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Suivre un flow d'informations : Entre l’observation et la visualisation des échanges lors des réunions de coordination BIM
Résumé
Cet article porte sur la méthodologie d’observation et de visualisation des échanges lors des réunions de coordination BIM (Building Information Management). Contrairement à des plateformes numériques collaboratives, le suivi et la compréhension des discussions lors des réunions de coordination BIM est un défi important, vu le nombre important d’informations échangées. Dans ce travail, nous proposons une caractérisation des informations échangées selon plusieurs critères, constituant une grille d’observation et d’analyse, afin de pouvoir traiter l’ensemble des données récoltées, sur 4 ans d’expérimentation dans un projet collaboratif en BIM. Un modèle de la communication interactive entre les acteurs d’un groupe est proposé, dans lequel nous visons à apporter une caractérisation visuelle des échanges d’information, tout en schématisant les flux réels des échanges en réunion de coordination BIM. Cette schématisation est facilement analysable dans notre approche descriptive et interprétative de la situation observée.
Table des matières
11/05/2023
1. Introduction
1L’approche Building Information Management (BIM) est essentiellement collaborative, impliquant l’ensemble des acteurs d’un projet de construction, dans une dynamique de coopération (Poirier, Frénette, Carignan & al., Frénette, Carignan & al., 2018). Le mot « BIM » est associé à la notion de modèle géométrique qui est enrichie d’informations liées au bâtiment (Shepherd, 2019). Donc la base du BIM est une maquette 3D regroupant des informations détaillées à propos de toutes les composantes du projet de construction. Ce mot évoque aussi la notion de processus de modélisation qui permet la mise en place d’une base de données et d’informations qui seront partagées (Shepherd, 2019). En d’autres termes, c’est un mécanisme destiné à générer des informations de construction et à les exploiter, et ce, tant dans la phase de conception que lors des phases de construction et d’exploitation. Dans notre travail, ce mot évoque 2 notions. La première est liée au processus de gestion des informations du bâtiment pour la gestion de projet (Chaudet, 2019). La deuxième est liée à la gestion du travail d’équipe puisqu’un projet implique différents acteurs devant collaborer autour d’un modèle partagé et enrichi d’informations liées au bâtiment (Celnik & Lebègue, 2015 ; Levan, 2018). Aujourd’hui, face aux enjeux importants qui régissent le secteur de la construction, tels que la multiplication croissante des technologies numériques ou la complexité grandissante des projets (Skair, 2015), s’intéresser aux processus d’échanges d’information apportera des pistes pour l’amélioration et l’optimisation continue des processus de gestion de l’entreprise, des modes de travail et des pratiques existantes dans le domaine de la construction. Dans cet article, nous exposons un travail de recherche centré sur une méthodologie d’observation et de visualisation des échanges d’informations dans un processus BIM, à travers son objet, son mode de représentation, son support, ainsi que les acteurs concernés.
2. Problématique et question de recherche
2Dans un contexte de communication interactive, nous définissons l’information comme une indication, un renseignement, une précision, une documentation, une nouvelle portée à la connaissance de quelqu’un, obtenue ou recherchée par quelqu'un sur quelqu'un ou quelque chose, dans un contexte donné, disposant ou pas d’un support, peu importe sa forme, qui a un but, comme par exemple le développement de solutions (Davies, Wilkinson, & McMeel, 2001 ; Martin, 2001). L'information est un outil de communication et de travail collectif, lorsqu'elle intervient au cours d'une réunion d'équipe (Gronier, 2000 ; Darses, Détienne & Visser, 1997). En effet, les informations collectées et diffusées par chaque personne vont permettre d'améliorer les performances de l'ensemble de l'équipe en ajustant les actions de chacun. Les réunions de coordination BIM permettent aux intervenants d’échanger de vive-voix ces informations, de décider des actions à entreprendre pour résoudre les conflits complexes ou de solutionner immédiatement ces/certains conflits. D'un point de vue méthodologique, le suivi ainsi que la compréhension des échanges et des prises de décision en réunion de coordination sont moins évidents à réaliser que le suivi de mails ou d'échanges sur une plateforme de coordination BIM, que ça soit sur les plateformes collaboratives BIM niveau 3 (d’après le diagramme de Bew & Richards, 2008) ou sur les plateformes numériques mobilisant/régies par le principe d’ « environnement de données en commun » (CDE pour Common Data Environment), car ces plateformes collaboratives sont des infrastructures informatiques qui autorisent/soutiennent la collecte et la gestion de données, avec des moyens techniques élaborés (Yanatchkov, 2022 ; Sattler, 2021). De plus, la coordination est nécessaire pour mener à bien le projet en mode BIM. Elle incarne un processus de transmission et de traduction du message entre les acteurs d'un projet (Levan, 2018), elle est l'un des piliers de la collaboration. Par conséquent, des réunions de coordination BIM sont le lieu idéal afin de favoriser des moments d’échanges et de communication entre les acteurs (Mehrbod, Staub-French, Mahyar & Tory, 2019). Cette problématique nous pousse à développer une méthodologie spécifique aux réunions de coordination BIM, qui nous permet de suivre le flux d’information et les interactions entre les acteurs, d’où notre question de recherche : Quelle méthodologie pour observer et visualiser les échanges lors des réunions de coordination d’un projet mené en BIM ?
