- Startpagina tijdschrift
- Volume 18 : 2018
- Le fédéralisme coopératif comme terrain de jeu du ...
- Articuler les équilibres fédéraux et les enjeux gl...
- Une histoire belge : La coopération en matière environnementale et climatique et la COP21
Weergave(s): 6181 (39 ULiège)
Download(s): 0 (0 ULiège)
Une histoire belge : La coopération en matière environnementale et climatique et la COP21
Inhoudstafel
Introduction
1Du 30 novembre au 12 décembre 2015, la France a accueilli la 21ème Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), mieux connue sous son acronyme : la COP21. Cette rencontre internationale restera avec les Conférences de Kyoto (1997) et le Sommet de Rio (1992), une des dates clés de la coopération internationale en matière de lutte contre le réchauffement climatique.
2L’objectif de la CCNUCC est de stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique1. Pour cela, chaque année, une conférence des parties à la Convention (une COP) est organisée afin de créer un espace de discussion entre les différents pays parties à la CCNUCC afin d’essayer de mettre en œuvre des mesures concrètes convenues et acceptées par tous. La COP21 a abouti à un accord « universel et ambitieux »2 sur le climat, dont la mesure phare devrait permettre de contenir la hausse des températures en-deçà de 2°C, et même de la limiter à 1,5°C pour après l’horizon 2020.
3La réussite de la conclusion de cet accord reposait sur le pari de faire négocier les 196 États parties à la CCNUCC (sans compter l’Union européenne qui est également une partie à part entière) afin d’adopter une position commune sur cette problématique qui préoccupe de plus en plus la population mondiale3. Plus encore que d’arriver à adopter un accord global et mondial sur les nouveaux objectifs de lutte contre le réchauffement climatique, les négociations qui se sont tenues à Paris ont d’abord nécessité que chaque pays définisse unilatéralement ses propres engagements. Sur la base de ces différents engagements, les pays ont ensuite pu négocier les termes d’un accord global en tentant de concilier les engagements pris par chaque pays.
4La participation de chaque Etat à l’Accord de Paris impliquait donc la définition préalable d’une position nationale claire en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Or, pour certains pays, c’est à ce stade que résidait le plus grand défi de cette rencontre internationale. La Belgique en est l’exemple.
5La construction institutionnelle de la Belgique, combinée aux objectifs politiques opposés des différentes entités fédérées, ont bien failli empêcher la Belgique de définir cette position commune.
6La problématique de la coopération intra-belge en matière de lutte contre le réchauffement climatique a éclaté au grand jour, créant ainsi une nouvelle crise politique entre les différentes parties du pays. Pourtant, sur papier, les acteurs de la Belgique fédérale avaient mis en place un système de concertation entre les entités fédérées et l’autorité fédérale, tant pour ce qui concerne les compétences dites internationales (I) que pour l’exercice de la coopération en matière de politique environnementale (II) ; système qui aurait dû leur permettre d’adopter une position commune en matière de lutte contre le réchauffement climatique dans un cadre constructif et serein. Or, la préparation de la délégation belge à la COP21 a justement démontré le contraire, ces défaillances obligeant même les entités belges à inventer de nouvelles procédures de concertation en dehors de tout cadre juridique (III).
7La participation belge à l’effort mondial pour la lutte contre le réchauffement climatique s’inscrit ainsi parfaitement dans la thématique du « jeu du droit » puisqu’il permet de mettre en lumière les espaces clos et secrets qui ont permis à l’État belge de décoincer les blocages institutionnels qui l’empêchaient jusque ici de pouvoir adopter une position commune sur la scène internationale.
1. Le partage des compétences relatives aux relations internationales et la coopération entre les entités belges
8La participation d’un Etat fédéral à des évènements internationaux aussi importants que les COP, constitue un défi institutionnel puisqu’elle nécessite préalablement de concilier deux impératifs a priori opposés4. Il s’agit, d’une part, du principe de la personnalité juridique internationale des Etats selon lequel même un Etat fédéral est traité comme étant un état unitaire5 et, d’autre part, du respect de la répartition des compétences interne qui distribue parfois le pouvoir de décision relative à une même politique entre plusieurs acteurs institutionnels différents6.
9La Constitution belge contient, depuis la révision constitutionnelle de 1993, un titre consacré spécifiquement à la question des relations internationales7, lequel pose les bases de la coopération entre les différentes entités fédérées et le pouvoir fédéral.
10L’article 167 de la Constitution précise d’abord que le rôle du Roi (dans les faits, du Ministre des Affaires étrangères) est de diriger les relations internationales8 afin d’accomplir tous les actes imposés par la vie internationale de l’Etat9. Par contre, la Constitution précise immédiatement après que les missions internationales de l’autorité fédérale ne peuvent porter préjudice aux matières qui relèvent exclusivement de la compétence des Communautés et des Régions10.
11Par cette précision, l’article 167 de la Constitution consacre la compétence de conclure des traités aussi bien dans le chef de l’autorité fédérale que dans celui des entités fédérées. Ainsi, toute entité disposant d’une assemblée législative11 peut conclure un traité international à la condition que l’objet même du traité entre dans sa sphère de compétence12. La compétence relative aux relations internationales n’existe ainsi que par référence à une autre compétence jugée comme étant principale. Il y a ainsi un parallèle entre compétences internes et externes.
12Soucieux de respecter l’équilibre entre la prédominance de l’autorité fédérale sur le plan international et l’autonomie de chaque entité fédérée, le Constituant met en place des procédures de concertation et de coopération entre les entités et l’autorité fédérale, afin d’assurer la cohérence de la politique extérieure de la Belgique13.
13De manière synthétique, plusieurs situations peuvent se présenter :
-
Si l’objet du traité ressort uniquement des compétences de l’autorité fédérale, il revient alors au Gouvernement fédéral de conclure le traité ; la Constitution attribue désormais à la Chambre des représentants, seule, la compétence de donner l’assentiment au traité, sans l’apport du Sénat14 ;
-
Lorsque l’objet du traité relève d’une compétence exclusivement attribuée à une Région ou à une Communauté, la négociation et la conclusion du traité sont menées par le gouvernement de l’entité fédérée ; l’assentiment doit être donné par son propre organe législatif15 ;
-
Toutefois, il convient de noter que le législateur spécial a entendu permettre un contrôle de la part de l’autorité fédérale sur l’action internationale des entités fédérées, ce dans un souci d’assurer une cohérence de la politique extérieure. Ce contrôle peut aller, dans certains cas, jusqu’à interdire à une entité fédérée de poursuivre des négociations internationales16.
-
Pour les traités dont l’objet est susceptible de recouvrir des compétences qui relèvent tant des compétences de l’autorité fédérale que des entités fédérées (on parle alors de traités « mixtes »), la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980 (conformément à l’obligation prévue à l’article 167, §4, de la Constitution) oblige les entités belges à conclure un accord de coopération organisant les modalités concrètes de conclusion d’un tel traité, dénommé traité « mixte »17.
14L’autorité fédérale, les Communautés et les Régions ont conclu le 8 mars 1994 un accord de coopération relatif aux modalités de conclusion des traités mixtes18, instaurant un système de concertation particulier placé sous la tutelle de la Conférence interministérielle de la politique étrangère (ci-après la CIPE). Les différentes entités concernées participent sur un pied d’égalité au processus de négociation d’un tel traité, sous la supervision du Ministre fédéral des Affaires étrangères. Le traité est ensuite signé par tous les Gouvernements des entités concernées et chaque assemblée parlementaire correspondante doit donner son assentiment19, même s’il revient à l’autorité fédérale de ratifier le traité (acte qui engage la Belgique sur le plan international).
15En ce qui concerne la question de la représentation internationale de l’autorité fédérale et des entités fédérées, l’article 92bis, § 4bis de la loi spéciale de réformes institutionnelles impose aux entités belges de conclure un accord de coopération afin de déterminer quelles sont les entités et les ministres qui sont habilités à représenter et à prendre position, lors des rencontres internationales, au nom de l’Etat belge dans son ensemble. 20. Un accord-cadre de coopération a en effet été conclu le 30 juin 1994 entre l'Etat fédéral, les Communautés et les Régions réglant la problématique de la représentation du Royaume de Belgique auprès des organisations internationales poursuivant des activités relevant de compétences mixtes21. L’accord-cadre de 1994 n’empêche pas les entités fédérées et l’autorité fédérale de conclure des accords de coopération spécifiques lorsque les enjeux visés par l’organisation internationale en question imposent des modalités particulières de représentation22.
16Une concertation générale en vue de déterminer la position belge est assurée avant chaque réunion d’une organisation internationale, sous la supervision du ministère fédéral des Affaires étrangères, afin d’arrêter ensemble une position commune. Ici aussi, la CIPE joue un rôle de concertation important puisqu’elle comprend notamment un groupe de travail spécifique en son sein, dénommé « Représentation du Royaume de Belgique auprès des Organisations internationales »23.
17S’il y a une particularité qu’il convient de mettre en lumière dans le système de répartition des compétences internationales au sein de l’ordre juridique belge, c’est la place importante (et quasiment incontournable) que tient la CIPE dans les mécanismes de concertation prévus entre les entités fédérées et l’autorité fédérale, que ce soit dans le cadre de la conclusion des traités mais également dans la détermination de la position commune de la Belgique lors des rencontres internationales. Comme le résume Marc Uyttendaele, « (l)es exigences des relations internationales démontrent à nouveau la nécessité d’un réel fédéralisme coopératif conçu et développé à l’intervention de la CIPE. Celui-ci est notamment requis pour assurer une représentation adéquate et efficace de la Belgique dans les organisations internationales auxquelles les entités fédérées n’ont pas accès »24.
18Toutefois, il faut souligner que la CIPE est d’abord un organe politique, spécialisé, créé au sein du Comité de concertation25. La CIPE reste un organisme particulièrement obscur : il est très compliqué de connaître l’identité précise des participants de chacune de ses réunions, pas plus que son ordre du jour ou les propositions et positions qui y ont été adoptées ou rejetées (aucun procès-verbal n’étant accessible au public).
