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Frederik Dhondt

Le théâtre de la guerre et la bataille d’Audenarde (11 juillet 1708)

(Vol. 43 - 2021)
Article
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Résumé

La bataille d’Audenarde du 11 juillet 1708, une des nombreuses défaites françaises de la fin du règne de Louis XIV, semble bien éloignée de l’étude de l’histoire du droit. Pourtant, plusieurs niveaux d’analyse permettent de remonter au droit constitutionnel des belligérants impliqués dans la Guerre de Succession d’Espagne (1701/1702-1713/1714), tout comme au droit des gens. L’article présent traite d’abord le déroulement de l’affrontement entre deux armées de masse, représentant des souverains de Grenade à Königsberg, et la perception locale de ce déferlement de troupes, mise en scène dans une pièce satyrique exposant le ‘Français vantard et consterné’. Ensuite, la présence des alliés allemands de Louis XIV et de ses opposants mène au droit du Saint-Empire Germanique. Finalement, la bataille en elle-même n’étant pas décisive, il est important de souligner que les manœuvres diplomatiques entre les campagnes de 1707 et 1708 annonçaient les contours de l’accord qui a permis en 1713-1714 de terminer une guerre sanglante. Le caractère connecté de tous les « théâtres de la guerre » (Italie, Espagne, Allemagne, Pays-Bas, Ecosse) paraît également dans l’iconographie du Schouwburg van den Oorlog de Schenk.

Index de mots-clés : Histoire du droit public, Louis XIV, droit des gens

Abstract

The battle of Oudenarde (11 July 1708) is one of the numerous defeats of the end of Louis XIV’s reign. The event seems disconnected from legal history. Yet, several layers of analysis allow to connect the battle to the constitutional systems of the belligerents, as well as to the law of nations. This article treats first the military confrontation of two mass armies, representing rulers from Granada to Königsberg, and the local perception of this sudden foreign military presence, through a satire on ‘French vanity and consternation’. In an ensuing stage, the German allies of Louis XIV and his opponents offer a perspective on the law of the Holy Roman Empire. Finally, the battle in itself being far from decisive, diplomatic manoeuvres announced the blueprint of the agreement that would bring the war to an end in 1713-1714. The interconnectedness of all ‘Theatres of War’ (Italy, Spain, Germany, Low Countries, Scotland) equally transpires in the iconography used in Schenk’s Schouwburg van den Oorlog.

Index by keyword : History of public Law, Louis XIV, law of nations

1. Introduction

1Les Journées internationales 2019 de la Société d’histoire du droit et des institutions des pays flamands, picards et wallons ont eu lieu dans le magnifique couvent des Sœurs noires de la ville d’Audenarde. Notre association, qui rassemble traditionnellement des historiens du droit réputés issus des Pays-Bas, de la Belgique et du Nord de la France, est un carrefour important de la sociabilité académique et un réseau essentiel pour le développement de l’histoire du droit. Un ancien président de notre société, l’historien du droit John Gilissen (1912-1988), a toujours revendiqué l’utilité évidente de l’histoire du droit pour le temps présent. L’histoire du droit permet d’interroger le présent, et ne sert pas seulement à reconstituer des généalogies.1 Elle se distingue des autres sciences sociales par son attention au caractère spécifique et contextuel des institutions et des concepts, sans déterminisme.2

2Nos enseignements et nos recherches démontrent à quel point le passé constitue un laboratoire privilégié pour ce que le théoricien du droit Michel Troper appelle les « métaconcepts »3, qui permettent au chercheur de comparer les normes et les institutions à travers le temps et dans l’espace. Dans le réseau académique global actuel, il est tout à fait logique que nous soyons les témoins de la renaissance de l’histoire comparée du droit (avec la création de la European Society for Comparative Legal History et la revue internationale Comparative Legal History en 2010), allant même jusqu’à des plaidoyers pour une fusion des disciplines que sont l’histoire du droit et le droit comparé.4

3Les normes applicables au sein d’un territoire donné varient avec les aléas de l’histoire politique, militaire et diplomatique de l’Europe. Les thèmes de l’histoire du droit interne, comme la tendance croissante du souverain à imposer sa volonté comme législateur5 plutôt que comme juge suprême6, ou encore la relation entre droit savant et droit coutumier7, se déroulent dans un cadre géopolitique marqué par des échanges, des partages ou des unions inespérées. Les élites administratives des Pays-Bas s’inscrivent dans des réseaux transnationaux au sein de l’Empire espagnol (1515-1700) et autrichien (1715-1794). L’occupation militaire française (1700-1706/1715, 1745-1748)8 et les annexions inlassables de Louis XIV (1668/1678/1684)9 montrent à la fois les possibilités alternatives d’un autre mode d’administration et l’évolution du droit local sous la souveraineté d’un nouveau prince.10

4Les historiens du droit sont traditionnellement réticents à explorer le thème trop vaste, trop philosophique ou trop politique de la construction juridique de la paix.11 Cette vision ne correspond plus à l’état actuel du champ scientifique de l’histoire du droit, qui a vu une explosion de publications et de projets sur ce thème depuis 2001.12 La présente contribution vise à démontrer comment de grands évènements de l’histoire militaire, souvent dépeinte sous des allures évènementielle ou nationaliste, peuvent illustrer la coexistence de systèmes institutionnels et la mise en œuvre de concepts de droit international. La bataille d’Audenarde du 11 juillet 1708, évènement de taille européenne au début du XVIIIe siècle, nous en donne l’occasion.

5Des millions de documents numérisés sont désormais accessibles en ligne grâce à la Bibliothèque nationale de France (Gallica), la Bayerische Staatsbibliothek ou encore le Rijksmuseum. L’accès facile aux collections de traités entre souverains,13 à la littérature pamphlétaire14 et à l’iconographie15 permet de saisir l’importance des évènements militaires dans l’imaginaire européen commun du début du XVIIIe siècle. Les clés de lecture peuvent bien entendu être multiples : la stratégie,16 la religion17, l’économie18, l’intérêt dynastique19, la circulation de l’information,20 l’identité régionale21, la représentation de la paix22 ou encore l’histoire impériale.23

6Dans la correspondance militaire et diplomatique, l’expression « théâtre de la guerre » décrit une réalité ambiante, à travers toute la durée de la campagne.24 Mais il s’agit également d’un imaginaire, construit à travers la correspondance (derrière le rideau du secret d’État),25 comme dans l’opinion publique naissante, à travers la presse officielle (comme la Gazette) ou privée, comme en atteste le succès des « entrepreneurs de nouvelles » huguenots en République de Hollande.26

7De nombreuses sources nous racontent la rencontre de plus de 170 000 fantassins et cavaliers dans les plaines au Nord d’Audenarde, cernées par les collines d’Edelare, Ooike et Huise (cf. image 1). L’histoire sociale, économique et politique de la ville et de la châtellenie d’Audenarde offrirait du matériel à bien des analyses d’historiens du droit.27 Cependant, le cadre de la bataille de 1708 réduit ces facteurs à un pur décor. Si la bataille a lieu, c’est plutôt près de la ville, et l’enjeu n’est pas en soi le contrôle de la place et de ses fortifications renforcées par Vauban.

8Nous ne saurions être exhaustif dans la contribution présente ni sur les évènements militaires ni sur le contexte juridique bien connu de la question de la Succession d’Espagne (1659-1713), que nous avons traité de façon détaillée dans la présente revue et ailleurs.28 Il suffira de rappeler aux lecteurs que la Guerre de Succession d’Espagne (1701-1714) fut l’apogée d’une querelle entre les Habsbourg de Vienne et la Maison de Bourbon. Aussi bien Louis XIV que l’empereur Léopold Ier (1640-1705)29 avaient épousé une infante d’Espagne, fille du roi Philippe IV (1605-1665). Le camp français avançait des arguments brouillés dérivés du droit privé30. Le camp autrichien se retrancha derrière la renonciation que Marie-Thérèse d’Autriche, épouse de Louis XIV, avait dû faire avant son mariage en 1659 et derrière le testament de Philippe IV (1665). Une tentative secrète d’accommodement aboutit à un traité de partage franco-autrichien en 1668, qui ne connut plus de suite. En 1698 et 1700, Guillaume III (1650-1702) tenta d’accommoder les deux points de vue, en signant des traités de partage avec Louis XIV. 31Bien que cette logique fût la seule base solide d’une solution au problème, la méfiance entre les cours de Versailles et de Hampton Court aboutit à l’acceptation par Louis XIV du testament de Charles II d’Espagne, qui attribua toute la monarchie composite32 à Philippe d’Anjou, second petit-fils du Roi de France (1683-1746).33

2. La défaite française

2.1. Perspectives militaires

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Image 1 : plan de la bataille d’Audenarde, dressé sur place par l’ingénieur Mosberger ; source : Schouwburg van den oorlog, publié par Schenk à Amsterdam, 1708 ou 1720 ; Rijksmuseum, domaine public-libre de droits [détail]

9

10La défaite française à Audenarde est le résultat d’une accumulation de mauvaises décisions face à un adversaire imaginatif et réactif. La question de la responsabilité des commandants avait en outre des répercussions politiques internes considérables. L’armée des « Deux Couronnes » (France et Espagne) comptait près de 100 000 hommes. Face à elle, Marlbourough, qui commandait une armée multinationale, attendait les renforts du prince Eugène de Savoie, venant d’Allemagne, pour compter un effectif de 90 000 hommes. Louis, duc de Bourgogne (1682-1712), petit-fils aîné de Louis XIV, avait été envoyé par le Roi-Soleil pour commander l’armée avec Joseph-Louis duc de Vendôme (1654-1712), petit-fils de César de Vendôme, enfant naturel d’Henri le Grand (Henri IV), premier monarque Bourbon de France. La relation entre les deux hommes était plus que tumultueuse.34 Le duc de Bourgogne avait été envoyé en Flandre pour acquérir de l’expérience militaire après une première tentative malheureuse en Allemagne au début de la guerre. Peu porté sur l’art militaire, le prince était sous l’influence des quiétistes et de son mentor, l’archevêque Fénelon de Cambrai, qui critiquait la politique étrangère de Louis XIV.35 Vendôme, par contre, était un militaire très expérimenté, ayant vécu une ascension normale dans la carrière.36 Il avait tenu le prince Eugène de Savoie (1666-1736)37 en échec lors de la bataille de Cassano en 1705. Louis XIV l’avait envoyé de toute hâte aux Pays-Bas, le 1er août 1706, pour arrêter le déferlement de l’armée alliée sur le Nord de la France. Vendôme est à situer dans le groupe gravitant autour du Grand Dauphin, unique fils légitime de Louis XIV (1661-1712). La continuité de la politique du Roi-Soleil n’était pas désagréable aux courtisans qui soutenaient le Dauphin contre son propre fils, le duc de Bourgogne.

11La campagne de 1708 débute par un face-à-face indécis entre les armées des Deux Couronnes (France-Espagne) et de la Grande Alliance dans le duché de Brabant. Cependant, grâce au travail assidu du comte de Bergeyck (1644-1725)38, principal ministre du roi Bourbon Philippe V39 dans les Pays-Bas Méridionaux, les villes de Gand (5 juillet) et de Bruges (6 juillet) se livrent aux armées franco-espagnoles. Ce coup de maître leur assure le contrôle de l’Escaut (la connexion vitale avec le port d’Anvers) et du canal de Bruges à Ostende, chaînon principal de l’approvisionnement depuis le Royaume-Uni. Ainsi, l’armée dirigée par John Churchill, duc de Marlborough (1650-1722)40 est condamnée à rattraper un retard. Depuis Asse, où il attendait Eugène de Savoie, Malborough allait pourtant réussit à devancer les Français à Audenarde, ce qui constitue un exploit logistique remarquable. Les Alliés allaient parcourir 85 km à pied en 43 heures, passer la Dendre et préparer le passage de l’Escaut.

12L’année précédente (1707), la stratégie franco-bavaroise avait consisté en une grande manœuvre statique, destinée à éviter les provocations à la bataille par l’armée ennemie.41 Le succès franco-espagnol d’Almanza (mai 1707) avait alors permis de rebattre les cartes. Le maréchal de Berwick (fils naturel du Roi Catholique déchu Jacques II Stuart) semble y avoir sauvé le trône de Philippe d’Anjou.42 En 1708, la cour de Versailles espérait qu’une bataille en ligne pouvait contraindre les alliés à négocier.

13Au début de la journée du 11 juillet 1708, l’armée française est massivement présente au nord d’Audenarde, dans les alentours de Gavere sur l’Escaut, en vue de couvrir Gand (je renvoie à la carte de Mosberger ci-dessus, image 1, qui éclaire les mouvements de troupes). Quelques bataillons effectuent une mission d’exploration et de fourrage. Vendôme est surpris par l’arrivée de la colonne anglo-hanovrienne dirigée par William Cadogan (1671-1726)43. Rentrant dans Audenarde depuis les hauteurs stratégiquement importantes d’Edelare44, ce premier corps de troupes de 16 bataillons et 35 escadrons (environ 6 400 et 3 600 hommes) permet la construction de ponts temporaires en complément des ponts de pierre de la ville d’Audenarde, offrant ainsi la possibilité à l’armée alliée de rejoindre rapidement les plaines au nord de la ville.

