- Portada
- Vol. 43 - 2021
- La prescription acquisitive de la qualité d’héritier sous le Code Napoléon
Vista(s): 2557 (11 ULiège)
Descargar(s): 0 (0 ULiège)
La prescription acquisitive de la qualité d’héritier sous le Code Napoléon
Résumé
Normalement, on devient héritier par l’opération de la loi ou du testament. Mais que se passe-t-il quand une personne prend possession d’une succession à laquelle elle n’a pas de vocation successorale en rang utile ? La doctrine belge écrit que dans ces cas, la prescription acquisitive a vocation de s’appliquer. Le possesseur de la succession deviendra ainsi véritablement héritier par la possession utile pendant le délai légal (qui est de 30 ans). Or sauf une exception remarquable, toute la jurisprudence qui reconnaît la prescription acquisitive de la qualité d’héritier date du 19e siècle. La présente contribution vise donc à analyser la prescription acquisitive de la qualité d’héritier sous le Code Napoléon : son existence, les tendances de la jurisprudence et les raisons de sa décadence.
Abstract
Normally, one becomes an heir by law or through a last will and testament. But what happens if someone takes possession of an estate, without being an heir? Following the Belgian legal authors, this possessor may become an heir through acquisitive prescription (adverse possession). To become an heir, the possessor must possess the estate in a proper way, during the legal time (which is 30 years). But with one exception, all case law on the matter dates from the 19th century. This article therefore will analyse the acquisitive prescription of an heirship under Napoleonic law: does it exist? What tendencies can be seen in the case law? Why has this form of acquisitive prescription nearly completely disappeared from legal practice?
Tabla de contenidos
Introduction
1 1. Le problème étudié. En ancien droit (le droit qui précède le droit de la Révolution française), il était souvent difficile de savoir si une personne était bel et bien un héritier en rang utile. Les défauts de l’état civil, les guerres et les voyages lointains semaient l’incertitude. La pratique de l’ancien droit avait cherché à y remédier par la prescription acquisitive (ou l’usucapion) de la qualité d’héritier. La personne qui avait pris possession de l’héritage à titre d’héritier, mais sans droit pouvait alors acquérir la qualité d’héritier (en rang utile) par sa possession de longue durée. Il s’agissait donc d’une prescription acquisitive. Cette prescription acquisitive est remarquable, car elle a pour objet une qualité, celle d’héritier, et non pas un droit réel.
2 La prescription acquisitive de la qualité d’héritier a survécu jusqu’aujourd’hui dans les manuels de droit (du moins belges), mais elle ne se rencontre pratiquement qu’en la jurisprudence du 19e siècle. De plus, cette jurisprudence a tendance à concerner des successions ouvertes avant l’entrée en vigueur du Code Napoléon. Cette contribution esquissera le débat sur la nature, les conditions et les effets de la prescription acquisitive de la qualité d’héritier, dégagera les tendances de la jurisprudence et recherchera les causes de la décadence de cette prescription acquisitive insolite.
3 2. Parties à la prescription (acquisitive ou extinctive). Nous nommons « prescriptionnaire » celui qui est avantagé par la prescription (donc dans notre cas l’héritier apparent), et « prescrit » celui qui perd son droit en vertu de la prescription (c’est-à-dire le véritable héritier)1.
Le débat sur la prescription acquisitive de la qualité d’héritier
4 3. La pétition d’hérédité. La qualité d’héritier emporte, tout comme la qualité de propriétaire ou plus généralement la qualité de titulaire d’un droit subjectif, une action tendant à la protection et à la reconnaissance de cette qualité. Le droit de propriété est protégé par la revendication ou plus généralement par les actions pétitoires2. La qualité d’héritier est protégée par la pétition d’hérédité (on utilise aussi parfois l’expression latine petitio hereditatis). La pétition d’hérédité peut se prescrire, en partie en raison de la prescription extinctive du droit d’option de l’héritier (qui peut accepter ou répudier la succession) (art. 789 C.Nap.)3. Toutefois, la prescription de l’article 789 C.Nap. n’est pas celle qui se dirige à l’encontre de la pétition d’hérédité4, même si elle mène au même résultat, à savoir la perte de la qualité d’héritier5.
5 4. La prescription de la pétition d’hérédité. Il faut alors se pencher sur la nature de la prescription de la pétition d’hérédité. Une partie de la doctrine et de la jurisprudence – dominante en France, mais pas en Belgique – estime qu’il s’agit d’une prescription extinctive6. La doctrine belge, soutenue par une partie importante de la jurisprudence belge (voy. les nos 26-28), qualifie cette prescription d’acquisitive : la pétition d’hérédité disparaît parce que le possesseur de la succession acquiert la qualité d’héritier7. Une certaine jurisprudence confirme que les universalités de biens sont aptes à être possédées (voy. le no 9), ce qui est une étape essentielle pour la prescription acquisitive. Elle a failli être approuvée par le législateur belge, car l’avant-projet de Code civil de J. Van Biervliet reconnaissait dans son article 163 explicitement que la prescription dirigée contre la pétition d’hérédité est une prescription acquisitive8.
6 Il faut bien mentionner que souvent on ne fait pas de distinction claire entre la prescription du droit d’option de l’héritier (art. 789 C.Nap.) et la prescription dirigée contre la pétition d’hérédité9. Cela complique l’analyse.
7 5. La pétition d’hérédité est une action pétitoire (« eigendomsvordering »). Un argument important en faveur de la prescription acquisitive est que la pétition d’hérédité est une action pétitoire10. Elle est intentée par l’héritier en vue de faire reconnaître sa qualité d’héritier, ce qui implique que son droit de propriété (ou autre droit réel, le cas échéant) sur les biens héréditaires sera alors reconnu. Le caractère réel (et non pas personnel) de la pétition d’hérédité plaide en faveur de cette interprétation (voy. le no 14).
8L’analyse précédente est combattue en raison du fait que la pétition d’hérédité est une « action en déclaration de qualité », laquelle serait une catégorie d’actions qui sont toujours personnelles11. On ne peut guère admettre cette objection. La revendication, une action réelle par excellence, est également en partie une action en déclaration de qualité12.
9 6. Effets de la qualification comme action pétitoire. Les actions pétitoires sont imprescriptibles en ce qui concerne la prescription extinctive (ou du moins ne peuvent pas s’éteindre avant le droit qu’elles protègent, quand ce droit peut se prescrire)13. Il n’y a que la prescription acquisitive (et des prescriptions qui créent une présomption ou un autre moyen de preuve) qui peut leur être opposée. Étant donné que la pétition d’hérédité est une action pétitoire, la prescription qui court contre elle doit être acquisitive.
10 7. Le législateur. L’article 137 C.Nap.14 énonçait que « Les dispositions […] auront lieu sans préjudice des actions en pétition d’hérédité et d’autres droits, lesquels compèteront à l’absent ou à ses représentants ou ayants-cause, et ne s’éteindront que par le laps de temps établi pour la prescription. » Il suggère que la pétition d’hérédité s’éteint par la prescription extinctive.
11Il faut toutefois tenir compte du contexte de l’article 137, qui règle les droits d’un absent. Le régime de l’absence du Code Napoléon octroyait les biens de l’absent à des envoyés en possession (provisoires ou définitifs), qui étaient davantage des détenteurs que des possesseurs ad usucapionem15. L’article 125 C.Nap. ne définissait l’envoi en possession provisoire « que » comme « un dépôt », de sorte que les envoyés en possession provisoires n’étaient que des détenteurs16. L’article 132 C.Nap. décrétait que l’absent qui revenait ou dont l’existence était prouvée recouvrait ses biens ou les biens qui y étaient réellement subrogés. On se rappelle que le détenteur ne peut pas acquérir par prescription le bien détenu (art. 2236 C.Nap.). Une prescription acquisitive en faveur des envoyés en possession n’est donc point logique, contrairement à une prescription extinctive. Même si l’on considère que l’envoi en possession définitif constitue une acquisition17 sous condition résolutoire de retour de l’absent (l’absent qui retourne récupère ses biens), on doit encore constater que les droits personnels qui découlent de cette condition ne sont pas atteints par la prescription acquisitive, qui est uniquement un mode d’acquérir18.
Les conditions de la prescription acquisitive de la qualité d’héritier
12 8. Introduction. La prescription acquisitive nécessite, en règle générale, que les conditions suivantes soient remplies : il faut 1° une possession, 2° qui est non viciée et 3° qui dure pendant le temps exigé par le droit, 4° qui porte sur un bien ou autre objet apte à la prescription acquisitive et 5° qui est exercée à un titre apte à la prescription acquisitive19.