19En raison de son statut d’organe politique, l’action de la CIPE n’est contrôlée par aucune juridiction, ni par aucune assemblée législative. Interpellé à ce sujet à la Chambre des représentants, le Ministre des affaires étrangères a même rappelé que la CIPE ne peut être soumise à la loi de 11 avril 1994 concernant la liberté d’accès aux documents administratifs26. Il en résulte que la politique étrangère de la Belgique se discute et se négocie en grande partie au sein d’un cénacle opaque, sans aucun contrôle direct et sans droit de regard de la population et des parlementaires.
2. La détermination de la compétence relative à la lutte contre le réchauffement climatique
20La représentation de l’Etat belge sur la scène internationale, y compris la capacité à négocier un traité, nécessite de déterminer préalablement qui, au sein de la construction fédérale, détient la compétence matérielle relative à la matière qui sera abordée lors d’une rencontre internationale ou dans le cadre d’un projet de traité.
21Si certaines compétences peuvent plus facilement être rattachées à certaines entités fédérées ou à l’autorité fédérale grâce aux dispositions expresses de la Constitution ou de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980 (ci-après LSRI), il faut constater que cet exercice de détermination peut rapidement virer au casse-tête, surtout lorsque les sujets retenus par les activités internationales de la Belgique recouvrent des domaines partagés entre l’autorité fédérale et les entités fédérées. C’est notamment le cas en matière de lutte contre le réchauffement climatique.
2.1 L’absence d’une compétence homogène liée à la lutte contre le réchauffement climatique
22A la lecture de la Constitution et des dispositions de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, qui déterminent les compétences dévolues respectivement à l’autorité fédérale d’une part et aux Régions ou aux Communautés de l’autre, un premier constat s’impose : la politique relative à la lutte contre le réchauffement climatique ne constitue pas une compétence expressément attribuée en Belgique.
23On pourrait considérer que la politique publique de la lutte contre le réchauffement climatique relève uniquement de la compétence de l’autorité fédérale en tant que compétence résiduelle27. Ce n’est toutefois pas la solution qui a été choisie par les acteurs institutionnels belges. En effet, si la politique de la lutte contre le réchauffement climatique n’est pas expressément attribuée, la loi spéciale de réformes institutionnelles distribue des compétences directement liées à cette politique à différentes entités. Il s’agit donc d’une compétence particulièrement éclatée en pratique.
24En fait, la difficulté liée à l’attribution de la politique de la lutte contre le réchauffement climatique est avant tout une question de définition. Que recouvre concrètement la notion de « lutte contre le réchauffement climatique » en termes de répartition des compétences ? Dès lors qu’en l’état actuel des textes, la lutte contre le réchauffement climatique n’apparaît pas comme étant (et ne pouvant actuellement être) une compétence homogène et déterminée, celle-ci peut dès lors apparaître comme étant une compétence accessoire des autres compétences attribuées.
25Ainsi, la lutte contre le réchauffement climatique intéresse tant la politique de l’énergie (compétence partagée entre le pouvoir régional et le pouvoir fédéral28), la politique de l’environnement (compétence partagée entre le pouvoir régional et le pouvoir fédéral29), la politique du nucléaire (compétence fédérale30), la politique de l’économie (compétence partagée entre le pouvoir régional et le pouvoir fédéral31), la politique de l’agriculture et de la pêche (compétence partagée entre le pouvoir régional et le pouvoir fédéral32), la politique liée à la gestion et à la conservation de la Mer du Nord (compétence fédérale33) mais également la politique des transports (compétence régionale34), la politique de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire (compétence régionale35), la politique fiscale (compétence partagée entre le pouvoir régional et le pouvoir fédéral), la politique de l’enseignement,…
26Toutefois, en raison de la préoccupation grandissante liée au réchauffement climatique à l’échelle mondiale, il a fallu, pour des raisons d’organisation et de pragmatisme, désigner dans l’ordre juridique interne les interlocuteurs principaux qui auront la charge de mener de front cette politique, tant sur le plan national qu’international.
27Le choix s’est finalement porté sur les entités en charge de la politique de l'environnement, de la conservation de la nature et du développement durable36, toutefois en pratique cette dernière politique est traitée de manière séparée des deux premières (qui sont exercées par les ministres en charge de l’environnement) pour être englobée dans la matière plus générale de l’énergie37 (les poltiques belges semblent considérer que la matière du développement durable concerne plus la question de l’utilisation de l’énergie plutôt que de question environnementale). Il en résulte que la politique climatique relève à la fois de l’autorité fédérale et des trois Régions que compte le pays38.
28Ce choix ne s’est pas formalisé dans une disposition constitutionnelle ou par une disposition légale particulière. Il résulte plutôt du comportement et des actions concrètes de ces entités qui ont, de manière publique, assumé le monopole de l’exercice de cette compétence d’une façon qui semble faire consensus parmi l’ensemble des autorités belges. L’autorité fédérale et les Régions ont alors commencé à agir activement dans la politique climatique et à assumer publiquement et médiatiquement la charge de cette politique39.
29L’absence d’homogénéité de la compétence de la lutte contre le réchauffement climatique explique ainsi pourquoi la délégation belge à la COP21 était composée de pas moins de cinq ministres différents40 41pour un pays d’une superficie de 30.000 km² 42.
2.2 Les mécanismes de coopération en matière de lutte contre le réchauffement climatique
30Face à cet éclatement de la politique de la lutte contre le réchauffement climatique, une coopération entre toutes les entités apparaît comme étant indispensable à la réalisation d’une politique globale de lutte contre le réchauffement et les dérèglements climatiques. Conscients de cette nécessité, l’autorité fédérale et les entités fédérées ont alors mis sur pied un ensemble impressionnant de mécanismes de coopération en matière de politique climatique.
31Afin de décrire les mécanismes de coopération mis en place en matière de lutte contre le réchauffement climatique, il convient de distinguer deux types de coopération : les coopérations imposées par le législateur spécial et les mécanismes volontaires de coopération mis en place par les différentes entités de l’Etat belge de leur propre initiative.
32En ce qui concerne les mécanismes de coopération imposés par la loi, on ne peut qu’être frappé par l’absence, dans la loi spéciale de réformes institutionnelles, d’une véritable obligation de concertation des entités fédérées en matière de lutte contre le réchauffement climatique43. Autrement dit, cette politique a connu un développement important durant les dernières décennies, mais qui n’a pas donné lieu à une adaptation des règles et du cadre juridiques par le législateur spécial. La loi spéciale de réformes institutionnelles n’impose une concertation que par rapport à certains pans de la politique climatique mais n’organise pas une concertation générale et institutionnalisée sur l’ensemble de cette politique climatique.
33La loi spéciale de réformes institutionnelles impose ainsi une concertation associant les Gouvernements des autorités concernées pour :
-
les mesures concernant la politique de l'énergie44 ;
-
les grands axes de la politique énergétique nationale 45;
-
les mesures qui ont une incidence sur la politique agricole 46;
-
l'élaboration des réglementations fédérales en matière de normes de produits47.
34L’article 92bis de la loi spéciale de réformes institutionnelles, qui prévoit la possibilité pour les entités fédérées et pour l’autorité fédérale de conclure des accords de coopération48, impose également aux entités fédérées et à l’autorité fédérale de conclure des accords de coopération dits « obligatoires » relatifs à certaines politiques précises49. L’article 92bis de la loi spéciale de réformes institutionnelles n’impose cependant pas à l’autorité fédérale, pas plus qu’aux entités fédérées, de conclure des accords de coopération en matière de politique climatique, ni dans des domaines directement connexes. Ce qui prouve, une fois de plus, que la compétence climatique n’a pas du tout été abordée dans le cadre des différentes modifications qu’a connues la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980.
35Pourtant, la politique climatique de la Belgique constitue l’un des domaines où les entités fédérées et l’autorité fédérale ont développé le plus de structures de concertation et de mécanismes de coopération. L’ensemble de ces mécanismes ont cependant été mis en place de manière volontaire par les entités fédérées et l’autorité fédérale qui ont, d’une certaine manière, remédié au silence de la loi spéciale et qui ont mis en place, de leur propre initiative un système de coopération originale et pour le moins tentaculaire50.
36La Cour constitutionnelle a également mis en évidence des situations dans laquelle la conclusion d’accords de coopération est obligatoire en raison du caractère trop imbriqué des compétences des différentes entités et ce notamment dans le cadre de la politique de lutte contre le réchauffement climatique. Ainsi, dans l’arrêt n°76/2012, la Cour a par exemple jugé à propos d’un décret de la Région wallonne du 6 octobre 2010 « modifiant le décret du 10 novembre 2004 instaurant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre, créant un Fonds wallon Kyoto et relatif aux mécanismes de flexibilité du Protocole de Kyoto », qu’« en l’espèce, les compétences de l’autorité fédérale et des régions sont devenues à ce point imbriquées, par suite, d’une part, de la nécessité en droit européen de n’avoir qu’une seule autorité responsable par exploitant d’aéronef et, d’autre part, de la nature principalement transrégionale des émissions causées pendant l’intégralité de leur vol par des aéronefs qui atterrissent dans une région ou qui en décollent, qu’elles ne peuvent plus être exercées que dans le cadre d’une coopération. Un accord de coopération entre l’Etat fédéral et les régions permettra du reste, si nécessaire, à l’exemple de la directive 2003/87/CE (article 18ter), d’associer à l’application du système les autorités aéronautiques fédérales compétentes »51.
