Fédéralisme Régionalisme

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Jean Beaufays

Théorie de la nouvelle frontière.Pistes de réflexion

(Volume 4 : 2003-2004 - Régions et sécurité)
Article
Open Access

«Comme si la liberté et la vérité étaient des bizarreries locales, à mettre sur le même plan que le port du kilt ou la consommation d’escargots».

Gilles Lepesant, 2003.

Introduction

1Depuis 1989, le monde est entré dans une ère de grandes turbulences. Les certitudes quant aux alliés ou aux ennemis, la définition de nos peurs étaient simples et assez communément partagées. La paix, surtout née de la peur nucléaire, laissait peu de place aux doutes. Depuis quinze ans, beaucoup de facteurs et acteurs se sont transformés, voire ont disparus.

2Trois conditions importantes et interdépendantes se modifient simultanément en Europe :

  1. la nature de l’Union européenne1 qui constitue un système supranational, certes de plus en plus intégré, mais aussi déséquilibré : un géant économique régenté par un nain politique et surtout militaire;

  2. les menaces ne dépendent plus uniquement, ni même principalement des gouvernements, mais bien de groupes privés ou parapublics;

  3. les frontières intérieures s’amenuisent et les frontières extérieures se déplacent et se renforcent.

3Nous voudrions montrer que les nouvelles frontières de l’Union européenne supranationale ne peuvent efficacement faire face aux nouvelles menaces, et que cette nouvelle situation influence ses structures et ses politiques.

4Nous progresserons donc en trois étapes : éléments sur la notion de frontière, vieilles peurs et nouvelles menaces, inadéquation du système supranational européen.

A.1. Éléments sur la notion de frontière

5La frontière est une ligne géographique séparant deux États. Aujourd’hui, pour être véritablement reconnue comme frontière, elle doit être précise sur le terrain, stable dans le temps et reconnue internationalement.

6Ce n’est pas le lieu d’établir une typologie complète des frontières. Nous voudrions seulement mentionner celles qui sont utiles à notre développement. Nous parlons prioritairement des frontières extérieures, celles qui limitent les États. Dans le cas de l’Union européenne, les frontières périphériques de l’ensemble jouent parfois le rôle de frontière extérieure. Les frontières extérieures peuvent être de rupture, hostiles (fixées il y a peu à la suite d’un conflit) ou de mitoyenneté, amicales, consenties, apaisées depuis une guerre lointaine. Il serait inopérant, voire dangereux de parler de frontière intérieure. En effet, il s’agit de limites administratives2. Dans le cas de l’Union européenne, on peut parler de frontières emboîtées (Schengen, Euro) puisqu’il s’agit de compétences régaliennes. La frontière naturelle fait référence à la structure de la frontière : des obstacles relevant de la géographie physique. Mais, elle fait appel à la nature, comme pouvoir supérieur, plus légitime que celui des hommes. Il s’agit en fait d’une construction culturelle, idéologique.

7La fixation des frontières se réalise dans différentes conditions : victoire ou défaite militaire, sécession, réunification, par traité, arbitrage, voire par achat. Violence et conciliation participent au processus. C’est ici qu’il faut mentionner un des postulats des relations internationales du XXe siècle : le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Les frontières ne sont donc pas intangibles. L’écroulement d’empires – coloniaux ou autres – entraîne un remodelage de la carte du monde.

8Nous conceptualisons la notion de frontière sur la base d’éléments idéologiques, selon le sens que nous donnons à l’histoire, selon notre système de valeurs. Un Belge et un Grec ne donneront pas la même signification au substantif «frontière».

9L’ancienne conception de la frontière, nationaliste, la voit comme intangible et inviolable. Elle est ancrée dans les esprits et matériellement visible sur le terrain. La nouvelle conception, marquée par la mondialisation, lui reconnaît un rôle plus séculier quasi cartographique.

10Les frontières remplissent traditionnellement un certain nombre de fonctions3 :

  • Fonction de protection :

  1. assurer la sécurité extérieure par la fixation d’une stratégie et la mise en œuvre des moyens de défense;

  2. participer à la sécurité intérieure en contrôlant qui entre et qui quitte le territoire.

  • Fonction de contrôle :

  1. fixer la limite de l’exercice de la souveraineté et reconnaître que ce qui est hors frontière n’est pas soumis à la souveraineté;

  2. séparer les États les uns des autres;

  3. déterminer l’aire sur laquelle s’exerce le contrôle d’un régime politique, la pratique des droits régaliens, la mise en œuvre des différentes politiques, l’application de la loi4.

  • Fonction fiscale et économique :

  1. elle limite l’assiette de l’impôt sur laquelle l’État aura un monopole de prélèvement;

  2. elle délimite le marché sur lequel l’État agira;

  3. elle permet la régulation des importations et des exportations et par là influence la production sur le marché national;

  4. elle limite géographiquement la distribution de la production et la réallocation des ressources par l’État.