La possession
13 9. La possibilité contestée, mais à admettre. On conteste parfois que des universalités juridiques telles que l’hérédité sont aptes à être possédées, ce qui exclut naturellement la prescription acquisitive20. Cette opinion ne tient pas compte du fait qu’on peut facilement conceptualiser la possession de l’hérédité : on possède au moins une partie des biens de l’hérédité, et on s’arroge la qualité d’héritier par une acceptation explicite, en payant les droits de succession, en se déclarant propriétaire par succession héréditaire dans des actes de vente ou d’autres actes…21 Ajoutons-y que la pétition d’hérédité doit s’exercer contre le possesseur de l’hérédité, ce qu’écrivent même certains auteurs qui nient la possibilité de posséder des universalités de droit22, et que la jurisprudence a admis la possession des universalités23.
14On peut également noter que certaines législations admettent ou ont admis la possession d’universalités. L’article 1160 du Code civil italien, par exemple, admet la prescription acquisitive des universalités de biens meubles. Les actions possessoires offrent un exemple historique : on admettait que les universalités de biens meubles (généralement des successions) pouvaient être protégées par des actions possessoires24.
15Il faut donc nuancer, voire même rejeter l’opinion25 que les universalités ne sont pas capables d’être possédées.
16 10. La possession doit être à titre d’héritier et réelle. La possession doit être à titre d’héritier26. Elle doit porter sur l’universalité de droit qu’est l’hérédité, et non pas sur les biens individuels. Il ne suffit donc pas que le prescriptionnaire possède quelques biens ou même tous les biens qui font partie de la succession. En effet, il se peut que tous les biens d’une succession très petite soient emportés par des personnes qui ne sont pas des héritiers et qui ne possèdent pas à titre d’héritier. Il n’est alors pas possible de faire de ces personnes des héritiers par la prescription acquisitive, même si elles peuvent acquérir les biens individuels par la prescription.
17La jurisprudence met en exergue que la possession de l’hérédité doit passer par la possession de biens qui font partie de l’hérédité27. Il ne suffit pas de s’arroger le titre d’héritier, même si des intéressés le reconnaissent. On voit toutefois que le fait d’intenter l’action en pétition d’hérédité est assimilé à la prise de possession réelle28.
L’objet apte à la prescription acquisitive
18 11. La qualité d’héritier octroyée seulement par la loi ? La qualité d’héritier est octroyée par la loi et donc impossible à acquérir par prescription, selon un auteur29. L’article 723 C.Nap. le confirme, car il dit que la loi détermine l’ordre de la succession héréditaire. Si la prescription acquisitive était d’origine coutumière et non pas légale, on pourrait être séduit par l’analyse. Or la prescription acquisitive a une base tout aussi légale : les articles 712 et 2219 C.Nap. L’article 2219 C.Nap. est, en plus, suffisamment large pour admettre la prescription acquisitive d’une qualité, telle que la qualité d’héritier. L’article 816 C.Nap. confirme d’ailleurs que la prescription acquisitive peut faire obstacle à l’action en partage intentée par un héritier30.
19 12. La loi admet la cession et la transmission du droit héréditaire. L’article 780 C.Nap. décrète que « la donation, vente ou [le] transport que fait de ses droits successifs un des cohéritiers, soit à un étranger, soit à tous ses cohéritiers, soit à quelques uns d’eux, emporte de sa part acceptation de la succession ». Il s’ensuit que la qualité d’héritier est dans le commerce. La doctrine suit cette analyse, car elle voit dans la cession de la part héréditaire une institution d’héritier en faveur du cessionnaire, qui devient véritablement héritier31. Si le cessionnaire n’avait qu’acquis les biens individuels, il ne serait que successeur à titre particulier. La loi accepte également que la qualité d’héritier se transmette par succession héréditaire, ainsi que le démontre l’article 781 C.Nap. Il édicte que les héritiers d’un héritier qui n’avait pas encore accepté l’hérédité peuvent accepter « de son chef » l’hérédité.
20Logiquement, la possibilité de la cession et de la transmission de la qualité d’héritier entraîne la possibilité de la prescription acquisitive de la qualité d’héritier, car la prescription acquisitive est un mode d’acquisition de droit commun32.
Le titre apte à la prescription acquisitive
21 13. Introduction. La prescription acquisitive est, en principe, restreinte aux droits réels en droit actuel33. Il y a donc lieu d’analyser la question de savoir si la qualité d’héritier crée un droit réel sui generis sur les biens de l’hérédité, ou s’il s’agit d’un autre type de droit subjectif.
22 14. Une tendance traditionnelle en faveur du droit réel. La pétition d’hérédité est généralement qualifiée comme une action réelle34. Déjà le droit romain qualifiait la petitio hereditatis comme actio in rem, à côté de la rei vindicatio, l’actio confessoria, l’actio publiciana, la vectigalis actio et l’actio serviana35. Des actiones in rem furent plus tard déduits les droits réels : le droit de propriété fut déduit de la rei vindicatio, l’actio confessoria était la source des servitudes personnelles (tel que l’usufruit) et réelles36. A-t-on également déduit de la petitio hereditatis un droit réel sous-jacent ? Il semble que oui, quand on lit quelques codes civils anciens. L’article 627 du Code civil du Royaume des Belgiques de 183037 énonce qu’on peut avoir un « regt van erfgenaamschap » ou « droit d’hérédité » sur les biens, ce qui a été critiqué par la doctrine38. Le § 308 de l’ABGB énonce la même chose (un des dingliche Sachenrechte est le « Recht des Erbrechtes »), bien que la doctrine autrichienne semble réticente à accepter la prescription acquisitive de la qualité d’héritier39.
23 15. La position du Code Napoléon. Le Code Napoléon est bien plus réticent. Son article 543 ne mentionne pas le « droit d’hérédité » comme droit réel, mais on pourrait encore dire que cet article est incomplet et ne fait qu’introduire le livre II ; le droit des successions fait partie du livre III. Le Wetboek Napoleon ingerigt voor het Koningrijk Holland (Code Napoléon pour le Royaume de Hollande) suit sur ce point le Code Napoléon (voy. l’art. 438). On voit bien occasionnellement des auteurs qui estiment qu’il existe un droit réel d’hérédité40. Ils se voyaient soutenus par le rapport de Chabot au Tribunat, dans lequel ce dernier qualifiait la saisine de droit réel41. La doctrine actuelle ne s’intéresse pas à la question42, mais on ne voit jamais apparaître la qualité d’héritier dans les listes des droits réels. En outre, la pétition d’hérédité est analysée comme une action qui protège le droit de propriété (certes acquis – en règle générale – par la succession héréditaire), de telle sorte qu’un droit réel à part entière est superflu43.
24Ces arguments ne sont pas nécessairement décisifs, mais la qualification de droit réel n’est même pas utile pour comprendre les règles du droit des successions. L’acceptation de l’hérédité rend l’héritier propriétaire et vide donc de son sens un droit réel d’hérédité. Avant l’acceptation, il y a la saisine héréditaire, mais l’article 724 du Code Napoléon indique qu’il a plutôt trait à la possession (et cette notion est comprise de façon spéciale). En tout cas, il est difficile d’imaginer qu’on puisse avoir la possession d’une hérédité pendant 30 ans sans l’accepter.
25 16. Être héritier est une qualité. On peut donc conclure qu’être héritier est une qualité de la personne, qui lui octroie certains droits et lui impose certaines obligations44. Elle rend l’héritier propriétaire et possesseur des biens héréditaires de la même façon que le fut le défunt.
Le délai de possession
26 17. Délai de droit commun. Le possesseur à titre d’héritier ne peut pas invoquer la prescription acquisitive abrégée de l’article 2265 C.Nap.45. C’est assez logique, car la prescription acquisitive abrégée vise à réparer les défauts dans le pouvoir de disposition du cédant – or il est difficile de ne pas avoir ce pouvoir de disposition, certainement quant à son propre patrimoine46. Il ne peut pas non plus invoquer l’acquisition instantanée de l’article 2279 C.Nap. (pour la même raison que celle avancée pour l’art. 2265 C.Nap.)47, bien que rien ne s’oppose à ce qu’il invoque la présomption de propriété que contient cet article. Il s’ensuit que le possesseur à titre d’héritier doit posséder pendant le délai trentenaire de l’article 2262 C.Nap., qui est le délai de droit commun.
Les effets de la prescription acquisitive de la qualité d’héritier
Acquisition de la qualité d’héritier
27 18. La qualité d’héritier. Le possesseur à titre d’héritier acquiert définitivement (sous réserve d’une renonciation à la prescription acquisitive) la qualité d’héritier48. Il importe de préciser cela, car il y a plusieurs formes d’héritier au sens large. La forme acquise dépend du titre apparent. La possession en vertu d’un testament (ou autre contrat, tel qu’un contrat de mariage) qui institue le possesseur en légataire universel (il acquiert l’entièreté de la succession, sous réserve de legs particuliers), fait acquérir la qualité de légataire universel ; si le testament se limite à instituer le possesseur en légataire à titre universel (il n’acquiert donc qu’une quote-part de l’hérédité), il devient légataire à titre universel. L’usurpateur sans titre acquiert la qualité d’héritier légal en rang utile. Si l’État s’est mis en possession en vertu de son droit de successeur irrégulier (art. 768 C.Nap.), il devient successeur irrégulier.
