Les Cahiers de muséologie

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André Gob

Allocution de bienvenue et d'introduction au colloque

(Hors-série n° 1)
Editorial
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1Bonjour à toutes et à tous. Permettez-moi tout d’abord de vous souhaiter la bienvenue à Liège – et à l’Université de Liège – au nom de l’Embarcadère du savoir et du Service de muséologie de l’ULiège, les co-organisateurs de ces journées qui nous rassemblent ici.

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3Lorsque le roi Guillaume Ier des Pays-Bas – le royaume éphémère qui regroupe, de 1815 à 1830, les actuels Pays-Bas, Belgique et Luxembourg – décide la création de plusieurs universités « modernes » dans cet État nouveau, il puise son inspiration dans les conceptions de l’homme d’état prussien Wilhelm von Humboldt, qui venait de créer à Berlin, en 1809, l’institution qui porte aujourd’hui son nom, Humboldt Universität. Cette université moderne, libérale, inspirée des Lumières, veut associer enseignement et recherche : « La particularité des établissements scientifiques supérieurs doit être de traiter la science comme un problème non encore entièrement résolu, qui doit donc toujours faire l’objet de recherches »1.

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5Cette conviction repose notamment sur le principe de non-dissociation des idées et du monde, de la pensée et de la nature. L’immatérialité des concepts et la matérialité du monde ne sont pas dissociables. Dans cette perspective, Wilhelm von Humboldt prône la constitution de collections d’histoire naturelle, mais aussi d’art et d’histoire, au sein des universités pour servir d’appui à l’enseignement et à la recherche.

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7Ainsi, lorsque l’Université de Liège est créée par un arrêté royal de décembre 1816 – les cours commencent en novembre de l’année suivante – elle se dote aussitôt d’un embryon de collection. Le roi lui-même y contribue à partir des collections royales. Cette impulsion initiale ne se démentira pas par la suite. Un des professeurs d’histoire naturelle est explicitement chargé de rassembler et de gérer ces collections. Le premier est l’entomologiste Jean-Théodore Lacordaire2, recruté en 1835, explorateur de l’Amérique du Sud entre 1824 et 1832. Il enrichit considérablement les collections dont il a la charge, notamment par des achats comme, par exemple, la collection de poissons rassemblée par le comte de Castelnau, explorateur en Afrique et en Amérique du sud3. Un des mérites de Castelnau, et de sa collection, est qu’elle est soigneusement documentée par des carnets de notes, illustrés d’aquarelles, reprenant les lieux et conditions de collecte des spécimens4.

8L’achat de collections n’est qu’une des voies d’acquisition et elle reste secondaire en comparaison de l’apport des recherches sur le terrain des professeurs et des chercheurs eux même, en particulier dans les sciences de la nature, mais aussi en archéologie, par exemple. Les dons constituent également une source d’enrichissement des collections universitaires. Ainsi, dans le domaine culturel, le legs que fit le baron Adrien Wittert à l’université en 1903 est à l’origine de la constitution des Collections artistiques de l’Université de Liège, aujourd’hui Musée Wittert5.

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10Un bon exemple d’expédition sur le terrain est le fait du recteur Marcel Dubuisson, professeur de zoologie. Dans les années 1960, il a mis sur pied une campagne de recherche de grande envergure sur la Grande Barrière de Corail en Australie. Avec des moyens importants puisque l’université a pu affréter un navire océanographique propre pour réaliser cette expédition, qui a rapporté plusieurs millions d’échantillons de toutes natures utiles pour les nombreuses recherches entreprises dans ce cadre, mais aussi pour enrichir les collections du muséum de l’université de Liège. Parallèlement, Dubuisson a réorganisé le muséum et y a adjoint un aquarium, dans l’objectif affirmé d’ouverture vers le grand public6.

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12Dans les années 1980, Roger Moreau, à force d’opiniâtreté7, crée la Maison de la Science, sur le modèle du Palais de la Découverte. Ce nouvel outil, localisé dans le même bâtiment que l’Aquarium-Muséum, est résolument tourné vers le public scolaire mais organise aussi des séances de démonstration pour un plus large public.

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14Le recteur Willy Legros, qui a présidé aux destinées de cette université entre 1997 et 2005, s’était fait le propagandiste d’une « culture scientifique qui vaut bien l’autre », pour reprendre le propos d’une exposition de photos scientifiques organisée sous son égide. Pour ma part, je ne vois pas l’intérêt de cette opposition et j’inverserais plutôt la proposition en affirmant que les sciences humaines et les humanités sont aussi des sciences. L’UMAC et Universeum ne réunissent-ils pas tous les musées et collections universitaires sous une même enseigne, quelle que soit leur nature, ou plutôt les disciplines auxquelles ces institutions se raccordent ?

