Bulletin de la Société Royale des Sciences de Liège Bulletin de la Société Royale des Sciences de Liège -  Volume 80 - Année 2011 

Le mot du Secrétaire général
From the Secretary General’s desk, Das Wort des Generalsekretärs

Jacques Aghion

Société Royale des Sciences de Liège, Institut de Mathématique de l'Université de Liège, Bât. B37, Grande Traverse, 12, B-4000 Liège 1, Belgique, Tél : +32-4-3669371 - Fax : +32-4-3669547, jaghion@ulg.ac.be

1Le mot du Secrétaire général

2Dans le Bulletin du Cnrs, en 1980, sous la plume de Claude Guillemin (un minéralogiste) on pouvait lire que « l’espèce humaine saura […] faire sa seule mutation importante, celle de ses valeurs morales. Peut-être faut-il […] se tourner vers les ‘scientifiques’ qui, s’ils sont ‘par-delà le bien et le mal’ [sont] seuls capables de mettre de l’ordre dans ce qu’ils ont créé et créent chaque jour ». Un peu moins de 2.000 ans avant lui, Sextus Empiricus écrivait que « la science appartient au sage ».

3La Société royale des sciences de Liège a pour objet l’avancement et la promotion des sciences (article premier de ses statuts) et, dans ce but, elle publie – sur la toile maintenant, www.srsl-ulg.net – un recueil d’articles originaux toujours examinés par des pairs, et des textes de conférenciers invités (article 18).

4Or il est hélas patent qu’un nombre croissant de services publics de recherches, dans les universités ou dans les Instituts de recherches, sont incapables de survivre sans l’aide d’institutions dont le but n’est certes ni le mécénat désintéressé ni l’élargissement intellectuel mais bien plutôt la satisfaction de l’intérêt monétaire de leurs actionnaires. La Société, faut-il insister sur ce point, n’a ni fonds suffisants ni actionnaires bien évidemment. Est-ce par (un malencontreux) hasard qu’un nombre croissant de compagnies industrielles sont prises la main dans le sac des intérêts contradictoires donc souvent conflictuels entre services publics et intérêts financiers (voir par exemple Cohen & Carter, 2010, dans le British Medical Journal, vol 340, p. 1274 seq.). Les services au public, du ressort des hautes sphères politiques, sont trop souvent cachés derrière la notion de concurrence que l’on voudrait prétendre « libre et non faussée » (un leurre, à en croire Sapir, 2006, La fin de l’eurolibéralisme, le Seuil, Paris). Ces dirigeants ont-ils (comme elles) ainsi abandonné toute indépendance intellectuelle face à la finance que l’industrie manipule plus facilement ?

5Mais quels sont les chercheurs – quelle que soit la « dureté » de leur discipline – qui ne soient toujours en concurrence ?  Ce fut un facteur d’avancement des connaissances jusqu’à ce que les brevets et autres considérations purement financières prennent le dessus. C’est alors que plusieurs recherches ont été bridées, plusieurs publications interdites, c’est alors que la concurrence a été vraiment faussée, donc l’avancement des connaissances ralenti sinon compromis. Et cependant maint baron d’industrie a écrit que c’est de la recherche désintéressée que sont nées les nouveautés.

6En 1973, Lyall Watson (un botaniste sud-africain) écrivait « Même la physique, une discipline longtemps considérée indiscutable, a dû se soumettre à l’indignité du principe d’incertitude […] et la traditionnelle différence entre naturel et surnaturel a perdu de son sens » (Supernature, a natural history of the supernatural, Holder & Sloughton, London). Faut-il voir dans cette considération un encouragement aux astrologues, extra-lucides et autres charlatans dont Voltaire a écrit qu’ils sont nés le jour où le premier fripon a rencontré le premier imbécile ? Ne pouvons-nous y voir (aussi ?) un encouragement en direction de plusieurs bailleurs de fonds publics, à franchir un Rubicon anti-scientifique ?

7Quos vult Jupiter perdere, dementat prius selon Euripide (repris en latin par Boissonade). Jupiter œuvre-t-il à nous détruire tous ensemble ? Nous rend-il fous ?

8Comme tous les ans, la Société a organisé et organisera des conférences « normales » en invitant des collègues étrangers ainsi que des « mini-conférences » d’une demi-heure environ par des collègues belges et, le plus souvent, liégeois. En outre elle a organisé un colloque sur l’Eau avec des exposés d’astrophysique, de biologie, de chimie, d’écologie au sens large et de politique. Les textes de quatre de ces cinq exposés sont publiés dans le Bulletin sur la toile.