3. Méthodologie
3.1 Mise en situation collaborative instrumentée
3Durant 4 éditions, chacune d’une durée de 4 mois d’expérimentation (Rahhal, Ben Rajeb & Leclercq, 2020), 75 participants, inscrits en Master 1 en Ingénieur Civil Architecte en Faculté des Sciences Appliquées, ont abouti en 8 groupes de travail à 8 projets BIM. Dans le cadre de notre recherche, le protocole expérimental a été défini de manière à anticiper les pratiques professionnelles et à s’aligner à la réalité du terrain : il présente les méthodes et outils émergents au service de la collaboration et les met en œuvre dans un contexte technologique original. Plus concrètement, le travail collaboratif est organisé par le groupe de participants lui-même. Il se base sur une distribution de diverses tâches intégrant, entre autres, des coordinateurs BIM et des modeleurs BIM spécialisés dans différents domaines, comme l'architecture, la structure, ou encore les techniques spéciales. Dans le cadre de cette expérimentation BIM, des projets sélectionnés sont issus d'un précédent travail de conception en atelier d'architecture menés par des étudiants en Master 1 ingénieur architecte à l’Université de Liège. La spécificité de cet atelier d'architecture est d'articuler composition spatiale et maîtrise d’œuvre pour la conception d’un équipement public contemporain, dans les conditions d’un réel appel à concours. Dans le cadre de cet atelier, les projets ont été conçus et détaillés techniquement par les étudiants Ingénieurs Architectes de ULiège et prédimensionnés par les étudiants Ingénieurs de l’École des Mines d’Alès (projet bâtiment). Par conséquent, le niveau de conception de ces projets est assez avancé: les projets sont entre les niveaux APD (avant-projet détaillé) et EXE (l'exécution). Les projet sont illustrés dans la Figure 1. Ils ont des tailles semblables et ils représentent une complexité similaire en termes de composition et de conception architecturale et technique. Le choix de tels projet arrivés à ce stade d'avancement est justifié par le constat que le BIM présente une valeur ajoutée avérée dans cette phase de projet, avec une multitude d’usages actuels possibles de la maquette numérique. Toutes les informations utiles et nécessaires à la compréhension architecturale et spatiale de ce projet (plans, coupes, éléments de représentations), ainsi que les rapports de conception et de prédimensionnement technique (structurel, HVAC, etc.) du bâtiment sont mis à disposition des divers acteurs/étudiants participant à l'expérimentation.
Figure 1 – Vue 3D des 3 projets.
3.2 Les réunions de coordination BIM, comme situation observée
4Dans notre protocole expérimental, nous avons choisi d’observer ce type de réunion pour caractériser les échanges réels entre acteurs. Cet objectif se situe dans un cadre de recherche plus général, comprenant la comparaison à un cadre théorique des flux d’informations décrits dans les protocoles BIM. Ces réunions se déroulent de façon hebdomadaire. La durée moyenne de ces réunions est de 60 minutes, elles sont animées par un ou plusieurs coordinateurs BIM et elles sont encadrées et supportées par des outils logistiques pour la revue et la résolution des problèmes techniques par groupe de projet (comme le tableau digital au mur permettant la visualisation et l'annotation sur le projet, cf. Figure 2). Au total, 22 réunions de coordination BIM sont observées et analysées, dont 8 réunions en 2019, 8 réunions en 2020, 4 réunions en 2021 et 2 réunions en 2021. L’ordre du jour de ses réunions est variable selon la phase du projet. Il est décidé et préparé à l’avance par le coordinateur et son groupe. Parmi les thématiques évoquées dans ces ordres du jour, nous pouvons citer, entre autres, l’identification des conflits géométriques entre les maquettes « métiers » du bâtiment, ou encore la discussion autour d’incohérences et de problèmes techniques et organisationnels rencontrés par le groupe au fur et à mesure de l’avancement du projet. Enfin, des réunions hebdomadaires ont lieu en présentiel principalement mais à distance si nécessaire. Les supports physiques mis en place sont des ordinateurs portables, des tablettes graphiques avec un stylo numérique pour chacun des participants et un smart board équipé de stylos numériques pour l’ensemble du groupe.
Figure 2 – Exemples de réunions de coordination BIM en présentiel au sein de 2 groupes.