14Sans vouloir entrer dans trop de détails, indiquons que Vendôme prend clairement le parti de chasser l’ennemi le plus tôt possible, et de le rejeter sur la rive droite de l’Escaut, mais sans encore savoir que Malborough et toute l’armée alliée les suivent de près. Bourgogne prend une posture plus hésitante. Ce désaccord devient clair quand ce dernier décide de camper sur les hauteurs de Huise, bordant environ sept kilomètres de champs depuis les remparts bastionnés de la ville d’Audenarde (cf. carte de Mosberger, image 1).45 Vendôme, par contre, descend dans la mêlée qui se crée le long de la Bloedbeek (Diepenbeek), un ruisseau qui coule près de la chaussée d’Audenarde à Gand. Le duc tente de jeter le maximum de bataillons possible afin de réduire la tête de pont de Cadogan : le déséquilibre en sa faveur est flagrant (36 bataillons alliés contre 50 bataillons français, ou environ 14 400 contre 20 000 hommes) mais la résistance reste tenace. Les colonnes prussiennes, hanovriennes, anglaises et hollandaises traversent le fleuve. Cependant, Bourgogne ne semble pas écouter des appels répétés aux renforts. A la charge désespérée de la cavalerie danoise et prussienne succèdent des actes de bravoure de la Maison militaire du Roi, mais le lieu du combat principal reste figé entre la Bloedbeek et le hameau d’Herlegem (cf. carte de Mosberger, image 1).

15La cabale du duc de Bourgogne (où on situe également l’épouse morganatique de Louis XIV, madame de Maintenon, le duc de Beauvilliers et le duc de Chevreuse) reprochera plus tard à Vendôme de s’être laissé aller. Il se serait mêlé aux combats sur le terrain comme un sous-officier ou un simple soldat, un comportement indigne d’un général. Le duc de Bourgogne s’était tenu à l’écart près du moulin de Rooigem sur une colline (cf. carte de Mosberger, image 1), pour garder une vue d’ensemble de la plaine, entrecoupée de haies, de petites routes et de cours d’eau, submergée par la fumée et la poussière résultant d’une belle journée estivale. Le maréchal de camp Puységur (1656-1743) estimant que le terrain (qu’il connaissait pourtant mal) était marécageux, aurait interdit l’envoi de renforts à Vendôme. Le prétendant anglais Jacques Stuart (1688-1766) et le duc de Berry, frère cadet du duc de Bourgogne (1686-1714) se tinrent à l’arrière, en compagnie des troupes bavaroises et de Cologne.

16En fin d’après-midi, les divisions hollandaises commandées par le maréchal Ouwerkerk (1640-1708)46 et le prince Jean Guillaume Frison (1687-1711),47 cousin de Guillaume III, traversèrent Audenarde et surent contourner le champ de bataille vers l’Ouest, empruntant un chemin couvert menant jusqu’au village d’Ooike (cf. carte de Mosberger, image 1). Montant sur les hauteurs du plateau menant du moulin de Rooigem à Ooike, Ouwerkerk menaçait d’arriver de flanc, voire dans le dos du gros de l’armée française (50 000 soldats), ainsi pris en tenaille avec l’armée de Marlborough et Eugène le long de la Bloedbeek. Le spectre d’un anéantissement du type bataille de Cannes (-216 av. J.-C.) planait, mais la manœuvre des Néerlandais arrivait trop tard pour le mener à terme.

17À la tombée de la nuit, les Alliés durent arrêter leur offensive. L’état-major français se retrouva à Huise. La moitié de l’armée n’avait pas combattu.48 Cependant, les pertes s’élevaient à un quart des effectifs des troupes engagées (11 000-14 000 hommes), qui avaient eu à faire face à presque toute l’armée alliée en fin de journée.49 Les Alliés avaient de leur côté perdu 6 000 soldats.50 Vendôme plaidait pour la continuation des combats sur les hauteurs d’Huise, utilisant les troupes « fraiches » pour repousser l’ennemi. Seul le comte d’Evreux, parent du duc de Vendôme,51 était prêt à suivre cette piste. Les autres officiers généraux préféraient la retraite derrière le canal de Gand à Bruges.

18Ainsi l’armée française marcha en direction du Nord, pour établir le quartier général à Lovendegem. Vendôme et Bourgogne firent leur entrée à Gand le 10 août. L’armée alliée, par contre, put commencer à s’attaquer à la première des conquêtes de Louis XIV : Lille et sa citadelle.52 Malgré la chute relativement rapide de la ville (24 octobre 1708) et de la citadelle (8 décembre 1708), il importe de souligner le caractère logistique très hasardeux de l’opération, comme les armées opéraient « à front renversé ».53 L’armée des Deux Couronnes pouvait toujours bloquer l’Escaut et l’approvisionnement depuis Ostende. Pendant le siège de Lille, le lieutenant-général La Mothe Houdancourt (1643-1728) tenta d’arrêter un convoi, transportant des ressources acheminées par chaloupe depuis Ostende. Sa tentative échoua misérablement à Wijnendale près de Torhout, où ses hommes (bien que beaucoup plus nombreux que les ennemis) se sont laissé tailler en pièces par Cadogan et Webb.54 Si ce malheur n’était pas encore suffisant en soi, la tentative (réussie) de Vendôme de prendre le bourg de Leffinge près d’Ostende (24 octobre 1708), coïncida avec la reddition de Lille et le retrait du maréchal de Boufflers dans la citadelle.

19Les contretemps ne s’arrêtaient pas là. En automne 1708, l’électeur Maximilien Emanuel II de Bavière (1662-1726), gouverneur-général des Pays-Bas espagnols sous Charles II d’Espagne et allié de Louis XIV, revint de campagne en Allemagne.55 Il demanda la permission d’assiéger Bruxelles (23 novembre 1708). Comme la plupart des villes (des « bicoques ») du Brabant étaient peu fortifiées et donc mal défendables, l’opération n’était pas perdue d’avance. Cependant, la population s’opposait au retour du gouverneur-général, qui se croyait pourtant bien aimé. Pendant que le siège de Bruxelles échouait, l’armée de Marlborough et Eugène réussit un autre coup de maître. Le 26 novembre 1708, presque sans coup férir, le système de garde de l’Escaut monté par Bourgogne et Vendôme fut percé de Tournai jusqu’à Gavere. En une matinée, les alliés avaient su défaire tout le système défensif français. Le 29 novembre 1708, Marlborough fut accueilli par la population de Bruxelles.

20Cette dernière humiliation fut la cause du rappel de Vendôme et de Bourgogne. Tout au long de cette campagne invraisemblable, Bourgogne avait tenté d’obtenir le départ de Vendôme à travers Madame de Maintenon et son épouse, Marie-Adélaïde de Savoie (1685-1712),56 fille de l’ambitieux duc de Savoie Victor Amédée II (1666-1732).57 Vendôme fut dépeint comme un incapable. Il ne commanda plus d’armée en 1709, se retira au château d’Anet et il fallut attendre la requête de Philippe V à son grand-père, pour que le centurion vienne sauver le front espagnol. Le duc de Saint-Simon calomnia le duc de Vendôme au vitriol dans ses mémoires.58 Saint-Simon s’opposa aux tentatives despotiques de Louis XIV d’insérer ses enfants naturels dans l’ordre de succession de la couronne, régi par les lois fondamentales.59 Le duc de Vendôme exigea une patente de général des armées, avec rang supérieur par rapport aux maréchaux de France. Quand Louis XIV décida de la lui accorder (comme il l’avait fait uniquement pour Turenne), Vendôme refusa. Il insista sur l’inclusion de sa filiation, comme descendant d’Henri IV. Pour le général, cet élément l’élevait au-dessus des autres militaires. Évidemment, il dut céder le pas devant un petit-fils de France comme le Duc de Bourgogne. Cependant, Vendôme n’accepta pas que ce dernier mît en cause son jugement militaire.

21Pour se défendre contre les attaques du clan Bourgogne, le secrétaire italien du duc de Vendôme, l’abbé placentin Giulio Alberoni (1664-1752)60 publia une défense de son maître dans la Gazette d’Amsterdam. D’un raisonnement implacable, Alberoni démontrait les faiblesses et les erreurs du clan Bourgogne.61 Le récit de la bataille d’Audenarde était parvenu à Louis XIV à travers les lettres des deux généraux, qui préféraient tous les deux parler de « combat » ou d’« incident ». Quand le lieutenant-général (futur maréchal) de Biron-Gontaut (1663-1756), fait prisonnier au tout début de la journée du 11 juillet 1708, fut relâché, il reçut audience à Fontainebleau, où la cour séjournait habituellement en été. Comme Biron prenait parti pour Bourgogne, Saint-Simon exploita son récit. La lettre d’Alberoni était destinée à contrecarrer le récit adverse. Comme le duc de Vendôme jouissait d’une popularité particulière à Paris, dans le Marais, des chansons populaires se moquaient de l’impuissance du duc de Bourgogne.

22À la cour, comme l’a démontré Emmanuel le Roy Ladurie, les deux coteries de Bourgogne et du Grand-Dauphin se chamaillaient autour de la défaite française, en essayant d’avancer leur propre idée de la succession de Louis XIV.62 Bourgogne aurait proféré que « le Royaume de France avait subsisté pendant des siècles sans Lille », feignant son indifférence devant l’échec d’une nouvelle tentative de secourir le siège de Lille en septembre 1708. L’indifférence semble également le sentiment approprié quand on apprend que Gand et Bruges se rendent aux alliés sans coup férir. Pour la première (reddition le 30 décembre, six jours après l’ouverture de la tranchée), les échevins et métiers implorèrent le malheureux lieutenant-général La Mothe Houdancourt (pourtant bien pourvu de ravitaillements) et le duc de Marlborough d’épargner la ville d’un bombardement. Pour la seconde, l’hiver glacial de 1708-1709 poussa le marquis de Grimaldi à l’évacuation de Bruges, Plassendale et Leffinge (2 janvier 1709). Depuis la désastreuse année 1706, où la France avait perdu le contrôle du Brabant et de la majeure partie du comté de Flandre,63 ainsi que tout le nord de l’Italie, on n’avait plus connu de telle déroute.

23Les noms de villages comme Huise, Eine, Lede, Ooike et de hameaux obscurs, tels que « Schaerken » ou « Bruwaene », endroits charmants de la campagne au nord d’Audenarde, firent le tour des capitales européennes. Nous venons de voir à quel niveau le récit détaillé avait des répercussions politiques à Versailles. La défaite française cinglante était indéniable. Il est tout à fait logique que la population locale s’en fît une impression, qui se traduit en un propre récit.

2.2. Perspectives locales

24Comment la bataille fut-elle perçue par les spectateurs locaux, victimes accidentelles d’un affrontement de taille européen ? La pièce de théâtre satyrique De verwaandheid der Franse ten toon gestelt. Of de Geconsterneerde Fransman, wegens de Bataille van Oudenaarden. Klugt-spel, comptant 35 pages in-8°, conservé à la Bibliothèque universitaire à Gand, imprimé auprès de « Lodewyk Bedeest » à Oudenaarde, nous en donne un indice. Le lecteur est appelé à lire la farce, rempli de « joie véritable » (« waaragtige vreugde ») après la Victoire que le Ciel vient d’accorder sur les « Ennemis ».64 L’arrogance française (« de Franse verwaantheid ») aurait exposé de façon scandaleuse le pays flamand sur le théâtre du monde, indifférent aux désastres advenus. L’heure serait donc finalement venue de renvoyer cette arrogance française chez elle, en la calomniant dans une pièce populaire (traduction libre de « haar schimpen en lasteren op een boertende wyze »).65

25L’auteur met en scène un officier français captif (« Monsieur Léger »), qui se vante de bientôt pouvoir défaire « die pauvre Ollande » et semble ignorer les malheurs de l’armée de Louis XIV face à la coalition. La chute de Gand et de Bruges au début du mois de juillet a ouvert le comté de Flandre au duc de Bourgogne, petit-fils aîné de Louis XIV.66 Léger, confiant, se frotte les mains en attendant le « Grand Vendôme » qui battra l’armée de Hollande.67 Les paysans flamands opposent à Monsieur Léger que Gand et Bruges étaient des places sans défense. Ils se moquent des Français, qui, « même après tant de désastres soufferts », ne peuvent se passer de vanter la grandeur de leurs entreprises.68 La bataille de Blenheim (13 août 1704), qui a vu l’expulsion de l’Électeur de Bavière de ses territoires, ou celle de Ramillies (23 mai 1706), qui a ouvert la plupart de la Flandre et le duché de Brabant à Marlborough et Eugène de Savoie, semblent déjà oubliées.

