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Gold standard family
Table des matières
Expertises pour et contre le mariage entre personnes de même sexe en France et aux États-Unis
1Depuis les années 1970 aux États-Unis et les années 1990 en France, les couples de même sexe se sont mobilisés afin de faire reconnaître leurs familles par les administrations de leurs pays respectifs. Sans reconnaissance juridique de leurs liens conjugaux et parentaux, ils se trouvaient dans des situations d’invisibilité institutionnelle. Au-delà de l’aspect symbolique du refus de l’État de les considérer comme des familles « légitimes », cette situation leur posait de nombreuses difficultés matérielles. Pour faire valoir leurs droits et trouver des solutions, des militant·es lesbiennes, gays, bisexuel·les et trans ont soutenu des revendications de reconnaissance conjugale (Pacs, union civile, mariage) et parentale (garde d’enfant en cas de divorce avec un parent hétérosexuel, filiation, adoption, accès à l’aide médicale à la procréation etc.). Ces mobilisations ont suscité de vives réactions politiques et sociales des deux côtés de l’Atlantique.
2Les débats, qui se sont déroulés dans les médias, dans les rues, mais aussi dans les parlements et les tribunaux, ont pris diverses formes et ont varié en fonction des situations politiques des deux pays. Un même enjeu a toutefois été mis au cœur des discussions : celui du « bien-être » des enfants élevés par les couples de même sexe. Bon nombre de décideurs et décideuses, mais aussi de scientifiques, notamment de psychologues, de psychiatres et de sociologues, se sont donc intéressé·es à l’aptitude de ces couples à élever des enfants. Ceux qui condamnaient l’homoparentalité les accusaient de ne pas être des familles « normales » et de mettre les enfants en danger ; ceux qui les défendaient soutenaient l’idée que les familles homoparentales sont parfaitement comparables à ces familles « normales ». Dans les débats tant politiques que scientifiques, les familles composées d’un homme et d’une femme mariés et ayant des liens génétiques avec leurs enfants ont souvent été prises pour une « référence absolue » ou « gold standard family1 ». Toutes les autres configurations familiales (parents célibataires, parents adoptifs, parents divorcés et familles homoparentales) devaient donc se comparer à cette famille de référence, alors même que celle-ci représente de moins en moins la norme2.
3Cet article s’appuie sur une enquête comparative que j’ai réalisée à la fois en France et aux États-Unis et au cours de laquelle j’ai mené des entretiens avec 72 personnalités politiques et « expert·es » qui avaient été auditionné·es devant les tribunaux ou les parlements de leur pays respectif. Les tableaux en annexe de l’article donnent la liste nominative des enquêté·es. J’ai également constitué un corpus d’archives parlementaires et juridiques reprenant les débats sur les familles homoparentales depuis 19903.
4La demande du champ politique à disposer d’un savoir capable de trancher sur la conformité (ou non) des familles homoparentales aux attentes sociales concernant les « bons parents » met en évidence la grande interconnexion entre les champs politique et juridique, d’une part, et le champ scientifique, de l’autre4. Cette dépendance apparaît d’autant plus nettement par la comparaison entre les deux pays, puisqu’aux États-Unis les recherches sur l’homoparentalité sont assez anciennes et bien développées, tandis qu’en France ces études sont relativement neuves, peu nombreuses et exposées à des stratégies de discrédit. Mon article montre que ces débats sur les différentes manières de « faire famille » ont paradoxalement contribué à un renforcement du rôle de référence joué par la famille hétérosexuelle.
Des contextes politiques et scientifiques distincts
5En mai 2013 est entrée en vigueur la loi française autorisant le mariage et l’adoption plénière pour les couples de même sexe. En amont de sa promulgation, et pendant environ six mois, plus d’une centaine de personnes ont été auditionnées par la commission des lois et la commission des affaires sociales à l’Assemblée nationale et au Sénat. Les parlementaires ont invité un groupe hétérogène composé de sociologues, d’anthropologues, de psychanalystes voire d’associations familiales et de représentant·es religieux·euses5. Bien que les thèmes abordés fussent variés, une question revenait souvent au centre de leurs interventions : quelles seraient les conséquences de cette réforme sur la famille et surtout sur les enfants ?
6Aux États-Unis, pendant la même période, des questions similaires étaient soulevées lorsque les juges de nombreux tribunaux étatiques et fédéraux se trouvaient devant des plaignant·es qui attaquaient en justice les lois interdisant le mariage des couples de même sexe. Il est important de noter que les tribunaux étatsuniens, étatiques et fédéraux, ont joué un rôle central dans les mobilisations autour des lois pour la reconnaissance du mariage et de la filiation pour les couples de même sexe. Contrairement à la France, où la législature constitue le principal levier d’action pour réformer ces questions, la voie judiciaire s’est avérée plus fructueuse pour les défenseur·euses des droits des couples homosexuels étatsuniens. En effet, c’est grâce à la décision de la Cour suprême Obergefell v. Hodges (2015) que le mariage entre personnes de même sexe est désormais reconnu dans tous les états. Lors de procès précédents, qui ont abouti en appel à cette décision définitive, et notamment DeBoer v. Snyder (2014) et Perry v. Schwarzenegger (2010), les avocat·es des deux bords ont sollicité des chercheuses et chercheurs en sciences sociales en tant que « témoins experts » pour défendre leurs arguments. Celles et ceux qui soutenaient l’idée que les homosexuel·les ne devraient pas pouvoir se marier sous prétexte qu’un enfant a besoin d’être élevé par un père et une mère ont été sommé·es par les juges de le démontrer. Celleux qui défendaient les couples de même sexe devaient contrer ces idées, en montrant que ces couples étaient des parents aussi capables que leurs pairs hétérosexuels.