  • Fonction identitaire :

  1. préciser et clôturer l’espace national;

  2. regrouper toute la nation dans une seule entité dans l’hypothèse de l’État-nation;

  3. séparer l’ami de l’ennemi (nous d’eux);

  4. être un «marqueur d’identité»;

  5. jouer un rôle sacré, c’est-à-dire situer jusqu’où les dieux sont efficaces, la frontière revêt alors une signification mythologique, «nos dieux et nos morts». Le nationalisme peut être la forme actuellement laïcisée de cette attache spirituelle au territoire.

11Les fonctions de la frontière ne sont pas les mêmes selon les classes sociales, tout au moins pas avec la même intensité. Les frontières, c’est pour le peuple, serait-on tenté d’écrire familièrement. Il ne peut facilement en sortir, le pouvoir l’y enferme. L’opposition est claire avec le cosmopolitisme affiché, revendiqué, des élites; il est une marque de leur liberté, de leur supériorité. Les riches, les puissants se pensent et se veulent au-dessus des frontières. Leur franchissement est pour eux un plaisir, voire une source d’enrichissement. Au contraire, l’homme ordinaire a besoin de la frontière pour se protéger, pour se rassurer. S’il la franchit au moment des loisirs de masse, c’est souvent par imitation. Autrement, il s’agit de migrations forcées par la pauvreté ou la peur. Comme l’écrit le professeur Paul Scheffer : « c’est à ce moment qu’est né le clivage entre une classe politique n’osant pas aborder ces questions et une population qui, issue des quartiers populaires mais aussi de la classe moyenne, se sentait menacée par un monde globalisé, dont l’immigration était, selon elle, le symptôme le plus visible. On pouvait s’attendre à ce qu’un homme politique plaidant pour une fermeture des frontières connaisse un triomphe. Beaucoup de gens avaient cessé de se sentir représentés par des élites se voulant cosmopolites, affirmant que, dans un monde globalisé, le contrôle des frontières et de l’immigration n’était pas possible »5. Frontière et migration sont étroitement liées. Elles sont toutes deux conçues comme menace, souffrance et fatalité. Nous sommes bien en présence d’un phénomène de classes sociales.

Premiers théorèmes

Théorème n° 1

12La fonction identitaire de l’État exige une frontière aussi hermétique que possible, ce qui est incompatible avec l’exigence du développement (économique, culturel, idéologique). Ne pouvant croître, se moderniser en autarcie, l’État doit s’ouvrir, ce qui dilue son identité, son degré d’intégration. Ceci est particulièrement vrai pour les petits pays, les pays pauvres qui doivent donc abandonner une partie de leur souveraineté-identité pour assurer leur croissance.

Théorème n° 2

13La multiplication des frontières augmente les risques. Ceci vise tant leur nature que leur ampleur.

14La frontière fonctionne différemment selon les voisins. Chaque pays présente ses propres menaces, mais aussi ses soutiens spécifiques vis-à-vis de ses voisins. Ceux que l’on appelle les grands voisins peuvent jouer un rôle primordial dans la vie du petit pays limitrophe, ainsi de la Belgique enserrée par la France et l’Allemagne voire la Grande-Bretagne au XIXe siècle. La limite du phénomène est celle de l’enclavement.

15Pour diverses raisons, linguistique, culturelle, ethnique, économique, la frontière entre les États-Unis d’Amérique et le Canada ne joue pas les mêmes rôles que celle qui sépare les États-Unis du Mexique.

16Certaines frontières possèdent une charge affective qui les rendent particulièrement lourdes de sens : le rideau de fer, le mur de Berlin.

A.2. La nouvelle frontière européenne

17Le 15 juillet 1960, devant la convention démocrate de Chicago, John Fitzgerald Kennedy désormais candidat officiel de son parti à la Maison Blanche prononce cette affirmation, devenue une phrase-culte de la politique américaine : «Nous nous trouvons aujourd’hui au bord d’une nouvelle frontière, la frontière des années 60, une frontière de possibilités inconnues et de périls inconnus, une frontière d’espoirs et de menaces irréalisés». Cette prophétie – où le mot «frontière» doit être pris dans son acception américaine6 – s’applique particulièrement bien au passage de l’Union européenne à 25 États membres.

18L’Union européenne s’est élargie pour des motifs économiques et secondairement politiques. Une pointe de grandeur nostalgique n’était pas absente. Certains nouveaux membres escomptaient également une protection accrue. Il s’agit d’une frontière de mitoyenneté fixée par des traités entre partenaires égaux et librement consentants.

19Cette nouvelle frontière conduit l’Union européenne aux portes du Moyen-Orient. Elle intègre de nouveaux lieux symboliques comme Auschwitz, Dantzig, Prague ou Varsovie.

20Le centre de gravité de l’Union européenne se déplace vers l’Est. Une nouvelle périphérie se crée qui entre dans le circuit de l’Union européenne. Le nouvel espace ainsi créé est décisif pour la réussite du modèle économique libéral7.

21«Rejoindre l’Union n’est pas une tactique déplacée pour contrebalancer des voisinages pesants et pour conjurer, par le jeu des rapports de force autour de la table des Conseils européens, une situation périphérique. Dans le cas de l’Europe centrale, le respect des normes européennes, des principes de bon voisinage auront permis de tuer dans l’œuf des velléités irrédentistes, des conflits de frontières qui ne demandaient qu’à s’exprimer pour réviser l’ordre de Versailles ou de Yalta»8.