3.3 Le rôle observé du coordinateur BIM
5Selon notre mise en situation, les réunions de coordination BIM ne sont pas des réunions de conception collaborative au sens large du terme (Rajeb, 2012) mais bien des réunions organisées pour la coordination entre les différents acteurs du projet dans un processus BIM dans lesquelles un coordinateur BIM remplit un rôle bien spécifique, documenté à l’avance, comme animateur des réunions (Mehrbod, Staub-French, Mahyar & Tory, 2019). Ce dernier définit l'ordre du jour, guide les échanges et introduit au fur et à mesure de la réunion de nouvelles idées à débattre et à discuter avec le groupe. En se basant, sur plusieurs catégories de verbalisations, la notion d’une nouvelle idée dans la conversation est adaptée et elle est (re)définie comme un prédicat toujours lié à un sujet ou un thème de la discussion. Elle peut prendre la forme soit d’une proposition informationnelle (Gronier, 2010), soit d’une question (d’après la classification proposée par Martin, 2001), soit d’une description d’un problème (d’après la méthode COMET - Davies, Wilkinson, & McMeel, 2001). L’hypothèse de départ que nous formulons est que l’idée discutée a un début et une fin qui dépendent de plusieurs éléments, en lien avec le rôle de l’information échangée :
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le manque de réaction du groupe suite à une question posée par le coordinateur BIM ou d’une proposition informationnelle du coordinateur BIM ;
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une acceptation explicite d’une proposition informationnelle du coordinateur BIM, adressée à une personne à plusieurs personnes ou à tout le groupe ;
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la prise de décision par une ou plusieurs personnes concernant un problème décrit ou une question posée par le coordinateur BIM ;
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ou une prise de décision du coordinateur BIM lui-même pour conclure un débat, avec une acceptation implicite du groupe.
6La deuxième hypothèse de départ que nous formulons est que le coordinateur BIM reste le maître à bord de la succession chronologique des idées en réunion. En outre, au sein d’une idée discutée, il existe une ou plusieurs informations échangées et ceci provoque une ou plusieurs réactions des autres acteurs qui pourraient également être supports d'autres informations concernant le projet. Nous appelons ces autres idées des points discutés par le coordinateur BIM puisque les observations portent principalement sur les idées amenées par le coordinateur BIM.
3.4 Élaboration d’une première grille d’observation des information échangés
3.4.1 Les critères principaux observés
7Dans le cadre de notre récolte, nous avons choisi d’élaborer une grille d’observation afin de collecter toutes les données nécessaires et suffisantes qui nous permettront de caractériser les échanges lors des réunions de coordination BIM. Cette caractérisation nécessite la description, avec précision, des particularités d’une information dans une situation de communication reposant, à priori, sur l’usage de maquettes BIM. Dans le domaine des sciences de l’information et de la communication, nous trouvons plusieurs caractéristiques relatives à une information échangée. Elles sont résumées et adaptées ci-après pour coller à notre contexte de recherche :
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son contenu : comprenant son objet, et sa forme comprenant son mode de représentation et son support (Davenport & Prusak, 1998).
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son sens : définit comme son rôle dans un contexte précis, par exemple comme outil d’aide à la décision, de communication ou de travail collectif (Boton, Rivest, Ghnaya, & Chouchen, 2021).
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sa qualité : principalement son utilité, ayant une valeur d’usage en répondant à un besoin collectif ou vis-à-vis d’un acteur du projet (Harrathi & Calabretto, 2006).
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son coût : définit par la charge nécessaire à son élaboration, son acquisition, son traitement et sa transmission. En réunion, ce coût est équivalent au temps écoulé du début à la fin d’un point discuté et clôturé par le coordinateur BIM, avec un passage au point suivant, peu importe qu’il y ait eu ou pas une prise de décision (Pelletier & Cuenot, 2013).
8Une grille d’encodage pour l’observation de ces réunions est mise en place par nos soins et est structurée par des critères inspirés des caractéristiques décrites précédemment. Le but de nos observations est de collecter non seulement le contenu du point discuté par les acteurs, mais aussi les objets de l’information, les supports utilisées, et le mode de représentation de l’information échangée entre les acteurs présents aux réunions de coordination BIM. La particularité de notre grille d’observation est qu’elle se focalise sur le contenu de la discussion et non sur une temporalité précise d’encodage des observations et cela peu importe le temps qu’un point de discussion peut prendre. Dans cette première grille, nous présentons une partie de notre recherche doctorale en cours, ainsi nous prenons en compte les 6 volets suivants, illustrés à la Figure 3:
9(1) le temps, chronométré entre deux nouveaux points discutés, nous permettra de savoir le temps passé sur une idée à la fois ;
10(2) la nouveauté du point discuté, chaque nouveau point à discuter, amené par le coordinateur, étant défini comme un nouvel élément dans la conversation ;
11(3) l’objet de l’information échangée ;
12(4) le mode de représentation de l’information échangée, c’est-à-dire l’ensemble des artefacts utilisés permettant d'expliquer l’information échangée ;
13(5) le support de l’information, soit le logiciel utilisé, ainsi que le support physique employé ;
14(6) la liste des acteurs concernés par ce point de la conversation.
Figure 3 – Les 6 critères de la grille d’observation.