7Dans les deux pays on voit qu’une question de nature politique et démocratique — ouvrir ou non des droits à un groupe marginalisé — tend à s’inféoder au seul critère du bien-être des enfants élevés par des couples homosexuels et à la mesure scientifique de celui-ci. Cependant, face à cette question à la forme « technique », les législateur·ices en France et les juges aux États-Unis ne disposaient pas de champs de recherches également développés et valorisés6. On observe plusieurs différences notables en comparant la production nationale des études sur l’homoparentalité pendant les quelques décennies précédant les débats sur le mariage. Par comparaison, aux États-Unis (ainsi que dans d’autres pays comme le Royaume-Uni et les Pays-Bas), ces études étaient plus anciennes et plus nombreuses qu’en France. Elles différent également par les disciplines dont elles sont issues et les méthodologies qu’elles utilisent7. Par exemple, les études étatsuniennes disposaient d’échantillons de taille importante, mobilisaient davantage des métriques standardisées en psychologie développementale et proposaient plus souvent des analyses statistiques. En France, les études étaient de moindre ampleur et la majorité étaient qualitatives. Bien que le champ français soit en train d’évoluer rapidement, l’écart entre les deux pays reste important et doit être pris en compte pour cerner la façon dont les débats sur le mariage et la filiation pour les couples de même sexe se sont déroulés dans ces pays.
Côté français : du prétendu manque de recul à l’émulation espérée
8Ce décalage scientifique entre la France et les États-Unis revenait régulièrement dans les débats politiques et dans les discours des personnes écoutées par des institutions décisionnelles françaises. Les entretiens révèlent en effet que ces différences nationales n’échappaient pas aux expert·es auditionné·es : ni à celleux travaillant directement sur l’homoparentalité (comme des sociologues, anthropologues et psychologues), ni à celleux n’étudiant pas directement ce sujet, mais néanmoins écoutés pour leur opposition à l’ouverture du mariage et de l’adoption (certain·es philosophes, psychanalystes, psychiatres et juristes).
9Selon des expert·es soutenant les droits des familles homoparentales, le « retard » français a constitué un frein dans les luttes pour l’élargissement de la reconnaissance juridique des familles homoparentales. Des parlementaires français·es pouvaient alors avoir l’impression que le recul scientifique sur l’homoparentalité manquait et qu’il fallait alors appliquer un principe de précaution en interdisant aux couples de même sexe d’accéder au mariage, et par extension à la filiation. Pour contrecarrer cette idée, des expert·es plaidant en faveur de la réforme du mariage n’ont eu cesse de noter l’existence de nombreuses études américaines, anglaises ou néerlandaises qui comparent de manière systématique les enfants élevés par les couples de même sexe à ceux élevés par les familles hétérosexuelles dites « de référence8 ».
10Selon eux, la relative absence d’étude française a souvent retenu l’attention des parlementaires en dépit du fait que les études étrangères ne montraient aucune conséquence négative pour les enfants de parents homosexuels. Par ailleurs, iels notent une barrière linguistique et méthodologique — ces travaux étant pour la plupart publiés en anglais et adossés à des barèmes standardisés en psychologie développementale moins utilisés en France — qui a joué en faveur des expert·es opposés à l’homoparentalité. Celleux-ci pouvaient discréditer plus aisément le savoir étranger existant sur le sujet et déclarer dans la presse et devant les décideurs et décideuses que la connaissance sur le devenir de ces enfants était encore très pauvre. Jérôme Courduriès, auditionné par l’Assemblée nationale et l’un des premier·ères anthropologues français·es à travailler sur la conjugalité gay, a témoigné de ce constat largement partagé par d’autres expert·es comme lui. Il m’a expliqué : « Les intellectuels contre [l’égalité juridique des familles homoparentales] vont décrier les études en disant qu’elles sont partiales, elles sont peu nombreuses, il n’y en a pas en France, etc. Comme si des enfants américains et des enfants français étaient si différents. » Cette description illustre bien le discours des expert·es opposé·es au mariage que j’ai rencontré·es.
11Celleux-ci cherchaient à discréditer le savoir étranger de plusieurs manières. Non seulement, iels insistaient sur l’incompatibilité méthodologique de ces études avec leur préoccupation (décrite comme « particulièrement française ») et avec le modèle « biologiquement crédible » de la parentalité, mais iels prétendaient également que ces recherches étaient menées dans un but militant. Par exemple, le pédopsychiatre et psychanalyste Pierre Lévy-Soussan, régulièrement auditionné par les décideurs et décideuses, m’a fait part de son scepticisme sur les nombreuses enquêtes menées dans d’autres pays :
Je connais bien ces études, pour me les avoir farcies, à force de discuter avec Martine Gross [une des premièr·es sociologues français·es à étudier l’homoparentalité], l’APGL [Association des parents et futurs parents gays et lesbiens], etc. Je me suis quand même plongé dans cette fameuse étude de Golombak, Tasker et compagnie [Susan Golombok, psychologue à Cambridge, et Fiona Tasker, psychologue à Birkbeck Université de Londres, ont publié de nombreux articles, dont quelques-uns ensemble], disant que tout va bien. Le fameux « tout va bien ». Donc je dirais même que ces études, qui étaient totalement biaisées, et totalement mal faites, elles étaient faites dans un contexte éducatif. C’est-à-dire, aussi biaisées qu’elles soient, aussi de mauvaise foi qu’elles soient, on comprend pourquoi ils les ont faites.
