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Biotechnologie, Agronomie, Société et Environnement/Biotechnology, Agronomy, Society and Environment

1370-6233 1780-4507

 

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Christophe Vandenberghe, Richard Lambert & Jean Marie Marcoen

Evaluation de l'efficacité des cultures intermédiaires pièges à nitrate (CIPAN) en novembre

(Volume 14 (2010) — Numéro spécial 1)
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Résumé

Le Programme de Gestion Durable de l'Azote en agriculture, transposition de la Directive Nitrates en Région wallonne (Belgique), prévoit que les cultures intermédiaires pièges à nitrate (CIPAN) doivent être maintenues jusqu'au 1er décembre. Cependant, pour des raisons agronomiques (faciliter le labour, éviter la production de graines), il est parfois souhaité d'enfouir les CIPAN plus tôt, à partir du 15 novembre par exemple. Cinq années (2002 à 2006) de suivi du reliquat en nitrate en novembre et en décembre ont néanmoins mis en évidence l'intérêt de maintenir ce couvert jusqu'au 1er décembre puisqu'une réduction de reliquat de l'ordre de 10 kg N-NO3-.ha-1 était observée sur les parcelles couvertes au cours des deux dernières décades de novembre.

Mots-clés : azote, pratiques agricoles, CIPAN, enfouissement

Abstract

Evaluation of the catch crops efficiency in November. The walloon Action Programme (Belgium) called "Sustainable Use of Nitrogen's Programme", plans the ploughing in of the catch crops from the 1st December. However it would be preferable for agronomic reasons (to make the ploughing easier, to avoid grains production) to plough in the catch crops from 15th November. Five years (from 2002 to 2006) measurements of soil nitrate residue have nevertheless underlined the interest of maintaining this cover up to 1st December; some 10 kg N-NO3-.ha-1 were consummed by the catch crop during the the end of November.

Keywords : nitrogen, nitrate, nitrate, agricultural practices, catch crops, incorporation

1. Introduction

1L'actuel Programme de Gestion Durable de l'Azote en agriculture (PGDA), transcription de la Directive Nitrates (91/676) dans la législation wallonne [Arrêté du Gouvernement wallon modifiant le Livre II du Code de l'Environnement constituant le Code de l'Eau en ce qui concerne la gestion durable de l'azote en agriculture (Moniteur Belge, 07.03.2007)] prévoit l'enfouissement des cultures intermédiaires pièges à nitrate (CIPAN) à partir du 1er décembre. L'enquête publique relative au PGDA, réalisée en 2008 par la DGARNE (Direction Générale de l'Agriculture, des Ressources naturelles et de l'Environnement) a, entre autres, mis en avant le souhait des agriculteurs d'avancer au 15 novembre la date d'enfouissement des CIPAN, effectué à l'occasion du labour d'hiver. Il importe donc de pouvoir évaluer si cette modification peut avoir un impact sur l'efficience de la CIPAN. Les mesures de reliquat azoté réalisées en novembre et décembre dans le Survey Surfaces Agricoles (SSA) entre 2002 et 2006 ont été analysées dans ce but.

2. Matériel et méthodes

2.1. Matériel

2Le SSA est constitué d'une trentaine d'exploitations, suivies dans le cadre du PGDA, par GRENeRA (FUSAGx, devenue ULg - Gembloux Agro-Bio Tech) et l'UCL depuis 2002. Des mesures de reliquat azoté y sont régulièrement effectuées afin d'établir annuellement les références d'APL (Azote Potentiellement Lessivable). Ces exploitations sont principalement situées en zone vulnérable et ont été choisies de manière à rencontrer la diversité des cultures et élevages en région wallonne (Vandenberghe et al., 2004). Les parcelles suivies dans ces exploitations ont également été sélectionnées de manière à être représentatives des principales séries de sols en région wallonne. De plus, une taille minimale (1 ha) est fixée afin de limiter les biais liés aux zones de redoublage d'épandage (engrais minéraux, engrais de ferme).

3Dans ces exploitations, des conseils de fumure sont prodigués sur chaque parcelle suivie (une huitaine par exploitation) et le reliquat azoté est mesuré durant les premières décades d'octobre, de novembre et de décembre. Les résultats de ces mesures sont utilisés pour établir les références d'APL.

4Ainsi, entre 2002 et 2006, de 16 à 30 parcelles de froment ou d'escourgeon suivi d'une CIPAN ont fait l'objet d'un échantillonnage de sol les premières décades de novembre et de décembre. Ces résultats d'analyse sont utilisés dans cette étude afin d'évaluer si les CIPAN ont encore un effet de piégeage de l'azote au cours de la deuxième et troisième décade de novembre.

2.2. Méthodes

5Mesure du reliquat azoté. Chaque parcelle de terre arable est échantillonnée à raison de 10 prélèvements au moins. L'échantillonnage couvre de manière homogène l'entièreté de celle-ci, à l'exception des abords immédiats de son pourtour, des sites de stockage de fumier ou de toute autre portion de surface traitée de manière significativement différente du reste de la parcelle.