4. Premiers résultats
15Dans la suite de cet article, plusieurs résultats sont présentés, ils sont centrés sur la méthodologie mise en place pour affiner les critères de notre grille, en fonction du cadre expérimental élaboré. L’affinage des 6 premiers critères de cette grille se base uniquement sur une revue de la littérature scientifique. Nos résultats ne portent pas sur le traitement et l’analyse des données collectés par cette grille d’observation. Nous exposons les résultats d’une première analyse qui comprennent la définition de nombreuses sous-catégories, liées à chacun des 6 volets précédents. Ces sous-catégories sont présentées ci-après et justifiées par le biais de plusieurs références scientifiques.
4.1 Affinage de la grille en sous-catégories d’observation
4.1.1 Quel objet de l’information échangée ?
Information concernant le projet de construction (Ip)
16Notre première catégorie concerne le projet constructif. Du fait que notre protocole expérimental ne comporte pas de phase de conception architecturale, la réalisation des maquettes numériques a montré la nécessité de s’approprier le projet constructif par les équipes de modélisation des projets et de détecter de manière progressive, par la confrontation des points de vue, les contradictions entre les documents, le manque d'information et les erreurs identifiées dans les documents. Le but principal des échanges de cette catégorie (Ip) est de s’aligner sur une compréhension commune du projet, avec l’aide du maître d’œuvre du projet (MO), qui a le rôle de décideur final, lors de la synthèse d’un problème de conception du projet. Cette sous-catégorie d’information prend tout son sens dans le cadre des projets BIM, sous contrat traditionnel où la maquette numérique dite de conception n’est pas utilisée pour préparer la phase de chantier. Bourgault (2021) dans sa liste des phénomènes contribuant souvent à la complexité des projets de construction mentionne : les besoins du client parfois imprécis et changeants, provoquant des coûts de changements importants ; le peu d’apprentissage d’ensemble car il y a peu de répétitions ; les risques élevés dus à la nouveauté ; les incertitudes techniques, climatiques et mêmes sociétales ; la complexité de la coordination et des processus décisionnels entre les équipes impliquées ; et les conditions de réalisation changeantes (Bourgault, Danjou, Pellerin & al., 2021). Ceci se confirme dans nos premières analyses. Faisant également suite à plusieurs retours des BIM Managers (Bleyenheuft, Naroura, Gorcea, et al., 2017) dans les entreprises, nous constatons que souvent malgré une stratégie BIM, un plan de déploiement du BIM, la mise en place de protocole BIM, l’intégration d’une classification nationale et la rigueur systématique pour la définition des niveaux de développement (Level of Developments (LOD)) du projet modélisé et informé, ainsi que des procédures de modélisations et parfois des procédures de construction physiques standardisés, nous assistons tout de même à une re-modélisation des maquettes numériques multidisciplinaires, accompagnée des boucles itératives importantes de validation et de changement. Cette évolution du projet en boucle est variable selon la phase du projet et les acteurs concernés, « ... au lieu d’avoir une maquette numérique qui s’enrichit au fur et à mesure du déroulement du processus, nous observons des acteurs qui recréent des maquettes en fonction de leurs besoins spécifiques à chaque phase et à chaque acteur » (Chaudet, 2019). Ainsi, l’information dans cette nouvelle sous-catégorie (Ip) concerne toute indication sur l’aspect constructif du projet, pour comprendre la conception architecturale et tous les aspects techniques du projet, ainsi que les demandes du maître d’ouvrage.
Information pour la modélisation de la maquette numérique (Im)
17Afin de favoriser l’interaction entre les membres des groupes, dans notre protocole expérimental, les maquettes BIM de différentes disciplines sont produites par binôme, puis elles sont assemblées dans une maquette unique, selon un workflow établit dans un protocole BIM par chacun des binômes. Chaque binôme est responsable de sa production vis à vis de l’ensemble du groupe. Les discussions liées aux informations concernant la modélisation comprennent l’ensemble des décisions prises à ce sujet. Des décisions qui sont parfois actées dans le protocole ou le plan d’exécution BIM, ainsi que dans les conventions et procédures de modélisation qui les accompagnent. Ces conventions reprennent les différents éléments et nœuds constructifs, en concertation avec le groupe de travail. Les différentes disciplines de modélisation proposées aux participants sont la structure portante (ST), l’enveloppe (EN), l’ensemble des réseaux des fluides (chauffage, sanitaire et ventilation) (FL), ainsi que l’architecture et le partitionnement intérieur du bâtiment (PI). Une fiche de modélisation par discipline est également mise en place, au début de l’expérimentation, pour s’assurer une compréhension et une validation commune des rôles de chaque binôme, vis-à-vis du groupe. En effet, le Building Information Model est associé à la notion de maquette numérique enrichie d’informations liées au bâtiment (Shepherd, 2019). Donc l’élément à la base du BIM est une maquette 3D regroupant des informations détaillées à propos de toutes les composantes du projet de construction. Shepherd (2019) évoque la nécessité d’un processus de modélisation qui permet la mise en place d’une base de données et d’informations partagées. En d’autres termes, il faut élaborer un mécanisme destiné à générer des informations de construction et à les exploiter, et ce, tant dans la phase de conception que lors de celles de construction et d’exploitation. Shepherd (2019) précise également que dans le BIM niveau 3, le travail collaboratif s’organise autour d’un modèle unique partagé sur un serveur central et qui est alimenté en temps réel par tous les acteurs du projet. Les échanges deviennent alors bidirectionnels et impliquent une dissolution des phases de vie du projet autrefois distinctes. Ainsi les échanges figurant dans cette nouvelle sous-catégorie relative à la modélisation (Im) se focalisent sur le « quoi », le « comment » et le « pourquoi » du processus de modélisation.