26Gijsbert, un des deux paysans, compare les Français captifs au Moriaan (expression désignant des personnes d’origine africaine) : « die niet veranderen zou, al wierd hy geschuurt en geschrobt » (qui ne change pas de nature, même si on le frotte à longueur de journée).69 Le lieutenant français fait sa cour à la fille d’un des deux paysans, tentant de l’impressionner. La fille flamande lui retoquant que ses vêtements sont en piteux état, le lieutenant se plaint d’attendre une lettre de change qui ne veut arriver.70 Monsieur Léger, pire encore, a également séduit la bonne et la fille d’un des paysans. Le médecin du village, venant féliciter Léger et la bonne de leur mariage, fait un diagnostic de l’état de santé de la France. Le royaume souffre d’excès d’effort cardiaque, par rapport à ses pauvres propres moyens. Une saignée s’impose.71 Un des paysans affirme que cela a déjà bien commencé à « Hoogsted » (Blenheim), Ramillies et Turin, grâce à Marlborough et « Eugeen ».72 Le docteur prescrit une nouvelle purge, qui ferait « vomir toute l’Espagne ».73 Ainsi, le cœur pourra ramener ces efforts à un niveau harmonieux.

27Perturbé par des rumeurs de défaite française, Monsieur Léger est interpelé par la bonne, qui exige qu’il l’épouse sur le champ, comme elle va entrer en accouchement.74 Le Français nie toute implication dans la grossesse, et se dérobe. La pauvre bonne tire la perruque poudrée de la tête de son ancien amant et implore la punition divine. Les paysans reviennent ensuite pour annoncer à Léger la défaite à Audenarde, ainsi que la fuite de Bourgogne et Vendôme.75 Marlborough, Eugène et Ouwerkerk ont attrapé le Français à Audenarde, l’ont battu et plumé, de telle sorte que les parties n’en sont même plus identifiables.76

28Le médecin vient confirmer la nouvelle : après la saignée et la purgation, il ne faut plus qu’un vomitif pour rétablir le patient français dans des proportions modérées. Un des paysans répond qu’on « ne se bat que pour vivre en tranquillité, en conservant ce qui est à nous, en évitant de prétendre à la propriété d’autrui. Nous nous battons que pour garder notre liberté, et pour sauver un autre de l’esclavage ».77 Le médecin annonce alors la liste définitive des pertes de la bataille. 600 prisonniers nobles et officiers et près de 8000 soldats communs. Blessés, à peu près 4371. Morts, 3199. 4000 noyés. 8000 tirés par la tête par-derrière.78 Monsieur Léger se sent malade, mais les paysans le forcent à danser la « Courante ».

3. Vie et mort de la Grande Alliance

29Si, du côté de l’armée des Deux Couronnes, les répercussions des évènements militaires sont surtout d’ordre interne, cela tient bien évidemment à la prédominance française au sein de l’alliance des Bourbons. Dans cette armée, en effet, les contingents de troupes « espagnoles » (flamandes ou wallonnes, recrutées par Bergeyck) ou de « Cologne » ne s’élèvent qu’à quelques milliers d’hommes et restent minoritaires. La situation est très différente du côté de la Grande Alliance, où les intérêts partagés de l’Empereur, du Royaume-Uni et de la République des Provinces-Unies nécessitent une activité diplomatique beaucoup plus intense. L’union de ces trois principales puissances et de leurs auxiliaires est d’autant plus sujette à la pression des évènements.

3.1. La présence allemande à Audenarde

3.1.1. Les alliés allemands de Louis XIV

30La guerre de succession d’Espagne (1700-1714)79 avait embrasé l’Europe entière et les colonies américaines80. D’un côté, les prétentions de Philippe d’Anjou étaient soutenues par son grand-père Louis XIV, roi de France, et par ses alliés allemands, les électeurs de Bavière et de Cologne. Le duc de Bavière et électeur du Saint-Empire Maximilien Emanuel II et son frère cadet Joseph Clément, archevêque-électeur de Cologne et prince-évêque de Liège (1671-1723)81, avaient choisi l’option périlleuse de s’allier avec le camp bourbon.

31Sans oser prétendre à l’exhaustivité, il convient d’esquisser les grandes lignes du droit impérial du début du XVIIIe siècle. Le droit du Saint-Empire germanique a été profondément modifié par les traités de paix de Münster et Osnabrück.82 Dans la structure médiévale et féodale de l’Empire, l’Empereur était le prodominus, le suzerain, et donc le seul titulaire du pouvoir de disposition (abusus). Ce système a été complété par la paix de Westphalie (1648), entraînant une codification structurelle des prérogatives de ses vassaux, qui se comportaient de plus en plus comme des souverains à part entière.83

32L’exercice des prérogatives féodales traditionnelles de l’Empereur était dorénavant conditionné à l’accord de la Diète permanente de l’Empire (siégeant à Ratisbonne à partir de 1663).84 L’Empire, et non l’Empereur seul, exerçait le dominium directum. Seul le corpus des membres réunis en Diète avec l’Empereur pouvait disposer d’un territoire ou d’un membre de l’Empire.85 L’article VIII §1 de l’« Instrumentum Pacis Osnabrugensis », ou le traité de paix entre l’Empereur Ferdinand III de Habsbourg et les princes protestants de l’Empire, reconnaissait le droit des membres de l’Empire de conduire une politique étrangère autonome. Les princes de l’Empire pouvaient conclure des traités (en ce compris des alliances) avec des souverains externes. Cependant, ce droit était soumis au respect de la Reichsfrieden (paix de l’Empire). Les alliances ne pouvaient pas mener à un conflit militaire opposant un membre de l’Empire aux autres ou à l’Empereur. Enfreindre cette norme constituait une infraction à la paix de l’Empire (Reichsfriedensbruch), un acte de félonie.

33Les infortunes militaires des électeurs Wittelsbach les ont rendus de moins en moins utiles comme alliés de la France et de l’Espagne. En 1702 et 1703, les troupes de la Grande Alliance (voir sous-partie suivante) occupèrent l’électorat de Cologne et la principauté de Liège. En 1704, Marlborough et Eugène de Savoie défirent complètement l’armée franco-bavaroise de Max Emmanuel II et Marsin à la bataille de Blenheim.86 Il était assez clair que les électeurs Wittelsbach s’étaient alliés à un souverain étranger auquel la Diète de l’Empire avait déclaré la guerre en mai 1702. L’Empereur, avec le soutien de la Diète Impériale, décida en avril 1706 de casser les patentes d’investiture des deux électeurs Wittelsbach, « Infracteurs de la Paix, Parjures, Felons, Contempteurs de la Liberté & des Loix d’Allemagne ».87 Leurs territoires furent confisqués.

34La Guerre de Succession d’Espagne offrit donc des occasions au jeune empereur Joseph Ier, qui avait succédé à son père en 1705,88 d’affirmer une interprétation très autoritaire de la constitution de l’Empire, qui était aussi soutenue par Leibniz. Les princes de l’Empire étaient considérés comme des vassaux liges, ou des sujets.89 Le duc de Mantoue Ferdinand Charles de Gonzage (1665-1708), qui commit l’erreur de s’allier avec les Deux Couronnes, se vit confisquer son duché lui aussi.90

3.1.2. Les princes allemands et la Grande Alliance : le cas du Hanovre

35L’alliance contre Louis XIV a été construite entre 1700 et 1702. Lors du décès de Charles II, le dernier roi Habsbourg d’Espagne, en novembre 1700, l’Empereur Léopold Ier revendiqua assertivement le duché de Milan. Il considéra que la vacance du fief en question créait une situation de retour à l’Empereur (Heimfall). La branche aînée des Habsbourg avait régné sur le duché depuis 1535. En tant que vassal de l’Empire, Charles II n’aurait pas pu disposer du fief qu’il tenait d’autrui. Le pouvoir d’investiture appartenait à l’Empereur, et non au vassal.91

36Si les Puissances Maritimes semblaient prêtes à reconnaître Philippe d’Anjou comme roi d’Espagne début de 1701, cette attitude évolua vite dans le sens inverse. Les décisions prises par Louis XIV créèrent vite de l’aigreur. La reconnaissance du titre de « roi d’Angleterre » au fils du Roi Catholique chassé Jacques II Stuart, après le décès de ce premier, était de nature à suggérer que Louis XIV ne reconnaissait plus l’accession du protestant Guillaume III comme roi d’Angleterre en 1688-1689.92 La cour de France argumentait que cette reconnaissance ne visait qu’à reconnaître le caractère princier du jeune Stuart, et non un droit de souveraineté.93 Quoi qu’il en soit, la tentative française de contrôler les échanges commerciaux avec les colonies espagnoles allait à l’encontre des intérêts économiques anglais, représentés au parlement. La décision de Philippe V d’inviter son grand-père à occuper et administrer les Pays-Bas Espagnols pour son compte finit par vexer aussi bien l’Angleterre que la République des Provinces-Unies.94

37Ainsi, une triade d’opposants se réunit à La Haye pour conclure le traité de la « Grande Alliance », le 7 septembre 1701.95 Les termes de cet accord sont de grande importance. Les alliés ne réunissent leurs forces que pour arrêter le danger d’une mainmise des Bourbons sur l’Europe. Ils visent à arriver à une aequa et rationi conveniens satisfactio : une satisfaction équitable, conforme à la raison (art. II et III).96 Charles de Habsbourg, le fils cadet de l’Empereur Léopold Ier, devra régner comme chef d’une branche séparée de la dynastie. Les Puissances Maritimes ne souscrivent donc pas à un objectif explicite de conquête complète des territoires de la monarchie composite d’Espagne.

38Au sein de l’Alliance, les efforts des Puissances Maritimes sont essentiellement financiers. La plupart des militaires mobilisés à Audenarde sont originaires de l’Empire. Non moins de 50 000 des 65 000 soldats payés par le Royaume-Uni auraient été des mercenaires allemands et danois.97 Ils sont à la solde de la Grande Alliance, qui rémunère leurs souverains.98 L’historien allemand Max Braubach (1899-1975) a rappelé l’existence de ces accords pour expliquer le manque de soutien militaire à la défense du Rhin ou de la Moselle. Les membres de l’Empire auraient préféré envoyer leurs soldats en Italie, en Flandre ou au théâtre de la Grande Guerre du Nord (1700-1721)99, plutôt que de contribuer à la défense collective de l’Empire. Cette image a été nuancée dans une étude d’histoire du droit très intéressante de Gert Brauer, publiée en 1962.100

39Brauer souligne la différence notable de système constitutionnel entre le royaume auquel l’Électeur George Louis aspire, celui d’Angleterre et d’Écosse (à partir de 1707 : le Royaume-Uni), et l’électorat de Hanovre. La monarchie constitutionnelle introduite en 1688-1689 inspirait de la méfiance.101 Brauer compare même le point de vue de George Louis et son ministre Bothmer à celui de Thomas Hobbes, alors que l’évêque de Bristol (Stafford, plénipotentiaire au Congrès d’Utrecht) et Henry St John, Vicomte de Bolingbroke (secrétaire d’État pour le département méridional) se seraient rapprochés davantage de celui de John Locke.102

40Les manœuvres diplomatiques du duc de Marlborough mettent l’électeur dans une position où le choix semble presque imposé. Le duc confronte l’électeur aux ambitions de la maison de Hohenzollern, qui gouverne le Brandebourg, la Prusse et d’autres territoires éparpillés dans le Nord de l’Allemagne. Dans beaucoup de dossiers, la maison des Guelfes (de laquelle descend George Louis) est une rivale.103 Maintenir une diplomatie active parmi les « petits » princes de l’Empire permettait également de contrebalancer les grandes puissances.104 La balance délicate entre le Danemark, la Prusse et le Hanovre était parfois aussi un désavantage pour le duc de Marlborough. Tout signe de traitement défavorable pouvait donner lieu à un rappel unilatéral des troupes du front.105 Les Puissances Maritimes ne pouvaient plus rien imposer, une fois qu’un prince allemand avait décidé motu proprio que son intérêt requérait le retour des troupes, qui lui avaient juré fidélité.106 La Guerre du Nord créait une menace permanente. Dans le pire des cas, si l’armée suédoise de Charles XII menaçait des terres des trois cours, 60 000 soldats danois, saxons, prussiens, hanovriens ou holsteinois risquaient de manquer à l’appel.