37Les diverses entités fédérées et l’autorité fédérale ont dès lors mis en place des institutions ayant toutes pour but d’arriver à la mise en place d’une politique globale climatique de la Belgique. Parmi les plus importantes, on peut épingler :
-
La Conférence interministérielle de l’Environnement : Comme développé ci-dessus pour ce qui concerne la CIPE, le comité de concertation peut créer en son sein des réunions spécialisées (conférences interministérielles52) dans un domaine défini. Ainsi les membres du comité de concertation ont institué la Conférence interministérielle de l’environnement (CIE), en tant que groupe de travail permanent du Comité de concertation chargé des questions globales de politique environnementale. La CIE se compose des ministres régionaux et fédéraux qui ont l'environnement et la nature dans leurs attributions53. Cependant, lorsque la CIE doit traiter de questions touchant également d'autres domaines de compétence, la CIE s’élargit aux autres membres du gouvernement fédéral, des gouvernements régionaux ou communautaires concernés. La CIE constitue l’un des lieux de concertation environnementale les plus importants, puisqu’elle met directement en relation les ministres concernés par la matière de l’environnement. C’est donc, en principe, en son sein que les principaux arbitrages en matière de politique environnementale sont effectuées et que les principales lignes directrices de la politique environnementale sont déterminées. L’autorité fédérale et les Régions ont stipulé dans un accord de coopération que lorsque la CIE doit traiter de problématique liée au climat, celle-ci est élargie aux ministres de l'Énergie, des Transports, de la Fiscalité, de la Coopération au développement et de l'Économie54.
-
Le Comité de coordination de la politique internationale de l'environnement : L’accord de coopération du 5 avril 1995 entre l'Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif à la politique internationale de l'environnement55 institue le Comité de coordination de la politique internationale de l'environnement (CCPIE). Ce dernier a pour mission principale de préparer les positions qui doivent être défendues par les délégations belges auprès des instances des organisations internationales. Il a aussi pour mission de déterminer la composition de la délégation belge et la désignation de son porte-parole lors des rencontres internationales, ainsi que l'organisation de la concertation en vue d'une exécution coordonnée des recommandations et décisions des organisations internationales. Le CCPIE est un comité politique hybride, puisque il ressort à la fois des compétences de la CIPE et de la CIE (dont il assure le secrétariat56). Les réunions du CCPIE ne sont pas publiques57 et la direction quotidienne de ce comité est assurée par la DG Environnement du Service Public Fédéral58 de la Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire et Environnement (soit sous une administration fédérale distincte du Service public fédéral « Environnement et énergie »59).
-
La « Commission nationale climat »60 : La création de la « Commission nationale climat » (CNC) découle de la nécessité pour la Belgique d’assurer le respect de ses engagements européens en matière de lutte contre le réchauffement climatique, ainsi que de ses engagements internationaux, notamment ceux pris lors de la signature du Protocole de Kyoto.
-
La « Commission nationale climat »61 a été instituée par l’accord de coopération du 14 novembre 2002 entre l’Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région bruxelloise concernant la rédaction, l'exécution et le suivi d'un Plan national Climat, mis en place suite aux travaux effectués lors la Convention-cadre des Nations Unies en matière de changement climatique et plus particulièrement lors de l’adoption du Protocole de Kyoto62. Cet accord de coopération octroie à la CNC la mission de préparer le Plan national climat, qui doit constituer la base politique de l’action climatique belge pour la période 2009-2012. Les décisions de la Commission nationale climat sont prises à l’unanimité entre les parties. Si cette unanimité n’est pas rencontrée, le point litigieux est soumis à la CIE élargie, voire le cas échéant, au comité de concertation.
-
Le Groupe de concertation Etat-Régions pour l’Energie (CONCERE) : Ce Groupe a été créé par l’accord de coopération du 18 décembre 1991 entre l’Etat, la Région wallonne, la Région flamande et la Région de Bruxelles-Capitale, relatif à la coordination des activités liées à l’énergie et constitue un groupe de travail permanent de la CIE63. Il fait suite à une recommandation de la Conférence interministérielle économie et énergie afin de créer un organe formel de concertation en vue de préparer un protocole d’accord entre l’Etat et les Régions en matière d’énergie (c’est-à-dire le futur « Plan climat »).
-
La Cellule interrégionale de l'Environnement (CELINE) : La Cellule interrégionale de l'Environnement, composée de membres du personnel des différents ministères de l'environnement, a été instituée par l’accord de coopération du 18 mai 1994 entre les Régions bruxelloise, flamande et wallonne en matière de surveillance des émissions atmosphériques et de structuration des données64. Cette cellule est chargée de missions plus opérationnelles et notamment des missions liées à la recherche scientifique relative à la pollution atmosphérique.
-
Les différents comités d'accompagnement des plans d’appui scientifique à une politique de développement durable : Le ministre fédéral de la recherche a sollicité la rédaction de deux rapports de recherches dénommés « plans d’Appui scientifique à une politique de développement durable ». Le premier rapport a été rédigé en 1997, le deuxième en 2002. Ces rapports ont pour but de créer une synergie, au sein de la communauté scientifique entre les recherches relevant de diverses disciplines dans une optique d’optimalisation du thème du développement durable. Un premier comité d’accompagnement a été institué par l’accord de coopération du 24 octobre 1997 concernant la coopération entre l’Etat et les Régions relatif au Plan d’Appui scientifique à une politique de développement durable65. Le deuxième comité a été mis en place par l’accord de coopération du 20 mai 2002 entre l'Etat, les Communautés et les Régions relatif au deuxième Plan d'appui scientifique à une politique de développement durable.
-
L’Institut fédéral pour le Développement durable : Afin de garantir, une plus grande garantie sur le plan de la stabilité et de la continuité dans le cadre de la politique fédérale du développement durable, l’arrêté royal du 21 février 2014 a créé auprès du Service public fédéral de la Chancellerie du Premier Ministre, un Institut fédéral pour le Développement qui a pour missions de préparer la politique fédérale en matière de développement durable, d’en coordonner son exécution et de mettre à la disposition du Conseil des ministres, les expertises nécessaires à la prise de décision66.
-
La Commission interdépartementale fédérale pour le développement durable : Il s’agit d’une commission créée par la loi du 5 mai 1997 relative à la coordination de la politique fédérale de développement durable67, composée d'un représentant de chaque service public fédéral. Sont néanmoins invités à y participer un représentant de chaque gouvernement régional et communautaire ainsi que des représentants du Bureau fédéral du plan68. Cet organisme a pour mission principale de suggérer des pistes de réflexion à l’Institut Fédéral pour le Développement durable ainsi que des thèmes d’études pour le Bureau fédéral du Plan.
-
Le Conseil fédéral du Développement durable : Il s’agit d’une institution également créée par la loi du 5 mai 1997, composée de représentants de la société civile, dont le Roi fixe le nombre et la répartition par un arrêté délibéré en Conseil des Ministres. Cet arrêté veille à une représentation équilibrée entre les acteurs économiques et des associations d'environnement et de développement, telles qu'identifiées depuis la Conférence des Nations unies à Rio en 1992. Des représentants des milieux scientifiques, choisis après un appel à candidatures, sont aussi présentés à la nomination au Roi pour un mandat renouvelable de cinq ans. Ce Conseil est complété d’un représentant de chaque ministre ou secrétaire d'Etat pour le niveau fédéral, et d’un représentant de chaque gouvernement de Région et de Communauté. Ce Conseil a principalement comme mission d’émettre des avis sur les mesures relatives à la politique fédérale et européenne de développement durable prises ou envisagées par l'autorité fédérale, notamment en exécution des engagements internationaux de la Belgique.
38A cette liste s’ajoute également un nombre important d’accords de coopération imposant à l’autorité fédérale et aux autorités régionales de procéder à des échanges d’informations dans plusieurs matières environnementales.
39L’autorité fédérale et les entités fédérées ont ainsi développé un véritable système de coopération créé sur une base essentiellement volontaire. L’imbrication compliquée de l’ensemble de ces institutions rend le système de coopération peu lisible. Les quelques informations entre notre possession69 ne nous permettent cependant pas d’expliquer les raisons de cette multiplication de ces organes de concertation.
40Le site Internet Climat.be (site fédéral officiel d’informations sur la politique climatique belge) schématique ce système imbriqué de la manière suivante70 :
41La coopération en matière de lutte contre le réchauffement climatique se caractérise tant par la multiplicité des organes mis en place que par l’obscurité et le manque de transparence de leurs travaux. Concrètement, l’ensemble des institutions présentées ci-dessus ne publient ni leur ordre du jour des réunions, ni l’identité des personnes présentes, ni même le résultat des discussions qui s’y sont déroulées.
42L’absence d’information et de publication des travaux de ces différentes institutions emporte également une double conséquence :
43Il n’est pas possible de savoir si toutes ces institutions se réunissent régulièrement et si elles sont toujours actives aujourd’hui ;
44On n’aperçoit pas quels sont les motifs qui ont conduit les entités belges à multiplier les institutions consultatives dans le cadre de la politique de la lutte contre le réchauffement climatique71.
45En effet, d’un point de vue rationnel, on peut se demander quelles sont raisons qui ont poussés les entités belges à multiplier les lieux de rencontre entre les différentes entités de la Belgique.
46A ce stade, nous ne pouvons émettre que des hypothèses quant à cette multiplication.
47D’un point de vue positif, nous pouvons espérer que la multiplication des institutions de coopération répond à une nécessité de créer des cénacles spécialisés sur des questions précises de la lutte contre le réchauffement climatique (ce qui prouverait que les acteurs institutionnels apportent une attention particulière sur les différents aspects techniques liés à la matière de la protection de l’environnement).
48D’un point de vue plus négatif, nous espérons cependant que cette multiplication ne correspond pas à une nécessité de renouveler à chaque fois les lieux de concertation lorsque ceux-ci ne fonctionnent plus, un peu comme si les entités politiques étaient des grands enfants qui changent de jeu lorsque le précédent est cassé ou abîmé.
3. Une mise en pratique : La COP21
49Comme exposé ci-dessus, l’autorité fédérale et les Régions ont mis en place un important système de coopération en matière d’environnement et de politique climatique en multipliant les espaces de rencontres entre les responsables des différents services et ministères concernés.
50La COP21 constitue ainsi un parfait cas d’étude de la bonne mise en place de ce système. Hélas, la participation belge à la COP21 pourrait longtemps rester gravée dans les mémoires comme l’un des plus beaux actes manqués de la politique internationale belge.
51En effet, la participation de la Belgique à la COP21 a constitué un feuilleton inédit pour les observateurs du droit public belge – feuilleton qui a fait à plusieurs reprises la une des principaux journaux du pays.
52Avec le recul, cet épisode peut être considéré comme une véritable crise politique qui a permis à la population de prendre connaissance des problèmes de concertation entre les différentes entités de l’État belge sur un sujet aussi sensible que le réchauffement climatique.