9La Société est heureuse de remercier une fois de plus l’Université de Liège, la Région wallonne et l’Ambassade de France en Belgique pour l’aider à organiser ce colloque. Cette année, la Compagnie Intercommunale Liégeoise des Eaux a participé à cette aide.

10Un (relativement) petit nombre de publications étrangères que nous recevions en échange arrêtent leurs relations avec la Société depuis la publication de notre Bulletin sur la toile.

11Durant l’année 2010, nous avons eu à regretter la disparition de quelques collègues, Evry Schatzmann (Astrophysique, Paris), Jules Gobert et Alphonse Lavis, tous deux mathématiciens liégeois.

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13From the Secretary General’s desk

14In 1980, the French mineralogist C. Guillemin wrote in the Bulletin du CNRS that “the human species will be able to undergo an important mutation, the change of its moral values. To achieve it, perhaps is it worth involving the ‘scientists’ because, being beyond “good and bad”, they are the only ones able to set in order whatever they created and keep creating every day”. Less than 2,000 years before him, Sextus Empiricus wrote that “science belongs to the wise”.

15The Royal Science Society of Liège aims to promote the sciences (article 1 of its charter) by publishing (on the web now, www.srsl-ulg.net) brochures with original scientific papers, all of them peer-reviewed, as well as invited lectures (article 18).

16However, it is unfortunately clear that growing numbers of public research groups, in Universities or in Research Institutes, cannot afford to live without the help of concerns whose aims are neither disinterested patronage nor the advancement of knowledge, but the monetary satisfaction of their shareholders. Is it necessary to mention that our scientific Society is not rich and has, of course, no shareholders? Is it a really untoward chance that so many industries are caught between contradictory (therefore clashing) interests between public services and particular benefits (see for instance Cohen & Carter 2010, British Medical Journal, vol. 340, p. 1274 seq.)? Public service should be our high-level politicians’ responsibility, but they hide too often behind the idea of competition, supposedly “free and not adulterated” (a delusion or a hoax, according to Sapir 2006, La fin de l’eurolibéralisme, Le Seuil, Paris). Those politicians seem to have given up all intellectual independence, face to finance, much more cleverly manipulated by bankers and industrialists.

17But where are the researchers – however “hard” their scientific field – who don’t compete with one another all their lives? Competition was – and is – an important advancement parameter for knowledge, at least until patents and other purely financial considerations overcame it. It is then that several research initiatives were inhibited, publication of several results forbidden. Competition was really perverted and the advancement of science was at least slowed down. And this, notwithstanding the fact that several industry financial tycoons wrote more than once that industrial innovation breeds on fundamental research.

18In 1973, according to the South African botanist Lyall Watson (Supernature, a natural history of the supernatural, Holder & Sloughton, London) “even the discipline of physics whose laws once went unchallenged, has had to submit to the indignity of the Uncertainty Principle […]. The old distinction between natural and supernatural has become meaningless”. Is this meant to encourage astrologists, prophets and other charlatans whose existence began – according to Voltaire – when the first rogue met the first imbecile? Are we meant, in addition, to read this as encouraging several public fund- providers to jump an anti-scientific Rubicon?

19Quos vult Jupiter perdere, dementat prius, according to Euripides (Latinized by Boissonade). Does Jove, indeed want to make us all crazy in order to destroy us?

20Every year, our Society organizes “normal” lectures by prestigious foreign colleagues as well as half-hour “mini-lectures” by Belgian (most often Liège) lecturers. In addition, like every year, in 2010 it organized a one-day colloquium about water, with lectures in astrophysics, in biology, in chemistry, in ecology (sensu lato) and in politics. Four of those five lectures are printed in our Bulletin, on the web.

21The Society is pleased to thank once again the University of Liège, the Walloon Region and the French Embassy in Belgium for help in organizing this scientific event. This year, the C.I.L.E. participated too. Exchanges with a rather small number of foreign publications were put to an end after we stopped publishing on paper, in 2006.

22Obituary: in 2010 we had to mourn the disappearance of Evry Shatzman (Astrophysics, Paris), of Alphonse Lavis and Jules Gobert, both Liège mathematicians.

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24Das Wort des Generalsekretärs.