6Chaque prélèvement dans une parcelle de terre arable est subdivisé en trois couches (de 0 à 30 cm, de 30 à 60 cm et de 60 à 90 cm de profondeur). Ces prélèvements se font à l'aide d'une sonde dont le diamètre est tel que la masse de terre prélevée, soit au moins de 300 g par couche et par parcelle échantillonnée.

7Au moment du prélèvement, le degré de ressuyage du sol doit être suffisant pour palier au risque de souillure d'une couche par une autre (" coulage ") et pour permettre aux traitements ultérieurs de l'échantillon de se réaliser dans de bonnes conditions (tamisage, homogénéisation de l'échantillon). Ces prélèvements sont réalisés à l'aide d'une sonde tubulaire de type gouge fermée ou en demi-lune, soit d'une tarière hélicoïdale de type vrille.

8Pour chaque parcelle échantillonnée, la terre prélevée est placée dans un contenant thermiquement isolé et hermétiquement fermé. Les échantillons sont analysés par le laboratoire immédiatement après réception ou, à défaut, stockés en chambre froide à une température comprise entre 1 °C et 4 °C pendant une durée maximale de cinq jours avant analyse.

9Avant analyse, l'intégralité du contenu de chaque sachet est soigneusement homogénéisé par tamisage au travers d'un tamis de mailles de 8 mm. Si après tamisage, il subsiste un refus sur le tamis, ce refus est pesé et la charge caillouteuse en est déduite. Si la charge caillouteuse est inférieure à 10 %, les calculs sont pondérés en tenant compte de la charge mesurée. Si elle est supérieure à 10 %, la charge caillouteuse est déduite de la carte numérique des sols de Wallonie (Borgers et al., 2006).

10Immédiatement après tamisage, l'extraction de l'ion nitrate se réalise sur la matière brute non séchée d'une partie aliquote de minimum 30 g d'échantillon par solution KCl 0,1N. Le rapport d'extraction (poids de terre/volume de solution d'extraction) est de 1/5.

11Les flacons servant à l'extraction sont bouchés et soumis à l'action d'un agitateur rotatif pendant 30 min. La solution est ensuite laissée au repos pendant 30 min pour décantation. Le dosage de l'ion nitrate est effectué sur le surnageant qui, selon la méthode de dosage, est préalablement filtré ou centrifugé. Si le dosage n'est pas effectué endéans les 3 h qui suivent l'extraction, les extraits sont stockés en chambre froide, à une température maximale de 4 °C, à l'abri de la lumière pendant une durée maximale de 48 h.

12Le dosage du nitrate est effectué par le laboratoire selon une méthode standardisée telle que :

13– la méthode colorimétrique de dosage direct du nitrate par l'acide chromotropique (West et al., 1960),

14– la méthode colorimétrique de dosage direct du nitrate par la brucine (Baker, 1967),

15– la méthode titrimétrique de réduction du nitrate en ammonium par l'alliage de Devarda, après distillation et entrainement à la vapeur,

16– la méthode colorimétrique de réduction du nitrate en nitrite (à l'aide notamment de cadmium ou d'hydrazine) avec dosage de l'ion nitrite par la réaction de Griess-Ilosvay modifiée (Bremner, 1965 ; Guiot, 1975).

17Le résultat obtenu est exprimé en kg N-NO3-.ha-1 en intégrant des paramètres tels que l'épaisseur de la couche de sol, le pourcentage de matière sèche, le rapport cailloux/terre et la densité apparente à l'état sec. Pour ce faire, les valeurs standard suivantes de poids spécifique apparent sur sol sec par couche sont appliquées : 1,35 t.m-3 pour la couche supérieure (0-30 cm), 1,5 t.m-3 pour les autres couches (30-60 cm et 60-90 cm) en terre arable. Cette méthode de mesure du reliquat azoté s'appuie sur les travaux de Guiot et al. (1992) complétés en 2002 (Destain et al.), elle a été publiée dans le Moniteur belge (Moniteur belge, 2008) et est utilisée par tous les laboratoires provinciaux wallons.

18Test statistique. Les résultats des analyses (novembre et décembre) ne sont pas indépendants puisque celles-ci ont été effectuées sur les mêmes parcelles à des périodes différentes. En conséquence, ces résultats sont associés par paires et le test appliqué est basé sur le calcul de la différence entre couples d'observations (Dagnelie, 1998). Le test t par paires ou par couples concerne la même hypothèse que le test t classique :

19H: m= m2.

20Il peut être réalisé en calculant les différences :

21d1 = x11 - x21, … dn = x1n - x2n

22et la quantité

23tobs = (x1moy – x2moy|) / (SCEd/(n * (n-1)))exp 0.5,

24SCEd représentant la somme des carrés des écarts des différences di.

25L'hypothèse d'égalité des moyennes doit être rejetée, pour un test bilatéral de niveau α, quand :

26P(|t| > tobs) ≤ α.