41George Louis aurait tenté d’échapper à la pression en expliquant qu’il était tenu par ses obligations comme prince de l’Empire : la contribution à l’armée impériale prime sur de possibles engagements extérieurs.107 Évidemment, le comte de Wratislaw, envoyé de l’empereur Léopold, intime au vassal de son maître que les traités conclus avec les puissances tierces ne peuvent enfreindre les obligations découlant du droit de l’Empire. Affaiblir la position de l’Empereur, comme caput imperii, en n’envoyant pas son contingent à l’armée impériale, c’est un manquement aux devoirs de vassal.108 De l’autre côté, le Royaume-Uni tentait de faire valoir que l’Act of Settlement, qui prévoyait la succession de George Louis au trône après la mort de la Reine Anne, avait créé une unité juridique d’intérêts entre l’électeur et son futur Royaume. Le souverain refusait cet amalgame, et opéra une distinction nette entre son intérêt allemand (actuel) et britannique (futur).109

42Une dispute intra-allemande semble avoir convaincu la maison de Hanovre de retirer ses régiments de l’armée impériale commandée par Ludwig von Baden (1655-1707, surnommé Türkenlouis)110. Cependant, ceci ne créa pas de vide dans le contingent impérial, comme le prince de Hessen-Darmstadt avait accepté de remplacer les troupes du Hanovre. Brauer donne l’exemple du juriste Johann Friedrich Eisenhart (1720-1783), professeur à l’université de Helmstedt rattaché à la cour de Hanovre à partir de 1759, qui publia une justification de la pratique de mise à disposition de troupes à des souverains étrangers par des membres de l’empire.111 Selon Eisenhart, l’Instrumentum Pacis Osnabrugensis permettait de conclure des traités louant des troupes auxiliaires, si l’objectif était de laisser rentrer des revenus permettant d’améliorer la prospérité de son propre état. Le prince qui concluait de pareils traités ne se serait pas exposé à une attaque légitime du souverain contre lequel les troupes pourraient être utilisées. Eisenhart jugea même la pratique en conformité avec le statut de neutralité, en se référant aux cantons suisses, qui mettaient des troupes à disposition du roi de France et du pape.112 Cependant, il reconnut — comme Wratislaw — la primauté des obligations primaires découlant du droit impérial. Les vassaux sont tenus de se battre pour la puissance, la dignité et la réputation de l’empereur. Cependant, dès qu’il avait rempli l’obligation de respecter le contingent impérial, un souverain était libre de louer encore davantage de troupes à un tiers.

43Contrairement à Eisenhart, le penseur piétiste et éclairé Friedrich Carl von Moser (1723-1798)113, fils du célèbre jurisconsulte Johann Jakob von Moser (1701-1785)114, était d’un tout autre avis. Contrairement à Eisenhart, il considérait que les membres de l’Empire ne songeaient qu’à leur propre intérêt (« Eigennutz »). Une manie se serait emparée des princes au début de la Guerre de Succession d’Espagne pour récupérer du « Subsidienfett ». Dès qu’on avait ne fût-ce que deux régiments disponibles, on se pressait pour les mettre à disposition d’un tiers. Moser considérait que les conventions conclues sans prendre en compte l’intérêt de l’Empereur ou même sans favoriser ce dernier étaient vicieuses par rapport au droit de l’Empire !115 Des traités de subsides avec des États sans alliance avec l’Empereur étaient certainement condamnables. En 1786, Moser aurait même traité les princes de « trafiquants d’êtres humains », mettant en avant la dignité humaine des soldats.116

44George Louis réussit donc, à partir de 1705, à faire renflouer ses caisses par le Royaume-Uni. Les arguments développés a posteriori par Eisenhart permettent de justifier sa démarche par une volonté indirecte d’avancer les objectifs de guerre de la maison de Habsbourg. Les Puissances Maritimes étaient alliées avec la cour de Vienne. Cependant, Brauer souligne les évidents enjeux financiers et économiques, causés par les déficiences de l’appareil étatique du Hanovre. Déjà en temps de paix, le trésor de guerre des Guelfes était déficitaire. Les hausses d’impôts étaient conditionnées à l’accord des Landesstände (états), et l’endettement auprès de riches particuliers augmentait la dépendance du souverain vis-à-vis de ces derniers.117

45Les subventions britanniques ont permis au Hanovre de faire rentrer 1,8 million de livres sterling dans ses caisses, une somme colossale pour l’époque. Paradoxalement, la base démographique de l’Angleterre suffisait à engager une grande armée, comme celle de Cromwell (1649-1658), qui compta 45 000 soldats.118 Cependant, sous le régime du Bill of Rights, le vote de crédits annuels était soumis à un débat public sur le budget de l’armée. Comment expliquer alors que le Parlement ait agréé de telles demandes financières ? Vu l’avidité des princes allemands à louer des troupes, la compétition avec la France était un risque.119

3.2. La sortie de guerre (1711-1715)

3.2.1. Les alliés allemands de Louis XIV

46La situation semblait devenir de plus en plus désespérée pour les Wittelsbach. La promesse de devenir le souverain des Pays-Bas méridionaux avait été faite à Maximilien Emanuel lors de son ralliement à Louis XIV.120 Cependant, les territoires effectivement contrôlés par les Deux Couronnes se rétrécissaient d’année en année. La chute de Tournai (31 août 1709) et celle de Mons (20 octobre 1709) obligèrent Max Emanuel à s’installer à Namur. En mai 1712, le prince Wittelsbach prit le serment de fidélité des habitants de Charleroi, de Nieuport, du comté de Namur et du duché de Luxembourg.

47L’attitude entêtée de Charles VI offrit cependant une voie de secours. Ayant quitté la table des négociations à Utrecht,121 l’Empereur continua le combat, mais sans beaucoup de succès. L’armée de Villars arriva à vaincre celle d’Eugène de Savoie dans le Haut-Rhin. Le 6 mars 1714, la paix de Rastatt122 fut signée au château du fameux commandant de l’armée impériale de 1707.123 L’Empereur est contraint d’accepter la réintégration des Wittelsbach dans leurs titres, dignités et possessions. Les dispositions du traité de Rastatt prises à leur égard sont ratifiées par les membres de l’Empire lors de la paix de Baden en Argovie (7 septembre 1714), signée avec l’Empereur comme caput Imperii et les membres de l’Empire.124 Ce dernier traité fut rédigé en latin, langue juridique, administrative et diplomatique préférée de la cour de Vienne.

48L’article XV prévoit que :

Pour ce qui est de la Maison de Baviére [sic], Sa Majesté Impériale & l’Empire consentent, par les motifs de la tranquilité publique, qu’en vertu du présent Traité, général & solemnel à faire avec l’Empereur & l’Empire, le Seigneur Joseph-Clément, Archevêque de Cologne & le Seigneur Maximilien-Emanuel de Baviére [sic], soient rétablis généralement & entiérement [sic] dans tous leurs Etats, Rangs, Prérogatives, Régaux, Biens, Dignitez Electorales & autres, & dans tous les Droits, en la maniére [sic] qu’ils en ont jouï, ont pû jouïr avant cette Guerre, & qui apartenoient [sic] à l’Archevêché de Cologne, & autres Eglises nommées ci-après, ou à la Maison de Baviére [sic], médiatement ou immédiatement.125

49La maison catholique rivale des Habsbourg récupère ses deux suffrages au collège électoral. La diplomatie française n’oubliera pas d’utiliser cette possible alternative aux Habsbourg lors de la prochaine élection impériale.126 In fine, l’élection en 1742 de Charles VII de Bavière comme Empereur après le décès de Charles VI de Habsbourg est un résultat de cette opération.

3.2.2. Les alliés allemands de la Grande Alliance

50La décision britannique de mai 1712127 de ne plus laisser les troupes participer aux combats laisse George-Louis de Hanovre pantois. L’électeur s’est clairement opposé à la conclusion d’une paix séparée, craignant toujours que l’union de la France et de l’Espagne sous une même dynastie crée la « Sclaverey » et la « Verwirrung » en Europe. Il rejette l’exclusion de l’Empereur dans les pourparlers bilatéraux franco-britanniques, qui, tout comme les traités de partage de 1698 et 1700, ne prennent pas la peine d’inclure un des principaux prétendants dans l’affaire de la succession d’Espagne.128

51Cependant, le système constitutionnel britannique impose un changement de politique, vu la victoire électorale du parti Tory. Les envoyés de George Louis à Londres reçoivent une fin de non-recevoir. La reine ne décide pas seule en matière de guerre et de paix, mais gouverne avec son parlement.129 Comme la victoire des Tories découlait d’une campagne contre les frais de la guerre, il était impératif de baisser les impôts.130 Suivant la tournure des évènements politiques internes, le gouvernement Tory veut arriver à la paix le plus vite possible. Dans son interprétation, les troupes hanovriennes sont sous commandement anglais et le restent. Le général Bülow, cependant, préfère rester auprès des troupes commandées par le prince Eugène.131 George Louis ressent la conclusion séparée de la paix comme une trahison.132 Comment un des alliés pourrait-il décider seul si l’objectif commun (la « aequa et rationi conveniens satisfactio ») avait été atteint ?

52L’opposition Whig, qui a soutenu le duc de Marlborough et son engagement continental, se range derrière George Louis, mais elle est réduite à l’impuissance, comme elle ne dispose pas de la majorité. En tout cas, pas encore… Les Whigs ne rechignent pas devant l’introduction de motions insistant sur le paiement des subsides réclamés par le Hanovre pour la période suivant le retrait britannique de la guerre.133

53Lors du traité de Rastatt, Louis XIV reconnut la dignité électorale de la maison de Brunswick-Lunebourg.134 Ce fait s’ajoutant à la reconnaissance de la succession protestante en Grande-Bretagne, lors de la paix bilatérale signée à Utrecht (sur base des articles préliminaires d’octobre 1711),135 la maison de Hanovre avait désormais les mains libres pour prendre sa revanche. Lors de son arrivée à Greenwich en août 1714, le monarque décida de limoger les ministres Tory. Une ère de trente ans de domination du parti Whig s’ouvrait.136 Un juste retour pour leur insistance, ininterrompue jusqu’en mars 1714, sur le paiement des subsides ?137

54« Unser Arreagen » sont immédiatement réclamés par les confidents hanovriens de George Ier. L’homme politique et futur grand diplomate Horatio Walpole (frère du futur premier ministre Robert) convainc le Parlement de voter le paiement rétroactif des subsides depuis mai 1712, à l’unanimité, en ce compris les Tories. La générosité semble presque sans limite : au lieu de payer les troupes jusqu’au début du congrès de paix d’Utrecht (29 janvier 1712), le montant couvre la somme normalement due en temps de guerre jusqu’à la conclusion de la paix, le 11 avril 1713.138

4. L’image de la campagne de 1708 : le théâtre du monde

55Comment envisager, par rapport au droit, la représentation des opérations militaires comme théâtre de la vie et de la mort ? Les négociations diplomatiques battent leur plein pendant la trêve hivernale, quand les opérations logistiques deviennent presque impossibles. La bataille d’Audenarde n’a en effet, en elle-même, rien de décisif, comme nous venons de le voir.

56Cependant, la campagne de 1708 recèle encore davantage de trésors. Revenons aux sources iconographiques : le Schouwburg van den Oorlog (théâtre de la guerre) publié à Amsterdam par Pieter Schenk dans les années 1720139 met en vedette tous les évènements, y compris ceux qui se sont déroulés en dehors des Pays-Bas.

4.1. Les scènes complémentaires de la pièce de 1708 : la guerre aux quatre coins de l’Europe

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Image 2 : Schouwburg van den Oorlog, détail : la flotte française sous commandement de Forbin apparaît devant la côte écossaise avec le prétendant Jacques Stuart à bord [Rijksmuseum/Domaine public — libre de droits]

57Même si les évènements d’Audenarde, de Lille et de Gand occupent l’essentiel, l’année commence en Écosse. Le 17 mars 1708, la flotte française de Forbin tente de débarquer Jacques III Stuart, le prétendant catholique, en Écosse.140 L’expédition est un échec total. L’escadre française est dispersée par l’amiral Byng. Cependant, cette diversion causa de grandes alarmes à Londres. C’est précisément dans ce contexte que nous retrouvons la dernière utilisation du véto royal par la Reine Anne. En droit public anglais, le principe « King in Parliament », ou dans ce cas « Queen in Parliament », prescrit l’exercice conjoint de la souveraineté par le monarque et les représentants de la nation dans les deux chambres du Parlement.141 Le parlement ayant approuvé un Bill pour élargir le périmètre de la milice, la reine se précipita (avec l’accord du Cabinet) pour refuser sa signature, par crainte que des éléments non fiables, jacobites, ne s’immiscent dans les forces armées appelées sous les armes. N’oublions pas non plus que l’Act of Union, en réalité plutôt un traité négocié entre les États d’Écosse et le Parlement anglais, entérine la fusion en une union réelle des royaumes d’Écosse et d’Angleterre, juridiquement séparés jusqu’alors. Pourquoi cette union — tant décriée de nos jours par les nationalistes écossais — était-elle nécessaire au XVIIIe siècle ? Parce que les règles de succession étaient toujours séparées. Théoriquement, les États d’Écosse et le Parlement anglais pouvaient opter pour un autre monarque au décès de la Reine Anne, qui avait succédé à son beau-frère Guillaume III en 1702. L’Act of Settlement voté par le parlement anglais devait également être en vigueur en Écosse.142

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Image 3 : Schouwburg van den Oorlog, détail : Elisabeth Christine de Brunswick-Wolffenbuttel, épouse de Charles de Habsbourg en Catalogne [Rijksmuseum/Domaine public — libre de droits]

58Le 25 juillet 1708, deux semaines après Oudenarde, Schenk montre Elisabeth-Christine de Brunswick (1691-1750), épouse du prétendant Habsbourg au trône d’Espagne, Charles « III », débarquant à Barcelone. Depuis l’arrivée de l’archiduc en 1704, Barcelone fait figure de capitale alternative. Cependant, le candidat Habsbourg n’est pas accepté par la population de Castille.

