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Introduction générale : le régionalisme dans les relations internationales
1La revue Fédéralisme-Régionalisme a fait le choix de consacrer deux numéros spéciaux à un phénomène particulier des relations internationales, à savoir le régionalisme international.
2L’intérêt porté à l’étude des intégrations régionales par le monde de la recherche est fluctuant et varie à travers le temps. Les premières études, fort empreintes de fonctionnalisme1, sont issues de la période des années 1950 et 1960 et coïncident, notamment, avec l’essor du régionalisme européen mais également à celui des intégrations régionales dites introverties d’Amérique latine, postcoloniales d’Afrique et sécuritaire de l’Asie du Sud-Est. Ceci étant dit, l’intérêt et l’enthousiasme scientifique pour l’analyse des groupements régionaux chutent à partir des années 1970 avec la montée de l’europessimisme et l’entrée en léthargie du régionalisme latino-américain, africain et asiatique.
3Toutefois, depuis une vingtaine d’années, les relations internationales sont confrontées tant à une accélération du développement de la globalisation qu’à une résurgence du régionalisme. Le «nouveau régionalisme» qui émerge au cours de la deuxième moitié des années 1980 commence avec la redynamisation de la construction européenne suite à l’adoption du livre Blanc et de l’Acte unique européen, pour ensuite gagner les Amériques, l’Afrique, l’Asie ou encore l’Océanie.
4La fin de la guerre froide et la disparition du système bipolaire combinées à la crise du multilatéralisme universel et à l’accélération de la globalisation – source d’instabilité et d’incontrôlabilité internationales – constituent des facteurs systémiques qui s’avéreront déterminants dans le repositionnement régional de l’État2.
5C’est donc en l’absence de structures mondiales satisfaisantes, que le développement de structures régionales acquiert de l’importance. Elles apparaissent comme un mode d’organisation des relations internationales et, partant, comme un vecteur de structuration de la gouvernance mondiale3. La tendance à la régionalisation de la planète peut être considérée comme un stade intermédiaire ou comme la dimension médiane entre l’échelon étatique et le niveau mondial4.
6Le phénomène régional se présente tout d’abord comme une construction interétatique5. Autrement dit, il s’agit d’ensembles sous-continentaux politiquement structurés ouverts à l’action publique et donc à la volonté politique des États qui les composent.
7Toutefois, s’ils sont animés par des acteurs étatiques indépendants, les groupements régionaux ont également pour acteurs des entreprises, des syndicats, des universités, des organisations non-gouvernementales, des entités infra-étatiques ou des institutions internationales6. Le régionalisme devient ainsi pour toute une série d’acteurs un «espace pour l’action»7. Il s’agit donc d’une construction sociale animée par des acteurs publics et privés internes et internationaux producteur de normes et donc de sens politique.
8Ceci étant, le régionalisme ne se limite pas seulement à être un espace pour l’action. Il peut dans certains cas agir sur la scène internationale à travers des stratégies de projection internationale8.
9Ces différents processus d’intégration, qui émergent à partir de la deuxième moitié des années 1980, ne se développent pas de manière uniforme et chaque espace régional évolue selon un contexte qui lui est propre9. En d’autres termes, il existe une multiplicité de formes d’intégration régionale et il convient de les différencier selon qu’elles poursuivent un objectif purement économique ou qu’elles dépassent ce stade pour épouser des stratégies communes.
10Par ailleurs, certains des regroupements régionaux présentent une charpente institutionnelle de nature uniquement interétatique alors que d’autres rassemblent des institutions tant intergouvernementales que supranationales. C’est, d’ailleurs, dans ce dernier type de schéma que les États mettent en place des mécanismes visant le renforcement de leur cohésion mutuelle et leurs rapports de solidarité, en vue de partager, ou même de confondre leur souveraineté respective10. Dans cette situation, où l’effectivité de la fonction gouvernante s’apprécierait à des niveaux multiples (multi-level governance), l’État-nation est, avec l’échelon suprarégional, et de plus en plus avec celui des collectivités locales, un niveau décisionnel parmi d’autres11.
11C’est de ces multiples facettes du régionalisme que la revue Fédéralisme-Régionalisme souhaite rendre compte en publiant pour son volume 11 deux numéros spéciaux dont l’un porte sur «Le régionalisme international dans les Amériques : dynamique interne et projection internationale» et l’autre sur «Le régionalisme international : regards croisés. Europe, Asie et Maghreb».
12Les recherches présentées dans ces numéros portent sur un nombre limité de casus. Toutefois, en présentant un ensemble variés d’études de cas sur la question du régionalisme, la revue Fédéralisme-Régionalisme espère, au-delà de son intérêt d’actualité, contribuer à enrichir la littérature scientifique en la matière ainsi que la recherche sur l’un des phénomènes structurels importants des relations internationales.
13Avant de céder la place à la lecture des articles, je souhaite remercier les auteurs qui malgré la surcharge de leurs agendas et aléas de leur profession se sont engagés avec enthousiasme et professionnalisme dans cette tâche scientifique livrant ainsi un travail de qualité. Mes remerciements vont également aux évaluateurs dont les remarques justes et pertinentes ont permis de consolider la qualité des articles. Notre gratitude va également à Thibaud Mariage et à Olivier Dupont qui m’ont apporté leur soutien dans la relecture et la correction. Enfin, je tiens à remercier la revue Fédéralisme-Régionalisme pour la confiance qu’elle m’a faite en m’accordant la responsabilité de la coordination de ces deux numéros.
Notes
Pour citer cet article
A propos de : Sebastian Santander
Chargé de cours et responsable l’Unité d’études en Relations internationales du département de Science politique de l’ULg ; professeur visiteur à l’Institut d’études européennes de l’Université libre de Bruxelles ; membre associé au Centre d’études sur l’intégration et la mondialisation de l’Université du Québec à Montréal et au Monash European and EU Center de l’Université de Monash à Melbourne.