12Selon Lévy-Soussan, ces études ne sont tout simplement pas scientifiques et ne répondent pas à la question de l’équilibre des enfants. Pour des psychanalystes qui partagent cet avis, les couples de même sexe ne peuvent jamais être réellement comparés aux couples de sexes différents sur la question de la filiation. Selon elleux, ce qui est important pour le bien-être psychologique des enfants est de pouvoir imaginer une scène « primitive » (le coït) plausible entre leurs parents. Dans cette perspective, qu’Éric Fassin qualifie « d’expertise d’a priori9 », la famille hétérosexuelle est un modèle exclusif qui écarte de fait les couples de même sexe de la possibilité d’être de bons parents. Il n’est donc nul besoin de faire des études car la conclusion est connue d’avance. En plus de cette sacralisation de la famille hétérosexuelle, Lévy-Soussan cherche à délégitimer ces études en accusant ces auteur·ices de les faire uniquement dans un objectif militant et orienté.
13Face au peu d’études françaises et au discrédit jeté sur celles qui existent, qu’elles soient françaises ou étrangères, les parlementaires français responsables du débat, issu·es de la majorité, m’ont expliqué avoir eu du mal à mettre en place des auditions, qui devaient, selon eux, être « équilibrées » entre partisan·es et opposant·es à la réforme. Iels avaient en partie pour objectif de mettre en place un forum qui rendait audible une variété de perspectives, notamment celles des opposant·es dans un contexte de forte mobilisation contre le projet de loi du gouvernement socialiste de François Hollande. Erwann Binet, le rapporteur pour la commission des lois de l’Assemblée nationale, m’a dit que « le problème, c’est que sur cette question du mariage gay… Je pense que la question doit être un peu différente aux États-Unis parce que c’est une question ancienne chez vous. » Selon lui, le caractère récent de ce débat en France (et des recherches afférentes) posait des difficultés aux parlementaires hexagonaux soucieux·ses de protéger la légitimité de leur travail face aux mobilisations contre leur réforme. Quand je l’interroge sur la mise en place des auditions d’expert·es, il m’explique :
Au départ, quand vous travaillez [en tant que parlementaire] […] en France sur le mariage gay vous avez en face de vous des études, des expertises, des gens qui sont militants et qui sont tous pour le mariage gay. En novembre [2012], quand le texte a été présenté, 90 % des gens qui étaient favorables au texte (des juristes, des sociologues, des psys, etc.), […] avaient travaillé sur le sujet. Autrement dit, ce sujet-là n’avait en France intéressé que les gens qui étaient favorables au sujet. Les sociologues avaient fait des études là-dessus parce qu’ils étaient pour le mariage gay, parce qu’ils étaient peut-être homosexuels eux-mêmes ou parce qu’ils avaient un a priori favorable sur la question.
14Dans son estimation de l’utilité politique des expert·es, Erwann Binet accordait autant, sinon plus d’importance à la vie privée des chercheurs et chercheuses et à leurs prises de positions politiques qu’à ce que leurs travaux démontraient. Le nombre plus important d’expert·es qui se prononçaient en faveur de l’ouverture du mariage et de la filiation lui apparaît comme le reflet d’un positionnement politique, un bémol dans un contexte partisan compliqué, et non pas comme l’expression d’un consensus scientifique. Pour un parlementaire qui souhaite organiser des auditions avec un partage équilibré d’opinions sur la réforme, l’état de la recherche ressemble à un obstacle dès lors qu’il penche majoritairement d’un côté. Cette impression est renforcée du fait que le champ de recherche français sur l’homoparentalité est relativement restreint et que la recherche étrangère est regardée avec un certain scepticisme.
15L’expérience des auditions a poussé certain·es expert·es travaillant sur l’homoparentalité à réfléchir à des stratégies à mettre en place sur le long terme pour mieux se positionner contre ce type de critiques. Pour elleux, l’enjeu est d’augmenter le nombre d’études faites en France et d’améliorer la perception de leur légitimité, dans les divers instituts de recherche comme dans le champ politique. Iels souhaitent que le champ scientifique français soit suffisamment bien armé pour répondre aux expert·es qui s’opposent aux familles homoparentales et qui profitent du faible nombre d’études pour dominer les débats.
16Cette réflexivité accrue des chercheurs et chercheuses soutenant le droit des homosexuel·les ne les a toutefois pas amenés à questionner publiquement le bien-fondé scientifique et idéologique d’un geste épistémologique pourtant mis au cœur des débats : à savoir, le fait de comparer tous types de familles à la famille hétérosexuelle référentielle. Mes enquêté·es ont semblé bien plus préoccupé·es par l’augmentation du volume d’études que par cette remise en cause. Même si certain·es l’évoquent, se passer du modèle comparatif de la « golden standard family » est difficile, puisque ce dernier structure la littérature scientifique et semble particulièrement audible par les décideur·euses et par le public.
Côté US : de l’evidence-based policy à l’évidence de la norme
17Aux États-Unis, les articulations entre la recherche sur l’homoparentalité et le domaine juridique sont nombreuses. Tout d’abord, les chercheurs et chercheuses ainsi que les décideurs et décideuses étatsunien·nes doivent composer avec un champ de recherche ancien, conséquent et fondé sur des études faites localement et en anglais. De plus, la forme spécifique du débat dans le système accusatoire (« adversarial system ») des tribunaux étatsuniens renforce les enjeux qui pèsent sur ces études. En effet, lors des procès, les juges appellent les adversaires — avocat·es et parties civiles qui défendent le droit au mariage pour les couples de même sexe et celleux qui défendent son interdiction — à présenter les preuves empiriques et démontrées par la recherche qui soutiennent leurs arguments. Si, par exemple, les détracteur·ices de l’homoparentalité revendiquent l’interdiction du mariage entre personnes de même sexe parce que leurs enfants souffrent d’un manque de modèle parental hétérosexuel, alors ils sont dans l’obligation de le démontrer de manière convaincante. Les études sur l’homoparentalité deviennent donc un élément clé des procès. Les juges doivent s’intéresser en détail à ce champ de recherche pour essayer de cerner la qualité des publications, la robustesse des méthodes, le sens général des conclusions, la renommée des auteur·ices, et tout autre aspect de la littérature scientifique qui permet de saisir le bien-fondé des arguments des deux parties.