Information pour l'exploitation de la maquette (Ie)
18Dans le cadre de notre expérimentation d’un projet BIM, le but du protocole expérimental est de supporter en partie la construction d’un référentiel commun à tous les acteurs, c’est-à-dire une représentation commune et partagée des buts à atteindre en groupe. Cela est rendu possible grâce à la spécification de trois demandes précises des maîtres d’ouvrage des projets: (i) l’estimation du coût de la construction du bâtiment, (ii) l’estimation du coût et la planification de la construction du bâtiment sur chantier et (iii) l’évaluation du coût de fonctionnement du bâtiment. Ces demandes constituent trois missions communes précises à accomplir par l’ensemble des acteurs de chaque groupe, qui nécessite l’exploitation des maquettes BIM. En effet, comme le précise Gronier (2022), le travail collectif repose sur une synchronisation cognitive: les acteurs doivent se mettre d’accord sur l’objectif, sur les plans d’actions, sur les méthodes employées, etc.
19Dans l’expérimentation, l’accent n’est pas mis uniquement sur les caractéristiques de l’objet modélisé mais sur le besoin d‘information que l’objet doit contenir pour satisfaire le besoin du professionnel au moment précis de la conception. En effet, comme précisé dans le concept LOIN (Niveau de Besoin d’Information, selon la norme ISO 19650-1), ce dernier part de la prise de conscience que le degré de précision d’un modèle n’est pas un paramètre absolu mais doit être évalué en fonction de diverses conditions. Les procédures de modélisation comprennent également les spécifications IFC (Industry Foundation Classes, selon la norme internationale ouverte (ISO 16739-1:2018)) à intégrer au modèle BIM des éléments et nœuds constructifs du modèle BIM. Ainsi, les points discutés comprenant des informations sur l’exploitation des maquettes BIM (Ie) se focalisent sur le « quoi », le « comment » et le « pourquoi » des usages BIM. De plus, comme le précise Kubicki (2019), un des usages les plus récurrents du BIM est la coordination BIM des maquettes, qui est nécessaire, pour plusieurs raisons :
-
pour livrer des maquettes « disciplines » en limitant le nombre d’interférences, de doublons, nous parlons de détection des conflits entre les maquettes ;
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pour contrôler la qualité et de la conformité des maquettes (codification des données, classification, présence et remplissage des paramétrage) afin de les rendre tout à fait/plus facilement exploitables ;
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pour répondre aux exigences du protocole BIM, afin d’améliorer le processus de construction et les méthodes de travail mises en place.
20Ainsi, cette catégorie relative à l'exploitation de la maquette (Ie) contient également la sous-catégorie (Id) : Information pour la détection des conflits entre les maquettes.
Information pour l’organisation du travail collectif (Ic)
21Afin de favoriser la coordination au sein des groupes dans le cadre de notre expérimentation, le protocole expérimental proposé ici prescrit les trois phases d’activités suivantes :
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Phase (1) la mise en place d’un protocole BIM. Cette première phase comprend la compréhension et la mise en place de l’ensemble des rôles au sein des équipes, ainsi que la rédaction d’un protocole BIM partagé par les acteurs d'un même projet, comprenant les méthodes de travail définies par chaque groupe afin que ces acteurs puissent préparer au mieux les phases (2) et (3), avec comme modèle de base le protocole BIM Belge du CSTC (2018 et puis 2019).
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Phase (2) la modélisation collaborative de la maquette numérique constructive du bâtiment déjà conçu, en utilisant des logiciels BIM, accompagnée de réunions de coordination et de détection des conflits entre les maquettes « métiers », ainsi que la production de nombreuses représentations du projet (plans, façades, coupes et vues diverses).
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Phase (3) l’exploitation des données partagées dans la maquette numérique, afin d’accomplir les trois missions communes que le maitre d'ouvrage (MOA) leur a prescrit ici, c'est à dire: (i) l’estimation du coût de la construction du bâtiment par les deviseurs (DE), (ii) l’estimation du coût et la planification de la construction du bâtiment sur chantier, par les planificateurs (PL) et (iii) l’évaluation du coût de fonctionnement du bâtiment par les facility managers (FM).