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Image 4 : Schouwburg van den Oorlog, détail : prise de la Sardaigne par la marine des puissances alliées au nom de Charles de Habsbourg [Rijksmuseum/Domaine public — libre de droits]

59Une solution négociée verrait donc probablement les revendications plus traditionnelles de la monarchie autrichienne satisfaites. En premier lieu, celle sur l’Italie. Schenk montre également l’invasion de la Sardaigne par les troupes des coalisés au nom de Charles « III » de Habsbourg. L’allié italien de ce dernier, le duc de Savoie, s’empare d’Exiles près de Suse et de Fenestrelles. La position de cette principauté, à cheval entre Habsbourg et Bourbon, ne peut que s’améliorer.

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Image 5 : Schouwburg van den Oorlog, détail : conquête d’Exilles, Pérouse, Saint Louis, la vallée de Saint-Martin et Fenestrelle par le duc de Savoie Victor Amédée II

60Finalement, Schenk montre l’occupation de Minorque, « au nom de Charles III ». Cette île sera revendiquée et annexée par les Britanniques, tout comme le rocher de Gibraltar.143

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Image 6 : Schouwburg van den Oorlog, détail : prise de Minorque (Port Mahon) par les alliés de Charles de Habsbourg en son nom

61Il faut donc constamment garder à l’esprit le dialogue entre la dimension européenne et la dimension locale. Les contemporains voyaient la connexion entre les divers champs de bataille d’Europe. Il était logique qu’une bataille dans les Flandres pût entraîner des répercussions pour le statut de territoires en Italie, en Allemagne, en Espagne ou aux Amériques.

4.2. Le moment décisif de chaque année de guerre : les négociations hivernales

62Les négociations qui eurent lieu à La Haye pendant l’hiver de 1707 à 1708 (25 décembre - 28 février) furent le décor d’une esquisse d’accord, qui confirmait la répartition des territoires établie à l’issue de la campagne militaire de 1707144. L’archiduc Charles recevrait les Pays-Bas espagnols et les territoires italiens, alors que Philippe d’Anjou garderait les royaumes d’Espagne et les possessions américaines et asiatiques. Cependant, chaque évènement militaire de nature à faire basculer cet ordre établi suscitait de nouvelles hypothèses et tentations.

63La situation militaire s’enlisait dans nos régions. La bataille de Malplaquet (le 11 septembre 1709) fut une sombre impasse, avec des pertes si élevées que Villars pouvait rapporter à Versailles qu’une nouvelle défaite de ce genre arriverait à mettre à genoux… l’adversaire. Marlborough et Eugène de Savoie passaient le temps à tenter de percer les camps retranchés et les lignes françaises, en prenant Douai (26 mai 1710) ou en assiégeant Bouchain (14 septembre 1711). En Espagne, le même Vendôme qui avait commandé lors la défaite d’Audenarde arriva à sécuriser les couronnes d’Espagne pour Philippe V lors de la double bataille de Brihuega et Villaviciosa (9-10 décembre 1710). Le futur principal ministre anglais James Stanhope y fut fait prisonnier.145

64L’option de négociations avec les Puissances Maritimes et l’Empereur était vouée à l’échec. À Geertruidenberg (près de La Haye), Colbert de Torcy, secrétaire d’État des affaires étrangères de Louis XIV, était prêt à de grandes concessions. Cependant, l’injonction de chasser soi-même son petit-fils d’Espagne était inacceptable pour Louis XIV.146 Le hasard dynastique changea totalement la situation. Le décès inopiné du jeune empereur Joseph Ier, victime de la vérole, mit en danger l’aequa et rationi convenientem satisfactio tant chérie des Puissances Maritimes.147 Pourquoi se battre pour Charles de Habsbourg, quand ce dernier sera élu Empereur du Saint-Empire germanique à Francfort ? Pourquoi ressusciter l’Empire de Charles Quint (1515-1555), dominant l’Europe à l’aide des revenus des colonies espagnoles d’Amérique, contrôlant la majeure partie de l’Italie, les pays héréditaires de la monarchie autrichienne et une partie des Balkans, l’héritage bourguignon et la majeure partie de la péninsule ibérique ? La combinaison d’une puissance terrestre et maritime serait trop formidable pour Versailles… ainsi que pour Londres.

65Suite à cet évènement cardinal, les négociateurs arrivèrent à fixer une répartition lors de nouvelles tentatives bilatérales, entre la France et la Grande-Bretagne, qui aboutirent à la signature des articles préliminaires de paix en octobre 1711.148 Le ministère Tory qui prit le pouvoir en 1711 avait remporté les élections pour la Chambre des Communes en fustigeant les dépenses militaires inutiles consenties pour la gloire d’un prétendant Habsbourg, accusant les alliés hollandais de tirer profit de la Grande Alliance.149 Il était assez évident qu’un accord de paix permettrait d’arrêter le versement de subsides aux princes allemands.150

66Le Congrès d’Utrecht entérina les rapports de force fixés dans cette négociation. Le retrait des troupes britanniques, ou des troupes à la solde du trésor de Londres, laissait l’Électeur de Hanovre et les autres princes allemands aux côtés des troupes impériales et hollandaises, comme nous venons de voir en seconde partie de la présente contribution. Eugène de Savoie fut défait par le maréchal de Villars à Denain (24 juillet 1712), ce qui fut suivi par la reprise de Bouchain, du Quesnoy et de Douai, signe définitif de la solidité de la « ceinture de fer » construite par Vauban.151

5. Conclusion

67Le transfert de la souveraineté sur les Pays-Bas méridionaux, de la maison des Habsbourg d’Espagne à celle de Vienne, est acté dans les traités de paix d’Utrecht152, de Rastatt153 et de Baden154. La relation triangulaire entre l’Empereur et les Puissances Maritimes reste pertinente. Le transfert effectif ne s’opère qu’après la signature du Traité de la Barrière à Anvers, le 15 novembre 1715.155 Ainsi, la République des Provinces-Unies obtient sa « sécurité » promise lors du Traité de la Grande-Alliance.156

68Cependant, les implications juridiques de la Guerre de Succession ont été bien plus larges et complexes. Si l’impact n’est pas comparable aux guerres de la Révolution Française et de l’époque napoléonienne, la Guerre de Succession d’Espagne a affecté l’interprétation du droit de l’Empire germanique, du droit constitutionnel anglais ou (depuis 1707) britannique et espagnol, l’application spécifique de la théorie de la reconnaissance, de l’interprétation des traités d’alliance, ou encore, de façon embryonnaire, de la hiérarchie des normes.

69La bataille d’Audenarde du 11 juillet 1708 intervient dans une année riche en évènements. Cette richesse n’a pas forcément rapport aux conséquences immédiates. La chute de Lille n’entraîne pas la ruine de la France ou sa défaite définitive, tout comme la bataille n’efface pas la présence française à Tournai, à Nieuport ou à Ypres. Cependant, la présence de George II, futur électeur de Hanovre et roi de Grande-Bretagne,157 du prétendant catholique Jacques III,158 de troupes bavaroises et de Cologne, du successeur présumé de Louis XIV et d’un petit-fils de bâtard royal, le duc de Vendôme, sont des symboles des questions de droit public de l’époque.

Notes

1 J. Gilissen, « Histoire comparée du droit : l’expérience de la Société Jean Bodin », dans M. Rotondi (dir.), Buts et méthodes du droit comparé. Aims and methods of comparative law, New York, Oceana, 1973, p. 256‑297. Cet esprit anima également la Revue de droit international et de législation comparée, fondée en 1869 pour soumettre les États à une régulation correspondant aux nécessités d’un monde de plus en plus interdépendant. M. Koskenniemi et V. Kari, « A More Elevated Patriotism: The Emergence of International and Comparative Law (Nineteenth Century) », dans H. Pihlajamäki, M. D. Dubber et M. Godfrey (dir.), The Oxford Handbook of European Legal History, Oxford, OUP, 2018, p. 974‑999 ; G. Rolin-Jaequemyns, « De l’étude de la législation comparée et du droit international », dans Revue de droit international et de législation comparée, I, 1869.

2 J. Gilissen, « Vergelijkende rechtsgeschiedenis: Doel en methode », dans H. Bijneveld et al. (dir.), Provocatie en inspiratie: Liber Amicorum Leopold Flam, Antwerpen, Ontwikkeling, 1975, p. 844 : « Gevaarlijker nog is deze begripsverwarring bij de specialisten van de andere humane wetenschappen, bijzonder bij de wijsgeren en de sociologen. Zij gebruiken in hun wetenschap dezelfde woorden als de jurist en de historicus om bepaalde instellingen aan te duiden, zonder zich rekenschap te geven dat deze termen slechts de instelling kenschetsen op één bepaald tijdstip en in één bepaalde streek. De ontwikkeling van de begrippen die instellingen aanduiden, is in het algemeen te weinig gekend, zelfs zelden bestudeerd, zodat begripsverwarring meestal onvermijdelijk is. »

3 M. Troper, « Le métaconcept de hiérarchie des normes et son utilité pour l’histoire du droit », dans N. Laurent-Bonne & X. Prévost (dir.), Penser l’ordre juridique médiéval et moderne. Regards croisés sur les méthodes des juristes (I), Paris, LGDJ, 2016, p. 159‑172.

4 H. Pihlajamäki, « Merging Comparative Law and Legal History: Towards an Integrated Discipline », dans The American Journal of Comparative Law, 66-4, 2018, p. 733‑750. Voir également les récents Id., M. D. Dubber et M. Godfrey (dir.), The Oxford Handbook of European Legal History, Oxford, New York, Oxford University Press, 2018, et M. D. Dubber et C. Tomlins (dir.), The Oxford Handbook of Legal History, Oxford, Oxford University Press, 2018.

5 J.-M. Cauchies, « Es plantar un mundo nuevo »: légiférer aux anciens Pays-Bas (XIIe-XVIIIe siècle), Bruxelles, Palais des Académies, 2019 ; O. Beaud, La puissance de l’Etat, Paris, PUF, 1994.

6 R.C. Van Caenegem, « Les appels flamands au Parlement de Paris au moyen âge », dans Études d’histoire du droit privé offertes à Pierre Petot, Paris, LGDJ, 1959, p. 61‑68.

7 J. Gilissen, « Les phases de la codification et de l’homologation des coutumes dans les XVII Provinces des Pays-Bas », dans Tijdschrift voor Rechtsgeschiedenis, XVIII, 1937, n° 1-2, p. 36‑67, 239‑290.

8 H. Van Houtte, Les occupations étrangères en Belgique sous l’Ancien Régime, Gand, Van Rysselberghe et Rombaut, 1930, vol. I ; J. E. Neve, Gand sous l’occupation de Louis XIV, Gand, Claeys-Verheughe, 1929.

9 J. A. Lynn, The Wars of Louis XIV, 1667-1714, Londres, Longman, 1999 ; L. Bély, Louis XIV. Le plus grand roi du monde, Paris, Éditions Jean Paul Gisserot, 2017 ; O. Chaline, Le règne de Louis XIV, Paris, Flammarion, 2009; P. Mansel, King of the World: The Life of Louis XIV, Londres, Penguin Books, 2019.

10 Serge Dauchy et Véronique Demars-Sion, Jurisprudence du Parlement de Flandre de Georges de Ghewiet, Bruxelles, SPF Justice, 2008 (Recueil de l'ancienne jurisprudence de la Belgique, 2e série).

11 Avec des exceptions, bien entendu. Voir J. Gilissen, « Essai d’une histoire comparative de l’organisation de la paix », dans Recueils de la Société Jean Bodin pour l’histoire comparative des institutions, 14-1, 1962, p. 5‑75. Pour une approche interdisciplinaire récente, combinant paix intérieure et extérieure : I. Dingel, M. Rohrschneider, I. Schmidt-Voges, S. Westphal et J. Whaley (dir.), Handbuch Frieden im Europa der Frühen Neuzeit. Handbook of Peace in Early Modern Europe, Berlin/Boston, De Gruyter Oldenbourg, 2021 (Reference).