18Les chercheurs et chercheuses que j’ai interviewé·es étaient conscient·es de ces enjeux lorsqu’iels étaient devant les tribunaux. Ielles mesurent également l’impact de cet examen juridique sur leur travail. Ainsi, Gary Gates, un démographe au William’s Institute — un think tank travaillant sur les droits des personnes LGBTQ+ implanté à l’université de Californie à Los Angeles —, a évoqué cette situation avec moi. Il a été « témoin expert » lors du procès DeBoer v. Synder pour parler de la démographie des familles homoparentales. Il m’a expliqué la logique institutionnelle à laquelle il a été confronté :
Devant un tribunal, en tant qu’expert, vous êtes sous serment et les [avocat·es des] deux côtés vous posent des questions… Et puisque les tribunaux statuent sur la science, elles évaluent les données et peuvent dire celles qui ont de la valeur ou pas, comme dans le procès au Michigan10.
19Ce procès devant la cour fédérale du Michigan visait à décider de la constitutionalité d’une loi dudit état interdisant le mariage et l’adoption par les couples de même sexe. Le caractère significatif du grand nombre d’études sur l’homoparentalité était au cœur du questionnement du juge. Comme nous l’avons vu, la quasi-totalité des études conclut que les enfants élevés par les couples de même sexe ne vont ni mieux ni moins bien que ceux élevés par les couples de sexes différents11. En faisant appel à des expert·es tel·les que Gates, les avocat·es plaidant l’inconstitutionnalité de l’interdiction dans le Michigan ont argué qu’il y avait un consensus favorable à l’homoparentalité dans la littérature scientifique. Dans un contexte institutionnel qui exige que les propos tenus soient démontrés empiriquement, ce consensus scientifique constituait donc un obstacle important pour les opposant·es au mariage entre les personnes de même sexe.
20Pour soutenir la constitutionnalité de la loi interdisant le mariage et l’adoption par les couples homosexuels, les opposant.e.s devaient eux aussi passer par la voie scientifique, ce qui impliquait de fournir des publications issues de revues à comité de lecture ayant une reconnaissance par les pairs — ce qu’un sociologue à l’université du Texas, Mark Regnerus, a réussi à faire en 2012 en publiant dans Social Science Research12. Il s’agissait des résultats de son enquête financée par le think tank conservateur Witherspoon Institute, qui, selon lui, démontraient que les enfants élevés par les couples de même sexe vont moins bien comparés aux enfants élevés selon le « gold standard ». Cette étude, qui a vraisemblablement été menée dans l’objectif d’influencer les débats juridiques et politiques en cours sur l’homoparentalité, a suscité de vives réactions dans la communauté scientifique. Un groupe de sociologues renommé·e·s et spécialistes de la famille ainsi que l’Association américaine de sociologie ont vivement critiqué la méthodologie, le processus de publication, et la réputation du chercheur13 par le biais de réponses publiées dans la même revue, de lettres ouvertes et d’autres communications publiques. Devant les tribunaux, les arguments se sont alors mis à tourner autour du volume important d’études allant à l’encontre de l’article de Regnerus et dénonçant sa pauvre qualité scientifique.
21Au final, le tribunal du Michigan a rendu une décision abrogeant l’interdiction du mariage et de l’adoption dans l’état. Le juge, Bernard Friedman, a insisté dans son raisonnement sur le fait que le consensus scientifique allait dans le sens des défenseur·euses de l’homoparentalité. Il a, de surcroit, décrit l’étude de Regnerus comme de la « science au rabais [junk science14] ». Ces positions claires et tranchées sur la recherche, rendues dans le cadre d’une décision de justice majeure, ont réconforté des chercheurs et chercheuses soutenant les droits des familles homoparentales. Gary Gates, qui représente bien ce camp, me fait part de ses impressions quant au procès :
C’était une défense remarquable de comment les sciences sociales fonctionnent et de ce qu’un consensus en science sociale veut dire. Alors consensus ne veut pas dire chaque chercheur. Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas un point de vue contradictoire de temps en temps. Mais ça signifie qu’il y a un accord général [qui se dégage de la littérature]. Les opposants avaient littéralement deux articles et demi. Ils avaient l’article de Regnerus, ils avaient l’article d’Allen15, et ils avaient ce commentaire de deux pages et demi [sur l’article] de Rosenfeld16. Et je pense que [le procès] a bien révélé ça. Le procès a servi à mettre en évidence le manque de preuve dont les opposants ont disposé et, au final, le juge a estimé que la science démontrait que les enfants de couples homosexuels bénéficieraient d’avoir des parents mariés.
22L’usage d’arguments fondés sur la recherche lors des procès a eu un effet direct, parfois estimé positif par les concerné·es, sur les chercheuses et chercheurs travaillant sur l’homoparentalité. D’une part, voyant l’utilité de leurs travaux de recherche aboutir après des décennies d’investissement en faveur des droits conjugaux et familiaux des couples de même sexe, iels ont été encouragé·es à continuer leurs enquêtes, quitte à investir des questions de recherche qui renforcent le modèle conjugal et parental normatif. D’autre part, ces expériences leur permettaient de se servir des mécanismes scientifiques pour contrer les études mobilisées par les opposant·es à l’homoparentalité, définitivement discréditées par la justice et vivement critiquées par les sociétés savantes.