22La Mitteleuropa, que l’on peut situer globalement de 1815 à 1945, est l’aire d’influence de la langue allemande : Berlin-Vienne-Prague. Cette société multiethnique était régentée par une élite aristocratique et bourgeoise assez homogénéisée. Culturellement, cela nous conduit de  Mozart à Freud en passant par Kafka. Le triangle Berlin-Vienne-Prague disparaît en 1945, avec la chute du IIIe Reich et l’imposition du rideau de fer. Avec l’ouverture du Mur de Berlin en 1989, c’est l’américanisation qui va se précipiter sur les pays d’Europe centrale et orientale, même si l’Allemagne y retrouve, après sa réunification, une certaine puissance économique et même linguistique9.

23Les anciennes lignes de fracture sont obsolètes10, même si elles ont laissé des traces : empire romain; empire carolingien; schisme de 1054; Réforme et Contre-réforme; retour du servage au XVIe siècle; empire ottoman.

24La nouvelle géopolitique fixe la limite de l’Union européenne à la Fédération de Russie et ses deux «satellites» occidentaux : Belarus et Ukraine. «De toute évidence, que ce soit en Ukraine ou au Belarus, la greffe ne prend pas comme si le corps receveur ne reconnaissait pas comme familières les normes européennes en matière de démocratie et d’économie de marché»11. Le doute est entretenu sur la Turquie par ceux qui imaginant que les valeurs et la morale européennes sont constituées exclusivement ou très majoritairement d’un héritage chrétien ne veulent pas admettre qu’à terme le pays le plus peuplé de l’Union européenne soit un pays musulman. Il est étonnant que les tenants de la laïcité ne fassent pas valoir de craintes similaires pour leurs engagements. L’utilisation de la géographie et limites «naturelles» de l’Europe seraient-elles convoquées si la Turquie était orthodoxe et non musulmane ?

25Le passé, les rêves, la vision du futur des PECO ne sont pas les mêmes que ceux de l’Europe occidentale. Ce qui n’empêche pas les Quinze d’agir comme si les PECO allaient se rallier d’office à leurs points de vue.

26«La guerre froide avait déterminé les frontières de l’Europe. Elle s’étendait jusqu’au rideau de fer. La fin de la guerre froide a effacé ce repère. L’Europe ne sait plus où elle s’arrête» et Jean-Claude Casanova de poursuivre «Or, il est important qu’elle le sache… pour se donner la vertu patriotique nécessaire»12.

27Le Général de Gaulle aimait la formule «L’Europe de l’Atlantique à l’Oural». Ainsi, écrivait-il : «L’organisation d’un groupement occidental, tout au moins équivalent à celui qui existe à l’Est pourra permettre un jour, dans l’indépendance et la liberté de chacun d’établir l’entente européenne de l’Atlantique à l’Oural. Alors, l’Europe toute entière, cessant d’être coupée en deux par des ambitions et des idéologies qui deviendront périmées, redeviendrait le foyer capital de la civilisation»13. La formule n’est pas que de circonstance. Elle rejette la coupure de la guerre froide, et semble vouloir trouver dans la persistance de la géographie physique une réponse avec divisions contingentes des idéologies.

Deuxième train de théorèmes

Théorème n° 3

28L’ancienne frontière ne s’efface jamais totalement.

Théorème n° 4

29Le dernier élargissement constitue la forme actuelle de la doctrine de l’espace vital. Au nom d’exigences présentées à la fois comme indispensables et inéluctables pour l’expansion économique, on s’ouvre les frontières des pays voisins.

Théorème n° 5

30La nouvelle frontière crée une nouvelle identité qui vient se surimposer aux anciennes.

Théorème n° 6

31Le prochain élargissement fixera les frontières de la civilisation européenne.

Théorème n° 7

32La chute du mur de Berlin en 1989 inaugure la fin de l’ordre westphalien qui prévalait depuis 1648.

Théorème n° 8

33La diversité des périmètres européens selon les finalités recherchées (l’Union européenne, Conseil de l’Europe, OTAN) constitue une cause de l’affaiblissement de l’Europe par manque de cohésion et de visibilité.

B.1. Vieilles peurs et nouvelles menaces

34Les vieilles peurs se fondaient sur la crainte de conflits armés internationaux classiques dans le cadre de la guerre froide. L’inviolabilité des frontières de l’État souverain constituait un point fondamental du droit international. L’ennemi était connu, redouté mais aussi apprivoisé. Après 1989, à la notable exception près de la Yougoslavie, on a respecté le principe des indépendances latino-américaines14, l’acceptation des frontières héritées. L’ensemble du bloc de l’Est, y compris l’URSS, a donné naissance aux États successeurs sans réelles contestations frontalières, même si un certain flou a pu planer sur les frontières polonaises. Contrairement au passé, la fixation de la frontière n’a pas été un facteur de guerre.