28 19. Effets concrets. La succession héréditaire est un mode d’acquérir à titre universel. Il s’ensuit que le prescriptionnaire reprend à son compte l’éventuelle bonne ou mauvaise foi du défunt et également sa qualité de détenteur (art. 2237 C.Nap.), ce qui peut être un obstacle à la prescription acquisitive. Le prescriptionnaire est alors également tenu des obligations personnelles du défunt.
Un droit réel sur une universalité de droit
Règle générale
29 20. Une universalité de droit. La qualité d’héritier implique, sur le plan du droit des biens, qu’on devient propriétaire (unique ou indivis, selon le nombre d’héritiers ; notons que l’acquisition d’un droit réel limité – spécialement l’usufruit – est également possible) de l’universalité de droit qu’est l’hérédité. C’est pourquoi on écrit souvent que la pétition d’hérédité est une action en vertu d’un titre universel, d’où il suit qu’il ne faut pas énumérer spécialement dans la citation en justice tous les biens qui appartiennent à l’hérédité49. La revendication, par contre, doit toujours porter sur un bien spécifique.
Détermination de la part héréditaire acquise
30 21. L’entièreté de l’hérédité ? Une partie de la doctrine (soutenue par une partie de la jurisprudence) écrit que la prescription acquisitive de la qualité d’héritier s’étend à toute l’universalité juridique, y compris aux biens non possédés50. C’est étonnant, du moins à première vue, car les effets de la possession ne sont pas élargis au-delà des biens et des droits possédés (tantum praescriptum, quantum possessum)51. On le voit confirmé pour la prescription acquisitive de la qualité d’héritier52. Rappelons toutefois que la possession peut être en partie potentielle : on n’exige par exemple pas qu’un possesseur d’un immeuble ait parcouru chaque mètre carré pour l’acquérir par prescription53. Le fait qu’il s’agit d’une universalité juridique – et que c’est cette universalité juridique qui est l’objet de la possession – implique qu’on peut donc bien accepter que des biens non possédés soient acquis, sous réserve de la prescription en faveur d’un tiers.
31On peut donc sans problème accepter que le prescriptionnaire qui agit comme héritier unique acquiert l’entièreté de l’hérédité.
32 22. Le cas où il y a plusieurs héritiers. Il faut une autre analyse quand plusieurs héritiers sont en jeu. En principe, les héritiers ont une part héréditaire égale (art. 745 C.Nap.). L’héritier prescriptionnaire acquiert donc une part proportionnelle dans l’hérédité, selon le nombre d’héritiers. Il faut bien noter que l’analyse suppose que les autres héritiers aient également pris possession de l’hérédité ; autrement, la prescription acquisitive pourrait les exclure.
La prescription acquisitive des biens individuels appartenant à l’hérédité
33 23. Le problème. Il y a deux prescriptions acquisitives qui courent en même temps en ce qui concerne l’hérédité et son contenu. Il y a premièrement la prescription acquisitive de l’hérédité comme universalité de droit, et deuxièmement la prescription acquisitive des biens individuels. On peut alors s’interroger sur l’influence de ces prescriptions acquisitives.
34 24. La prolongation de la prescription acquisitive des biens individuels. Le droit belge ne connaît pas de règle explicite sur l’exclusion de la prescription acquisitive des biens individuels par le prescriptionnaire de l’hérédité. En droit comparé, on voit que c’est bien le cas. Le droit néerlandais et le droit allemand excluent tous les deux l’acquisition par prescription des biens individuels, du moins avant que la prescription de la pétition d’hérédité n’ait eu lieu54. Il ne s’agit pas d’une exclusion, mais d’une prolongation de la prescription acquisitive des biens individuels, qui ne peut se terminer avant la prescription dirigée contre la pétition d’hérédité.
35 La doctrine belge accepte également la prolongation de la prescription acquisitive des biens individuels55. À juste titre, car autrement, la prescription de la pétition d’hérédité risque d’être vidée de son sens. C’est certes moins probable en Belgique qu’autre part (les délais sont identiques ; il faudrait que le prescriptionnaire ait pris possession d’un bien avant de prendre possession de l’hérédité), mais le risque existe et pourrait s’accroître.
Aperçu de la jurisprudence
36 25. Introduction. La jurisprudence est assez rare en la matière. Nous esquissons ici les cas que nous avons repérés dans les revues juridiques. Nous commençons par les cas où la prescription acquisitive a été reconnue comme telle ; dans un deuxième temps, nous analysons les cas où la qualification de prescription extinctive a été préférée. Nous laissons de côté les cas où il n’a pas été statué sur la nature de la prescription dirigée contre la pétition d’hérédité56.
Les cas accueillant la prescription acquisitive
37 26. Cass. b., 23 décembre 1834. La Cour de cassation belge eut à juger en 1834 d’un cas où il y avait quatre testaments, faits par le chanoine Vandenberg57. Il appelait certains membres de sa famille à sa succession en qualité de légataires à titre universel ; un chanoine du nom de Close fut exécuteur testamentaire (celui-ci, condamné à mort ultérieurement, semble avoir été peu fiable, bien qu’on ne sache pas si la présente affaire a joué un rôle dans cette condamnation). Vandenberg décéda en 1751 ; le partage intervint en 1756 et fut suivi en 1781 par une pétition d’hérédité de la part de Louis-Paul Mahy. Les légataires invoquèrent la prescription acquisitive de la qualité d’héritier (ou plus spécifiquement de la qualité de légataire à titre universel), ce que le Conseil de Namur déclara non fondé, alors que le Grand Conseil de Malines accepta le principe en appel, mais réserva la question de la possession. La Révolution française interrompit le procès, et la cour d’appel de Liège jugea enfin qu’il y avait effectivement eu une prescription acquisitive. Pourvoi en cassation. La Cour répondit alors : « Attendu, quant à l’art. 32 [de la coutume de Namur], qu’il traite de l’usucapion des biens réels dont il fixe le terme à vingt-deux ans, que ledit article ne peut avoir été violé puisque ce n’est pas cette prescription qui a été admise par l’arrêt attaqué ni celle qui devait l’être, par la raison que le possesseur qui, à titre d’héritier, prescrit contre la pétition d’hérédité, n’acquiert pas par usucapion tel bien déterminé de la succession, mais prescrit le jus universum que renferme l’action intentée par celui qui réclame cette hérédité. » Il fallait appliquer le délai trentenaire de l’article 33 de la coutume de Namur. Le tout n’est pas parfaitement limpide, mais le « chapeau » de l’arrêt énonce que « La pétition d’hérédité ne se prescrit point par l’usucapion, mais par le laps de temps requis pour la prescription la plus longue des choses que la succession renferme. »
38Faut-il alors considérer que cet arrêt refuse la qualification de prescription acquisitive ? Il nous semble que non. Le refus d’appliquer l’article 32 de la coutume de Namur est logique, car il règle la prescription acquisitive des « biens réels » (donc des immeubles) individuels58. Une succession n’est pas un bien immeuble individuel. L’application de l’article 33 de la coutume de Namur est plus problématique, car il semble traiter uniquement de la prescription des actions personnelles. Or il exige également la possession comme condition pour la prescription, ce qui est insolite pour les prescriptions extinctives. La doctrine en déduit que l’article 33 règle également toutes les prescriptions qui nécessitent une possession59. On peut donc considérer que la prescription du jus universum est une prescription acquisitive.
39 27. Bruxelles, 24 mai 1843 et 10 août 1844. La cour d’appel bruxelloise se montra assez active par deux arrêts de 1843 et de 1844. L’arrêt de 1843 concernait une succession héritée par les deux enfants de feu la baronne de Waës (un fils, interdit et représenté par un curateur, et une fille)60. Le fils avait pris possession en 1777, alors que la fille n’a agi qu’en 1809. La cour accepta en principe la prescription acquisitive, mais elle jugea que des mandataires avaient agi dans le nom et pour le compte de la fille entre 1777 et 1782, date à laquelle un arrêt portant déchéance du droit d’accepter pour la fille fut prononcé (un « homme de loi » avait été nommé pour la représenter en ce qui concernait les comptes dressés par le curateur de son frère). Or les 30 ans nécessaires pour la prescription acquisitive ne s’étaient pas écoulés, car elle ne pouvait commencer à courir qu’en 1782 et durer jusqu’en 1809 (date de la pétition d’hérédité), donnant un total de 27 ans.