23Malgré l’usage d’argumentations scientifiques dans un contexte juridique et malgré la réussite de la défense des familles homoparentales, la centralité de la famille hétérosexuelle n’a que rarement été remise en question. Dans un contexte de relative abondance d’études sur ces questions, on aurait pu s’attendre à entendre des positions critiques venant de la part d’universitaires sensibles à l’hétérosexisme de la posture comparative des études. La perspective critique qui se demande pourquoi les familles homoparentales sont sommées de justifier leur capacité à élever des enfants est d’ailleurs présente depuis des décennies. Cependant, elle semble avoir été volontairement minimisée par une majorité d’avocat·es et d’expert·es témoignant en faveur des familles homoparentales. En effet, il y avait dans la littérature scientifique, déjà depuis le début des années 2000, des voix qui s’élevaient pour dire que la comparaison avec les familles hétérosexuelles n’avait pas forcément de sens scientifique et représentait une erreur théorique.
24Plus précisément, certain·es chercheur·euses, notamment Judith Stacey, sociologue à New York University, ont bien observé qu’en réalité, même si on continue à faire cette comparaison, il faut bien admettre que les résultats de ces études sont plus nuancés qu’il n’y parait. Contrairement aux déclarations dans les discours de vulgarisation, les études démontreraient des différences intéressantes entre les enfants élevés par les couples de même sexe et les enfants élevés par les couples de sexes différents. Dès 2001, Stacey et d’autres affirment que le débat public a créé une sorte de distorsion dans la littérature scientifique en encourageant les chercheurs et chercheuses à reléguer à l’arrière-plan les résultats qui montraient ces différences entre les deux groupes17. Or, plus de 10 ans après, lors des procès, cette perspective critique a surtout été mobilisée par les avocat·es et les expert·es conservateurs pour essayer de délégitimer l’expertise pro-mariage. Par conséquent, Stacey et d’autres chercheurs et chercheuses ont décidé de déclarer publiquement que leurs critiques de la littérature scientifique ne pouvaient en rien justifier un refus de reconnaître légalement les familles homoparentales18. C’est ainsi que le débat dans les institutions décisionnelles étatsuniennes a pu, tout en légalisant le mariage, maintenir la famille hétérosexuelle comme modèle comparatif implicite.
Interactions science–société
25Face à l’interrogation sur le bien-être des enfants élevés par les couples de même sexe, les décideurs et décideuses et les chercheurs et chercheuses français·es se sont retrouvé·es dans des configurations scientifiques et politiques fort différentes de leurs homologues étatsunien·nes. Si la pénurie d’études françaises permettait aux opposant·es au mariage entre personnes de même sexe de disqualifier la recherche internationale et de semer le doute sur l’état réel de nos connaissances, leur abondance aux États-Unis a mené à un investissement important dans l’argument scientifique et au recours à des pratiques douteuses de la part des opposant·es pour se faire entendre.
26En France, puisque les réformes concernant les couples homosexuels et leurs familles suivent principalement la voie législative (plutôt que juridique), les logiques institutionnelles favorisent des calculs politiques et non scientifiques. Ainsi le but des auditions d’expert·es n’est pas de prendre une décision sur la qualité scientifique des études, mais de donner une légitimité au projet de loi et de permettre aux parlementaires de dire qu’iels ont pris en considération tous les points de vue. Il n’y a donc pas de forte demande de la part des législateur·ices pour des études empiriques. Ce sont les prises de position normatives et la notoriété des expert·es qui semblent davantage guider celleux qui organisent les débats au parlement français. Il existe par ailleurs de multiples barrières qui empêchent de mener des travaux sur les familles homoparentales en France. Les études sur le genre et la sexualité ne jouissent pas d’une forte institutionnalisation et pâtissent d’un certain discrédit dans les lieux de production du savoir. Celleux qui souhaitent travailler sur ces sujets se trouvent souvent marginalisé·es et sans financement importants19. Enfin, au niveau des mouvement sociaux, bien qu’il existe des interactions entre des associations et des chercheurs et chercheuses — l’APGL en donne l’exemple avec ses efforts pour permettre aux scientifiques d’étudier ses membres20 — ces associations ne sont pas professionnalisées et ne disposent pas d’une reconnaissance auprès des institutions susceptibles d’utiliser le savoir produit par les chercheurs. La configuration de ces trois éléments a contribué à défavoriser une production importante d’études sur les familles homoparentales en France, même s’il faut souligner que la situation évolue.
27Aux États-Unis, la voie juridique qui a abouti au succès des revendications pour le mariage entre personnes de même sexe impose une logique d’interrogatoire et de contre-interrogatoire sous le regard de magistrats qui jouent le rôle d’arbitre et jugent la qualité du savoir mobilisé par les parties en présence. Cette institution génère donc une demande pour de la recherche de bonne qualité, augmentant l’idée que les études sur l’homoparentalité constituent un savoir « utile21 ». Les recherches qui ont un rôle dans les débats publics majeurs peuvent générer du prestige, ce qui aide à légitimer ces études du point de vue des institutions de production du savoir, comme les universités. Par ailleurs, l’histoire de l’institutionnalisation relativement importante des « women’s and gender studies » a ouvert une voie favorable à l’exploration scientifique de la question de l’homoparentalité au sein des universités étatsuniennes ainsi que dans des disciplines traditionnelles comme la sociologie et la psychologie qui reconnaissent la légitime de ces questions. Ces disciplines jouissent par ailleurs de réseaux importants avec des associations professionnelles qui soutiennent le travail de recherche des chercheurs et chercheuses sur ces questions. Enfin, des organisations du mouvement gay et lesbien plus professionnalisées que leurs homologues français ont saisi cette voie judiciaire pour faire avancer leur cause et ont investi dans la création de postes d’avocat·es salarié·es capables de mener la bataille devant les tribunaux. Le besoin de disposer de savoirs scientifiques pour aider ces procès a contribué à tisser des liens entre ces organisations, telles que Lambda Legal, et des chercheurs et chercheuses. Cette demande a aussi donné naissance à un certain nombre d’instituts de recherche, issus des mouvements sociaux, qui sont parfois implantés dans les universités et dont le but est de produire de la science de bonne qualité qui puissent être utilisée dans les débats. Ces circonstances constituent un terrain favorable à la production des études sur l’homoparentalité aux États-Unis.