35Aujourd’hui, la guerre est interne, sub-étatique ou sans frontières. Les nouveaux défis se moquent des frontières. Celles-ci ne permettent plus aux États d’assurer pleinement leurs fonctions régaliennes. On peut classer ces nouvelles menaces selon quatre catégories :

  1. la guerre civile, qui n’est plus purement idéologique ou ethnique, mais est souvent clanique ou mercantile dans le chef des seigneurs de la guerre;

  2. prolifération et désétatisation des armes de destruction massive;

  3. le crime organisé par des réseaux mafieux internationaux : drogues, êtres humains, blanchiment, armes…;

  4. le terrorisme religieux-fasciste15;

  5. la détérioration de l’environnement;

  6. les épidémies internationales : grippe aviaire…

B.2. Les dangers nés de la nouvelle frontière

36De nouvelles frontières provoquent la redéfinition de qui sont les amis et les ennemis pour l’ensemble. Les nouveaux membres ont des préjugés, des craintes vis-à-vis des nouveaux voisins différents des ceux des anciens membres, tant à l’Est qu’à l’Ouest. Les anciens pays communistes gardent une vraie peur de la Russie. Ils sont très attachés à l’OTAN qu’ils ont récemment rejoint, pensant que seuls les États-Unis constituent une protection valable. Ils sont volontiers plus favorables aux États-Unis que certains de la «vieille Europe». De là découle une méfiance vis-à-vis de la PESC16 qui est une politique confédérale. La frontière orientale conserve pour eux une valeur bien plus grande que celle à laquelle les 15 États membres s’étaient habitués. En plus, comme le souligne Gilles Lepesant, «l’imaginaire de la Pologne s’accommode mal d’une frontière orientale de l’Union européenne fermée, qui la couperait de territoires aujourd’hui ukrainiens, bélarusses, lituaniens qui furent polonais et où sont nés les plus grands créateurs du pays»17. On voit là toute la contradiction entre une nécessaire ouverture et la peur atavique de la Russie.

37Des tensions ethniques et irrédentistes sont intégrées dans le système européen. Le cas des Roms est clairement posé, celui de la pérennité des frontières polonaises également, tout comme le statut de l’enclave russe de Kaliningrad. La diaspora hongroise sera le thème de tensions.

38L’Union européenne a désormais à ses frontières des États inquiétants, défaillants, voire en déliquescence, ce qui n’avait jamais été le cas auparavant. Evoquons simplement la Biélorussie, l’Ukraine18, l’Albanie, la Macédoine et les voisins orientaux de Chypre. Il s’agit là de pays en guerre civile, qui peuvent agir de façon imprévisible et peu capables de maintenir seuls un État de droit, l’ordre, la sécurité et la prospérité des citoyens.

39Les nouvelles frontières sont encore plus perméables que les anciennes. L’Europe vieillissante, faute de politiques démographique et migratoire adaptées ne se renouvelle pas, n’assure pas le renouvellement de sa population. Elle cherche donc à se fermer : c’est l’Europe forteresse. Pourtant, celle-ci est totalement irréalisable, l’immigration est non seulement irrépressible, mais encore indispensable. La question que l’on doit se poser est celle de la faisabilité d’un contrôle.

40Les nouvelles frontières et leurs espaces frontaliers constituent-ils des dangers pour une nation en devenir ? C’est le problème de la construction de l’identité européenne qui est posé. L’on sait combien cette question est délicate, en témoignent l’éventuelle référence religieuse dans la constitution européenne ainsi que l’admission de la Turquie.

41L’identité est une notion complexe qui fait appel à la permanence de caractéristiques communes d’appartenance et donc de reconnaissance. Elle se construit autant par intériorisation de valeurs, de mythes et de héros communs, que par exclusion de ceux qui sont réputés ne pas pouvoir partager cet héritage. L’identité fonde la dignité, l’honneur, parfois aussi le sentiment d’humiliation. Des intérêts matériels et immatériels s’y lient. Elle constitue l’une des bases du nationalisme. Nous sommes plus souvent dans le domaine de l’émotionnel que du rationnel. Une identité européenne constitue la base indispensable pour la réussite de l’intégration au sein de l’Union européenne. Les frontières de l’Europe sont portées aux limites de notre identité (théorème n° 6). Mais, l’identité est, en partie, composée par les frontières «idéales» qui s’imposent. Plus il est difficile de cerner les composantes communes, plus la construction identitaire est vulnérable.

42Venons-en enfin aux risques que nous pourrions qualifier de civils. Les premiers sont de nature économico-sociale : délocalisation d’entreprises à la recherche d’une main-d’œuvre qualifiée et peu chère (chômage), l’immigration clandestine, la réduction de la protection sociale.

43Les seconds sont de types environnementaux. Tout le monde se souvient de la catastrophe de Tchernobyl, un peu moins des pluies acides. Les derniers sont de santé publique. Des épidémies traversent nos frontières.

Encore quelques théorèmes

Théorème n° 9

44Toute frontière finit par susciter une identité politique.

Théorème n° 10

45La nouvelle frontière détruit d’anciennes solidarités, voire d’anciennes alliances et en suscite de nouvelles.