27Les conditions d'utilisation de cette méthode sont que les couples d'observation constituent un échantillon aléatoire et simple. Vu l'effectif suffisant, la condition de normalité de la population des différences n'a pas été testée.

3. Résultats

28L'observation des paires de mesures effectuées en 2002 indique une diminution du reliquat azoté entre la première décade de novembre et la première décade de décembre (Figure 1).

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29Cette diminution moyenne du reliquat azoté dans le sol est de l'ordre de 8 kg N-NO3-.ha-1 (Tableau 1).

Image2

30Le test statistique réalisé indique que la probabilité P(|t| > tobs) est égale à 0,033. La différence de résultats entre les deux périodes d'observations est donc significative. Un test similaire a été réalisé sur les résultats enregistrés au cours de ces deux périodes de mesures dans la couche 60-90 cm pour constater un éventuel enrichissement en azote nitrique de cette couche, synonyme de lixiviation du nitrate. L'observation des résultats indique une diminution du reliquat azoté (-3 kg N-NO3-.ha-1) dans cette couche entre novembre et décembre. Le test réalisé n'indique pas de différence significative entre les deux séries d'observations. La CIPAN a donc eu un effet de piégeage d'azote au cours des deuxième et troisième décades de novembre.

31Les observations réalisées au cours des années 2003 à 2006 (Figure 2 à Figure 5 et Tableau 2 à Tableau 5) confirment et complètent ces conclusions : plus le reliquat azoté mesuré en novembre est élevé, plus la diminution (différence entre la mesure de novembre et de décembre) du reliquat azoté est importante.

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4. Discussion et conclusion

32De 2002 à 2006, le reliquat azoté a été suivi chaque année dans plus d'une quinzaine de parcelles de froment ou d'escourgeon suivi d'une CIPAN. Ces parcelles faisaient partie du SSA et ont donc fait l'objet de conseils de fumure et d'un suivi de reliquat azoté, entre autres, les premières décades de novembre et de décembre. L'observation des résultats indique une diminution significative à très hautement significative du reliquat azoté dans le sol (0-90 cm) au cours de cette période de 8 kg N-NO3-.ha-1 (année 2002) à 17 kg N-NO3-.ha-1 (année 2006). La diminution est d'autant plus importante que le reliquat azoté en novembre est élevé (année 2006). Cet effet bénéfique sur le reliquat azoté en début de période de lixiviation est également amplifié par un retard du processus de décomposition de la biomasse enfouie ainsi que par une minéralisation ralentie due à l'augmentation du rapport C/N de la matière enfouie (lignification dans le cas de la moutarde). Néanmoins, il faut signaler deux effets négatifs. Premièrement, un labour d'hiver effectué après le 1er décembre peut, lors de conditions climatiques humides en novembre, être de moins bonne qualité pour la structure du sol, voire être rendu impossible dans le cas de sols hydromorphes ou argileux. Deuxièmement, une CIPAN telle que la moutarde, si elle est semée dans de bonnes conditions et/ou de manière précoce (aout) peut atteindre le stade de production de graines en décembre. Dans ce cas, sa capacité de prélèvement de nitrate peut être réduite et l'enfouissement serait également synonyme de semis, ce qui obligerait occasionnellement un traitement herbicide spécifique.

33Le choix d'une date d'enfouissement est donc un compromis entre la raison " environnementale " et la raison " agronomique ". Les observations réalisées entre 2002 et 2006 ont montré une variabilité interannuelle importante du reliquat azoté en novembre (de 37 à 62 kg N-NO3-.ha-1). Vu cette variabilité, la date d'enfouissement des CIPAN pourrait être chaque année fonction du reliquat azoté mesuré début novembre. Par exemple, si le reliquat est inférieur à 40 kg N-NO3-.ha-1, l'enfouissement pourrait être réalisé à partir du 15 novembre. Dans le cas contraire, l'enfouissement serait maintenu au 1er décembre pour permettre une réduction supplémentaire de 10 à 15 kg N-NO3-.ha-1 dans le sol.

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Para citar este artículo

Christophe Vandenberghe, Richard Lambert & Jean Marie Marcoen, «Evaluation de l'efficacité des cultures intermédiaires pièges à nitrate (CIPAN) en novembre», BASE [En ligne], Numéro spécial 1, Volume 14 (2010), 97-101 URL : https://popups.uliege.be/1780-4507/index.php?id=4936.

Acerca de: Christophe Vandenberghe

Univ. Liège - Gembloux Agro-Bio Tech. Laboratoire de Géopédologie. GRENeRA. Passage des Déportés, 2. B-5030 Gembloux (Belgique). E-mail : c.vandenberghe@ulg.ac.be

Acerca de: Richard Lambert

Université catholique de Louvain. Département de Biologie appliquée et des Productions agricoles. Place Croix du Sud, 2/24. B-1348 Louvain-la-Neuve (Belgique).

Acerca de: Jean Marie Marcoen

Univ. Liège - Gembloux Agro-Bio Tech. Laboratoire de Géopédologie. GRENeRA. Passage des Déportés, 2. B-5030 Gembloux (Belgique).