40L’arrêt de 1844 concernait une femme décédée en 179161. Celle-ci avait nommé des exécuteurs testamentaires et appelait ses héritiers légaux à sa succession. Le premier fait était une bonne idée, le deuxième moins. De nombreux prétendants à la succession se présentèrent et de nombreux litiges s’ensuivirent. Un des groupes de prétendants parvint à faire confirmer ses prétentions par jugement en 1829. En 1838, un nouveau prétendant se présenta et on lui opposa la prescription acquisitive de la qualité d’héritier par le groupe mentionné. La cour accepta la prescription acquisitive en principe et dans les faits. L’arrêt est intéressant surtout parce que les parties avaient discuté d’une prescription extinctive devant le premier juge ; en degré d’appel, on n’en parlait plus.
41 28. Bruxelles, 13 février 1891. Un arrêt bruxellois plus tardif – de 1891 – reconnaît implicitement la prescription acquisitive62. Il s’agissait d’une succession où l’héritier en ordre utile négligea d’exercer son option d’accepter ou de répudier la succession. Quelques héritiers en ordre non utile s’insurgèrent contre cet état des faits, en partie parce qu’il y avait un légataire universel institué par un testament prétendument nul. Ils intentèrent donc une pétition d’hérédité. Le légataire opposa qu’il y avait un héritier en ordre utile, et que les demandeurs avaient donc été trop vites à intenter leur action.
42La cour ne suivit pas ce raisonnement. Elle jugea que les demandeurs pouvaient agir en justice, car autrement leurs droits risquaient de se prescrire. Leur droit d’accepter deviendrait illusoire s’ils devaient attendre jusqu’à ce que le droit d’option d’autres héritiers en ordre plus utile soit éteint par prescription. Ils devraient tolérer qu’un possesseur ou détenteur gaspille l’héritage et fasse prescrire leurs droits. La cour envisage des possesseurs avec un titre nul et des possesseurs sans titre, ce qui implique qu’elle accepte la prescription acquisitive. Le possesseur sans titre n’a en effet aucun droit apparent qui pourrait être validé par la prescription extinctive, contrairement au possesseur avec un titre nul. L’action en nullité de ce titre peut se prescrire.
43 29. Cass. fr., 14 février 1857. Même la Cour de cassation française a accepté (ou semble du moins l’avoir fait) la prescription acquisitive de la qualité d’héritier dans un arrêt de 185763. Il s’agissait d’une fille adultérine, qui avait toujours été considérée comme une fille légitime par la famille en raison du fait que ses parents étaient mariés au moment de sa naissance (qui était toutefois arrivée deux mois après le mariage, lui-même célébré un mois après le décès de la première épouse du défunt, démontrant ainsi l’adultère). Elle avait donc reçu la moitié de l’héritage de son père après son décès en 1803. L’autre fille du défunt intenta quelques décennies plus tard une pétition d’hérédité, ce à quoi la fille adultérine opposa la prescription acquisitive. Les juges ont accueilli cette défense. La Cour déclara qu’« aucune disposition légale ne s’oppose à ce qu’une possession indivise de biens, pour une part égale à celle résultant du droit que donne la qualité en laquelle la possession a eu lieu, ne soit utile pour acquérir la propriété de ces biens par la prescription de trente ans ». On doit bien admettre que la Cour ne dit pas expressément qu’il s’agissait de la prescription acquisitive de l’universalité de droit.
44 30. Anvers, 16 mars 2021. La cour d’appel d’Anvers a récemment accepté la possibilité de la prescription acquisitive de la qualité d’héritier64. Il s’agit de la succession d’une femme (la défunte), qui a un fils et une sœur. Le contact entre la défunte et son fils était inexistant depuis longtemps, de sorte qu’il n’était pas au courant du décès de sa mère. La défunte avait institué sa sœur légataire universel peu avant sa mort en 1983. En 2015, le fils intente une action en pétition d’hérédité contre sa tante, la sœur de sa mère. La cour constate que la prescription extinctive de l’option de l’héritier est accomplie (art. 789 C.Nap.). Mais même si le fils avait accepté à temps la succession de sa mère, il n’en bénéficierait pas. La cour constate en effet que la prescription acquisitive est également accomplie, car la tante (légataire universelle) avait pris possession de la succession entière pendant 30 ans. La possession suivait à la fois de la saisine héréditaire (art. 724 C.Nap.) et des actes de possession réelle (notamment une déclaration de succession et un certificat de succession). Il n’y a pas d’indications que la possession était viciée ou que le fils a interrompu la prescription en temps utile.
45La cour confirme explicitement qu’il s’agit de la prescription acquisitive de la qualité d’héritier. Cette prescription acquisitive est dirigée contre la pétition d’hérédité. Elle invoque l’imprescriptibilité du droit de propriété (qui, pour rappel, n’exclut que la prescription extinctive) et l’article 816 C.Nap. (actuellement l’art. 818 du Code civil belge ; cet article exclut l’action en division quand il y a eu une prescription acquisitive en faveur d’un des indivisaires).
Les cas où la prescription extinctive fut préférée
46 31. Gand, 9 mai 1856. La cour d’appel de Gand en donne un bel exemple en 185665. Le défunt était décédé en 1769. Il était un bâtard légitimé. Les lettres de légitimation avaient prévu un droit de retour en ce qui concernait les biens recueillis du père naturel, pour le cas du décès du bâtard sans descendance légitime. Les défendeurs actuels avaient intenté une pétition d’hérédité en 1789, ce qui valait – selon la cour – prise de possession. Les demandeurs n’étant intervenus qu’en 1850, plus de 50 ans s’étaient écoulés. Leur prétention se trouvait prescrite, car l’article 1er de la rubrique 19 du droit coutumier gantois et l’article 2262 C.Nap. imposaient un délai trentenaire.
47 Notons que ces articles sont de droit commun, dans le sens où ils règlent la prescription des actions personnelles, réelles et mixtes (l’article du droit coutumier gantois déclare même le droit de propriété prescriptible, ce qui est un peu insolite aujourd’hui). On ne peut donc pas simplement affirmer que la cour visait le droit d’option de l’héritier. En plus, la cour écrit que la prescription avait pour effet que l’action des demandeurs « se trouve éteinte ». Elle indique certes que la prise de possession est un élément pertinent, mais « se trouver éteinte » est une expression qu’on associe surtout à la prescription extinctive. Bien que la prescription acquisitive éteint également certaines actions (pétitoires, surtout), on ne la voit que rarement sous cet aspect. On peut donc dire que la cour envisageait une prescription extinctive.
48 32. Bruxelles, 12 mars 2003 et Cass. b., 30 juillet 1852. Un arrêt récent (2003) de la cour d’appel de Bruxelles implique que la pétition d’hérédité s’éteint par la prescription extinctive66. Il s’agissait d’une répudiation par un avocat qui n’avait pas de procuration spéciale. L’héritière n’en avait pas souffert de dommage, décida la cour, car la pétition d’hérédité n’était pas touchée par l’acte fait hors des pouvoirs (ultra vires) du représentant et elle pouvait donc encore et toujours faire valoir ses droits. En plus, la pétition d’hérédité n’était pas prescrite, car l’héritière n’avait pas été inactive pendant 30 ans. Cette référence à l’inactivité implique que la pétition d’hérédité est soumise à une prescription extinctive, ce que la cour motive en faisant référence à un ancien arrêt de la Cour de cassation du 30 juillet 185267.
49Cet arrêt concernait un défunt absent qui avait vendu tous ses biens en 1772 pour disparaître. En 1786, un « garde proïsme » (l’administrateur des biens d’un absent, en ancien droit liégeois68) fut nommé, qui était un membre de la famille du défunt. On ne sait pas clairement comment il y avait encore des biens à administrer. En 1812, la succession s’ouvrit par l’effet des règles sur l’absence. Le garde proïsme continua à administrer les biens du défunt jusqu’à sa mort en 1828 ; en 1837, ses héritiers voulurent vendre des biens qui avaient appartenu au défunt absent. D’autres héritiers prétendus du défunt s’opposèrent à la vente par une pétition d’hérédité. Les héritiers du garde proïsme invoquèrent la prescription du droit d’option des héritiers et la prescription acquisitive de la succession. La Cour de cassation jugea que la prescription du droit d’option de l’héritier (art. 789 C.Nap.) suivait de l’inaction pendant 30 ans, c’est-à-dire du fait de ne pas choisir d’accepter ou de répudier la succession. C’est donc une prescription extinctive, car il ne faut pas de possession69. La prescription acquisitive (deuxième argument des héritiers du garde proïsme) fut refoulée, parce que le garde proïsme est un détenteur, ainsi que l’avait constaté souverainement l’arrêt en degré d’appel. On voit qu’on ne peut pas déduire de cet arrêt de cassation que la pétition d’hérédité est apte à la prescription extinctive, car la Cour de cassation ne s’est pas prononcée sur la prescription acquisitive, mais uniquement sur la prescription de l’article 789 C.Nap. Or que cet article contient une prescription extinctive n’est pas douteux. L’arrêt de cassation est davantage une confirmation de la possibilité de prescription acquisitive qu’un démenti.