53Si cette crise politique n’a pas eu pour conséquence de mettre en jeu la survie des différents gouvernements qui composent l’État belge, les positions de certains politiques de premier plan, les déclarations faites par chacun des membres de la Commission nationale climat et les différentes passes d’armes par médias interposés ont fait craindre un blocage général de la coopération entre les différentes entités fédérées et pas uniquement sur la seule question de la politique climatique.
3.1 Le retard de la Belgique face à ses obligations européennes
54Les mésaventures de l’Etat belge lors de la COP21 ont comme point de départ le retard que les différentes autorités du pays ont pris pour transposer en droit belge le « paquet énergie climat » imposé par l’Union européenne pour la période 2013-2020.
-
La mise en place de ce « paquet » s’est notamment traduite par les interventions suivantes du législateur européen :
-
La révision de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil 72;
-
L’adoption de Directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE 73;
-
L’adoption de la directive 2009/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 avril 2009 relative au stockage géologique du dioxyde de carbone et modifiant la directive 85/337/CEE du Conseil, les directives 2000/60/CE, 2001/80/CE, 2004/35/CE, 2006/12/CE et 2008/1/CE et le règlement (CE) n°1013/2006 du Parlement européen et du Conseil74 ;
-
L’adoption de la Décision n°406/2009/CE DU Parlement Européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à l’effort à fournir par les États membres pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre afin de respecter les engagements de la Communauté en matière de réduction de ces émissions jusqu’en 2020 75;
-
L’adoption du plan pour l’efficacité énergétique et de la directive 2012/27/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 relative à l'efficacité énergétique, modifiant les directives 2009/125/CE et 2010/30/UE et abrogeant les directives 2004/8/CE et 2006/32/CE76.
55En effet, avant d’entamer les négociations avec les autres pays lors de la Conférence de Paris, il était indispensable que la Belgique se conforme à ses obligations européennes, afin de garantir sa crédibilité internationale, surtout au sein de l’Union européenne.
56Le « paquet énergie-climat » (également dénommé « burden sharing ») est constitué d’un ensemble d'actes de nature contraignante devant permettre à l’Union européenne d'atteindre ses objectifs en matière d’énergie et de lutte contre le changement climatique à l'horizon 2020. Il impose principalement la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 20 % et de porter à 20 % la part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie des Etats membres. L’objectif est celui d’une croissance intelligente, durable et inclusive, tout en maintenant une certaine compétitivité, notamment en augmentant la sécurité énergétique de l’Union européenne par une diminution de sa dépendance aux importations d'énergie77.
57Le paquet énergie climat impose donc aux États membres la transposition d’une série de mesures afin de réaliser l’effort climatique européen entre 2013 et 2020. A la veille de la rencontre internationale de Paris, à la fin de l’année 2015, force était de constater que la Belgique restait en défaut de transposition de ces mesures, qui avaient pourtant été adoptées par l’Union européenne en 2009.
58Alors que l’Union européenne demandait aux Etats-membres de transposer des mesures visant à adopter une politique climatique ambitieuse pour l’horizon 2020, la politique climatique belge était toujours basée sur le « Plan national climat ». Ce dernier est un accord politique, et non un accord juridique, destiné à définir la stratégie de la Belgique pour répondre aux objectifs énoncés par le Protocole de Kyoto. Il énonce aussi les premiers objectifs chiffrés quant aux réductions de gaz à effet de serre pour une période allant de 2009 et 2012. Même si ce Plan précise qu’il jette les bases de l’établissement d’une stratégie climatique pour l’après 201278, son contenu n’en n’était pas moins dépassé fin 2015, puisque les nouveaux objectifs européens de lutte contre le réchauffement climatique dépassaient les arbitrages politiques opérés par la Belgique lors de l’adoption du plan en 2008-2009.
59Le Plan national climat est resté un accord purement politique sans ancrage juridique. Ce statut accorde en principe plus de flexibilité à ses signataires (l’autorité fédérale et les régions) puisque les arbitrages opérés n’ont pas de valeur légalement contraignante.
60Le maintien du Plan sous la forme d’un accord purement politique recèle plusieurs avantages puisque de tels accords se modifient simplement, par l’accord mutuel des parties, et ne nécessitent aucune procédure parlementaire ou administrative susceptible de freiner ou de critiquer les choix politiques arrêtés par les parties.
61La situation de la Belgique était donc pour le moins paradoxale. En effet, alors que la politique de lutte contre le réchauffement climatique reposait sur un acte politique aisément modifiable théoriquement, la Belgique a continué à appliquer jusqu’à la COP21, un accord politique qui ne reflétait plus les enjeux européens puisque la Belgique était en retard par rapport aux objectifs définis par l’Union européenne.
3.2 L’opacité et l’échec des mécanismes de coopération de la politique climatique
62Le lecteur désireux d’étudier d’un peu plus près les raisons pour lesquelles aucun accord climatique pour l’horizon 2013-2020 n’a pu voir le jour, avant le coup de pression international que constitua la COP21, va rester sur sa faim.
63En effet, l’ensemble du système de coopération présentée ci-dessus reste opaque pour l’ensemble de la population. Parmi les institutions présentées au point 2.2, la plupart des textes fondateurs prévoient spécifiquement que leurs réunions se déroulent à huis-clos, ce qui a pour conséquence qu’il n’est pas possible de savoir quand ces réunions de coopération ont lieu, ni où, pas plus que la liste des personnes présentes ou l’ordre du jour de telles réunions. Et bien évidemment, il est également impossible de savoir quelles décisions y ont finalement été prises.
64Les travaux de ces institutions de coopération belges ne sont pas consultables. Ainsi, il n’est possible que d’émettre des hypothèses pour expliquer l’absence d’accord climatique pour 2013-2020, faute de pouvoir disposer d’un matériel pertinent permettant de comprendre ce retard.
65Ce retard peut vraisemblablement s’expliquer en raison des différences importantes qui existent entre les différentes régions, tant du point de vue démographique que géographique puisque les trois régions qui composent la Belgique poursuivent des intérêts énergétiques et environnementaux différents.
66En ce qui concerne la répartition des centrales et des instruments de production d’énergie entre la Région flamande et la Région wallonne (le territoire Région de Bruxelles-Capitale étant trop petit pour rivaliser sur ce point avec ses deux consœurs), il apparaît difficile d’établir qu’une Région dispose véritablement d’un monopole de production énergétique par rapport à l’autre.
67Par contre, il convient de préciser que la Région wallonne est la Région la plus boisée du pays, que la Région flamande concentre le plus d’activité agricole sur son sol (élevage et culture) et que la Région de Bruxelles-Capitale est une Région essentiellement urbaine79. Dès ce constat, on s’aperçoit que les Régions ne poursuivront seront attentives à des aspects différents de la politique de lutte contre le réchauffement climatique.
68Les enjeux pour ces trois Régions sont donc totalement différents. Il n’est donc pas surprenant que des désaccords politiques aient lieu au sein de ces cénacles obscurs de la coopération climatique, entrainant ainsi un retard conséquent.
69La réalité de la politique climatique de la Belgique doit ainsi tenir compte du fait que sur un si petit territoire, les trois régions amenées à négocier et à se concerter sur le positionnement de la Belgique quant à la lutte contre le réchauffement climatique connaissent des réalités géographiques, économiques, industrielles et démographiques différentes. Ce constat, couplé aux différences entre les formations politiques des trois régions (cf. ci-dessous 3.3), fait que la concertation entre les Régions et le fédéral s’annonçait comme difficile dès l’entame des négociations.
70Il ne peut être exclu que ce retard soit également combiné d’autres facteurs : l’absence de sanctions punitives directes en cas de non-adoption du « pacte de burden sharing » européen, les agendas politiques du fédéral et des entités fédérées qui n’ont pas fait la part belle aux enjeux climatiques (du moins avant les mois qui précèdent la COP21), les rivalités politiques entre les majorités politiques du Nord et du Sud du pays,…
71De plus, il faut évoquer l’important aspect financier que représentent ces négociations. En effet, les mesures européennes du paquet «énergie climat » prévoient la mise en place du mécanisme de mise aux enchères des quotas de CO2 entre les différents pays européens80. Dans le cadre d’un pays à construction fédérale, la question de la répartition entre les Régions et l’autorité fédérale des éventuels revenus liés à la vente des quotas belges de CO2 à d’autres pays européens, a, on peut l’imaginer, constitué un des obstacles à la mise en place d’un accord climatique dans les temps.
3.3 La crise politique avant et pendant la COP21
72Du point de vue de crédibilité internationale et européenne de la Belgique dans le cadre de la politique mondiale de lutte contre le réchauffement climatique, il était impératif que les différentes entités se mettent en règle par rapport aux enjeux climatiques européens, avant de se rendre à la Conférence de Paris.
73A la pression « politique » s’est également ajouté la pression médiatique. En effet, quelques mois avant la COP21, les médias, en raison de l’importance symbolique qu’allait prendre la COP21, ont commencé à interroger les différents gouvernements sur la position commune que la Belgique allait adopter et défendre lors de ce sommet international. Les différents médias du pays ont particulièrement mis l’accent sur les difficultés que rencontraient les acteurs institutionnels de la politique climatique, lesquels ont publiquement commencé à affirmer leurs divergences sur les plateaux de télévision, accentuant ainsi quelque peu la crise de confiance entre les différents partenaires.
74Il n’est cependant pas question d’affirmer ici que les médias ont été une des causes du blocage des négociations en vue de la préparation à la COP21. Au contraire, l’exposition médiatique du blocage a certainement permis de conscientiser davantage la population sur la réalité de la politique climatique au sein de l’État belge, participant ainsi à accentuer l’obligation de résultat des politiques belges quant à la détermination d’une position belge quant aux prochains objectifs climatiques.