Théorème n° 11

46Dans un système international non coopératif, plus l’espace «national» est grand, plus la lutte contre les nouvelles menaces est difficile parce que portée à une plus grande échelle.

C. L’inadéquation du système européen à la nouvelle situation et ses conséquences

47Commençons par conceptualiser l’Union européenne d’un mot – si possible. La compréhension du système politique européen est largement obscurcie par deux facteurs au moins :

  1. la complexité réelle des institutions, de leurs règles de fonctionnement;

  2. l’usage polémique fait des concepts.

48Pour faire très bref, nous dirons deux choses. D’une part, il existe un continuum entre l’État unitaire, l’État régionalisé, la fédération, le régime supranational et la confédération-intergouvernementalisme. D’autre part, dans l’Union européenne, les compétences et les modes opératoires sont répartis en deux groupes. Le premier groupe communautaire, fonctionne de manière fédérale, le second intergouvernemental, de manière confédérale. Le mouvement de fond consiste à réduire le deuxième groupe au bénéfice du premier.

49Le système politique européen actuellement est mixte et complémentaire. Il est mixte parce que dans certains secteurs il fonctionne comme une fédération, tandis que dans d’autres, il fonctionne de façon confédérale. C’est ce que nous appelons un régime supranational.

50Il est impossible de considérer les deux groupes comme étrangers l’un à l’autre, comme hermétiquement séparés, puisque c’est leur somme, leur tout, qui fait l’Union européenne et que leurs interactions sont constantes et nécessaires. Un troisième groupe de matières, le pouvoir résiduaire reste dans les mains des États membres. Soulignons enfin un vide important par rapport à la théorie du fédéralisme : le premier groupe – a fortiori le deuxième – ne comporte pas de gouvernement fédéral européen.

51La capacité de la frontière à remplir ses missions traditionnelles est battue en brèche par une série de facteurs globaux :

  1. la subordination du politique à l’économique;

  2. la mondialisation;

  3. la puissance des menaces non-étatiques.

52«Les dynamiques de la mondialisation, l’interdépendance économique, la communication globale et les flux transnationaux ont semblé remettre en cause la notion de frontière, à l’image de l’État et de la souveraineté»19.

53Des facteurs spécifiques à l’Union européenne existent aussi :

  1. l’absence d’une politique commune de la frontière, comportant une vision globale des problèmes;

  2. le développement de l’Union européenne suit une logique de libre-échange, donc d’ouverture.

54Les nouvelles frontières et les nouveaux dangers qu’elles suscitent ne peuvent tolérer que l’Union européenne soit simplement un espace économique. Pour survivre, elle doit devenir une puissance politique, donc militaire. «Avant de se définir par sa dimension stratégique, le projet d’une Europe-puissance a commencé à prendre forme lorsque les Quinze ont décidé de se donner une monnaie unique. En 1995, Valéry Giscard d’Estaing affirmait, dans Le Figaro, qu’à défaut de progrès significatifs en matière de défense seule l’Union monétaire permettrait d’organiser une Europe-puissance»20. Sans doute, certains traumatisés par nos guerres intestines ne veulent-ils pas que l’Union européenne se constitue en puissance. Mais, à long terme face à ses nouveaux voisins que sont la Russie et le Proche-Orient peut-elle se permettre ce luxe éthique ?

55L’aspect militaire de la nouvelle frontière est pris en charge par une structure distincte : l’OTAN. Les conflits récents ont réhabilité l’importance de l’infanterie seule capable d’occuper le terrain et de garantir physiquement les frontières. Les douaniers, les gardes-côtes ont une fonction qui s’apparente à celle de la police. Mais, l’Union européenne vit comme si elle n’avait pas besoin de sécurité armée. Ses interventions bénéficient du label «humanitaire», c’est-à-dire accessoire, un luxe qu’elle s’offre. Au temps de la guerre froide, la supranationalité et l’OTAN suffisaient.

56Le système supranational européen n’a pas été conçu pour résister aux nouveaux dangers. Peut-il néanmoins lutter efficacement contre eux ? Le renforcement des structures et de la coordination qui devaient être le contre-poids de la dilution des frontières ne se sont que peu réalisés.

57Si l’Union européenne est une nation en devenir, émergente, ses structures doivent assurer un taux de sécurité au moins identique à celui offert par les États actuels. Les caractéristiques des nouvelles frontières, des nouveaux voisins influencent la machine européenne qui doit s’adapter. La fonction latente des nouveaux conflits est de forcer le changement des structures européennes et pas seulement de ses politiques. La création du poste de ministre des Affaires étrangères de l’Union en est un exemple. Il n’en reste pas moins que le projet de constitution européenne n’est pas adapté aux nouvelles frontières.

58La PESC et la PESD21 sont des outils volontairement faibles, les hommes politiques n’ayant pas encore intégré dans leurs raisonnements la nécessité du transfert de ce bloc de compétences au niveau supranational. S’ils persistent à refuser l’intégration, la sécurité devra être assumée par d’autres voies. Faute de pouvoir contrôler les menaces par le jeu institutionnel, on entrera dans un système plus autoritaire :

  1. renforcement de la sévérité des peines;

  2. augmentation, sans contrôle correspondant, de la surveillance policière;

  3. stigmatisation des boucs-émissaires.

