  Article 68 de la Constitution du 6 janvier 2014, M.B. , 31/01/2014.

151  Voy. supra point 2.2.1.

152  Articles 28 et 57 de la Constitution.

153  «Rapports d’information» in https://www.senate.be/

154  Pour un état des lieux des propositions : actes du colloque «Démocratie représentative, vers la fin d’un modèle ? Diagnostic et remèdes», 22/12/2015, Sénat de Belgique , organisé par le Sénat le 22 décembre 2015 in https://www.senate.be/ ; Bourgaux (A-E.), «Un Sénat tiré au sort ?», Politique, 2016, n°95 in http://www.revuepolitique.be/.  

155  Sur ce sujet : Bourgaux (A-E.), «Un Etat sur-représentatif ?», Politique, 2014, n°84 in  http://www.revuepolitique.be/;   «Pour une réforme de l’Etat citoyenne», proposition de révision déposée dans le cadre du Forum «Quelle Constitution après 2019 ?» organisé parBouhon (F.), El Berhoumi (M.), Moonen (T.), Romainville (C.) Sinardet (D.), 12 et 25/01/2019, Bruxelles, Palais des Académies.  

156  Dodeigne (J.), Sinardet (D.) et Reuchamps (M.), «Identités, préférences et attitudes parlementaires après la sixième réforme de l’Etat», C.H.CRISP, 2015, n°2272, 51 pp. ; Gadisseux (T.), «Les parlementaires veulent plus de Belgique, et moins de régionalisation», 24/01/2016 in https://www.rtbf.be.

157  «Attentats de Paris : De Wever veut abolir le Sénat» , 16/11/2015 in https://www.lesoir.be  ; «De Wever : «Supprimer le Sénat et investir ce budget dans la Sûreté de l’Etat»», 16/11/2015 in https://www.lavenir.net.

Pour citer cet article

Anne-Emmanuelle Bourgaux, «La Belgique, Etat failli ou fédération… para-fédérale ? Le comité de concertation comme illustration des jeux du droit», Fédéralisme Régionalisme [En ligne], Volume 18 : 2018, Le fédéralisme coopératif comme terrain de jeu du droit, Trop de jeu dans la structure juridique fédérale : un "jeu" dangereux, URL : https://popups.uliege.be/1374-3864/index.php?id=1768.

A propos de : Anne-Emmanuelle Bourgaux

Professeure, Université de Mons-Université Libre de Bruxelles