La puissance invaincue du mariage
28Malgré leurs différences, les débats français et étatsuniens ont pour point commun la réification de la famille hétérosexuelle et un renforcement symbolique de l’institution du mariage. Nous avons vu que l’implication de la recherche dans les débats politiques n’a pas mené à une remise en cause de la famille « de référence » hétérosexuelle et mariée. Au contraire, que ce soit devant des parlementaires ou des juges, les partisan·es et les opposant·es se sont affronté·e·s sur une base commune : celle de la capacité des familles marginalisées à se montrer à la hauteur d’un modèle supposé naturel. Il n’a jamais été question de profiter de ces débats pour poser sincèrement la question des effets potentiellement néfastes de la famille hétéroparentale sur les enfants et les adultes. Il n’était pas non plus question d’essayer de voir si les gays, lesbiennes, bisexuel·les, ou personnes trans pouvaient montrer une meilleure voie avec des modèles familiaux plus égalitaires et solidaires. Pour des raisons probablement stratégiques, notamment de la part de certain·es défenseur·euses des couples homosexuels, une critique radicale du bien-fondé du mariage et de la filiation sur un fondement biologique a vraisemblablement été écartée. Et malgré l’épouvantail agité par ses opposant·es, la légalisation du mariage et de l’adoption pour les couples de même sexe n’a pas mené à un délitement de la famille ou une dévalorisation générale du mariage, une institution qui confirme son statut central dans l’organisation administrative de la famille dans les deux pays. Le regard scientifique sur l’homoparentalité et la lutte pour sa reconnaissance juridique ont paradoxalement renforcé l’importance symbolique de la famille hétérosexuelle.
29L’interaction entre le champ politique et scientifique décrite dans cet article attire également l’attention sur un risque de glissement de questions politiques de droits fondamentaux vers un cadrage technique qui favorise l’emprise de la science sur le débat démocratique. Des tribunaux étatsuniens, qui placent les juges en position d’arbitres scientifiques, sont particulièrement problématiques à cet égard : les règles formelles de l’expertise peuvent minimiser le débat démocratique à la faveur d’une logique technique en apparence apolitique. Cette situation introduit d’importantes pressions dans le champ scientifique et octroie un pouvoir fondamental aux juges sous forme d’arbitrage scientifique qui est d’autant plus critiquable en l’absence de formation scientifique certifiée. La forme politique du débat parlementaire français, ancré dans un rapport de force social et partisan, fait également appel aux savoirs de manière utilitaire. Cependant, n’ayant pas pour but de trancher un état des lieux exhaustif de la science, il peut laisser davantage de place que le système judicaire étatsunien à une diversité de voix qui représentent des positions normatives assumées, au risque de gonfler la voix des opposant·es parmi les expert·es auditionné·es.
30En participant à l’utilisation du savoir scientifique pour aider à l’accroissement des droits des familles homoparentales, les chercheurs et chercheuses des deux côtés de l’Atlantique augmentent de manière considérable la portée de leurs travaux et les répercussions possibles de leurs résultats. Que ferait-on si, par exemple, une enquête de bonne qualité et représentative de la population trouvait que les enfants élevés par deux hommes ou deux femmes avaient plus de problèmes psychologiques graves que les enfants élevés par la « famille de référence » ? Si on laisse la question scientifique s’imposer sur la question politique, la réponse est nette. Ce risque n’était pas ignoré par les enquêté·es. Quand je faisais l’hypothèse de cette étude fictive — très loin du consensus scientifique actuel — les réponses étaient variables. Certain·es ont fini par affirmer qu’il ne faut pas inféoder la question politique à la question scientifique. Leur position sur le sujet ne changerait pas en fonction des études scientifiques car d’autres principes leur semblaient supérieurs, tels que l’égalité. D’autres ont affirmé que si les résultats montraient des effets néfastes de l’homoparentalité sur les enfants, iels seraient obligé·es de regarder l’ouverture du mariage et de la filiation aux couples de même sexe avec plus de prudence. Ces perspectives montrent bien l’ambiguïté inhérente à l’implication du champ scientifique dans les débats sur les droits, y compris lorsqu’elle est voulue et arrangée par des militant·es luttant pour leur extension.