59Jean-Claude Casanova écrit fort justement : «si l’Europe était fondamentalement hétérogène, s’il existait plusieurs civilisations distinctes en Europe ou, au contraire, si l’Europe faisait partie d’une civilisation plus large, dont elle ne serait qu’un élément indissociable, le processus et la forme de l’intégration pourraient en être affectés»22.

60L’Europe – et encore moins l’Union européenne – ne peut prétendre incarner à elle seule tout l’Occident, il est facile d’en convenir. Sa fragmentation civilisationnelle est beaucoup plus difficile à admettre par les Européens eux-mêmes. Opposerions-nous une Europe laïque à une Europe plus empreinte de religion ? Une Europe individualiste et une Europe communautariste ?

Derniers théorèmes

Théorème n° 12

61Le fédéralisme européen centrifuge pousse au renforcement des frontières internes et affaiblit la sécurité de l’Union.

Théorème n° 13

62Le fédéralisme européen centripète pousse à l’amenuisement des frontières internes et renforce la sécurité de l’Union.

Théorème n° 14

63Un système politique intégré de 500 millions d’habitants riches et vieux ne peut survivre sans une politique militaire et de sécurité forte.

Conclusion

64À la veille de la chute du Mur de Berlin, Francis Fukuyama inaugurait une série de travaux visionnaires globaux de géopoliticiens voyant s’écrouler l’ancien monde de la guerre froide. Francis Fukuyama prédisait la fin de l’histoire, soit le triomphe définitif de la démocratie libérale comme mode de gouvernement23. Quelques années plus tard, Jean-Christophe Rufin parlait de la rupture Nord-Sud dans son essai L’empire et les nouveau barbares24. Enfin, en 1993, Samuel Huntington publiait son fameux article sur le choc des civilisations25.

65L’intérêt actuel de ces différents ouvrages est de repositionner la question du rapport entre les structures, le régime politique et les frontières. Les critiques n’ont pas manqué. Francis Fukuyama, sous-évalue le nationalisme et la puissance des questions d’identités nationales. Il les confine dans un monde en voie de disparition. Il pense comme s’il était possible qu’il n’y ait plus de frontières. «Modernity, as represented by the United States and other developed democracies, will remain the dominant force in world politics»26.

66L’analyse de Jean-Christophe Rufin paraissait séduisante au lendemain de la chute du Mur de Berlin : l’Occident était réunifié et aucune menace sérieuse n’assombrissait son horizon. Les pays sous-développés, définitivement immergés, seraient abandonnés au-delà du limes. Comme le chantait Nino Ferer dès 1974 dans «Le Sud» :

«un jour ou l’autre, il faudra qu’il y ait la guerre on le sait bien

on n’aime pas ça, mais on ne sait pas quoi faire on dit c’est le destin

tant pis pour le Sud c’était pourtant bien

on aurait pu vivre plus d’un million d’années

et toujours en été».

67Les événements ont ensuite bien montré que le poète était le vrai visionnaire. Le Sud est ravagé par les guerres intestines, l’Occident laissant faire, malgré quelques interventions «humanitaires». Le Sud n’est plus retenu comme un enjeu stratégique à la suite de la fin de la guerre froide. L’Occident cesse d’être attentif à ce qui se passe à ses limites, au Sud. Il n’observe pas les changements profonds qui s’y produisent : retour du religieux littéral, sentiment de frustration et d’humiliation, jusqu’à l’explosion du 11 septembre 2001. Le Sud est le miroir du Nord.

68Samuel Huntington aurait tendance à surdimensionner le poids des identités nationales. «Tant que les Américains percevront leur nation comme menacée, il est probable qu’ils éprouveront un fort sentiment d’identification à son égard. En revanche, si ce sentiment d’insécurité vient à s’estomper, d’autres identités pourraient reprendre le pas sur l’identité nationale… Dans le monde actuel, certains groupes ethniques nationaux sont en train de se transformer en diasporas transnationales, que leurs États d’origine considèrent de plus en plus comme des prolongements communautaires et institutionnels d’eux-mêmes et comme des atouts décisifs pour leur pays»27.

69Faisons confiance au romancier israélien Amos Oz : «Les problèmes ne viennent pas des murs ou des barrières, mais des émotions liées aux murs. Ce sont les murs émotifs, les murs intérieurs que nous devons abattre, pas les murs physiques»28.

Bibliographie

70Beaufays (J.), Théorie du régionalisme, Bruxelles, Story-Scientia, 1986, 152 p.

71Beaufays (J.), «Région et sécurité», in Fédéralisme, 1992, p. 77-85.

72Burin des Roziers (E.), «L’Europe de l’Atlantique à l’Oural», www.charles-de-gaulle.org/article.php3?id.article=125, (01-02-2005).