Les cas où la prescription semble double
50 33. Bruxelles, 22 juillet 1870. La cour d’appel de Bruxelles semble admettre une double prescription de la pétition d’hérédité dans un arrêt de 187070. D’une part il y a – mais ce n’est pas exprimé de façon très limpide – la prescription par un « usurpateur complètement étranger à la succession ». L’usurpateur doit prendre réellement possession pour qu’il puisse prescrire, et il ne tombe pas sous l’empire de l’article 789 C.Nap. Il semble donc s’agir d’une prescription acquisitive.
51Si d’autre part un successible a pris possession de la succession, la prescription se règle selon l’article 789 C.Nap. et serait donc une prescription extinctive. Cette théorie est difficile à admettre, étant donné que l’article 789 C.Nap. règle la prescription du droit d’option de l’héritier et non pas celle de la pétition d’hérédité (voy. le no 3).
52La théorie de la double prescription est toutefois assez logique, quand on laisse de côté le fait que son fondement ne se trouve pas dans l’article 789 C.Nap. L’usurpateur doit acquérir un droit, alors qu’un successible a un droit – nécessairement encore éventuel, vu qu’on a besoin de la prescription pour le conforter – qui doit être conforté. Conforter un droit existant se fait davantage par la prescription extinctive ; créer un nouveau droit doit se faire par la prescription acquisitive.
Analyse de la jurisprudence
53 34. Quel est le droit appliqué ? On aperçoit très vite que la jurisprudence est très généralement ancienne et concerne même bien souvent l’ancien droit. Sauf l’arrêt bruxellois de 2003 et l’arrêt anversois de 2021, il n’y a que les arrêts de cassation de 1852 et de 1857 et l’arrêt bruxellois de 1891 qui sont rendus sous l’empire du Code Napoléon. Tous les autres cas ont été réglés par l’ancien droit. On peut alors s’interroger sur la pertinence de la jurisprudence pour le Code Napoléon. Il apparaît en premier lieu que le Code Napoléon est, largement, le développement de l’ancien droit français qui avait déjà eu une influence importante sur l’ancien droit belge. La continuité est donc grande71, y compris en ce qui concerne la pétition d’hérédité72. En plus, il n’y a pas de règlementation organique de la pétition d’hérédité dans le Code Napoléon. Le Code Napoléon confirmait son existence dans son article 137, qui ne faisait que réitérer que l’absent conserve la pétition d’hérédité. L’ancien droit est donc une source d’inspiration pour l’état du droit du Code Napoléon73.
54 35. La possession et ses vices. Il est frappant que la possession non viciée ne soit généralement pas abordée de manière approfondie, alors que c’est souvent un problème important quand il s’agit de biens individuels. Cela s’explique probablement par certains facteurs. En premier lieu, les héritiers apparents doivent avoir pris possession de l’hérédité en cette qualité. S’ils ont pris possession de biens individuels, une revendication portant sur ces biens individuels sera intentée. Deuxièmement, il est peu probable que des vices de la possession se manifestent. L’équivoque est exclue par l’acceptation plus ou moins expresse ; la clandestinité l’est par la nécessité d’agir ouvertement comme héritier ; la discontinuité ne peut guère surgir en raison du fait que la succession s’intègre (de fait) au patrimoine de l’héritier apparent. Il n’y a que la violence qui semble avoir une chance de se manifester, mais elle est rare en pratique. En général, la prescription est opposée à un héritier absent et inconnu, ou parfois totalement inactif ; nous n’avons pas vu de cas où un héritier a été évincé par la violence.
Les causes de la décadence
55 36. Les causes. La plus grande partie de la jurisprudence qui a trait à la pétition d’hérédité date du 19e siècle. Nous n’avons trouvé que quelques cas récents en Belgique74 ; en France, la situation est un peu meilleure75. Aucun de ces cas n’a donné lieu à un débat sur la prescription de la pétition d’hérédité.
56On peut noter plusieurs facteurs expliquant cette situation. En premier lieu, le droit des successions a été sensiblement simplifié par le Code Napoléon76, rendant ainsi bien plus facile de savoir qui est héritier. On peut également y ajouter des évolutions postérieures au Code Napoléon, telle que l’égalité des enfants (voy. le no 29). L’état civil est d’une qualité bien supérieure et les moyens de communication sont substantiellement améliorés, sans oublier qu’il y a moins de guerres qui font disparaître des soldats, des réfugiés et des documents77. Cette dernière raison est toutefois moins convaincante, si l’on tient compte des deux guerres mondiales durant le 20e siècle. On peut probablement présumer que des organisations telles que la Croix-Rouge (qui n’existaient pas au début du 19e siècle) ont joué un rôle. La Belgique a également été épargnée par la majorité des mouvements migratoires (réfugiés, Heimatvertriebenen) qui ont impacté l’Europe centrale et de l’est à l’issue de la Seconde Guerre mondiale.
57 Additionnellement, le droit d’option de l’héritier fait maintenant l’objet d’une prescription extinctive (art. 789 C.Nap.), contrairement à la situation sous l’ancien droit78. Il est bien plus aisé d’invoquer la prescription extinctive du droit d’option, car la preuve d’un exercice en temps utile de l’option est à la charge de l’héritier prescrit. Le prescriptionnaire doit tout au plus invoquer la prescription et démontrer qu’elle est possible. La prescription acquisitive est bien plus difficile à prouver79.
58Dans la mesure où le litige porte sur un bien individuel, il est souvent plus logique d’invoquer la prescription acquisitive du bien individuel, plutôt que la prescription acquisitive de l’universalité à laquelle il appartient.
Conclusion
59 37. Conclusion. La prescription de la pétition d’hérédité est une matière compliquée, surtout parce qu’elle n’a pas été réglée par la loi. Sa nature acquisitive ou extinctive est débattue par la doctrine et par la jurisprudence. Le droit belge penche pour la prescription acquisitive, bien qu’il n’y ait pas unanimité ; le droit français préfère la prescription extinctive, mais il n’y a pas unanimité non plus. Il ne nous semble pas qu’il y ait des obstacles à considérer que la prescription est une prescription acquisitive, étant donné que la prescription acquisitive est un mode général d’acquérir des droits subjectifs (du moins en droit patrimonial). La restriction de la prescription acquisitive aux droits réels est contingente et non pas imposée par sa nature.
60La jurisprudence est rare, même au 19e siècle. On applique généralement l’ancien droit, mais il y a également quelques cas sous l’empire du Code Napoléon. Quoi qu’il en soit, les juges estiment que le Code Napoléon ne fait que reprendre pour son compte – implicitement – l’ancien droit. Il est plus intéressant de voir que les conditions de la prescription acquisitive ne sont généralement pas examinées en profondeur, ce qui s’explique probablement par le fait que la possession doit, pour ainsi dire, crever les yeux dans le cas d’une universalité de droit, qui est une chose abstraite.
61Il est clair que plusieurs facteurs ont contribué à la rareté de la jurisprudence : l’amélioration des moyens de communication, l’état civil qui est mieux réglé, une réduction du nombre des guerres. L’élément le plus important est probablement que le droit d’option de l’héritier est en tout cas prescriptible, ce qui n’était pas acquis dans l’ancien droit.
Liste des sigles
-
ABGB = Allgemeines Bürgerliches Gesetzbuch, Code civil autrichien
-
Arr. Cass. = Arresten van het Hof van Cassatie
-
BGB = Bürgerliches Gesetzbuch, Code civil allemand
-
B.J. = La Belgique judiciaire (intégralement disponible sur http://arch93.arch.be/BIB_D4P19/)
-
BW = Burgerlijk Wetboek, Code civil des Pays-Bas
-
Cass. (Cass. b. ; Cass. fr.) = Cour de cassation (Cour de cassation belge ; Cour de cassation française)
-
D. = Dalloz périodique
-
Gaz.Pal. = Gazette du Palais
-
J.O.R.F. = Journal officiel de la République Française
-
J.J.P. = Journal des juges de paix
-
J.P. = juge de paix
-
J.T. = Journal des Tribunaux
-
Jura Falc. = Jura Falconis
-
M.b. = Moniteur belge
-
Pand.b. = Pandectes belges
-
Pas. = Pasicrisie belge
-
R.D.E. = Revue de droit des étrangers
-
R.G.A.R. = Revue générale des Assurances et des Responsabilités
-
R.W. = Rechtskundig Weekblad
-
Rev.fac.dr.ULg = Revue de la faculté de droit de l’Université de Liège
-
Rev.not.b. = Revue du notariat belge
-
RTD civ. = Revue trimestrielle de droit civil
-
T.Not. = Tijdschrift voor Notarissen
-
T.P.R.=Tijdschrift voor Privaatrecht
-
Trib. = Tribunal de première instance
Notes
1 F. Hage-Chahine, Les conflits dans l’espace et dans le temps en matière de prescription, Paris, Dalloz, 1977, p. 21, no 17 et n. 3.