12 F. Dhondt, « Recent Research in the History of International Law », dans Tijdschrift voor Rechtsgeschiedenis, LXXXIV, 2016, n° 1-2, p. 313‑334.

13 J. Du Mont de Carels-kroon (dir.), Corps universel diplomatique du droit des gens, La Haye, Pieter Husson & Charles Levier, 1731, [ci-après CUD] vol. VIII.

14 J. Metzdorf, Politik, Propaganda, Patronage : Francis Hare und die englische Publizistik im spanischen Erbfolgekrieg, Mayence, von Zabern, 2000 (Veröffentlichungen des Instituts für Europäische Geschichte Mainz. Abteilung für Universalgeschichte).

15 H. ZieglerDer Sonnenkönig und seine Feinde : die Bildpropaganda Ludwigs XIV. in der Kritik, Petersberg, Imhof, 2010 (Studien zur internationalen Architektur- und Kunstgeschichte); H. F. K. van Nierop, Romeyn de Hooghe: de verbeelding van de late Gouden Eeuw, Zwolle, Waanders Uitgeverij, 2008 ; A. Sarazin et J.-Y. Sarazin, Hyacinthe Rigaud 1659-1743, Dijon, Faton, 2016 ; T. Claydon et C.-E. Levillain (dir.), Louis XIV outside in : images of the Sun King beyond France, 1661-1715, Farnham, Ashgate, 2015 (Politics and Culture in Europe, 1650-1750) ; P. Burke, Louis XIV. Les Stratégies de la Gloire, trad. P. Chemla, Paris, Seuil, 2007.

16 J. B. Hattendorf, England in the war of the Spanish succession. A study of the English view and conduct of grand strategy, 1702-1712, New York, Garland, 1987 (Modern European History).

17 D. Cruz González, Une guerre de religion entre princes catholiques : la succession de Charles II dans l'Empire espagnol, Paris, Éditions de l’ÉHESS, 2005 (Civilisations et Sociétés) ; L. S. Frey et M. L. Frey, « The Confessional Issue and Utrecht: Ambassadors and Clerics, Spies and Rebels », dans L. Bély, G. Poumarède et G. Hanotin (dir.), La Diplomatie-monde. Autour de la paix d’Utrecht 1713, Paris, Pedone, 2019, p. 31‑40 (Histoire de la diplomatie et des relations internationales) ; A. C. Thompson, Britain, Hanover and the Protestant interest, 1688-1756, Woodbridge, Boydell, 2006 (Studies in early modern cultural, political and social history).

18 A Alimento et K. Stapelbroek (dir.), The politics of commercial treaties in the eighteenth century: balance of power, balance of trade, Basingstoke, Palgrave, 2017.

19 L. Bély (dir.), La présence des Bourbons en Europe, XVIe-XXIe siècle, Paris, PUF, 2003.

20 M. Pohlig, Marlboroughs Geheimnis. Strukturen und Funktionen der Informationsgewinnung im Spanischen Erbfolgekrieg, Cologne, Böhlau, 2016 (Externa).

21 J. Albareda i Salvadó (dir.), Catalunya i els tractats internacionals, El Prat de Llobregat, Rúbrica, 2003; P. McCluskey, Absolute monarchy on the frontiers. Louis XIV's military occupations of Lorraine and Savoy, Manchester, Manchester University Press, 2016 (Studies in early modern European history).

22 R.E. De Bruin, C. van der Haven L. Jensen & D. Onnekink (eds.), Performances of Peace: Utrecht 1713, Leiden/Boston, Martinus Nijhoff/Brill, 2016.

23 A.A. Olivas, Loyalty and disloyalty to the Bourbon Dynasty in Spanish America and the Philippines during the War of the Spanish Succession (1700-1715), Los Angeles, UCLA, thèse de doctorat inédite, 2013.

24 J. Dumont, J. Rousset de Missy et J. Van Huchtenburg, Oorlogskundige beschryving van de veldslagen, en belegeringen, der drie doorluchtige en wydvermaarde krygsoversten, hunne vorstelyke hoogheden, den prins Eugenius van Savoye, den prins en hertog van Marlborough, en den prins van Oranje-en Nassau-Vriesland, La Haye, Isaac van der Kloot, 1729.

25 G. Rowlands, « Louis XIV et la stratégie de cabinet », dans Revue historique des armées, 222/1, 2001, p. 25-34.

26 M. Brétéché, Les compagnons de Mercure : journalisme et politique dans l’Europe de Louis XIV, Ceyzérieu, Champ Vallon, 2015 ; L. Bély (dir.), Les circulations internationales en Europe (1680-1780), Paris, PUPS, 2011 (Association des historiens modernistes des universités).

27 L. Dhondt, « Een schets van de geschiedenis van de stad en van een bijzondere symbiose met het platteland », dans I. De Meûter et M. Vermeiren-Vanwelden (dir.), Oudenaardse wandtapijten van de 16de tot de 18de eeuw, Tielt, Lannoo, 1999, p. 13‑22.

28 F. Dhondt, « Entre droit privé et droit international : la succession d’Espagne aux XVIIe et XVIIIe siècles », dans Cahiers du CRHIDI, n°35‑36: Histoire(s) du droit, dir. E. Falzone & M. Moulart, 2011, p. 61‑102 ; Id., « From Contract to Treaty: the Legal Transformation of the Spanish Succession, 1659-1713 », dans Journal of the History of International Law, XIII, 2011, n° 2, p. 347‑375 ; Id., Balance of Power and Norm Hierarchy. Franco-British Diplomacy after the Peace of Utrecht, Leyde/Boston, Martinus Nijhoff/Brill, 2015 (Legal History Library/Studies in the History of International Law).

29 J. Bérenger, Léopold Ier (1640-1705) : fondateur de la puissance autrichienne, Paris, PUF, 2004 ; M. Frey et L. Frey, A Question of empire : Leopold I and the war of Spanish succession, 1701-1705, New York, Columbia University Press, 1983 (East European monographs; Studies on society in change).

30 A. Bilain, Traité des droits de la reine très-chrétienne sur divers États de la monarchie d’Espagne, Paris, Impr. royale, 1667 ; D. Montariol, Les droits de la reine. La guerre juridique de dévolution (1667-1674), thèse de doctorat en droit, Université Toulouse I, Toulouse, 2005.

31 W. Troost, William III the Stadholder-king : a political biography, trad. J.C. Grayson, Aldershot, Ashgate, 2005 ; L. A. Ribot García et José María Iñurritegui Rodríguez (dir.), Europa y los tratados de reparto de la monarquía de España, 1668-1700, Madrid, Marcial Pons, 2016 (Colleción Historia; Biblioteca Nueva) ; J. L Arroyo Vozmediano, « Spain and the Partition Treaties (1697-1700) », dans The International History Review, XLI, 2019, n° 1, p. 178‑199.

32 J. H. Elliott, « A Europe of Composite Monarchies », dans Past & Present n° 137, 1992, p. 48-71.

33 G. Hanotin, Ambassadeur de deux couronnes : Amelot et les Bourbons entre commerce et diplomatie, Madrid, Casa de Velázquez, 2018 (Collection de la Casa de Velázquez).

34 F. Dhondt, Op Zoek naar Glorie in Vlaanderen. De Zonnekoning en de Spaanse Successie, 1707-1708, Heule, UGA, 2012, p. 168-172 (Standen en Landen/Anciens Pays et Assemblées d’États); A. Sarazin & J.-Y. Sarazin, Rigaud, op. cit., II, p. 277-279.

35 L. Bély, « Fénelon face à la guerre et à la frontière », dans G. Deregnaucourt et P. Guignet (dir.), Fénelo n: évêque et pasteur en son temps, 1695-1715, Villeneuve d’Asq, Université Charles de Gaulle - Lille 3, 1996, p. 243‑257 (Histoire et littérature régionales) ; M. Fumaroli, Dans ma bibliothèque. La guerre et la paix, Paris, Les Belles Lettres/de Fallois, 2021

36 F. El Hage, Le duc de Vendôme: la gloire ou l’imposture, 2016 (Portraits) ; L. Truc, MM. de Vendôme ou les pourceaux d’Epicure, Paris, La Librairie Française, 1956 ; J.-P. Desprat, Les bâtards d’Henri IV. L’épopée des Vendômes, 1594-1727, Paris, Perrin, 1994 ; A. Sarazin & J.-Y. Sarazin, Rigaud, op. cit., II, p. 195-196.

37 F. El Hage, « Le duc de Vendôme en Italie (1702-1706) », dans H. Drévillon, B. Fonck et J.-Ph. Cénat (dir.), Les dernières guerres de Louis XIV 1688-1715, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017 (Histoire), p. 191-203; A. Kirchhammer, Feldzüge des prinzen Eugen von Savoyen nach den Feld-Acten und anderen authentischen Quellen, Vienne, Verlag des K.u.K. Generalstabes, 1885; D. McKay, Prince Eugene of Savoy, London, Thames & Hudson, 1977 (Men in Office).

38 R. De Schryver, Jan van Brouchoven graaf van Bergeyck 1644-1725 : een halve eeuw staatkunde in de Spaanse Nederlanden en in Europa, Brussel, Paleis der Academiën, 1965 (Verhandelingen van de Koninklijke Vlaamse Academie voor Wetenschappen, Letteren en Schone Kunsten van België; Klasse der Letteren), p. 359-361.

39 H. Kamen, Philip V of Spain. The King who Reigned Twice, New Haven (Conn.), Yale UP, 2001; Sarazin & J.-Y. Sarazin, Rigaud, op. cit., II, p. 246-248.

40 W. Churchill, Marlborough. His Life and Times, Chicago, University of Chicago Press, 2000-2002.

41 F. Dhondt, Op Zoek naar Glorie, op. cit., p. 145-160.

42 J.-P. Bois, « Almanza », dans J. Garnier (dir.), Dictionnaire Perrin des guerres et des batailles de l’histoire de France, Paris, Perrin, 2004, p. 53‑54. Soulignons que l’année 1707 coïncide avec l’abolition des fueros (privilèges locaux) des couronnes d’Aragon par Philippe V (par les decretos de Nueva Planta), élément majeur dans le déclenchement de la révolte catalane contre la monarchie des Bourbons. En 1713, Philippe V modifie le droit de succession à la couronne d’Espagne pour en exclure les femmes ayant eu des descendants masculins légitimes. J. M. Iñurritegui Rodríguez, Gobernar la ocasión. Preludio político de la Nueva planta de 1707, Madrid, Centro de estudios políticos y constitucionales, 2008 (Historia de la sociedad política).

43 J. Falkner, « Cadogan, William, Earl Cadogan (1671/2–1726) », dans Oxford Digital Dictionary of National Biography, 2008. www.oxforddbn.com, dernière consultation le 29.II.2020. Cadogan est bien connu pour avoir extorqué des « gratifications » aux autorités locales pendant l’occupation anglo-batave, A.J. Veenendaal sr., Het Engels-Nederlands condominium in de Zuidelijke Nederlanden tijdens de Spaanse Successieoorlog, Utrecht, Kemink, 1946, 283-292.

44 F. Dhondt, « Op één nacht van Parijs: Oudenaarde als vestingstad op het slagveld van Europa (1600-1819) », dans R. Castelain, G. Van Kerkhoven et P. Trio (dir.), Tijd voor Oudenaarde, Brugge, Die Keure, 2012, p. 64‑77.

45 Cf. la description éloquente du terrain chez A. Kirchhammer, Feldzüge, op. cit., vol. X, p. 339-341.

46 Hendrik van Nassau-Ouwerkerk (1640-1708), maréchal de camp des troupes hollandaises depuis 1703 : M. Bruggeman, Nassau en de macht van Oranje. De strijd van de Friese Nassaus voor erkenning van hun rechten, 1702-1747, Hilversum, Verloren, 2007, p. 236-237.

47 Ibid.

48 « État des bataillons qui ont combattu le 11 juillet 1708 », SHD, Armée de Terre, A1, 2018, n° 89, publié chez F.E. de Vault et J.J.G. Pelet (dir.), Mémoires militaires relatifs à la succession d’Espagne sous Louis XIV, Paris, Imprimerie Nationale, 1850, vol. VIII, p. 385.