31Annexes
32Tableau 1 : Entretiens en France (n = 37)
Nom |
Qualité d’expert·e |
Affiliation institutionnelle |
Opposant·es |
||
Collin, Thibaud |
Prof. de philosophie |
Collège Stanislas |
Dekeuwer-Defossez, Françoise |
Prof. de droit |
Université catholique de Lille |
Flavigny, Christian |
Psychanalyste / psychiatre |
Hôpital de la Pitié-Salpêtrière |
Fulchiron, Hugues |
Prof. de droit |
Université de Lyon III |
Lacroix, Xavier |
Prof. de philosophie / théologie |
Université catholique de Lyon |
Levy-Soussan, Pierre |
Psychanalyste / psychiatre |
Psychology practice / Université Paris-Diderot |
Neirinck, Claire |
Prof. de droit |
Université de Toulouse I |
Ménard, Claire |
Person. administratif |
Union national des associations familliales |
Vallat, Jean-Philipe |
Directeur adjoint |
Union national des associations familliales |
Défenseur·euses |
||
Badinter, Elisabeth |
Prof. de philosophie |
École polytechnique |
Binet, Erwann |
Legislateur |
Assemblée nationale |
Bloche, Patrick |
Legislateur |
Assemblée nationale |
Borrillo, Daniel |
Prof. de droit |
Université Paris Ouest Nanterre |
Brunet, Laurence |
Chercheuse en droit et bioéthique |
Université de Paris / Hôpital Cochin |
Cadoret, Anne |
Prof. d’anthropologie |
Centre national de la recherche scientifique |
Courduriès, Jérôme |
Prof. d’anthropologie |
Université de Toulouse II |
Delaisi de Parseval, Geneviève |
Psychanalyste / prof. |
Multiple |
Descoutures, Virginie |
Chercheuse en sociologie |
Institut national d’études démographiques |
Fassin, Eric |
Prof. de sociologie |
Université Paris 8 |
Godelier, Maurice |
Prof. d’anthropologie |
École des hautes études en sciences sociales |
Gross, Martine |
Checheuse en sociologie |
Centre national de la recherche scientifique |
Hefez, Serge |
Psychanalyste / Psychiatre |
Hôpital de la Pitié-Salpêtrière |
Héritier, Françoise |
Prof. d’anthropologie |
Collège de France |
Jouannet, Pierre |
Médecin / prof. |
Université Paris Descarts, multiple |
Le Déroff, Joël |
Salarié d’association militante |
ILGA – Europe |
Mécary, Caroline |
Avocate |
None |
Michel, Jean-Pierre |
Legislateur |
Sénat |
Nadaud, Stéphane |
Psychanalyste / prof. / philosophe |
Hôpital de Ville-Évrard |
Neiertz, Nicolas |
Directeur d’association militante |
Association David et Jonathan |
Quinqueton, Denis |
Directeur d’association militante |
Association Homosexualités et Socialismes |
Roudinesco, Élisabeth |
Prof. d’histoire |
École normale supérieure, multiple |
Sanguinetti, Patrick |
Directeur d’association militante |
Association David et Jonathan |
Schulz, Marianne |
Fonctionnaire |
Ministère des Solidarités |
Seban, Pablo |
Militant / citoyen |
Indépendent |
Théry, Irène |
Prof. de sociologie |
École des hautes études en sciences sociales |
Urwicz, Alexandre |
Directeur d’association militante |
Association des familles homoparentales |
Wintemute, Robert |
Prof. de droit / avocat |
King’s College, London |
33Tableau 2 : Entretiens aux États-Unis (n = 35)
Nom |
Qualité d’expert·e |
Affiliation institutionnelle |
Opposant·es |
||
Allen, Douglas |
Prof. d’économie |
Simon Fraser University |
Duncan, William |
Chercheur de think tank |
Marriage Law Foundation |
Gallagher, Maggie |
Fondatrice d’association militante / penseuse |
Institute for Marriage and Public Policy |
Lund, Nelson |
Prof. de droit |
George Mason University |
Morse, Jennifer Roback |
Fondatrice d’association militante / penseuse |
The Ruth Institute |
Wardle, Lynn |
Prof. de droit |
Brigham Young University |
Défenseur·euses |
||
Anderson, Clinton |
Salarié d’organstion profesionnelle |
American Psychological Association |
Avery, Shannon |
Juge |
State of Maryland |
Badgett, Lee |
Prof. d’économie / chercheuse de think tank |
UMass Amherst / The William’s Institute |
Boaz, David |
Directeur adjoint de think tank |
The Cato Institute |
Bonauto, Mary |
Avocate militante |
Gay and Lesbian Alliance and Defenders |
Carpenter, Dale |
Prof. de droit |
University of Minnesota |
Cherlin, Andrew |
Prof. de sociologie |
Johns Hopkins University |
Cooper, Leslie |
Avocat militant |
American Civil Liberities Union |
Cott, Nancy |
Prof. d’histoire |
Harvard University |
Egan, Edmund |
Économiste |
City of San Francisco |
Eskridge, William |
Prof. de droit |
Yale University |
Galatzer-Levy, Robert |
Prof de psychologie / psychanalyste |
University of Chicago |
Gates, Gary |
Chercheur de think tank |
The William’s Institute |
Haider-Markel, Donald P. |
Prof. de science politique |
University of Kanssas |
Herek, Gregory |
Prof. de psychologie |
University of California Davis |
Hillsman, Sally |
Directrice d’organisation professionnelle |
American Sociological Association |
Hunter, Nan |
Prof. de droit |
Georgetown University |
Lamb, Michael |
Prof. de psychologie |
Cambridge University |
Manning, Wendy |
Prof. de sociologie |
Bowling Green State University |
Meyer, Ilan |
Prof. de psychologie |
The William’s Institute |
Patterson, Charlotte |
Prof. de psychologie |
University of Virginia |
Pepleau, Letitia Anne |
Prof. de psychologie |
University of California Los Angeles |
Pizer, Jennifer |
Avocate militante |
Lambda Legal |
Rosenfeld, Michael |
Prof. de psychologie |
Stanford University |
Shapiro, Ilya |
Chercheur de think tank |
The Cato Institute |
Stein, Edward |
Prof. de droit |
Cardoza School of Law |
Stern, Marc D. |
Avocat militant |
American Jewish Committee |
Stewart, Therese |
Avocate du conseil municipal |
City of San Francisco |
Zia, Helen |
Écrivaine / militante / citoyenne |
None |
Notes
1 Judith Stacey, Unhitched: Love, Marriage, and Family Values from West Hollywood to Western China, New York, NYU Press, 2011.