2 Voy. en ce qui concerne les actions pétitoires J. Van de Voorde, « Eigendomsvorderingen: revindicatie, vaststellingsvordering en stakingsvordering », dans Onroerend goed in de praktijk, Malines, Kluwer, 2015, p. I.D.12-1 à I.D.12-25.
3 H. De Page et R. Dekkers, Traité élémentaire de droit civil belge, IX, Les successions, Bruxelles, Bruylant, 1946, p. 601, no 832 ; F. Bourjon, Le droit commun de la France et la coutume de Paris, I, Paris, Grangé, 1770, p. 960.
4 Anvers, 16 mars 2021, n° 2020/FA/370 ; 72e Congrès des notaires de France, La dévolution successorale, Romainville, Promaplans, 1975, p. 155.
5 Pand.b., v° Pétition d’hérédité, no 158.
6 Belgique : Trib. Mons, 5 mai 1860, B.J., 1860, col. 689, concl. E. Haus ; Ch. Aubry et Ch.-Fr. Rau, Cours de droit civil français par C.-S. Zachariae, II, Bruxelles, Hauman, 1847, p. 421, § 616, 4° et n. 5 ; J. Hansenne, Les biens, I, Liège, Faculté de droit de l’Université de Liège, 1996, p. 325, no 346 (implicitement par le fait que l’auteur refuse la prescription acquisitive d’universalités). France : Cass. fr., 26 juin 2013, ECLI:FR:CCASS:2013:C100705 ; Rouen, 29 juin 1870, D., 1871, II, p. 239 ; Caen, 25 juillet 1862, D., 1863, II, p. 168 ; Douai, 9 février 1962, Gaz.Pal., 1962, I, p. 378, note (ces arrêts sont souvent mentionnés par la doctrine, mais leur lecture ne nous convainc pas toujours de leur pertinence) ; C. Bufnoir, Propriété et contrat, Paris, L.G.D.J., 2005 (rééd. 1924), p. 133 (nuancé) ; A. Pillet, Essai sur la nature de la pétition d’hérédité, Paris, Pichon, 1884, p. 23, n. 2 ; G. Baudry-Lacantinerie et A. Wahl, Traité théorique et pratique de droit civil. Des successions, I, Paris, Sirey, 1905, p. 690, no 903 ; H. Mazeaud, L. Mazeaud et J. Mazeaud, Leçons de droit civil, IV/2, Successions. Libéralités, s.l., Montchrestien, 1971, p. 455-456, no 1255 ; M. Planiol, G. Ripert, J. Maury et H. Vialleton, Traité pratique de droit civil français, IV, Successions, Paris, L.G.D.J., 1928, p. 401-402, no 331 ; 72e Congrès des notaires de France, La dévolution successorale, Romainville, Promaplans, 1975, p. 154-155 ; P. Cauwès, La pétition d’hérédité en droit romain et en droit français, Paris, Morris, 1865, p. 223 ; Th. Huc, Commentaire théorique et pratique du Code civil, XIV, Privilèges et Hypothèques (fin). Expropriation forcée - Ordre entre les créanciers. Prescription. Possession des meubles. Loi du 15 juillet 1872 sur les titres au porteur. Art. 2167 à 2281, Paris, Pichon, 1902, p. 377, no 309 (voy. toutefois Th. Huc, Commentaire théorique et pratique du Code civil, V, Des successions – Acceptation et répudiation. Bénéfice d’inventaire. Partages et rapports. Loi du 6 février 1893 modifiant le régime de la séparation de corps, Paris, Pichon, 1893, p. 313-314, no 264 qui admet la prescription acquisitive de la qualité d’héritier).
7 Belgique : R.-Th. Troplong (adapté par A. Delebecque), Commentaire sur la prescription, Bruxelles, Meline, 1843, p. 498, no 894 ; H. De Page et R. Dekkers, Traité élémentaire de droit civil belge, IX, Les successions, Bruxelles, Bruylant, 1946, p. 601, no 832 ; A. Seresia, De la pétition d’hérédité en droit moderne, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 400-403, no 262 ; F. Laurent, Principes de droit civil français, IX, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 569-570, no 497 ; P. Delnoy, « L’indignité successorale », dans Rev.fac.dr.ULg, 2012, p. 70 ; V. Sagaert, « Het onderscheid tussen persoonlijke en zakelijke vorderingen – Het verjaringsregime van zakelijke vorderingen nader geanalyseerd », dans I. Claeys (éd.), Verjaring in het privaatrecht. Weet de avond wat de morgen brengt?, Malines, Kluwer, 2005, p. 12, no 14 ; V. Sagaert, Goederenrecht, dans Beginselen van Belgisch Privaatrecht, Malines, Kluwer, 2014, p. 165, no 190 ; S. Taillieu et K. Willems, « Topics verjaring in het vermogensrecht: onbekend maakt onbemind? », dans W. Pintens et C. Declerk (éds.), Patrimonium 2015, Bruges, die Keure, 2015, p. 297-298, nos 27-30 ; H. Petit, Liquidation et partage des successions, Bruxelles, Bruylant, 1907, p. 54, nos 222-223. France : Th. Huc, Commentaire théorique et pratique du Code civil, V, Des successions – Acceptation et répudiation. Bénéfice d’inventaire. Partages et rapports. Loi du 6 février 1893 modifiant le régime de la séparation de corps, Paris, Pichon, 1893, p. 313-314, no 264 ; F. Zénati, Essai sur la nature juridique de la propriété. Contribution à la théorie du droit subjectif, Lyon, thèse dactyl. Université Jean Moulin, 1981, p. 127, n. 140.
8 J. Van Biervliet, Cours de droit civil, Louvain, Uystpruyst-Dieudonné, 1921, pp. 655-656 : « La pétition d’hérédité se prescrit par le laps de temps requis pour la prescription la plus longue des droits, à compter du jour où un tiers s’est mis en possession effective des biens de la succession, en qualité de successeur universel ou d’acquéreur de l’hérédité. / La prescription fait acquérir à l’héritier apparent les droits de l’héritier véritable. » Van Biervliet (1841-1935) était membre de la commission de révision du Code civil installée après l’échec de l’avant-projet de François Laurent. Il y a joué un rôle important, surtout en ce qui concerne le droit des successions. Son rapport a été publié comme annexe dans le livre cité (p. 367 et suiv.).
9 Voy. p. ex. Bruxelles, 22 juillet 1870, B.J., 1870, col. 1138, note ; Cass. fr., 1er avril 2015, ECLI:FR:CCASS:2015:C100366 (« Attendu que Mme Rose-Marie X... fait grief à l’arrêt de dire qu’elle a perdu la qualité d’héritière, faute d’option ou d’action en pétition d’hérédité dans les délais prescrits par les dispositions alors en vigueur et de la débouter de ses demandes ») ; Cass. fr. 26 juin 2013, ECLI:FR:CCASS:2013:C100705.
10 Voy. G. Galopin, Les successions, Liège, Vaillant-Carmanne, 1910, p. 119, no 197 ; H. De Page et R. Dekkers, Traité élémentaire de droit civil belge, IX, Les successions, Bruxelles, Bruylant, 1946, 601, no 832 ; Pand.b., v° Pétition d’hérédité, no 165 (moins explicite).
11 A. Pillet, Essai sur la nature de la pétition d’hérédité, Paris, Pichon, 1884, 23, n. 2.
12 Cass. b., 3 mai 1996, Arr.Cass., 1996, p. 388, R.W., 1996-97, p. 684 (abrégé) : « De eigendomsvordering [is] een zakelijke rechtsvordering tot erkenning of bescherming van het eigendomsrecht dat rechtstreeks betrekking heeft op een roerend of een onroerend goed ». Voy. aussi J. Van de Voorde, « Eigendomsvorderingen: revindicatie, vaststellingsvordering en stakingsvordering », dans Onroerend goed in de praktijk, Malines, Kluwer, 2015, I.D.12-1.
13 J. Van de Voorde, « De bevrijdende verjaring van zakelijke rechten », dans R. Barbaix et N. Carette (éds.), Tendensen vermogensrecht 2019, Anvers, Intersentia, 2019, p. 252-259, nos 18-24.
14 Abrogé en Belgique par l’art. 34 de la loi du 9 mai 2007 modifiant diverses dispositions relatives à l'absence et à la déclaration judiciaire de décès, M.b., 21 juin 2007, p. 34.252, et en France par la loi no 77-1447 du 28 décembre 1977 portant réforme du titre IV du livre Ier du code civil : Des absents, J.O.R.F., 29 décembre 1977, p. 6215.
15 Voy. sur les effets de l’envoi en possession H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, I, Théorie des droits et des lois. Les personnes. La famille, Bruxelles, Bruylant, 1948, p. 538-539, no 491 (envoi en possession provisoire), p. 540, no 496 (envoi en possession définitif).