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16D’ailleurs, l’essentiel ne réside pas dans les collections et dans leur nature, ni dans les modalités de leur gestion ; l’essentiel c’est, selon moi, de savoir pour qui on les rassemble, à qui elles sont destinées. La perspective humboldienne que j’ai évoquée y voyait, avant tout, un outil pour l’éducation et la recherche. Plus tard, l’ouverture vers un public extra-universitaire s’est affirmée, à Liège comme ailleurs, sans perdre de vue toutefois la dimension didactique et l’action sur la société, rejoignant ainsi la vision d’un Humboldt.

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18C’est cela qui nous réunit aujourd’hui. Dans les trois prochains jours, nous aurons amplement l’occasion d’explorer les points que je viens d’évoquer et de découvrir les collections et les institutions muséales qu’offre l’Université de Liège.

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20Mais avant de passer la parole au Premier Vice-recteur, je voudrais remercier les modérateurs et les intervenants, ainsi que différentes personnes qui ont apporté leur concours à l’organisation de ce colloque.

  • Mes collègues Christine Servais (ULiege), Marie-Paule Jungblut (ULuxembourg), Joël Roucloux (ULouvain), Francesco Lobue (UMons) et Jean-Louis Postula (MVW), qui ont accepté de jouer le rôle de modérateur des différentes sessions.

  • L’UMAC, dont la présidente Marta Lourenço (U Lisbonne) regrette de ne pouvoir être présente mais a demandé à notre collègue Hugues Dreyssé (Un. Strasbourg) de représenter le comité.

  • L’équipe de Réjouiscience : Martine Van Herck, Thomas Beyer, Manon Tirtiaux.

  • L’équipe de l’Embarcadère du Savoir : Carole Champenois et Ludovic Baumsteiger.

  • Le Service de Muséologie de l’ULiège : ma collègue Manuelina Duarte, et les chercheurs Alix Nyssen et Edouard Nzoyihera.

  • Les nombreux acteurs au sein des institutions qui nous accueilleront lors des visites au Musée Wittert (Edith Micha), à l’Aquarium-Muséum (Sonia Wanson et Frédéric Paquer), à la Maison de la Science (Hervé Caps) et jeudi dans différents services sur le campus du Sart Tilman (Valentin Fisher, Julien Denayer, Frédéric Hatert, Pierre Bonnet, Yannick Bruni, Jean Housen, Sophie Pitoors).

  • Les étudiants qui viennent prêter mains fortes lors des pauses café, les cocktails et les lunchs.

  • Les différents services et institutions qui ont apporté un soutien financier, qu’ils soient internes à l’Université de Liège ou externes :

    • Les facultés des Sciences et de Philosophe et Lettres ; merci à leur doyen respectif ;

    • L’Administration Recherche-Développement (ARD) ;

    • Les unités de recherche Traverses et AAP ;

    • Icom Wallonie-Bruxelles ;

    • La Province de Liège (président Luc Gillard) ;

    • Le gouvernement de la Communauté Wallonie-Bruxelles (ministre Jean-Claude Marcourt).

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22Enfin, je veux adresser un merci particulier à Mélanie Cornélis, cheville ouvrière de ce colloque, qui a apporté toute son intelligence et tout son enthousiasme à la réussite de l’entreprise. Merci à elle.

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24Après cette longue litanie qui, pour obligée qu’elle soit à l’entame d’un événement, n’en suscite pas moins chez moi un sincère sentiment de gratitude, j’ai le plaisir de donner la parole à M. Jean Winand, Premier Vice-recteur de l’Université de Liège.

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26Merci de votre écoute.

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28André Gob

29Liège, 5 novembre 2019

Notes

1 Wilhelm von Humboldt, Über die innere und äussere Organisation der höheren wissenschftlichen Anstalten in Berlin, 1809 ; Johan Östling, Humboldt and the modern German University. An intellectual History, Lund University Press, 2018 ; Hidegard Vieregg,  « Wilhelm von Humboldts Ideen zur Bildung des Menschen : museologische, philosophische und pädagogische Betrachtung » dans Icofom Study Series, 2006, p. 178-193.

2 Le frère du célèbre prédicateur dominicain Henri Lacordaire. Sonia Wanson, Historique du Musée de Zoologie, Liège, 2008, 7 p.

3 Sa collection d’oiseau est achetée, elle, par l’Institut (alors Muséum) royal d’Histoire naturelle de Belgique à Bruxelles.

4 Ces carnets, détenus par l’Aquarium-muséum de Liège, ont notamment permis la restauration des spécimens, qui avaient perdu leurs couleurs d’origine.

5 Jean-Patrick Duchesne, Le patrimoine artistique de l’Université de Liège, 1993.

6 Sonia Wanson et Christian Michel, « L'Aquarium-Muséum », dans Le patrimoine de l’Université de Liège, (Carnets du patrimoine, n° 47), 2008 ; Sonia Wanson, e.a., Coraux sous les Tropiques. De la Grande Barrière d’Australie et d’ailleurs, Liège, 2014.

7 Et après quelques expositions préfiguratives mémorables.

To cite this article

André Gob, «Allocution de bienvenue et d'introduction au colloque», Les Cahiers de muséologie [En ligne], Hors-série n° 1, 14-17 URL : https://popups.uliege.be/2406-7202/index.php?id=601.