22Même si la phase (3) est distincte de la phase (2), elle peut évoluer en parallèle de cette dernière, selon l’état d’avancement de la modélisation des maquettes, pour une exploitation partielle des données. Par exemple, l’élaboration de la planification 4D du chantier ne nécessite pas forcément que la maquette soit déjà complètement modélisée mais seulement une connaissance de tous les éléments qui seront modélisés et l’établissement d’un planning traditionnel du déroulement chronologique de la construction du bâtiment. Ces trois phases influencent la façon dont le travail collectif s’organise. En fonction des objectifs et des livrables de chaque phase, les échanges sont liés à la façon de s’organiser, aux échéances, aux procédures à suivre, aux méthodes employées, ainsi qu’aux conseils formulés et aux problèmes organisationnelles et humains rencontrés au sein de l’équipe. En effet, le manque de coordination efficace entre les intervenants d’un projet peut impacter la gestion de l’information (Forgues, Carignan, Forgues & Ben Rajeb, 2016). Les trois phases s'alignent à ce qui est fait le plus souvent dans les agences et entreprises et à ce qui est généralement préconisé dans divers guides de gestion BIM (par exemple dans le BIM Planning Guide de Penn State). L’organisation du travail collectif peut comprendre une approche essais/erreurs et des boucles de tests d’exploitation des données avec des maquettes non complètes. Les workflows de modélisation et d’exploitation des données font partie des guides, chartes et protocoles BIM élaborés par les équipes de projet. Ce travail collectif de préparation de l’activité est discuté en réunion de coordination, ainsi l’information dans cette catégorie d’information concerne l’organisation du travail collectif (Ic), qui évolue de phase en phase.
Information pour l'appropriation des logiciels BIM par les acteurs (Io)
23Cette dernière catégorie comprend tous les échanges liés aux questionnements relatifs aux logiciels numériques utilisés par les acteurs, peu importe la catégorie du logiciel BIM. Les différentes catégories seront détaillées plus loin dans l’article. Ces échanges comprennent des explications de fonctionnalités et/ou du fonctionnement d’un logiciel BIM, les possibilités offertes par le logiciel de réaliser certaines activités, ainsi que des remarques de tout genre sur le logiciel, problèmes et difficultés d’usage rencontrés. Nous retrouvons également dans cette catégorie, les échanges de procédés de bonnes pratiques, de connaissances et du savoir-faire, ainsi que le partage d’information entre les participants sur les sources d’information disponibles pour se former ou mieux apprendre un tel ou tel logiciel. D’après Buildwise (2021), il existe de nombreux logiciels ayant des fonctionnalités différentes et ils varient selon les besoins en production et selon les phases du projet, cette catégorie prend son sens tout au long du projet et des réunions de coordination. Cette catégorie relative à l’appropriation des logiciels par les acteurs (Io) est impactée d’un côté par le niveau de maturité des participants d’un groupe (GR), en terme de connaissance des logiciels BIM, et de l’autre par la différence du niveau de maturité entre les membres du même groupe.
4.1.2 Quel mode de représentation de l’information échangée ?
24La maquette BIM est la maquette numérique 3D dans laquelle est insérée ou sera insérée de l'information (Sattler, 2021). Ici, la maquette BIM est étendue à l’ensemble de ses modes de représentation, soit toutes apparitions/visualisations de la maquette numérique sur tous supports logiciels pendant la réunion (Image, Coupe, Plan, Vues/extraits de la maquette numérique ou croquis de celle-ci), Bimtrack et Revizto [Plateformes de coordination intégrant des viewers IFC], REVIT, ARCHICAD [Logiciels de modélisation], Navisworks, BIMcollab ZOOM, Solibri checker [Logiciel pour le contrôle, la détection de conflits et l’exploitation des données], Autodesk BIM 360 [Plateforme de gestion d’un projet collaboratif], etc. A cette maquette BIM viennent s’ajouter d’autres artefacts plus traditionnels, des croquis, d'esquisses, de plans, de coupes, de vues perspectives ou axonométriques réalisés à l’aide un logiciel CAD ou à main levée, ainsi que des maquettes 3D (non BIM). Enfin, il est possible que l’information échangée n’ai aucun mode de représentation graphique. Les logiciels BIM évoluent terriblement vite sur le marché (Gilles Balmisse, 2022) même si un grand nombre de logiciels est maîtrisé et préconisé dans le cadre du projet, il était libre aux participants d’expérimenter des logiciels au choix. La catégorie (5), concernant le support physique (matériel informatique), est étudié directement en lien avec les modes de représentation définies et l’objet de l’information. L’analyse purement technique des logiciels ne fait pas partie de notre recherche.
Figure 4 – Modes de représentation de l’information échangée.