49 Le nombre exact des pertes est difficile à évaluer. Clément Oury mentionne 4 000 morts et 7 000 prisonniers dans sa synthèse la plus récente (C. Oury, La Guerre de Succession d’Espagne. La fin tragique du Grand Siècle, Paris, Tallandier, 2020, p. 357). Un manuscrit consulté par l’auteur du présent article au Service Historique de la Défense en 2008 mentionne 3 000 morts et autant de blessés et 4 000 prisonniers, soit 14 000 hommes au total (Barbier, « Le champ de Mars, ou les campagnes en Flandre, 1702-1713 : Journal exact des campagnes de 1707 et 1708 », SHD, Mémoires et Reconnaissances, 1 M 73-74 ; F. Dhondt, Op zoek naar Glorie, op. cit., p. 197-222). Oury évalue le nombre de troupes « égarées » jusqu’à Lille ou Tournai à 15 000 hommes (C. Oury, La Guerre de Succession d’Espagne, op. cit., p. 268). Pour l’infanterie, le rapport de l’inspecteur Contades du 3 août 1708 mentionne 9 000 hommes rayés de l’ordre de bataille (SHD, Armée de terre, A1, 2082, nr° 36, publié chez F.E. de Vault et J.J.G. Pelet (dir.), Mémoires militaires, op. cit., vol. VIII, p. 412).

50 C. Oury, La Guerre de Succession d’Espagne, op. cit., p. 268, évalue les pertes alliées à « autant » de morts et de blessés. Le décompte « final » est difficile à faire vu que, si l’on tient compte de l’état de la médecine militaire au début du XVIIIe siècle, 30% des blessés sont probablement morts des suites de leurs blessures (H. Drévillon et B. Fonck, « Introduction », dans H. Drévillon, B. Fonck et J.-Ph. Cénat (dir.), Les dernières guerres de Louis XIV, op. cit., p. 18-19 : « Nous pouvons ainsi estimer que pour un soldat tué au combat, un autre mourait des suites de ses blessures et encore 3 autres de maladie »). Ceci explique aussi la « large fourchette » des soldats morts pendant la guerre (tous belligérants confondus) : « entre 700 000 et 1 250 000 » (Ibid., p. 19).

51 Henri Louis de La Tour d’Auvergne (1679-1753), voir A. Sarazin et J.-Y. Sarazin, Rigaud, op. cit., II, p. 280-281 et 311.

52 M. Sautai, Le siège de la ville et de la citadelle de Lille en 1708, Lille, Lefebvre-Ducrocq, 1899.

53 C. Oury, La Guerre de Succession d’Espagne, op. cit., p. 268.

54 F. Dhondt, Op Zoek naar Glorie, op. cit., p. 250-252.

55 R. De Schryver, Max II. Emanuel von Bayern und das spanische Erbe; Die europäischen Ambitionen des Hauses Wittelsbach 1665-1715, Mayence, von Zabern, 1996 (Veröffentlichungen des Instituts für europäische Geschichte Mainz).

56 G.-P. d’Haussonville, La duchesse de Bourgogne et l’alliance savoyarde sous Louis XIV, Paris, C. Lévy, 1898.

57 G. Symcox, Victor Amadeus. Absolutism in the Savoyard State 1675-1730, Londres, Thames & Hudson, 1983 (Men in Office).

58 L. de Rouvroy duc de Saint-Simon, Mémoires, éd. A. de Boislisle, Paris, Librairie Hachette, 1902, t. XVI, p. 177-182 ; F. Dhondt, Op Zoek naar Glorie, op. cit, p. 211-214.

59 F. Garrisson, « Lois fondamentales », dans L. Bély (dir.), Dictionnaire de l’Ancien Régime, Paris, PUF, 2010, p. 735‑757.

60 J. Rousset de Missy, Histoire du Cardinal Alberoni et de son ministère, À La Haye, Chez la veuve d’Adrien Moetjens, 1720 ; R. Boitet, Ontwerp van den kardinaal Alberoni, om het Turksche ryk onder de gehoorzaamheit van de Christen mogentheden te brengen, Delft, s.n., 1736 ; J. M. Alberoni, Testament politique du cardinal Jules Alberoni, recueilli De divers Mémoires, Lettres & Entretiens de Son Éminence, Lausanne, Marc-Michel Bousquiet & Compagnie, 1754 ; E. Bourgeois (dir.), Lettres Intimes au Comte de Rocca, 1892 ; Émile Bourgeois, La Diplomatie secrète au XVIIIe siècle, ses débuts. II. Le Secret des Farnèse, Philippe V et la politique d’Alberoni, Paris, Armand Colin, 1909 ; M. R. Vesnitch, « Cardinal Alberoni: An Italian Precursor of Pacifism and International Arbitration », dans American Journal of International Law, VIII, 1913, n°1, p. 51‑82 ; P. Castagnoli, Il Cardinale Giulio Alberoni, Piacenza, Collegio Alberoni, 1929-1931 ; S. Harcourt-Smith, Cardinal of Spain: the Life and Strange Career of Giulio Alberoni, New York, Knopf, 1955 ; N. Sallés, Giulio Alberoni y la dirección de la política exterior española después de los tratados de Utrecht: 1715-1719, thèse de doctorat en histoire moderne, Universitat Pompeu Fabra, Barcelona, 2016.

61 F. Dhondt, Op Zoek naar Glorie, op. cit., p. 214-217.

62 E. Le Roy Ladurie, Saint-Simon ou le système de la Cour, Paris, Fayard, 1997.

63 J. Ostwald, « The “Decisive” Battle of Ramillies, 1706: Prerequisites for Decisiveness in Early Modern Warfare », dans Journal of Military History, 64-3, 2000, p. 649‑677.

64 De verwaandheid der Franse ten toon gestelt, of de geconsterneerde Fransman, wegens de battaille van Oudenaarden: klugt-spel, Lodewyk Bedeest, 1708, p. 1. Consultable en ligne : https://lib.ugent.be/catalog/bkt01:000239182. Dernière consultation 28 février 2020.

65 Ibid., p. 1‑2.

66 Ibid., p. 6.

67 Ibid., p. 20.

68 Ibid., p. 10.

69 Ibid.

70 Ibid., p. 12.

71 Ibid., p. 24.

72 Ibid.

73 Ibid., p. 25.

74 Ibid., p. 26.

75 Ibid., p. 28.

76 Ibid., p. 29.

77 Ibid., p. 31.

78 Ibid., p. 32. “Dooden, drie duyzend, een hondert, seven en t’negentig, of daer omtrent, van vooren doot geschoten of gestoken. Circa vier duyzend verdronken, en van agteren geschoten zoo door de kop, als anders, omtrent seven, à agt duyzend.

79 J. Albareda i Salvadó, La guerra de sucesión de España, 1700-1714, Barcelona, Crítica, 2010 ; A. Álvarez-Ossorio, B. J. García García et V. León Sanz (dir.), La pérdida de Europa. La guerra de Sucesión por la Monarquía de España, Madrid, Fundación Carlos de Amberes, 2007.

80 L. Bély, « Behind the Stage: The Global Dimension of the Negotiations », dans R. E. De Bruin, C. Van der Haven, L. Jensen et D. Onnekink (dir.), Performances of Peace, op. cit., p. 22‑39 ; I. Schmidt-Voges et A. Crespo Solana (eds.), New worlds? : transformations in the culture of international relations around the Peace of Utrecht, Abingdon, Routledge, 2017 (Politics and Culture in Europe, 1650-1750).

81 B. Demoulin, « Joseph-Clément de Bavière, prince d’Empire subsidié (1702-1715) », dans Revue du Nord, 416, 2015, p. 747‑761 ; Id., Politique et croyances religieuses d’un évêque et prince de Liège: Joseph-Clément de Bavière (1694-1723), Liège, Société des bibliophiles liégeois, 1983 ; P. Harsin, Les Relations extérieures de la principauté de Liége sous Jean Louis d’Elderen et Joseph Clément de Bavière (1688-1718), Liége, H. Vaillant-Carmanne, 1927 ; M. Braubach, « Kurfürst Joseph Clemens von Köln als Vermittler zwischen Versailles und Wien », dans M. Braubach, Diplomatie und geistiges Leben im 17. und 18. Jahrhundert. Gesammelte Abhandlungen, Bonn, Röhrscheid Verlag, 1969 (Bonner historische Forschungen), p. 289-300.

82 D. Croxton et A. Tischer (dir.), The Peace of Westphalia. An Historical Dictionary, Westport (Conn.), Greenwood Press, 2002; G. Braun, La connaissance du Saint-Empire en France 1643-1756, Paris, Oldenbourg, 2010 (Pariser historische Studien).

83 La législation (pour l’Empire en tant que tel), les impôts impériaux, le recrutement de troupes ou la déclaration de guerre étaient réservés à la Diète de l’Empire. B. Nischan, « Westphalia, Peace of », dans J. W. Zophy (dir.), The Holy Roman Empire: A Dictionary Handbook, Westport (Conn.), Greenwood Press, 1980, p. p. 487..

84 N. Leher, Die rechtliche Stellung des auswärtigen Gesandten beim Immerwährenden Reichtstag zu Regensburg. Eine rechtshistorische Untersuchung unter Auswertung der Schriften zum Ius Publicum des Alten Reichs, thèse de doctorat en histoire du droit, Universität Aachen, Aachen, 2003. Voir également W. Burgdorf, Protokonstitutionalismus die Reichsverfassung in den Wahlkapitulationen der römisch-deutschen Könige und Kaiser 1519 – 1792, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2015 (Schriftenreihe der Historischen Kommission bei der Bayerischen Akademie der Wissenschaften).

85 R. Freiherr von Schönberg, Das Recht der Reichslehen im 18. Jahrhundert. Zugleich ein Beitrag zu den Grundlagen der bundesstaatlichen Ordnung, Heidelberg/Karlsruhe, Müller, 1977, p. 59 (Studien und Quellen zur Geschichte des deutschen Verfassungsrechts, Reihe A, Studien).

86 C. Oury, Blenheim, Ramillies, Audenarde. Les défaites françaises de la guerre de Succession d’Espagne (1704-1708), thèse de l’Ecole des Chartes, Paris, Ecole des Chartes, 2005.

87 Lettres patentes de l’Empereur Joseph pour mettre au Ban de l’Empire le prince Joseph Clément de Baviere [sic]…, Vienne, 29 avril 1706, dans CUD, VIII/1, n° LXII, 191-193 ; Lettres Patentes de l’Empereur Joseph pour mettre au Ban de l’Empire Maximilien Emanuel, Electeur & Duc de Baviere [sic], Vienne, 29 avril 1706, Ibid., n° LXIII, 193-194. Notons que les titres et dignités ecclésiastiques de Joseph Clément tombaient sous la compétence exclusive du pape ; J. Whaley, Germany and the Holy Roman Empire. Volume II: the Peace of Westphalia to the Dissolution of the Reich 1648-1806, Oxford, Oxford University Press, 2012 (Oxford history of early modern Europe), p. 122-123.

88 C. W. Ingrao, In Quest and Crisis: Emperor Joseph I and the Habsburg Monarchy, West Lafayette (Ind.), Purdue University Press, 1979.

89 R. F. von Schönberg, Recht der Reichslehen, op. cit, p. 60 ; J. Whaley, Germany and the Holy Roman Empire, op. cit., p. 101. On y ajoute souvent l’ambition de Leibniz de construire une organisation pacifique de la chrétienté toute entière, voir J. Nijman, « Leibniz’s Theory of Relative Sovereignty and International Legal Personality: Justice and Stability or the Last Great Defence of the Holy Roman Empire », IILJ Working Paper, 2004/2.

90 J. Whaley, Germany and the Holy Roman Empire, op. cit., p. 124.

91 Voir B. Stollberg-Rilinger, « Le rituel de l’investiture dans le Saint-Empire de l’époque moderne : histoire institutionnelle et pratiques symboliques », dans Revue d’histoire moderne et contemporaine, LVI, 2009, n° 2, p. 7‑29.

92 J. Israël (dir.), The Anglo-Dutch Moment: Essays on the Glorious Revolution and its world impact, Cambridge, Cambridge University Press, 1991.

93 G. Réal de Curban, La Science du Gouvernement. Tome Cinquième, contenant le droit des gens, Paris, Les libraires associés, 1764, p. 93.

94 Je me réfère au magnifique chapitre de W. J. Roosen, « The Origins of the War of the Spanish Succession », dans J. Black (dir.), The Origins of War in Early Modern Europe, Edinburg, Donald Publishers, 1987, p. 151‑175.

95 Traité d’alliance entre Léopold Ier, Guillaume III et les Seigneurs Etats-Généraux des Provinces-Unies, La Haye, 7 septembre 1701, CUD, VIII/1, n°. XIII, 89-91.

96 Traité d’alliance, op. cit., art. III : « ad obtinendam […] satisfactionem aequam & rationi convenientem ».

97 G. Brauer, Die hannoversch-englischen Subsidienverträge 1702-1748, Aalen, Scientia Verlag, 1962 (Untersuchungen zur deutschen Staats- und Rechtsgeschichte, Neue Folge), p. 83.