16 Pand.b., v° Pétition d’hérédité, no 168.
17 Ibid., no 170.
18 J. Van de Voorde, De verkrijgende verjaring, Bruges, la Charte, 2019, p. 611-612, no 1745.
19 Ibid., p. 123, no 341.
20 Belgique : Ch. Aubry et Ch.-Fr. Rau, Cours de droit civil français par C.-S. Zachariae, II, Bruxelles, Hauman, 1847, p. 421, § 616, 4° et note de bas de page 5 (mais à la p. 418, même §, la pétition d’hérédité est définie comme une action dirigée contre celui qui a pris possession de l’hérédité).
21 A. Seresia, De la pétition d’hérédité en droit moderne, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 402-403, no 262 ; P.-J. Ravail, De l’objet de la possession. Essai sur le droit romain, l’ancien droit français et le droit actuel, Paris, Rousseau, 1899, p. 181, n. 1. Voy. dans la jurisprudence Gand 13 août 1844, Pas., 1844, II, p. 248.
22 Belgique : Ch. Aubry et Ch.-Fr. Rau, Cours de droit civil français par C.-S. Zachariae, II, Bruxelles, Hauman, 1847, p. 418, § 616 (à la p. 421 se trouve le déni de la possession) ; R.-Th. Troplong (adapté par A. Delebecque), Commentaire sur la prescription, Bruxelles, Meline, 1843, p. 454, n. 2 ; A. Seresia, De la pétition d’hérédité en droit moderne, Bruxelles, Bruylant, 1873, pp. 402-403, no 262 ; V. Sagaert, « Het onderscheid tussen persoonlijke en zakelijke vorderingen – Het verjaringsregime van zakelijke vorderingen nader geanalyseerd », dans I. Claeys (éd.), Verjaring in het privaatrecht. Weet de avond wat de morgen brengt?, Malines, Kluwer, 2005, p. 12, no 14 ; H. De Page et R. Dekkers, Traité élémentaire de droit civil belge, IX, Les successions, Bruxelles, Bruylant, 1946, p. 601, no 832 ; F. Laurent, Principes de droit civil français, IX, Bruxelles, Bruylant, 1873, 591, no 514 ; R.J. Pothier, « Traité du droit de domaine de propriété », dans M. Dupin (éd.), Œuvres de Pothier, contenant les traités du droit français, VIII, Paris, Béchet, 1825, p. 284, no 370. France : A.-J. Merlin, De la prescription acquisitive en droit romain et en droit français, Paris, Moquet, 1857, p. 158, no 253.
23 J.P. Anvers (I) 14 mai 2014, J.J.P. 2016, p. 317.
24 Art. 97 de la coutume de Paris ; L. Charondas le Caron (éd.), Coustume de la ville, prévosté et vicomté de Paris, Paris, Chevalier, 1605, pp. 73 et suiv. ; R.J. Pothier, « Traité de la possession », dans M. Dupin (éd.), Œuvres de Pothier, contenant les traités du droit français, VIII, Paris, Béchet, 1825, p. 359, no 86 ; F. Patou, Commentaire sur la coutume de la ville de Lille et de sa chatellenie, II, Lille, 1788, p. 467 ; A. Lelièvre, Questions de droit concernant les coutumes de Namur, Namur, Wesmael-Legros, 1852, p. 346 ; G. de Ghewiet, Institutions du droit belgique, II, Bruxelles, Derbaix, 1735, p. 95 ; C.J. de Ferrière, Nouvelle introduction à la pratique, I, Paris, Brunet, 1724, p. 345 ; V. Marcadé, Commentaire-traité théorique et pratique de la prescription, Paris, Cotillon, 1861, p. 67 ; P.-J. Ravail, De l’objet de la possession. Essai sur le droit romain, l’ancien droit français et le droit actuel, Paris, Rousseau, 1899, p. 121, no 137.
25 Défendue p. ex. par J. Hansenne, Les biens, I, Liège, Faculté de droit de l’Université de Liège, 1996, p. 325, no 346.
26 J. Van Biervliet, Cours de droit civil, Louvain, Uystpruyst-Dieudonné, 1921, pp. 655-656.
27 Gand 13 août 1844, Pas. 1844, II, p. 248.
28 Gand, 9 mai 1856, Pas., 1856, II, p. 341, B.J., 1856, col. 726.
29 C. Bufnoir, Propriété et contrat, Paris, L.G.D.J., 2005 (rééd. 1924), p. 133.
30 J. Van Biervliet, Cours de droit civil, Louvain, Uystpruyst-Dieudonné, 1921, p. 223, no 255.
31 F. Laurent, Principes de droit civil français, IX, Bruxelles, Bruylant, 1873, pp. 589-590, no 513. Voy. également R.J. Pothier, « Traité du droit de domaine de propriété », dans M. Dupin (éd.), Œuvres de Pothier, contenant les traités du droit français, VIII, Paris, Béchet, 1825, p. 283, no 369.
32 J. Van de Voorde, De verkrijgende verjaring, Bruges, la Charte, 2019, p. 28, no 82.
33 J. Van de Voorde, De verkrijgende verjaring, Bruges, la Charte, 2019, p. 139-141, nos 388-394.
34 Belgique : H. De Page et R. Dekkers, Traité élémentaire de droit civil belge, IX, Les successions, Bruxelles, Bruylant, 1946, p. 573, no 794 ; F. Laurent, Principes de droit civil français, IX, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 577, no 501 ; Ch. Aubry et Ch.-Fr. Rau, Cours de droit civil français par C.-S. Zachariae, II, Bruxelles, Hauman, 1847, p. 418, § 616 ; A. Seresia, De la pétition d’hérédité en droit moderne, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 135-139, no 98 (nuancé). France : A.-J. Merlin, De la prescription acquisitive en droit romain et en droit français, Paris, Moquet, 1857, p. 158, no 253 ; P. Moutonnet de Bernard, Droit et généalogie, thèse dactyl. Université de Grenoble, 2013, p. 142, no 181 (nuancé).
35 E. Goessens, « De historische oorsprong van het numerus clausus beginsel in het goederenrecht », dans Jura Falc., 2010-11, p. 155-156 ; P.C. van Es, De actio negatoria. Een studie naar de rechtsvorderlijke zijde van het eigendomsrecht, Nijmegen, Wolf Legal Publishers, 2005, p. 21.
36 Voy. E. Goessens, « De historische oorsprong van het numerus clausus beginsel in het goederenrecht », dans Jura Falc., 2010-11, p. 155-156 ; E.M. Meijers, « Art. 584 B.W. en de zakelijke rechten » dans Verzamelde privaatrechtelijke opstellen, II, Leyde, Universitaire Pers Leiden, 1955, p. 13-14.
37 Voy. J. Van de Voorde, « ‘Zijn de Belgen Napoleons trouwste onderdanen?’ Een onderzoek naar de mogelijke opheffing van de Code Napoléon in België en zijn vervanging door het Burgerlijk Wetboek van het Verenigd Koninkrijk der Nederlanden », dans Pro Memorie, 2017, p. 232-265.
38 A. Heynsius, De rechtsvordering tot verkrijging der erfenis volgens het Nederlandsche recht, ’s Hage, gebroeders Giunta d’Albani, 1874, p. 9-12.
39 K. Gusenleitner, Ersitzung als allgemeiner Rechtserwerbstatbestand, Vienne, Verlag Österreich, 2004, p. 300-303.
40 A. Duranton, Cours de droit civil français suivant le Code civil, IV, Paris, Thorel, 1844, p. 183-184, no 236.
41 F.A. Fenet, Recueil complet des travaux préparatoires du Code civil, XII, Paris, Videcocq, 1836, p. 198 ; É. Créteau, « La saisine héréditaire dans la doctrine du XIXe siècle », dans Revue Historique de Droit Français et Etranger, 2010, livr. 3, p. 426.
42 Exception faite pour les auteurs d’histoire du droit, p. ex. D. Heirbaut, Privaatrechtsgeschiedenis van de Romeinen tot heden, Gand, Academia Press, 2005, p. 284 ; R. Feenstra, Romeinsrechtelijke grondslagen van het Nederlands privaatrecht, Leyde, Universitaire Pers Leiden, 1994, p. 84, no 152.
43 H. De Page et R. Dekkers, Traité élémentaire de droit civil belge, IX, Les successions, Bruxelles, Bruylant, 1946, p. 573, no 794.
44 A. Maton, Dictionnaire de la pratique notariale, II, Cancellation-engagement, Bruxelles, Administration de la Revue pratique du notariat belge, 1882, v° droits personnels et réels, p. 692, no 4 ; F. Laurent, Principes de droit civil français, VI, Bruxelles, Bruylant, 1871, p. 107, no 83.
45 P. Cauwès, La pétition d’hérédité en droit romain et en droit français, Paris, Morris, 1865, p. 223 (qui en déduit un étrange argument contre la prescription acquisitive de la qualité d’héritier).