4.1.3 Quels acteurs concernés par l’échange ?
25Davies et al. (2017) ont classé les rôles spécifiques au BIM, en quatre groupes principaux dont deux rôles de projet (gestionnaire du projet BIM et coordinateur BIM) et des rôles organisationnels (modélisateurs BIM et gestionnaire interne BIM). Dans leur étude exploratoire, Boton et Forgues (2018) identifient les responsabilités d’un gestionnaire/coordinateur BIM. Même si ces responsabilités varient d’une discipline à l’autre (Boton & Forgues, 2018), certaines similitudes existent comme/concernant : 1) la gestion du contenu des modèles numériques ; 2), le contrôle qualité des modèles numériques, 3) la coordination 3D, comprenant l’acquisition des modèles et leur intégration ensemble, la détection des collision intra et interdisciplinaire ; 4) la planification et l’organisation du travail pour l’ensemble de l’équipe ; 5) les inspections visuelles des modèles, 6) la gestion et la correction des avertissements d’erreurs ; etc. De plus, « pour disposer de cet avatar numérique, il faut l’alimenter et le mettre à jour. Tout le monde, hormis les ouvriers sur le chantier pour le moment, est appelé à participer à ce jeu d’écriture. » (Chaudet, 2019, p.12). Cette mise à jour du modèle est une des activités principales des modélisateurs BIM. Un coordinateur BIM est parfois désigné du côté de la maîtrise d’ouvrage, de la direction du système d’information et de l’organisation, parfois du côté de l’entreprise générale et parfois du côté du bureau d’architecture. Afin de prendre en compte la pluridisciplinarité des acteurs dans un projet de construction mené en BIM, une approche multi-rôles de modélisation et de coordination est mise en place dans le cadre expérimental.
26Ensuite, pour répondre aux nombreux usages BIM (CSTC, 2021), l’exploitation des données des maquettes BIM permet de visualiser les objets composants la maquette en fonction de l’identification de leurs paramètres, d’interroger la maquette en formulant des requêtes et d’enrichir les données (Sattler, Lamouri, Larabi et al., 2020). L’échange d’information n’est pas qu’une question purement technique et il dépend également des interactions et des dispositions humaines (Sattler, 2020). Enfin, une information n’a de sens que si elle est partagée avec les parties prenantes du projet (Boton, Rivest, Ghnaya, et al., 2021) et l’information reçue est utile quand elle apporte une réponse aux besoins formulés par les acteurs, pour l’aboutissement des missions d’évaluation de la construction ou autres (Rahhal, Ben Rajeb & Leclercq, 2022) d’où la nécessité de ne pas se limiter à des rôles de modélisation et de coordination BIM et de spécifier des rôles d’exploitation. Par conséquent, chaque intervenant endosse au sein de son équipe au minimum deux des trois rôles bien précis : (i) un rôle de modélisateur de la maquette BIM du projet, (ii) un rôle d’exploitation des données de la maquette BIM en fonction des missions (deviseur, planificateur des travaux et facility manager) et (iii) un rôle de coordination technique et organisationnelle. Des rôles supplémentaires sont également adoptés par les encadrants de l’expérimentation, tels que un maître d’ouvrage, un architecte concepteur du projet.
27Enfin, cette catégorie (6) de la grille repose sur les concepts de bases de la théorie de l’information (Shannon & Weaver, 1949) où le message communiqué, apportant de l’information, circule d’un émetteur à un récepteur. L’émetteur est la source de l’information, celui qui demande, dans notre cas c’est le coordinateur BIM. Le récepteur désigne le destinataire du message, la personne à qui est adressée la demande (récepteur visé par la demande). La demande peut être aussi adressée à l’ensemble du groupe, formé par tous les membres de l’équipe, présents à la réunion de coordination BIM. Nous élargissons ces deux aspects, à un troisième aspect qui prend en compte la notion d’interaction à la demande, qui est une évolution depuis le modèle de Shannon et Weaver (1949). Cette notion est définie comme réaction intentionnelle à la situation initiale, donc au message communiqué par le coordinateur BIM (CO), peu importe le récepteur à qui est adressé la demande. L’interaction n’est pas un échange de messages successifs mais l’influence réciproque que les partenaires exercent les uns sur les autres, lors d’un point discuté, selon le modèle interactif de la communication de X. Riley et X. Riley (1951) (dans Picard, 1992). Par exemple, quand une demande est formulée par une personne à une deuxième personne, une troisième personne peut interagir à la demande en formulant une réponse (récepteur exposé au message). Nous prenons bien en compte l’aspect interactionnel d’un message, une réponse étant définie comme l’ensemble des réactions du récepteur exposé au message ou visé par le message. En résumé, les trois parties constituantes de notre modèle de communication sont l’émetteur, le récepteur visé par le message et le récepteur exposé au message. Si le récepteur visé est le groupe, il n’y a pas de récepteur exposé et si le récepteur visé est une personne, le récepteur exposé est alors le reste du groupe.
Figure 5 – Proposition schématique illustrant la communication interactionnelle entre 3 types d’acteurs concernés par l’échange de groupe (adapté du modèle interactif de communication de Riley et Riley).
Figure 6 – Schéma de synthèse de toutes les sous-catégories d’observation.
4.2 La visualisation des échanges entre acteurs
28Vu le nombre important de sous-catégorie observées, de rôles et de groupes de projet et par conséquent de données à analyser et à comparer, il s’avère nécessaire d’amener une visualisation qui facilite la compréhension des échanges entre les acteurs. Cette visualisation croise les données encodées de l’ensemble des critères retenus, ainsi que de leurs sous-catégories. Nous retenons pour cette visualisation :
-
les différents objets de l’information ;
-
la maquette numérique comme mode de représentation principale ;
-
les acteurs concernés par les échanges.