25Im Jahresbulletin des CNRS von 1980 schrieb Claude Guillemin, ein Mineraloge,  dass „die Menschheit … ihre einzig wichtige Veränderung, nämlich die ihrer moralischen Werte, selbst vornehmen wird. Vielleicht sollte man sich an die Wissenschaftler wenden, die, über Gut und Böse stehend, als Einzige fähig sind Ordnung zu bringen in ihre vergangenen wie aktuellen Schöpfungen.“ Etwa 2000 Jahre vor ihm drückte es SEXTUS EMPIRIUCUS etwa so aus: „Die Wissenschaft  gehört dem Weisen.“ Die Société Royale des Sciences von Lüttich hat sich die Weiterentwicklung und die Förderung der Wissenschaft zum Ziel gesetzt, (wie es der erste Artikel der Statuten vorsieht.) Zu diesem Zweck werden, neuerdings auch im Internet unter srls-ulg.net, Originalartikel sowie Texte von Gastsprechern veröffentlicht (Art. 18)

26Immer zahlreichere öffentliche Dienste, wie Universitäten oder Forschungsinstitute, kommen nicht mehr aus ohne die Hilfe von Institutionen, deren Interesse sich jedoch keineswegs auf philanthropische Gründe stützt, und die sich nicht um der Sache willen zur Unterstützung entschließen, sondern schlicht aus finanziellem Interesse ihrer Aktionäre.

27Ich möchte daran erinnern, wenn es denn nötig ist, dass unsere Société des Sciences, weder über genügend finanzielle Mittel, noch über Aktionäre verfügt. Das Beispiel von COHEN & CARTER, (British Medical Journal, Bd 340, S 1274 Seq) bestätigt leider, dass immer wieder Firmen in die Zwickmühle der gegensätzlichen Interessen geraten und Konflikte entstehen zwischen öffentlichem und finanziellem Interesse.

28Der Dienst an die Öffentlichkeit, der der Politik untersteht tritt leider oft hinter der Konkurrenz zurück die man sich frei und unverfälscht wünschen würde. Doch welche Forscher, gleich welcher Disziplin, sind der gegenseitigen Konkurrenz nicht ausgesetzt? Bisher war Wettbewerb ein Fortschrittsgarant … bis Patente und ausschließlich finanzielle Überlegungen Überhand nahmen. Spätestens ab diesem Zeitpunkt wurde Forschern Steine in den Weg gelegt, Veröffentlichungen untersagt und somit die Erweiterung der Erkenntnisse verlangsamt oder ganz in Frage gestellt. Und das, obwohl mancher Industriebaron schrieb, „Neuheiten entstünden aus unabhängigem Forschen...“

291973 schrieb Lyall Watson, ein südafrikanischer Botaniker, dass „selbst die Physik, deren Gesetze einst als unangefochten galten, sich der Schmach eines Unsicherheitsprinzips beugen musste […] und die alte Unterscheidung zwischen natürlich und übernatürlich jede Bedeutung verloren hat. „ (Supernature, a natural history of the supernatural, Holder & Sloughton, London)

30Muss man in dieser Aussage eine Ermutigung sehen für Astrologen, Hellseher und andere Charlatane von denen Voltaire sagte „… der erste Prophet war der erste Schurke, der einem Dummkopf begegnete…“

31Quos vult Jupiter perdere, dementat prius (nach Euripidus, lateinisch von Boissonade) Will Jupiter uns alle vernichten? Macht er uns verrückt?

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33Wie jedes Jahr organisiert die Société „normale“ Konferenzen mit ausländischen Kollegen, sowie halbstündige „Mini-Konferenzen“ von belgischen, und vorwiegend Lütticher Kollegen. Außerdem wurde ein Symposium abgehalten zum Thema „Wasser“ mit Vorträgen über Astrophysik, Biologie, Chemie, Ökologie und Politik…

34Die Texte von vier dieser fünf Vorträge stehen im Internet zur Verfügung.

35Ein herzliches „Dankeschön“ für die Unterstützung bei der Organisation dieses Symposiums an die Universität Lüttich, an die Wallonische Region, an die französische Botschaft in Belgien, in diesem Jahr erstmalig, an die Société Liégeoise des Eaux. Eine –relativ- kleine Zahl der ausländischen Veröffentlichungen die wie auf Austauschbasis erhielten erreichen uns nicht mehr, seit unser Bulletin im Internet veröffentlicht wird.

36Zuletzt möchte ich unserem Kollegen, dem Astrophysiker Evry Schatzmann aus Paris, und  Jules Gobert und Alphonse Lavis, beide Mathematiker hier aus Lüttich gedenken, die uns in diesem Jahr verlassen haben.

To cite this article

Jacques Aghion, «Le mot du Secrétaire général», Bulletin de la Société Royale des Sciences de Liège [En ligne], Volume 80 - Année 2011, 1 – 3 URL : https://popups.uliege.be/0037-9565/index.php?id=2440.