2 Pamela J. Smock et Christine R. Schwartz, « The Demography of Families: A Review of Patterns and Change », Journal of Marriage and Family, vol. 82, no 1, 2020, p. 934.
3 Ces données sont issues de ma thèse : Michael Stambolis-Ruhstorfer, The Culture of Knowledge: Constructing “Expertise” in Legal Debates on Marriage and Kinship for Same-Sex Couples in France and the United States, PhD Dissertation, University of California Los Angeles and École des Hautes Études en Sciences Sociales, Los Angeles, CA, 2015.
4 Michael Stambolis-Ruhstorfer, « Formes de l’État et sélection des savoirs experts : Les controverses sur le mariage et la filiation des couples de personnes de même sexe en France et aux États-Unis », De l’autre côté du miroir : comparaisons franco-américaines, sous la direction de Daniel Sabbagh et Maud Simonet, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2018, p. 89–102.
5 Michael Stambolis-Ruhstorfer, The Culture of Knowledge, op. cit.
6 Michael Stambolis-Ruhstorfer, « Producing expert capital: how opposing same-sex marriage experts dominate fields in the United States and France », Social Movement Studies, vol. 19, no 1, 2 janvier 2020, p. 38‑62.
7 Olivier Vecho et Benoît Schneider, « Homoparentalité et développement de l’enfant : bilan de trente ans de publications », La psychiatrie de l’enfant, vol. 48, no 1, 1er mars 2005, p. 271‑328 ; Olivier Vecho et Benoît Schneider, « Attitudes toward gay and lesbian parents: A comparison among French and Quebec psychologists », Canadian Journal of Behavioural Science, vol. 47, no 1, 2015, p. 102‑112.
8 Pour un état des lieux de ces études, voir : Mignon R. Moore et Michael Stambolis-Ruhstorfer, « LGBT Sexuality and Families at the Start of the Twenty-First Century », Annual Review of Sociology, vol. 39, no 1, 2013, p. 491‑507 ; Wendy D. Manning, Marshal Neal Fettro et Esther Lamidi, « Child Well-Being in Same-Sex Parent Families: Review of Research Prepared for American Sociological Association Amicus Brief », Population Research and Policy Review, vol. 33, no 4, 1er août 2014, p. 485‑502 ; Michael Stambolis-Ruhstorfer, « Les mères lesbiennes, les mères seules, et leurs enfants : l’état des lieux de la recherche », Procréation, Médecine et Don, sous la direction de Pierre Jouannet, Paris, Lavoisier, 2015, p. 243‑251.
9 Au-delà du pacs : L’expertise familiale à l’épreuve de l’homosexualité, sous la direction de Daniel Borrillo et Éric Fassin, Paris, Presses Universitaires de France, 2001 ; Éric Fassin, « Same Sex, Different Politics: “Gay Marriage” Debates in France and the United States », Public Culture, vol. 13, 2001, p. 215‑232 ; Éric Fassin, « Le savant, l’expert et le politique : la famille des sociologues », Genèses, vol. 32, no 1, 1998, p. 156‑169.
10 Les extraits d’entretiens en anglais ont été traduits en français.
11 Jimi Adams et Ryan Light, « Scientific Consensus, the Law, and Same Sex Parenting Outcomes », Social Science Research, vol. 53, septembre 2015, p. 300‑310.
12 Mark Regnerus, « How different are the adult children of parents who have same-sex relationships? Findings from the New Family Structures Study », Social Science Research, vol. 41, no 4, 2012, p. 752‑770.
13 Wendy D. Manning, Marshal Neal Fettro et Esther Lamidi, « Child Well-Being in Same-Sex Parent Families », op. cit. ; Paul R. Amato, « The well-being of children with gay and lesbian parents », Social Science Research, vol. 41, no 4, 2012, p. 771‑774.
14 DeBoer et al. v. Snyder et al., 121–0285, 13 (E.D. Mich. March 21, 2014).
15 Douglas W. Allen, « High school graduation rates among children of same-sex households », Review of Economics of the Household, vol. 11, no 4, 1er décembre 2013, p. 635‑658.
16 Douglas W. Allen, Catherine Pakaluk et Joseph Price, « Nontraditional Families and Childhood Progress Through School: A Comment on Rosenfeld », Demography, vol. 50, no 30, 2013, p. 955‑961.
17 Judith Stacey et Timothy J. Biblarz, « (How) Does the Sexual Orientation of Parents Matter? », American Sociological Review, vol. 66, no 2, avril 2001, p. 159‑183.
18 Arnaud Lerch, « “Au nom de la famille”. Entretien avec Judith Stacey », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 214, no 4, 9 août 2016, p. 94‑103.
19 Bruno Perreau, Qui a peur de la théorie queer ?, Paris, Presses de Sciences Po, 2018 ; Michael Stambolis-Ruhstorfer, « Producing expert capital », op. cit.
20 Éric Garnier, L’homoparentalité en France : La bataille des nouvelles familles, Paris, Thierry Marchaisse Editions, 2012.
21 Steven Brint, In an Age of Experts, Princeton, NJ, Princeton University Press, 1996.
Pour citer cet article
A propos de : Michael Stambolis-Ruhstorfer
Université Toulouse – Jean Jaurès
Membre junior, Institut Universitaire de France