98 M. Braubach, Die Bedeutung der Subsidien für die Politik im Spanischen Erbfolgekriege, Bonn, Kurt Schroeder, 1923 (Bücherei der Kultur und Geschichte) p. 104. Pour la Prusse, la vision de Braubach et de Droysen (selon lesquels la Prusse aurait préféré « faire la guerre sans politique » à l’Ouest, alors qu’elle manquait d’une armée pour intervenir dans la Guerre du Nord, à l’Est) a été nuancée par F. Göse, Friedrich I. (1657-1713): ein König in Preußen, Regensburg, Pustet, 2012, p. 261-282

99 E. Schnakenbourg, La France, le Nord et l’Europe au début du XVIIIe siècle, Paris, Champion, 2008 (Bibliothèque d'histoire moderne et contemporaine).

100 G. Brauer, Die hannoversch-englischen Subsidienverträge 1702-1748, op. cit. Je remercie le professeur Dirk Heirbaut d’avoir attiré mon attention sur cet ouvrage.

101 Ibid., p. 18.

102 Ibid., p. 78.

103 Ibid., p. 62. Voir également F. Göse, Friedrich I. op. cit., p. 261-278.

104 G. Brauer, Die hannoversch-englischen Subsidienverträge 1702-1748, op. cit., p. 108.

105 Ibid., p. 104.

106 Ibid., p. 108.

107 Ibid., p. 68.

108 Ibid., p. 66.

109 Ibid., p. 111. George Louis semblait compter sur la longévité de la Reine Anne, « une jeune femme, encore précédée par ma propre mère ».

110 Ibid., p. 69.

111 J.F. Eisenhart, Abhandlung von dem Rechte der Stände des Heil. Röm. Reichs auswärtigen Mächten Kriegs-Völcker zu überlassen, wie ach von der Ausübung dieses Rechts nach den Reichs-Gesetzen und demjenigen was solchen überlassenen Kriegs-Völckern gebühret, Frankfurt/Leipzig, s.n., 1760 (https://mdz-nbn-resolving.de/urn:nbn:de:bvb:12-bsb10957198-4); G. Brauer, Die hannoversch-englischen Subsidienverträge 1702-1748, op. cit., p. 91.

112 A. Holenstein, Mitten in Europa: Verflechtung und Abgrenzung in der Schweizer Geschichte, Baden, hier + jetzt, 2014.

113 F. K. von Moser, Von dem Deutschen Nationalgeist, s.l., s.n., 1765, et Was ist gut Kayserlich und: nicht gut kayserlich?, Vaterland [Frankfurt am Main], 1766; J. Whaley, Germany and the Holy Roman Empire, op. cit., p. 489.

114 M. Walcker, Johann Jakob Moser and the Holy Roman Empire of the German Nation, Chapel Hill, University of North Carolina Press, 1981.

115 G. Brauer, Die hannoversch-englischen Subsidienverträge 1702-1748, op. cit, p. 93‑94.

116 F. K. von Moser, Über den Diensthandel deutscher Fürsten. Homo homini lupus, Frankfurt/Leipzig, s.n., 1786 ; G. Brauer, Die hannoversch-englischen Subsidienverträge 1702-1748, op. cit, p. 94-95.

117 Voir également G. Rowlands, The financial decline of a great power: war, influence, and money in Louis XIV’s France, Oxford, Oxford UP, 2012.

118 H. Reece, The Army in Cromwellian England, 1649-1660, Oxford, Oxford University Press, 2013, p. 23.

119 Vernon à Stepney, 23 janvier 1702 : « if so few troops were taken, his master would be at liberty to hearken to any proposal from France for the like number of men. » G. Brauer, Die hannoversch-englischen Subsidienverträge 1702-1748, op. cit, p. 102.

120 R. De Schryver, « Who Had Sovereignty in the Southern Netherlands During the War of the Spanish Succession », dans Liber Amicorum Jan Buntinx. Recht en instellingen in de oude Nederlanden tijdens de Middeleeuwen en de Nieuwe Tijd, Louvain, Universitaire Pers Leuven, 1984, p. 483‑497.

121 L. Bély, Espions et ambassadeurs au temps de Louis XIV, Paris, Fayard, 1990.

122 Traité de paix entre Charles VI et Louis XIV, Rastatt, 6 mars 1714, CUD, VIII/1, n° CLXX, 415-423.

123 W. Telesko, « Rastatt – Ruhestadt. Visualisierungen der Friedensschlüsse der Jahre 1713/1714 zwischen traditioneller Symbolik und Bildreportage », dans H. Duchhardt et M. Espenhorst (dir.), Utrecht-Rastatt-Baden 1712-1714. Ein europäisches Friedenswerk am Ende des Zeitalters Ludwigs XIV, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2013, p. 373‑393 (Veröffentlichungen des Instituts für Europäische Geschichte Mainz).

124 Traité de Paix entre Charles VI et l’Empire et Louis XIV, Baden (Argovie), 7 septembre 1714, CUD, VIII/1, n° CLXXIV, 436-444.

125 Art. XV, Traité de Rastatt, op. cit., 417. ; art. XV, Traité de Baden, op. cit., 438 : « Josephus Clemens […] & Maximilianus Emanuel […] generaliter et integre restituantur in omnes Ditiones, gradus honorum, praerogativas, regalia, bona, Dignitates Electorales, aliasque, ut & in omnia Jura, quibus ante praeteritum Bellum fruiti sunt, vel frui potuerunt […] ».

126 J. Dureng, Mission de Théodore Chevignard de Chavigny en Allemagne : septembre 1726 - octobre 1731 : d’après ses mémoires inédits et sa correspondance politique, conservés aux archives du Ministère des Affaires étrangères à Paris, Toulouse, Impr. du Sud Ouest, 1911.

127 C. Jones, « The Vote in the House of Lords on the Duke of Ormond’s “Restraining Orders”, 28 May 1712 », dans Parliamentary History, XXVI-2, 2007, p. 160‑184.

128 G. Brauer, Die hannoversch-englischen Subsidienverträge 1702-1748, op. cit., p. 76.

129 Ibid.

130 Bolingbroke semblait vouloir amadouer George Louis en lui promettant de régler en principe les subsides hanovriens, mais seulement lorsque le Parlement y consentirait à l’unanimité. Si les impôts ne baissaient pas, la victoire Tory aurait été dénuée de sens politique. Ibid., p. 89‑90.

131 Ibid., p. 83.

132 R. Hatton, George I, New Haven (Conn.), Yale University Press, 2011, p. 105-106 (Yale English Monarchs).

133 G. Brauer, Die hannoversch-englischen Subsidienverträge 1702-1748, op. cit., p. 112.

134 Art. XIV, Traité de Rastatt, op. cit., 417 : « Sa Majesté très-Chrêtienne [sic] reconnaîtra, en vertu de ce Traité, cette Dignité Electorale dans ladite Maison ».

135 Art. IV, Traité de Paix entre Louis XIV et la Reine Anne, Utrecht, 11 avril 1713, CUD, VIII/1, nr. CLI, 340 : « Le Roy T.C. reconnoit sincerement [sic] & solemnellement lad. Succession [établie […] de la manière qu’elle a été limitée par les loix] au Royaume de la G. B. ».

136 B. Williams, The Whig Supremacy 1714-1760, Oxford, Clarendon Press, 1988 ; P. Langford, The Eighteenth Century 1688-1815, Londres, A & Black, 1976.

137 G. Brauer, Die hannoversch-englischen Subsidienverträge 1702-1748, op. cit, p. 113.

138 Ibid., p. 115.

139 Amsterdam, Rijksmuseum, RB-P-OD-83.010-10. Domaine public, libre de droits. http ://hdl.handle.net/10934/RM0001.COLLECT.470289. Dernière consultation le 28 février 2020.

140 J. S. Gibson, Playing the Scottish Card: the franco-jacobite invasion of 1708, Edinburgh, Edinburgh University Press, 1988.

141 J. Goldworthy, The Sovereignty of Parliament: history and philosophy, New York, Oxford University Press, 2001.

142 Acte de Parlement pour étendre la Succession à la Couronne d’Angleterre, & pour mieux assurer la Liberté des Sujets, 10 février 1701, CUD, VIII/1, n°. II, 2-4.

143 F. Dhondt, Balance of Power, op. cit, p. 238.

144 F. Dhondt, « L’équilibre européen et la Succession d’Espagne. L’épisode révélateur des négociations de Nicolas Mesnager en Hollande, 1707-1708 », dans V. Demars-Sion, R. Martinage, H. François et A. Deperchin (dir.), Diplomates et Diplomatie. Actes des Journées Internationales tenues à Péronne du 22 au 23 mai 2009, Lille, Université Lille 2-Centre d’Histoire Judiciaire, 2013, p. 97‑112 (Collection Verte) ; J. G.Stork-Penning, Het grote werk: vredesonderhandelingen gedurende de Spaanse successie-oorlog 1705-1710, Groningen, Wolters, 1958.

145 B. Williams, Stanhope. A Study in Eighteenth-Century War and Diplomacy, Oxford, Clarendon Press, 1932.

146 L. Bély, « Les larmes de M. de Torcy: la leçon diplomatique de l’échec, à propos des conférences de Gertruydenberg (mars-juillet 1710) », dans Histoire, Économie et Société, a. 1983, n° 3, p. 429‑456.

147 Notons que les décès successifs du Grand Dauphin (14 avril 1711), du duc de Bourgogne (18 février 1712) et de son épouse, ainsi que de leur fils aîné, le duc de Bretagne (8 mars
1712), rendaient l’hypothèse d’une succession de Philippe d’Anjou en France moins improbable. Voir Olivier
Chaline, L’année des quatre dauphins, Paris, Flammarion, 2009 ; A. Baudrillart, Philippe V et la cour de France, Paris, Didot, 1890 ; S. de Bourbon-Parme, Le traité d’Utrecht et les lois fondamentales du royaume, Paris, Librairie Honoré Champion, 1914.

148 Articles preliminaires [sic] donnés de la part du Roi Très-Chrétien par le Sieur Menager [sic] son Ministre, pour servir de fondement à la paix generale [sic]. Londres, 27 Septembre/8 Octobre 1711, CUD, VIII/1, n° XIX, 281.

149 C. Jackson, « Jonathan Swift’s Peace of Utrecht », dans R. E. De Bruin, C. Van der Haven, Lotte Jensen et D. Onnekink (dir.), Perfomances of Peace, op. cit., p. 123‑141.

150 G. Brauer, Die hannoversch-englischen Subsidienverträge 1702-1748, op. cit, p. 86.

151 J. Ostwald, Vauban under Siege, Boston, Brill, 2007.

152 Art. IX, Traité de paix entre Louis XIV et les Seigneurs Etats-Généraux des Provinces-Unies, 11 avril 1713, CUD, VIII/1, nr. CLVI, 368.

153 Art. XIX, Traité de Rastatt, op. cit., 418.

154 Art. XX, Traité de Baden, op. cit., 439.

155 Traité entre Charles VI, George Ier et les Seigneurs Etats-Généraux des Provinces-Unies, Anvers, 15 novembre 1715, CUD, VIII/1, n°. CLXXX, 458-468. K. Van Gelder, « The estates of Flanders manning the barricades for territorial integrity: the protest against the barrier treaty of 1715 », dans G. Martyn R. Vermeir et C. Vancoppenolle (dir.), Intermediate Institutions in the County of Flanders in the Late Middle Ages and the Early Modern Age, Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2012, p. 114‑137 ; Id., Regime change at a distance: Austria and the Southern Netherlands following the War of the Spanish Succession (1716-1725), trad. Thomas Jacobs et Nirmala Patel, Louvain, Peeters, 2016.

156 Art. III, Traité de la Grande Alliance, op. cit.

157 C. Backerra, Wien und London 1727-1735: internationale Beziehungen im frühen 18. Jahrhundert., Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2018; A.C. Thompson, George II: King and Elector, New Haven (Conn.), Yale University Press, 2011 (Yale English Monarchs).

158 N. Genet-Rouffiac, Le grand exil: les jacobites en France 1688-1715, Paris, SHD, 2008 : D. Szechi, The Jacobites, Britain, and Europe, 1688-1788, Manchester, Manchester University Press, 1994 (New frontiers in history).

Pour citer cet article

Frederik Dhondt, «Le théâtre de la guerre et la bataille d’Audenarde (11 juillet 1708)», C@hiers du CRHiDI. Histoire, droit, institutions, société [En ligne], Vol. 43 - 2021, URL : https://popups.uliege.be/1370-2262/index.php?id=1360.

A propos de : Frederik Dhondt

 Frederik Dhondt est professeur d’histoire du droit et d’histoire politique à la Faculté de Droit et Criminologie de la Vrije Universiteit Brussel, directeur du centre de recherches Contextual Research in Law (CORE), chercheur associé à l’Institut d’Histoire du Droit et à l’Institut Gustave Rolin-Jaequemyns de Droit International (Gand). Il est docteur en droit (Gand, 2013), juriste (Gand, 2007), historien (Gand, 2008) et titulaire d’un master recherche en Relations Internationales (Sciences Po Paris, 2009). Pour une liste de publications à jour : https://www.vub.be/CORE/pub/index.shtml