75Les feux des médias se sont rapidement tournés vers la Commission nationale climat qui a été désignée, par la force des choses, comme le lieu privilégié de la négociation du nouvel accord politique qui devait remplacer la Plan national climat. Nous avons cependant exposé ci-dessus le rôle de la Commission nationale climat, qui était de veiller à la rédaction et à la mise en œuvre du plan national climat 2009-2012, et non de préparer et de négocier d’éventuels accords climatiques ultérieurs. Cette commission s’est donc retrouvée à devoir gérer de facto une mission à laquelle elle n’était pas originellement destinée.
76Au fil des jours, les sujets médiatiques sur l’absence de consensus sur un accord climatique belge n’ont cessé de faire l’actualité, jusqu’à être même le sujet d’ouverture des principaux journaux télévisés. A l’opacité des mécanismes de coopération décrits ci-dessus, s’est alors substitué l’affichage au grand jour les divergences politiques entre les différents gouvernements, ce qui a fait naître un doute sur la possibilité pour la Belgique de trouver un accord avant l’ouverture de la COP21.
77La négociation sur le nouvel accord climatique belge a donné lieu à des évènements dignes d’une véritable crise politique. On a ainsi pu voir les différents ministres en charge de la politique énergétique venir tour à tour sur les plateaux de télévision, ainsi que dans les autres médias, pour expliquer en quoi les autres entités bloquaient la mise en place d’un accord politique largement jugé nécessaire. Quinze jours avant l’ouverture de la COP21, la ministre bruxelloise de l’énergie81 a affirmé, dans un communiqué de presse, qu’elle n’irait pas à la COP21 sans un accord climatique préalable… sous peine de se couvrir de ridicule.
78Les difficultés dans les négociations peuvent également s’expliquer par la défiance et l’hostilité quasi génétique entre le parti socialiste francophone, majoritaire au Parlement régional bruxellois et au Parlement wallon, et le parti nationaliste libéral flamand (N-VA), majoritaire au Parlement flamand et au Parlement fédéral. Cette configuration rend toutes les négociations entre le nord et le sud du pays potentiellement explosives. Ajoutez à cela, une autre opposition forte entre le parti libéral francophone du Premier ministre et les partis autres francophones qui digéraient assez mal, à l’époque, le fait que le premier s’associe à la N-VA pour former une majorité fédérale alors que ce parti poursuit une finalité séparatiste et autonomiste pour la Flandre. On a ainsi pu voir le Premier ministre fédéral (libéral francophone, allié de la N-VA à la majorité fédérale) et le Ministre Président wallon (socialiste francophone) s’invectiver par médias interposés et en séance plénière à la Chambre, en se traitant mutuellement de « menteur » quand à l’absence réciproque d’efforts pour arriver à un accord82.
79Résultat, le 30 novembre 2015, le Thalys conduisant une partie de la délégation belge (comptant à peu près 200 personnes) vers le site du Bourget où se tenait la COP21 est parti … sans les Ministres compétents qui tentaient encore et toujours de négocier la position commune de la Belgique en matière climatique.
3.4 Ouverture de la COP21 et sortie de crise
80 L’image qu’a donnée la Belgique lors du début de la COP21 peut être résumée par la situation suivante. Le Premier ministre est monté à la tribune des chefs d’état afin de prononcer son discours d’ouverture dans lequel il n’a pas manqué d’exhorter les participants à l’élaboration d’un « accord ambitieux » et a affirmé que l’échec ne pouvait « être une option », et qu’il était donc temps que les différents pays prennent leurs responsabilités. Au même moment, les ministres fédéraux et régionaux étaient toujours en train de de négocier la position commune qu’allait adopter la Belgique lors des discussions internationales de cette même conférence.
81Cette situation de crise n’a pas connu qu’un retentissement national. L’absence de position commune de la Belgique en matière de lutte contre le réchauffement climatique a également été épinglée par diverses associations internationales, et notamment par le « Climate Action network »83 qui a décerné à la Belgique (ex aequo avec la Nouvelle-Zélande) le prix fossile récompensant les pays jugés comme étant les plus mauvais élèves de la politique climatique mondiale. Pire encore et comme si ça ne suffisait pas, la Ministre fédérale de l’Energie n’a pas assisté à l’ouverture de la COP21 car elle devait négocier les conventions permettant la prolongation de l’exploitation de plusieurs centrales nucléaires avec l’opérateur privé en charge de la production d’énergie nucléaire en Belgique.
82La Belgique a finalement réussi à adopter, in extremis, une position commune quant à la transposition des règles issues du « paquet énergie climat 2013-2020 » de l’Union européenne par la conclusion d’un accord politique signé le 4 décembre 2015 par les ministres en charge de l’Energie ; soit quatre jours après l’entame des négociations lors de la Conférence de Paris. Cet « Accord politique sur le Burden sharing intra-belge »84 est un document de sept pages85, dans lequel les ministres en charge de l’énergie ont finalement pu se mettre d’accord sur la répartition :
-
des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre (-15% de gaz à effet de serre) ;
-
des objectifs en matière de sources d’énergie renouvelable (+13% de production supplémentaire) ;
-
des revenus de la mise aux enchères des quotas de CO2 résultant du mécanisme européen ETS ;
-
de l’engagement sur le financement international de la lutte contre le réchauffement climatique.
83Cet accord politique comporte également un engagement de la part des Ministres compétents d’en traduire le contenu dans un accord de coopération qui sera soumis à l’approbation des différents Parlements. Ainsi, une fois de plus, la politique climatique nationale et internationale de la Belgique a reposé sur un accord purement politique ne permettant un contrôle de la part des élus, des juridictions belges et des citoyens.
84La manière dont l’ « accord politique sur le Burden sharing intra-belge » a été dégagé mérite aussi quelques éclaircissements malgré l’opacité des travaux de concertation menés au sein des différentes institutions présentées ci-dessus.
85Les seules informations dont nous disposons à ce sujet sont contenues dans le préambule de l’accord. Celui-ci nous informe que le 28 janvier 2015, soit un an avant la COP21, c’est le Comité de concertation qui a chargé la Commission nationale climat de reprendre les travaux de négociations sur la détermination d’un accord politique. Il a également confié au Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale la tâche de proposer un projet d’accord, lequel devra (ou devait ?) ensuite être approuvé au consensus par l’ensemble des membres de la Commission nationale climat86.
86Ainsi, malgré l’ensemble des procédures de concertation relatives à la détermination de la politique internationale de la Belgique et malgré les nombreuses institutions de concertation créées par les Régions et l’autorité fédérale pour arriver une position commune en matière de politique climatique, la procédure qui a mené à la conclusion de l’accord politique sur le Burden sharing intra-belge a été « inventée » par le Comité de concertation. Ce dernier a confié cette mission à une seule institution « la Commission nationale climat », écartant ainsi l’intervention et l’expertise des autres institutions compétentes en la matière. Ce constat permet de nous interroger sur la réelle utilité de l’ensemble de ces mécanismes de coopération puisque ceux-ci semblent avoir été inutiles au moment où il était nécessaire qu’ils interviennent. Finalement, il faut constater que la solution au blocage existant n’est pas issue du respect de l’ensemble des mécanismes de concertation décrits ci-dessus mais bien d’une nouvelle procédure pensée, négociée et imaginée au sein du comité de concertation. Cette constatation est troublante et nous amène à poser cette question, peut-être sacrilège, est-ce que finalement le fédéralisme coopératif s’accommode mieux des procédures légales, réglementaires ou conventionnelle figées ou est-ce que la meilleure manière de se concerter entre entités fédérées ne se trouverait pas les espaces clos et discrets créées en dehors de ces procédures formalisées, dans une certaine forme de « paralégalité » ?
87Malgré ces mésaventures institutionnelles, la Belgique a réussi à se présenter lors des différents groupes de travail de la COP21 avec une position commune, ce qui lui a permis de participer de manière pleine et entière aux discussions ayant abouti à l’Accord environnemental de Paris.
88Ces évènements ont toutefois laissé une trace politique, toujours visible actuellement. Ils ont permis d’une certaine manière de libérer une parole alors minoritaire en Belgique, laquelle prône la possibilité d’opérer une « refédéralisation » de certaines compétences87. En effet, une telle option apparaissait comme étant véritablement tabou au sein de la classe politique, la Belgique connaissant une dynamique centrifuge de fédéralisation depuis la première réforme de l’Etat en 1970. Or, de nombreux hommes et femmes politiques de premier plan (en ce compris la Ministre fédérale de l’Energie) n’ont pas hésité depuis ces évènements à faire part de leurs constats d’échec de cette fédéralisation intensive et n’hésitent plus à prôner la refédéralisation de certaines compétences dont notamment celles relatives au climat8889 afin d’éviter un nouvel « Belgium Bashing » au niveau international.
89Finalement, peut-être que les entités fédérées ont retenu les leçons de la COP21. En effet, la lecture du Moniteur belge du 12 juillet 2018 nous apprend que l’Etat fédéral et les trois Régions ont donné leur assentiment législatif à l’ « Accord de coopération du 12 février 2018 entre l'Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif au partage des objectifs belges climat et énergie pour la période 2013-2020 »90.
90Cet accord de coopération a pour objectif de :
-
fixer la contribution de chaque partie contractante en vue d'atteindre l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre imposé à la Belgique pour la période 2013-2020
-
fixer la contribution de chaque partie contractante en vue d'atteindre les objectifs imposés à la Belgique en matière d'énergie produite à partir de sources renouvelables ;
-
partager, entre les parties contractantes, des revenus issus de la mise aux enchères des quotas d'émissions de CO2 pour la période 2013 à 2020 ;
-
fixer la contribution obligatoire de chaque partie contractante au financement climatique international pour la période 2016 à 2020 inclus.
91L’accord de coopération donne comme mission à la Commission nationale climat et au CONCERE de procéder au suivi de la mise en œuvre de l’accord91.
92L’accord prévoit également un mécanisme particulier de sanction à savoir que lorsque que la Belgique fait l'objet d'une condamnation en vertu de l'article 260 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, le CONCERE fixe la part de la somme forfaitaire ou de l'astreinte éventuellement due par chaque partie contractante, proportionnellement aux engagements qu'elle n'a éventuellement pas atteints. L’accord précise alors qu’il revient… au Comité de Concertation valide la décision prise92.