46 Comp. A. Pillet, Essai sur la nature de la pétition d’hérédité, Paris, Pichon, 1884, p. 24, note de bas de page.
47 S. Taillieu et K. Willems, « Topics verjaring in het vermogensrecht: onbekend maakt onbemind? », dans W. Pintens et C. Declerk (eds.), Patrimonium 2015, Bruges, die Keure, 2015, p. 299, no 32.
48 A. Seresia, De la pétition d’hérédité en droit moderne, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 422, no 272 ; J. Van Biervliet, Cours de droit civil, Louvain, Uystpruyst-Dieudonné, 1921, p. 223, no 255 ; Pand.b., v° Pétition d’hérédité, no 176.
49 J. Vananroye, Onverdeelde boedel en rechtspersoon. Technieken van vermogensafscheiding, vermogensovergang en vermogensvereffening in het burgerlijk en ondernemingsrecht, Anvers, Biblo, 2014, p. 43, no 75 ; H. De Page et R. Dekkers, Traité élémentaire de droit civil belge, IX, Les successions, Bruxelles, Bruylant, 1946, p. 579, no 802 ; A. Seresia, De la pétition d’hérédité en droit moderne, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 152-153, nos 104-105.
50 Belgique : Gand, 1er juillet 1834, Pas. 1834, II, p. 161 ; H. De Page et R. Dekkers, Traité élémentaire de droit civil belge, IX, Les successions, Bruxelles, Bruylant, 1946, p. 602, no 835 ; F. Laurent, Principes de droit civil français, IX, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 597, no 519 (« [l’usurpateur] a acquis, par la prescription, la propriété de l’hérédité ») ; A. Seresia, De la pétition d’hérédité en droit moderne, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 397, no 259 (Ancien droit français). France : A.-J. Merlin, De la prescription acquisitive en droit romain et en droit français, Paris, Moquet, 1857, p. 158-159, no 253.
51 J. Van de Voorde, De verkrijgende verjaring, Bruges, la Charte, 2019, p. 572-573, no 1621 ; Pand.b., v° Pétition d’hérédité, no 180.
52 Pand.b., v° Pétition d’hérédité, no 180 ; A. Seresia, De la pétition d’hérédité en droit moderne, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 422, no 272.
53 A. Seresia, De la pétition d’hérédité en droit moderne, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 408-409, no 264.
54 Pays-Bas : art. 3:100 BW ; P. C. van Es, Verkrijging door verjaring, Nimègue, Ars Aequi Libri, 2011, p. 76. Allemagne : § 2026 BGB.
55 A. Seresia, De la pétition d’hérédité en droit moderne, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 425, no 274 ; J. Van de Voorde, De verkrijgende verjaring, Bruges, la Charte, 2019, p. 401, no 1132.
56 P. ex. Trib. Bruxelles 10 février 1842, B.J., 1843, col. 1729.
57 Cass. b., 23 décembre 1834, Pas., 1834, I, p. 338.
58 Ph. Godding, Le droit privé dans les Pays-Bas méridionaux du 12e au 18e siècle, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 1987, p. 341, no 599 (les « biens réels cottiers » sont les tenures à cens, ce qui est une expression typique pour des biens immeubles). Voy. également l’art. 9 de la coutume de Namur, qui déclare que les arbres qui poussent dans la terre sont des ‘biens réels’. Il y a également un acte de notoriété de 1814, qui confirme que les biens réels sont des immeubles : J. Grandgagnage (éd.), Coutumes de Namur et coutume de Philippeville, I, Bruxelles, Gobbaerts, 1869, p. 191-193.
59 A. Lelièvre, Questions de droit concernant les coutumes de Namur, Namur, Wesmael-Legros, 1852, p. 346.
60 Bruxelles, 24 mai 1843, Pas., 1844, II, p. 14.
61 Bruxelles, 10 août 1844, B.J., 1844, col. 1635, Pas., 1846, II, p. 99.
62 Bruxelles, 13 février 1891, Pas., 1891, II, p. 226.
63 Cass. fr., 14 février 1857, S., 1857, I, col. 779.
64 Anvers, 16 mars 2021, , T.Not., p. 497.
65 Gand, 9 mai 1856, Pas., 1856, II, p. 341, B.J., 1856, col. 726.
66 Bruxelles, 12 mars 2003, R.G.A.R., 2004, no de suite 13810, J.T., 2003, p. 582.
67 Cass. b., 30 juillet 1852, Pas., 1853, I, p. 330.
68 D. Sohet, Instituts de droit pour les Pays de Liege, de Luxembourg, Namur & autres, Namur, Lafontaine, 1770, p. 17-18.
69 Cass., 2 mars 1860, Pas., 1860, I, p. 92 (arrêt contre lequel était dirigé le pourvoi : Bruxelles, 14 juin 1858, B.J., 1859, col. 65, concl. Hynderick) ; J. Van de Voorde, « Bestaat de bevrijdende verjaring of is ze slechts een vorm van de verkrijgende verjaring? Een onderzoek naar de verjaring als monistisch of dualistisch concept », T.P.R., 2018, p. 422-444, nos 44-80.
70 Bruxelles, 22 juillet 1870, B.J., 1870, col. 1138, note.
71 Voy. Ph. Godding, « De l’‘ancien droit Belgique’ au Code civil de 1804 : une rupture? », dans A. Wijffels (éd.), Le Code civil entre ius commune et droit privé européen, Bruxelles, Bruylant, 2005, p. 585-610.
72 Bruxelles, 22 juillet 1870, B.J., 1870, col. 1138, note.
73 A. Seresia, De la pétition d’hérédité en droit moderne, Bruxelles, Bruylant, 1873, p. 56-67, nos 34-39 ; J. Van Biervliet, Cours de droit civil, Louvain, Uystpruyst-Dieudonné, 1921, p. 216, no 241 ; J. Vananroye, Onverdeelde boedel en rechtspersoon. Technieken van vermogensafscheiding, vermogensovergang en vermogensvereffening in het burgerlijk en ondernemingsrecht, Anvers, Biblo, 2014, p. 51, no 88 ; Pand.b., v° Pétition d’hérédité, no 167 (analysant spécifiquement Cass. b., 23 décembre 1834, Pas., 1834, I, p. 338).
74 Liège, 16 septembre 2009, J.T., 2009, p. 711, R.D.E., 2012, p. 161 (compte rendu), Rev.not.b., 2012, p. 299 (déclaré non fondé parce que la parenté ne fut pas prouvée à suffisance). Le pourvoi en cassation fut déclaré irrecevable : Cass. b., 27 juin 2011, Pas., 2011, I, p. 1764, concl. J.-F. Leclercq. Un autre cas d’application (bien qu’il s’agissait dans les faits de la responsabilité d’un avocat qui avait signé sans mandat une répudiation de la succession) se trouve dans : Bruxelles, 12 mars 2003, R.G.A.R., 2004, no de suite 13810, J.T., 2003, p. 582.
75 Voy. p. ex. Cass. fr. (Civ. 1) 17 juin 1986, no 85-10310, Bull. 1986, I, no 175, p. 174 ; Cass. fr. (Civ. 1), 26 juin 2013, no 12-13311, ECLI:FR:CCASS:2013:C100705.
76 F. Zénati-Castaing, « La propriété, mécanisme fondamental du droit », dans RTD civ., 2006, p. 446-447.
77 J. Vananroye, Onverdeelde boedel en rechtspersoon. Technieken van vermogensafscheiding, vermogensovergang en vermogensvereffening in het burgerlijk en ondernemingsrecht, Anvers, Biblo, 2014, p. 51, no 88.
78 R.J. Pothier, « Traité des successions », dans M. Dupin (éd.), Œuvres de Pothier, contenant les traités du droit français, VII, Paris, Béchet, 1824, p. 181 ; A. Gautier, « Sens juridique du mot faculté dans l’article 2232 du Code civil », dans Revue critique de législation et de jurisprudence, 1877, p. 53.
79 Voy. J. Van de Voorde, « Aandachtspunten inzake de verkrijgende verjaring bij vastgoedtransacties. Capita selecta », dans R. Barbaix et N. Carette (dir.), Tendensen vermogensrecht 2018, Anvers, Intersentia, 2018, p. 223-245, nos 11-50.
Para citar este artículo
Acerca de: Johan Van de Voorde
Dr. Johan Van de Voorde a étudié aux Universités d’Anvers, Namur et Salzburg. En 2017, il a défendu sa thèse doctorale sur la prescription acquisitive à l’Université d’Anvers. Il publie régulièrement en néerlandais, en français et en anglais dans des livres et des revues belges et internationales, le plus souvent en droit privé (spécialement en droit des biens) et en histoire du droit. Il est actuellement chercheur postdoctoral à l’Université d’Anvers, groupe de recherche Personne et Patrimoine, et assistant pédagogique à la Vrije Universiteit Brussel, groupe de recherche CORE. Il est également coordinateur académique de la Chaire de droit animalier à l’Université d’Anvers.