73Casanova (J.-C.), «Les limites de l’Europe», www.asmp.fr, Académie des sciences morales et politiques, communication du lundi 6 avril 1998, 15 p.

74Foucher (M.), L’invention des frontières, Paris, Fondation pour les études de défense nationale, 1986.

75Foucher (M.), Fronts et frontières, un tour du monde géopolitique, 1ère éd. 1988, Paris, Fayard, 1991.

76Fukuyama (F.), «La fin de l’histoire ?», in Commentaire, automne 1989, p. 457-469.

77Fukuyama (F.), «Has history started again?» in Policy, vol. 18, n° 2, hiver 2002, p. 1 et 6.

78Huntington (S.), «The clash of civilizations ?», in Foreign Affairs, été 1993, vol. 72, n° 3.

79Huntington (S.), The clash of civilizations and the remaking of world order, Londres, Touchstone, 1996, 368 p.

80Huntington (S.), Qui sommes-nous ? Identité nationale et choc des cultures, Paris, O. Jacobs, 2004, p. 9 et 272.

81Lepesant (G.), «Frontières européennes et imaginaires centre-européens», in Etudes européennes, n° 1, www.cees-europe.fr/fr/études/archives-php, (01-02-2005).

82Lipset (S. M.), Rokkan (S.), Party Systems and Voter Alignments: Cross-National Perspectives, New York, Free Press, 1967, p. 14.

83Magris (C.), Danube, Paris, L’Arpenteur, 1988, 498 p.

84Magris (C.), Microcosmes, Paris, L’Arpenteur, 1998, 275 p.

85Mark (W.), «The Territorial Integrity Norm : International Boundaries and the Use of Force», International Organization, 55 (2), printemps 2001, p. 215-250.

86Oz (A.), «Faites la paix, pas l’amour», Le Monde 2, 16 octobre 2004, p. 24-29.

87Plasschaert (S.), «Les conséquences micro-économiques de l’élargissement de l’Union européenne», in Studia diplomatica, septembre-octobre 2004, 178 p.

88Rufin (J.-C.), L’empire et les nouveaux barbares, Paris, Lattès, 1991, 255 p.

89Annexe

90Beaucoup d’auteurs ont cherché à théoriser les nouvelles relations internationales nées des décombres du mur de Berlin et du World Trade Center. Aucun n’a réellement privilégié l’angle spécifique des frontières. Or, les frontières sont constitutives des États, dans leurs différentes fonctions. La notion de frontière a évolué dans le passé. Dans le futur, elle adoptera de nouvelles caractéristiques qui se répercuteront sur la structure, voire la nature de l’État lui-même. L’Union européenne est une création institutionnelle sui generis, il est logique que ses frontières le soient aussi.

91Les structures et les politiques de l’Union européenne, mais aussi la culture et l’état d’esprit des décideurs politiques ne permettent pas une perception des nouvelles frontières selon une conception géopolitique de stratégie planétaire. Or, les nouvelles frontières nous installent aux portes du Moyen-Orient, alors que nous sommes déjà les voisins de la Russie, que nous voyons le Maroc à l’œil nu depuis l’Espagne et qu’un jet de pierre à peine nous sépare de la Tunisie. Demain nous serons en Mer Noire, et quel que soit le statut accordé à la Turquie, elle nous mènera directement à la Géorgie, l’Arménie, l’Iran, l’Irak et la Syrie, soit quasiment en Mer Caspienne. L’Europe doit réapprendre à se projeter dans le monde entier, comme avant 1914, pour d’autres buts, espérons-le. Si nous ne prenons pas les devants en construisant cette géopolitique, les autres nous y forcerons – ou l’Union européenne se désintégrera.

92Le nouveau paradigme de la frontière européenne peut donc s’énoncer de la manière suivante :

  • L’Union européenne possède de nouvelles frontières qui la placent dans une situation géopolitique inédite. De nouvelles frontières déterminent de nouveaux intérêts, donc une nouvelle politique de relations internationales. En raison du saut qualitatif que constitue le passage de 15 à 25, cette nouvelle politique exige de nouveaux processus d’élaboration et d’exécution et par là de nouvelles institutions.

  • Si les menaces militaires traditionnelles semblent s’éloigner de l’Union européenne, des risques et menaces d’une nouvelle nature sont apparus.

  • Les États-Unis d’Amérique n’ont plus pour but de nous défendre. Nous ne sommes plus – en tant qu’Europe – des alliés utiles.

  • Les États-Unis n’ont plus les moyens de nous défendre face aux nouveaux dangers. L’Union européenne compte trop d’habitants, trop de superficie, trop de frontières. Les nouvelles menaces ne permettent pas à un État d’assurer la sécurité d’un autre État.

  • La formation de l’identité européenne passe aux yeux de beaucoup par une opposition, voire une hostilité vis-à-vis des États-Unis. Le reniement du père nourricier permet de devenir adulte.

  • L’Union européenne n’a pas envie de se défendre militairement, par la force. Elle est devenue pacifiste. De ce fait, elle ne se dote ni des moyens institutionnels, ni des moyens armés.