93Enfin, autre élément interpellant, l’accord précise qu’il produit ses effets au … 4 décembre 201593, soit au jour de l’adoption de l’accord « Burden sharing » (soit un effet rétroactif de plus de trois ans….). La section de législation du Conseil d’Etat94, après avoir rappelé le principe général de non-rétroactivité, considère que l’accord peut rétroagir puisqu’il poursuit, a priori, l’objectif d’exécuter des obligations résultant du droit international et du droit européen95.
94La lecture des travaux préparatoires nous apprend également que l’accord « Burden Sharing » a été entériné le 23 décembre 2015 par le Comité de concertation96, ce qui peut s’interpréter comme le fait que les délégations belges à la COP21 ont négocié sur base d’un texte qui n’avait pas recueilli l’unanimité des parties au 4 décembre 2015. On peut s’interroger d’ailleurs sur le rôle du Comité de concertation dans cet « entérinement ».
95L’utilisation d’un accord de coopération pour constitue une évolution importante par rapport au précédent Plan national climat. En effet, alors qu’un accord politique ne constituait pas une norme de droit, un accord de coopération bénéficiant d’un assentiment législatif constitue un norme juridique importante dans la hiérarchie des normes en droit public belge. L’assentiment législatif donné par toutes les parties implique également que toute modification des termes de l’accord doit désormais être soumis aux différents Parlements, ce qui permet un contrôle démocratique des objectifs environnementaux et des moyens de lutte contre le réchauffement climatique. Un tel assentiment a donc pour conséquence de fixer clairement et durablement les objectifs ainsi déterminés. Toutefois, l’utilisation d’un accord de coopération n’est pas sans critique non plus notamment au niveau de l’effectivité de cet accord et de la possibilité de l’utiliser comme norme de référence pour l’éventuelle censure d’un acte législatif ou réglementaire qui serait contraire aux choix et aux arbitrages fixés par les parties97.
Conclusion : la politique climatique belge - un terrain de jeu de la paralégalité
96Au-delà des polémiques engendrées par la prestation des autorités belges pour arriver à négocier un accord politique de quelques pages sur la politique climatique de la Belgique, les évènements entourant la COP21 ont fait apparaître au grand jour plusieurs éléments susceptibles d’améliorer le système de fédéralisme coopératif en Belgique.
97Concrètement, on ne peut affirmer que c’est l’enchevêtrement de l’ensemble des mécanismes de coopération en matière environnementale et climatique et relatifs aux relations internationales qui sont à l’origine du blocage qui a empêché la Belgique de se doter dans les temps d’un instrument juridique traduisant le « paquet énergie climat européen ». L’origine de ce blocage peut être également recherchée avant tout dans l’effet conjugué des différentes politiques énergétiques, agricoles et environnementales des différentes autorités belges, découlant de la disparité géographique et démographique entre les différentes régions.
98Cependant, il est plus que troublant que l’ensemble des mécanismes de concertation présentés ci-dessus, qui multiplient les lieux de rencontre entre les responsables et les spécialistes de chaque entité, n’ait pu permettre de trouver une solution rapide à l’absence de politique climatique globale et actualisée en Belgique. L’opacité qui entoure les travaux de l’ensemble de ces commissions ne nous permet pas de savoir si elles ont également connu des blocages politiques en leur sein, empêchant ainsi l’émergence d’un consensus entre les parties, ou si ces institutions de concertation ne se sont tout simplement pas réunies pour discuter de ce sujet.
99Le fédéralisme coopératif belge en matière de politique climatique se caractérise par une absence de prise en compte de cette politique dans le système de répartition des compétences et par une véritable inflation des instruments de coopération qui n’ont malheureusement pas servi à empêcher la crise politique connexe à la COP21. La question se pose donc de savoir si toutes ces institutions de coopération sont bien utiles et s’il ne serait pas nécessaire de simplifier l’ensemble de ce système en revalorisant le rôle de la Commission nationale climat (et donc d’officialiser ce qui passe concrètement dans les arrières salles des ministères) ?
100Est-ce que la conclusion paradoxale qui doit être tirée de la mésaventure de la participation belge à la COP21 ne serait pas en fin de compte : trop de coopération empêche la coopération ?
101La crise issue de la COP21 a également permis la libération d’une certaine parole au sein de la classe politique belge, ainsi qu’au sein de la population, celle démontrant une volonté de rationalisation des compétences liées au climat, voire même d’une « refédéralisation », des compétences liées à la protection de l’environnement et à la lutte contre le réchauffement climatique. En effet, certaines personnalités politiques de premier plan pour ramener l’intégralité des compétences touchant au climat au sein de l’Autorité fédérale.
102Si une telle initiative est juridiquement envisageable (notamment par une clarification de la répartition des compétences entre les Régions et l’Etat fédéral dans la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980 et donc une modification de celle-ci), elle constituerait cependant un défi institutionnel important vu l’ensemble des compétences touchées par la politique du climat. Notons également qu’une autre partie de l’échiquier politique belge ne cautionne pas ces démarches et entendent maintenir l’autonomie régionale en matière de politique climatique.
103La politique belge de lutte contre le réchauffement climatique mérite clairement sa place dans une étude consacrée au « jeu du droit » et ce à plus d’un titre.
104Tout d’abord, on ne peut s’empêcher de penser que les entités belges ont utilisé les différents accords de coopération, comités de concertation, groupes de travail et commissions comme des jeux. Les entités ont ainsi collectionnés les différents organismes de concertation comme des enfants collectionnant les jouets d’une même série… alors qu’ils ont les mêmes habilités. En créant des instances de concertation composées par les mêmes parties sur des thèmes et problématiques similaires, on peut effectivement s’interroger sur la raison de l’absolue nécessité de multiplier ces instances …pour le résultat que l’on connaît aujourd’hui.
105Le système présenté ici peut également faire penser à un jeu de cache-cache où les gouvernements ont joué à créer des cachettes de plus en plus discrètes pour pouvoir se réunir et discuter de la mise en place d’une des politiques publiques les plus importantes aux yeux de la population. Les gouvernements belges sont tellement forts à ce jeu qu’on ne sait même pas si ces réunions ont bien eu lieu, ce qu’il en est ressorti et si ces « cachettes » ont bien été utiles à la mise en place de la politique climatique belge. Ils ont même poussé la maîtrise de ce jeu au point où aucun document n’est accessible concernant ces réunions et les décisions et arbitrages qui y seraient adoptés échappent également au contrôle des parlements.
106Si l’on prend également le terme « jeu » comme l’espace entre deux pièces d’un mécanisme ménagé pour permettre un mouvement aisé d’un objet, alors les mésaventures de la politique climatique belge peuvent également entre dans ce concept si celui-ci est pris sous l’angle de la paralégalité.
107Jusqu’en février 2018, la politique climatique de la Belgique s’est construite et décidé en dehors des sentiers battus, entendez ici en dehors des structures démocratiques habituelles permettant aux citoyens et aux parlementaires de pouvoir assurer un contrôle démocratique des options prises par les différents gouvernements. A l’inverse, les gouvernements ont entendu maintenir une forme d’obscurité et de confidentialité autour de toutes ces discussions. En utilisant des cénacles dont nous ne connaissons pas la composition et dont nous ne pouvons savoir qui a défendu quelle position, il convient de conclure que les gouvernements ont volontairement voulu se mettre à côté du droit et des institutions démocratiques habituelles pour pouvoir faire les arbitrages nécessaires sans que ces derniers puissent être remis en question par les mécanismes légaux de contrôle de l’action des gouvernements. Le meilleur exemple reste l’utilisation d’un accord politique entre 2009 et 2015 comme siège de la politique climatique belge, ce qui a comme avantage que cet accord ne constitue pas légalement un acte juridique créateur de droit… tout en l’étant en pratique.
108Espérons que les déboires de la délégation belge à la COP21 et la médiatisation des difficultés institutionnelles belges à cet égard ont fait sonner la fin de la récréation pour les différents gouvernements. Le fait que de plus en plus de personnalités politiques soulèvent le débat de la possible refédéralisation de certaines compétences et que l’accord « Burden Sharing » ait l’objet d’un accord de coopération qui a été débattue devant chaque assemblée parlementaire compétente semblent indiquer une certaine prise de conscience de la part des gouvernements. Si la « paralégalité » présente de nombreux avantages, notamment en matière de liberté d’action des pouvoirs publics, force est de constater que l’aventure climatique belge démontre certainement qu’il ne s’agit pas de la panacée pour éviter les blocages politiques.
Voetnoten
1 Article 2 de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.
2 Pour reprendre les termes utilisés par Laurent Fabius qui présidait cette rencontre internationale.
3 Sur ces 197 parties, 195 ont signé l’accord de Paris à l’issue de la Conférence de décembre 2015. Seuls la Syrie et le Nicaragua ont refusé, dans un premier temps, de signer l’accord. Aujourd’hui, les gouvernements de ces deux pays ont indiqué vouloir signer l’Accord de Paris. Seul les Etats-Unis ont finalement décidé de dénoncer l’Accord.
4 Sur ce point, voyez également Andersen (R.), « Les compétences », in :La Constitution fédérale du 5 mai 1993, Bruxelles, Bruylant, 1993, pp. 138 et s. ; De Visscher (P.), « La Constitution belge et le droit international », R.B.D.I, 1986, pp. 5 et s., R. ERGEC, « La Réforme de l’Etat – les relations internationales, J.T., 1994, pp. 837 et s. ; Leroy (M.) et Schaus (A.)., « Les relations internationales » in Les réformes institutionnelles de 1993, Vers un fédéralisme inachevé ? , Bruxelles, Bruylant, 1994, pp. 25 et s., Feyt (A.), « Les Communautés et les Régions peuvent-elles se doter d’une diplomatie propre », C.D.P.K., 2002, pp. 22 et s.
5 Brownlie (I.), Principles of Public International Law, Oxford University Press, 2003, p.58. Il est en effet rare que les entités fédérées bénéficient d’un droit de vote propre au sein des différentes organisations internationales, voyez cependant comme contre-exemple l’Organisation internationale de la Francophonie qui compte parmi ses membres tant l’Etat belge que l’une de ses entités fédérées : la Communauté française. Voyez aussi Paquin (S.), Kravagna (M.) et Reuchamps (M.) “International relations of minority nations: Quebec and Wallonia compared”. inReuchamps (M.) (ed.), Minority Nations in Multinational Federations: A comparative study of Quebec and Wallonia),Abingdon & New York: Routledge, 2015, pp. 160-180.