29Ensuite, la schématisation de ces échanges est fidèle au modèle interactif de communication de Riley et Riley, illustré à la figure 5, décliné pour englober l’ensemble des échanges. Cette schématisation est nécessaire pour pouvoir identifier les interactions et leurs importances, pouvoir quantifier et qualifier les échanges visuellement, selon le rôle de l’acteur et selon le groupe, ainsi que de créer des liens avec les caractéristiques de l’information échangée. Afin de rendre cette schématisation possible, un script en JavaScript a été développé à l'issu de nos premiers traitements, donnant ainsi un sens graphique, et donc des résultats plus facilement analysables pour notre approche descriptive et interprétative de la situation observée. Les schémas produits grâce à cet script résultent d'un traitement de notre grille d’observation et d'un encodage en tableau à double entrée calculant également le nombre d'occurrences relatifs aux échanges qui ont eu lieu. Ces schémas comprennent : des cercles représentant les acteurs à travers leurs rôles, des flèches pleines représentant les messages formulés, avec leurs pourcentages du total, des flèches pointillées représentant les réponses formulées, avec leurs pourcentages du total et trois niveaux de couleur, du bleu ciel au bleu foncé, permettant de mettre en évidence visuellement les échanges les plus importants (< 10%, de 10 à 20%, 20%). Ainsi, grâce à cette schématisation, nous visons à apporter une caractérisation visuelle des échanges d’information, en modélisant les flux réels des échanges en réunion de coordination.
Figure 7 – Exemples de schémas réalisés, illustrant le type de visualisation schématique des échanges en réunion de coordination BIM, entre les acteurs d’un projet. De gauche à droite, pour un des groupes observés : Qui demande, qui reçoit ? Qui demande, qui répond (récepteur visé) ? Qui demande, qui répond (récepteur exposé) ?
5. Conclusion
30Dans ce travail de recherche, nous proposons une méthodologie pour observer et visualiser les échanges lors des réunions de coordination d’un projet mené en BIM. En se basant sur une revue de littérature scientifique et sur un cadre expérimental mis en place, nous avons identifié plusieurs critères et catégories afin de composer une grille d’observation et d’encodage de ces moments d’échange dans le cadre de réunions de coordination. Nous nous sommes également appuyés sur un modèle de communication interactif afin de proposer une visualisation graphique et schématique des données encodées dans notre grille. Le but final de notre approche étant de faciliter le traitement des données récoltées 1/ dans le cadre d’une question de recherche plus large sur la caractérisation des échanges et 2/ dans le cadre de méthode organisationnelle de gestion de l’information à adopter/adoptée dans une collaboration BIM et pour un usage défini.
31Les résultats de notre travail se limitent à un cadre expérimental en raison de la complexité de ce type d’observations en entreprise. Certaines adaptations dans la méthode d’observation peuvent s’avérer nécessaires pour la transposer au milieu professionnel. Par ailleurs, l’observation des logiciels utilisés peut sembler assez sommaire mais il est important de prendre en compte que les logiciels numériques sur le marché de la construction présentent une évolution très rapide par rapport aux méthodes de travail mises en place dans le secteur de la construction. Un autre point pourrait être soulevé, relatif la maquette BIM (sur laquelle s'appuie notre grille d'analyse). Celle-ci est considérée comme un object collectif intermédiaire (« boundary object », Jeantet, 1998 ; Star & Griesemer, 1989), mais elle peut être affinée en prenant en compte de manière séparée chacun des artefacts produits par cette même maquette BIM.
32Dans les perspectives de ce travail, nous retrouvons plusieurs volets comme le développement des catégories d’observation sur le rôle de l’échange et de son utilité, qui font partie de la suite de notre travail doctoral, ainsi que sur les liens entre les méthodes d’échange décrites dans les protocoles BIM et celles réellement mises en place, y compris le retour sur les problèmes et obstacles rencontrés lors ces échanges. Certaines verbalisations seront également encodées à une granulométrie plus fine, pour certains points où les échanges s’avèrent plus complexes ; par exemple, s’ils contiennent plusieurs objets d’information, ou s’ils durent relativement plus longtemps que d’autres points de la réunion, avec de nombreuses interactions nécessaires afin d’aboutir à une prise de décision. Enfin, la schématisation proposée des échanges évoluera également en intégrant l’ensemble des critères retenus, soit à l’aide de filtres visuels des données, soit avec une proposition de superposition de différentes couches des données liées, comme l’objet, la forme, le rôle de l’information, etc. Pour la généralisation et la validation de nos résultats à plus long terme, il serait également possible de confronter toutes les hypothèses mises en avant, grâce à cette étude, à des interviews qui pourraient être réalisés dans une entreprise impliquée dans les processus BIM et concernés directement pas ce besoin de coordination de l'information utile lors des phases d’avant-projet détaillé et/ou de préparation de l’exécution.
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Pour citer cet article
A propos de : Anabelle Rahhal
Université de Liège
a.rahhal@uliege.be
A propos de : Samia Ben Rajeb
Ecole Polytechnique de Bruxelles
A propos de : Pierre Leclercq
Université de Liège