  • Il est bien plus facile de voter une augmentation des moyens sécuritaires internes (police, gendarmerie, renseignement…) que des moyens sécuritaires externes (armée, armements…).

  • Le risque est donc grand qu’à défaut de vouloir assurer la sécurité aux frontières, ce soit le modèle de l’État policier qui l’emporte. Il va dans le sens de la facilité pour les politiciens et rencontre le souhait des électeurs :

93- provoque un sentiment de sécurité;

94- ne coûte pas très cher;

95- semble éloigner tout changement;

96- participe d’un pacifisme de bon aloi;

97- séduit l’anti-américanisme des intellectuels.

  • Le résultat est particulièrement décevant :

98- un régime fort à l’intérieur;

99- inefficace vis-à-vis des nouvelles menaces dont les bases sont hors de nos frontières;

100- à terme, le risque d’implosion de l’Union européenne.

  • L’Union européenne doit adapter ses structures et ses politiques pour mettre fin au bricolage qui ne lui permet pas d’exercer les compétences régaliennes qui sont désormais les siennes et les seules qui peuvent assurer sa pérennité. On peut cependant être perplexe – comment une Europe dépolitisée, qui doute d’elle-même (eurosceptiques), peut-elle se construire efficacement.

  • Nous avons mis 50 ans pour faire l’Euro, nous ne disposons pas de 50 nouvelles années pour réaliser la vieille CED.

Notes

1  Voir infra C.
2  L’utilisation en Belgique de l’expression «frontière linguistique» et de ses conséquences illustre le propos.
3  Beaufays (J.), Théorie du régionalisme, Bruxelles, Story-Scientia, 1986, p. 45-46.
4  La mer est un espace de pouvoir et pas une frontière.
5  Entretien avec Paul Scheffer, sociologue néerlandais, Le Monde, 26 novembre 2004.
6  Boundary : la ligne de séparation; Frontier : l’espace frontalier.
7  Plasschaert (S.), «Les conséquences micro-économiques de l’élargissement de l’Union européenne», in Studia diplomatica, septembre-octobre 2004, 178 p.
8  Lepesant (G.), «Frontières européennes et imaginaires centre-européens» in Études européennes, n° 1 (18-02-2003), p. 6-7. www.cees.europe.fr/fr/études/archives.php.
9  Il ne faudrait pas confondre la Mitteleuropa avec les PECO.
10  Lipset (S. M.) et Rokkan (S.), Party Systems and Voter Alignments: Cross-National Perspectives, New York,  Free Press, 1967, p. 14.
11  Lepesant (G.), «Frontières européennes et imaginaires centre-européens», in Études européennes, n° 1, 2005, www.cees-europe-fr/fr/études/archives-php, p. 10.
12  Casanova (J.-Cl.), «Les limites de l’Europe», www.asmp.fr, Académie des sciences morales et politiques, communication du lundi 6 avril 1998, p. 9.
13  Cité par Burin des Roziers (E.), L’Europe de l’Atlantique à l’Oural. www.charles-de-gaulle.org/article.php3?id.article=125, (01-02-2005).
14  L’uti possidetis a été appliqué à l’Afrique décolonisée au XXe siècle.
15  Fukuyama (F.), «Has history started again ?», in Policy, vol. 18, n° 2, hiver 2002, p. 6.
16  Politique étrangère et de sécurité commune.
17  Lepesant (G.), «Frontières européennes et imaginaires centre-européens», op.cit., p. 10.
18  Les bourrasques dues aux élections présidentielles en Ukraine en novembre 2004 témoignent qu’il ne s’agit pas d’une menace purement théorique.
19  Smouts (M.C.), Battistella (D.), Vennesson (P.), Dictionnaire des relations internationales, Paris, Dalloz, 2003, p. 232.
20  Ferenczi (Th.), «L’Europe-puissance, un rêve non partagé», Le Monde, 11 juin 2004, p. 17.
21  Politique européenne de sécurité et de défense.
22  Casanova (J.-C.), «Les limites de l’Europe», op. cit., p. 2.
23  Fukuyama (F.), «La fin de l’histoire ?» in Commentaire, automne 1989, p. 457-469.
24  Rufin (J.-C.), L’empire et les nouveaux barbares, Paris, Lattès, 1991, 255 p.
25  Huntington (S.), «The clash of civilizations», in Foreign Affairs, été 1993, vol. 72, n° 3.
26  Fukuyama (Francis), «Has history started again ?», in Policy, vol. 18, n° 2, hiver 2002, p. 1.
27  Huntington (Samuel), Qui sommes-nous ? Identité nationale et choc des cultures, Paris, O. Jacob, 2004, p. 9 et 272.
28  Oz (A.), «Faites la paix, pas l’amour» in Le Monde 2, 16 octobre 2004, p. 28.

Pour citer cet article

Jean Beaufays, «Théorie de la nouvelle frontière.Pistes de réflexion», Fédéralisme Régionalisme [En ligne], Volume 4 : 2003-2004 - Régions et sécurité, URL : https://popups.uliege.be/1374-3864/index.php?id=297.

A propos de : Jean Beaufays

Professeur ordinaire à l’Université de Liège