6 Uyttendaele (M.), Trente leçons de droit constitutionnel paradoxal, Bruylant, 2014, p.966.
7 Titre IV de la Constitution (article 167 à 169).
8 L’article 167 de la Constitution précise que cette mission revient au Roi. Concrètement, cet article est désormais appliqué comme attribuant cette mission au Gouvernement fédéral et non au monarque, qui ne garde plus qu’une compétence formelle et parfois également de représentation lors de certains grands évènements.
9 Y. LEJEUNE, Droit constitutionnel belge, Fondements et institutions, 3ème éd., Larcier, 2017, p.643.
10 A noter que l’article 167 de la Constitution organise également les modalités particulières pour la conclusion des traités relatifs à l’Union européenne.
11 Voyez à ce propos l’article 16 de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 aout 1980.
12 Uyttendaele (M.), op.cit., p.873.
13 Ibid., p.967.
14 Révision constitutionnelle du 6 janvier 2014 (M.B., 30 janvier 2014) qui relègue la procédure d’assentiment des traités à la procédure du monocaméralisme alors qu’elle faisait partie, avant la Sixième réforme de l’Etat, de la procédure bicamérale obligatoire (Voy. À ce sujet, Amez (F.), “Le bicaméralisme après la sixième réforme de l’Etat”, C.D.P.K., 2015, pp.189 à 220).
15 Article 16 de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, tel que modifié par la loi spéciale du 5 mai 1993 sur les relations internationales des Communautés et des Région.
16 Article 81 de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980.
17 L’article 92bis, § 4ter, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980.
18 M.B. du 19 juillet 1996.
19 Article 9 de l’accord de coopération du 8 mars 1994 entre l’Etat fédéral, les Communautés et les Régions relatif aux modalités de conclusion des traités mixtes. Chacune de ces normes d’assentiment sera publiée au Moniteur belge, avec l’accord – qui est ainsi reproduit à plusieurs reprises.
20 Voyez à ce sujet : LAGASSE Lagasse (Ch.-E.), « La représentation de la Belgique dans les organisations internationales », R.B.D.I., 1994/1, p. 147 à 163.
21 M.B. du 19 novembre 1994.
22 Voyez par exemple : Accord de coopération du 24 septembre 2013 entre l'Etat fédéral, les Communautés et les Régions portant sur la représentation du Royaume de Belgique au sein de l'Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) et sur les contributions financières à cette organisation (M.B. 10 juillet 2015) ou l’accord de coopération du 8 mars 1994 entre l'Etat fédéral, les Communautés et les Régions, relatif à la représentation du Royaume de Belgique au sein du Conseil de Ministres de l'Union européenne (M.B., 17 novembre 1994).
23 Article 5 de l’accord-cadre de coopération du 30 juin 1994 entre l'Etat fédéral, les Communautés et les Régions portant sur la représentation du Royaume de Belgique auprès des organisations internationales poursuivant des activités relevant de compétences mixtes. Voyez également le préambule de l’accord-cadre de coopération qui précise que c’est au sein de la CIPE que l’accord a lui-même été négocié et conclu entre les Gouvernements.
24 Uyttendaele (M.), op. cit., p.973.
25 Pour une discussion relative au Comité de concertation, voir le texte d’Anne-Emmanuelle Bourgaux dans le présent numéro spécial.
26 Question écrite n° 5-626 de Karl Vanlouwe (N-VA) du 18 décembre 2010 au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères et des Réformes institutionnelles posée au Sénat, disponible sur http://www.senat.be/www/?MIval=/index_senate&MENUID=23130&LANG=fr.
27 La version actuellement en vigueur de l’article 35 de la Constitution prévoit que les entités fédérées disposent des compétences énumérées tandis que l’autorité fédérale se voit conférer les compétences non attribuées, appelées également compétences résiduelles.
28 Article 6, § 1er, VII, LSRI.
29 Article 6, § 1er, II, LSRI, et voyez à ce propos l’étude suivante : NEURAY Neuray (J.-F.), « La répartition des compétences environnementales en droit belge (principes directeurs) », in Fédéralisme et environnement : Perspectives belgo-canadiennes, Revue de la faculté de droit de l’ULB, Bruylant, Bruxelles, 2011, pp.87 à 121.
30 Article 6, § 1er, II, alinéa 2, 2°, LSRI.
31 Article 6, § 1er, VI, LSRI.
32 Article 6, § 1er, V, LSRI.
33 En vertu des compétences résiduaires.
34 Article 6, § 1er, X, LSRI.
35 Article 6, § 1er, I, LSRI.
36 Préambule de l’accord de coopération du 5 avril 1995 entre l'Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif à la politique internationale de l'environnement.
37 Pour ce qui concerne la politique de l’énergie, l’article 6, §1er, VII, LSRI répartit les compétences de la manière suivante : Les Régions disposent des aspects régionaux de la politique de l’énergie à savoir : la distribution et le transport local d'électricité au moyen de réseaux dont la tension nominale est inférieure ou égale à 70 000 volts ; la distribution publique du gaz; l'utilisation du grisou et du gaz de hauts fourneaux; les réseaux de distribution de chaleur à distance; la valorisation des terrils; les sources nouvelles d'énergie à l'exception de celles liées à l'énergie nucléaire; la récupération d'énergie par les industries et autres utilisateurs ;l'utilisation rationnelle de l'énergie. Selon cette même disposition, l’autorité fédérale reste compétente pour les matières dont l'indivisibilité technique et économique requiert une mise en œuvre homogène sur le plan national, à savoir les études sur les perspectives d'approvisionnement en énergie, le cycle du combustible nucléaire, les grandes infrastructures de stockage, le transport et la production de l'énergie et les tarifs, en ce compris la politique des prix.
38 Vanrykel (F.), « La politique belge en matière de climat, entre autonomie et coopération. Quelle place pour une vision commune à l’échelle nationale ? », R.B.D.C., 2017/3, p.225.
39 Il est difficile de dater précisément le début de cette pratique vu qu’elle n’a jamais été traduite de manière constitutionnelle et légale dans un acte précis. Le premier véritable acte posé en ce sens par les différentes entités est la conclusion de l’accord de coopération du 5 avril 1995 précité en ce qu’il a été signé par les ministres jugés compétents de l'Etat fédéral, de la Région flamande, de la Région wallonne et de la Région de Bruxelles-Capitale.
40 Le premier Ministre Charles Michel, le Ministre fédéral des Affaires étrangères Didier Reynders, la Ministre fédérale de l’Energie Marie-Christine Marghem la Ministre bruxelloise de l’Energie et de l’environnement Céline Frémault, la Ministre flamande de l’Energie et de l’environnement Joke Schauvliege, le Ministre wallon de l’énergie Paul Furlan. En cours de négociations, le Ministre-Président wallon Paul Magnette et le Ministre wallon de l’environnement, Carlo Di Antonio, ont rejoint la délégation belge à Paris.
41 Sur la question de l’harmonisation de l’attribution des portefeuilles ministériels compétents à la politique climatique voyez Vanrykel(F.), op. cit., p.228.
42 Ce dernier élément peut être vu tant d’une manière positive que d’une manière négative. D’un point de vue positif, on peut se réjouir que la problématique de la lutte contre le réchauffement climatique concerne plusieurs ministères différents démontrant ainsi la transversalité de la matière. Cependant, dans le contexte belge, la multiplication des acteurs institutionnels constitue également une potentielle source de blocage dans le cadre des négociations entre ces institutions.
43 Sur ce point voyez Vanrykel (F.), op. cit., p.228.
44 Article 6, § 3, 2°, LSRI.
45 Article 6, § 3, 3°, LSRI.
46 Article 6, § 3bis, 5°, LSRI.
47 Article 6, § 4, 1°, LSRI.
48 Article 92bis, § 1, LSRI : « L'Etat, les Communautés et les Régions peuvent conclure des accords de coopération qui portent notamment sur la création et la gestion conjointes de services et institutions communs, sur l'exercice conjoint de compétences propres, ou sur le développement d'initiatives en commun. Les accords de coopération sont négociés et conclus par l'autorité compétente. Les accords qui portent sur les matières réglées par décret, ainsi que les accords qui pourraient grever la Communauté ou la Région ou lier des Belges individuellement, n'ont d'effet qu'après avoir reçu l'assentiment par décret. Les accords qui portent sur les matières réglées par la loi, ainsi que les accords qui pourraient grever l'Etat ou lier des Belges individuellement, n'ont d'effet qu'après avoir reçu l'assentiment par la loi. (…) ». Voyez également : Peeters (Y.), « Samenwerkingsakkoorden in het Belgische staatsrecht », R.W., 2015-2016, liv. 16, pp. 603-619 ; Vanpraet (J.) et Peeters (Y.), « Autonomie en samenwerking in het federale België », in X., Evoluties in het Belgisch cooperatief federalisme — Evolution dans le fédéralisme coopératif belge, Bruges, die Keure, 2013, pp. 101-161.
49 Labrysen (L.), « Le fédéralisme belge et la politique de l’environnement : concertation, coopération et… agir chacun pour soi dans un contexte européen », in Fédéralisme et environnement : Perspectives belgo-canadiennes, Revue de la faculté de droit de l’ULB, Bruylant, Bruxelles, 2011. Le professeur Marc Uyttendaele précise à cet égard que : « La coopération forcée constitue la conséquence indissociable de l’accroissement des compétences des entités fédérées et surtout de leur éclatement excessif entre les divers partenaires de la Fédération » (Uyttendaele (M.),, Précis de droit constitutionnel belge, Regards sur un système institutionnel paradoxal, op. cit., p.1014).
50 Pour un aperçu des mécanismes de coopération facultatifs dans divers domaines de la politique de l’environnement, voyez Lavrysen (L.), op. cit., p.151 à 169.
51 C.C., arrêt n°76/2012 du 14 juin 2012, B.11.2
52 Vandenbossche (E.), « Het overlegcomité : een instelling in opmars ? », in X., Evoluties in het Belgisch cooperatief federalisme — Evolutions dans le fédéralisme coopératif belge, Bruges, die Keure, 2013, pp. 17-23.
53 https://www.health.belgium.be/fr/la-conference-interministerielle-de-lenvironnement-cie
54 Article 1er, §7, de l’accord de coopération du 14 novembre 2002 sur le climat relatif à l'établissement, l'exécution et le suivi d'un Plan national Climat, ainsi qu’à l'établissement de rapports, dans le cadre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements climatiques (M.B., 27 juin 2003). Cet accord de coopération n’a reçu aucun acte législatif d’assentiment. Moerenhout (R.), « La coopération entre l’Etat fédéral et les Régions ainsi qu’entre les régions en matière d’environnement et d’aménagement du territoire », Amén., 1997, numéro spécial, pp.29-30, Lavrysen (L.), « Le fédéralisme belge et la politique de l’environnement : concertation, coopération et… agir chacun pour soi dans un contexte européen », op. cit., pp. 121-169 ; Moerenhout (M.), « De samenwerking tussen de federale staat en de gewesten en tussen de gewesten onderling inzake leefmilieu en ruimtelijke ordening », T.M.R., 1998, p. 91.
55 M.B., 13 décembre 1995, cet accord de coopération n’a pas reçu d’assentiment législatif.
56 Le CCPIE est composé d’agents spécialisés des différentes administrations et des ministères concernées auxquels on ajoute un délégué particulier du Ministère fédéral des Affaires étrangères, un délégué particulier de l'Administration générale de la coopération au développement, un délégué du Ministre fédéral des Affaires étrangères, un délégué particulier du Ministre fédéral compétent pour la Coopération au Développement, un délégué particulier de la Représentation permanente de la Belgique auprès de l'Union européenne.
57 Article 10 de l’accord de coopération du 5 avril 1995.
58 Anciennement Ministère.
59 https://www.health.belgium.be/fr/ccpie-comite-de-coordination-de-la-politique-internationale-de-lenvironnement
60 Sur cette institution : Vanrykel (F.), op. cit., p.225.
61 Cette commission est constituée par des représentants de l’autorité fédérale et des trois Régions, chacune disposant de quatre mandataires désignés par leurs gouvernements. Ces personnes pourront être assistées par des experts.
62 M.B., 27 juin 2003.
63 M.B., 26 février 1992.
64 M.B., 24 juin 1994.
65 M.B., 4 février 1998.
66 M.B. 10 mars 2014.
67 M.B., 18 juin 1997.
68 Le Bureau fédéral du Plan est un organisme indépendant d'intérêt public qui réalise des études et des prévisions sur des questions de politique économique, sociale, environnementale et leur intégration dans une perspective de développement durable.
69 Cf. les différents préambules des accords de coopération présentés ci-dessus. La plupart des accords de coopération adoptés en matière de lutte contre le réchauffement climatique n’ont d’ailleurs pas fait l’objet d’une confirmation législative de telle sorte que nous ne disposons pas de travaux préparatoires pour nous éclairer sur l’imbrication réelle de l’ensemble de ces outils.
70 http://www.climat.be/fr-be/politiques/politique-belge/politique-nationale/organes-de-decision/
71 En théorie, les missions de ces institutions se recoupent en grande partie, la consultation des travaux de ces instances pourrait permettre de comprendre la logique de cette nécessité de multiplier les lieux de discussion en matière de développement durable.
72 J.O. L 275 du 25.10.2003, pp. 32 et s.
73 J.O. L 140 du 5 juin 2009, pp. 16 et s.
74 J.O. L 140 du 5 juin 2009, pp. 114 et s.
75 J.O. L 140 du 5.6.2009, pp. 136 et s.
76 J.O. L 315 du 14 novembre 2012, pp. 1 et s.
77 Communication de la Commission européenne : « EUROPE 2020 - Une stratégie pour une croissance intelligente, durable et inclusive », Bruxelles, le 3 mars 2010 - COM(2010) 2020
78 Plan national climat, page 4 - http://www.climat.be/files/7813/8262/1900/PNC_2009-2012-2.pdf
79 Cf. le site http://www.atlas-belgique.be/cms2/# mis en ligne par l’Unité de Géomatique de l'Université de Liège.
80 Voyez la Directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil ’UE qui instaure un système d’échange de quotas des gaz à effet de serre au sein de l’UE. Chaque quota représente la permission d’émettre une tonne de dioxyde de carbone (CO2) ou équivalent au cours d’une période donnée.Dans la limite du plafonnement européen des quotas (qui est abaissé de 1,74 % chaque année), les exploitants peuvent recevoir ou acheter des quotas qu’ils peuvent ensuite échanger entre eux en fonction de leurs besoins. Ils peuvent également échanger des quantités limitées de crédits internationaux résultant de projets de réduction des émissions partout dans le monde en quotas.
81 Qui assurait, à ce moment la présidence tournante, de la Commission nationale climat (article 6, §1er, 4., de l’accord de coopération entre l’Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif à l’établissement, l’exécution et le suivi d’un Plan national Climat, ainsi que l’établissement de rapports, dans le cadre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements climatiques et du Protocole de Kyoto.
82 LaLibre.be « Magnette : "Charles Michel ment comme il respire », article mis en ligne le 3 décembre 2015 (http://www.lalibre.be/actu/planete/magnette-charles-michel-ment-comme-il-respire-5660617835709322e71f0752); Rtbf.be « Absence d'accord climat: la température politique est montée d'un cran », article mis en ligne le 3 décembre 2015 (https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_la-temperature-est-a-nouveau-montee-d-un-cran-jeudi-au-parlement?id=9155062).
83 Association regroupant plus de 1.100 ONG actives dans les matières environnementales (plus d’informations sur http://www.climatenetwork.org/).
84 Cet accord est disponible sur le site de la Commission nationale climat : https://www.cnc-nkc.be/fr/cadre-legal/accords-de-cooperation-protocole-etc
85 A comparer avec les 143 pages du Plan national climat 2009-2012.
86 Préambule de l’accord politique sur le Burden sharing intra-belge : https://www.cnc-nkc.be/fr/cadre-legal/accords-de-cooperation-protocole-etc
87 En Belgique, une « refédéralisation » signifie une « re-centralisation » des compétences.
88 Dans la presse, tant des personnalités politiques tels que le Vice-Premier Ministre Kris Peeters (CD&V, chrétiens-démocrates), le Ministre Alexander De Croo (Open-VLD, libéraux flamands), tous des politiciens flamands, ont prôné d’étudier la possibilité pour une éventuelle nouvelle réforme de l’Etat, à la possibilité de réfédéraliser certaines matières. Au mois d’octobre 2016, la ministre fédérale en charge de l’Energie a également plaidé sur les plateaux d’émissions politiques pour une telle fédéralisation des compétences climat.
89 Ces propositions ont un retentissement jusque dans les débats parlementaires, voyez en ce sens les propos du député Marco Van Hees (PTB-GO) dans le cadre d’un débat parlementaire avec la ministre de l’Énergie, de l’Environnement et du Développement durable sur les suites de la COP21 au niveau de la politique climatique belge (Rapport fait au nom de la Commission spécial climat et développement durable, Doc. Parl., Ch., n°54- 1763/001, p. 10).
90 Accord de coopération du 12 février 2018 entre l'Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif au partage des objectifs belges climat et énergie pour la période 2013-2020, (M.B., 12 juillet 2018) ; Loi du 15 juin 2018 portant assentiment à l'accord de coopération du 12 février 2018 entre l'Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif au partage des objectifs belges climat et énergie pour la période 2013-2020, (M.B., 12 juillet 2018) ; Décret du 8 juin 2018 portant assentiment à l'accord de coopération du 12 février 2018 entre l'État fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale concernant la répartition des objectifs belges sur le climat et l'énergie pour la période 2013-2020, (M.B., 12 juillet 2018) ; Ordonnance du 24 mai 2018 portant assentiment à l'Accord de coopération du 12 février 2018 entre l'Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif au partage des objectifs belges climat et énergie pour la période 2013-2020, (M.B., 12 juillet 2018) ; Décret du 26 avril 2018 portant assentiment à l'accord de coopération du 12 février 2018 entre l'Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif au partage des objectifs belges climat et énergie pour la période 2013-2020, (M.B., 17 mai 2018).
91 Article 43 de l’accord de coopération du 12 février 2018 entre l'Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif au partage des objectifs belges climat et énergie pour la période 2013-2020.
92 Article 38 de l’accord de coopération du 12 février 2018 entre l'Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif au partage des objectifs belges climat et énergie pour la période 2013-2020.
93 Article 48 de l’accord de coopération du 12 février 2018 entre l'Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif au partage des objectifs belges climat et énergie pour la période 2013-2020.
94 Section du Conseil d’Etat belge appelé à examiner la légalité des avant-projets de loi/décret/ordonnance en cours de procédure parlementaire.
95 Avis SLCE n°61.126/VR du 26 avril 2017,Doc. Parl., Ch., session 2017-2018, n°54-3019/1, p.32.
96 Projet de loi portant assentiment à l’accord de coopération du 12 février 2018 entre l’Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif au partage des objectifs belges climat et énergie pour la période 2013-2020, Doc. Parl., Ch., session 2017-2018, n°54-3019/1, p.10.
97 M. LEROY, Contentieux administratif, 5ème éd., Anthemis, 2012, p.369 ; Y. PEETERS, De plaats van samenwerkingsakkoorden in het constitutioneel kader, Die Keure, 2016.Voyez également sur le sujet des accords de coopération : J. POIRIER, « Le droit public survivra-t-il à sa contractualisation ? : Le cas des accords de coopération dans le système fédéral belge », Revue de Droit de l'ULB, 2006, pp. 261-314. H. DUMONT, « L'Etat belge résistera-t-il à sa contractualisation ? Considérations critiques sur la mode belge des accords de coopération », Revue de Droit de l'ULB, 2006, p. 314-344.