Bulletin de la Société Géographique de Liège Bulletin de la Société Géographique de Liège -  63 (2014/2) - Varia 

L’émergence du concept de transition énergétique. Quels apports de la géographie ?

Kévin Duruisseau

Aix-Marseille Université – UMR TELEMME – CNRS

kevin.duruisseau-amu@orange.fr

Résumé

Le système énergétique dominant est confronté à deux limites inhérentes à ses propriétés : la raréfaction des énergies fossiles et fissiles conventionnelles et le réchauffement climatique. Il est également confronté à une hausse soutenue de la demande énergétique mondiale. Ces éléments contraignent le système à une nouvelle transition énergétique. Le concept émergent de transition énergétique devient un objet de recherche pour la géographie. L’objectif de cet article est de caractériser les apports de la géographie dans la construction du concept à travers les prismes spatiaux et scalaires de la géographie.

Index de mots-clés : énergies renouvelables, Multi-Level Perspective, système socio-technique, territorialisation, transition énergétique

Abstract

Energy system is confronted with two limits attached to its attributes: depletion of fossil and fissile energies and the global warming. It is also confronted with a sustained increase in the world’s energy demand. These elements force the system to a new energy transition. The emerging concept of energy transition is becoming a research problem for the geography. The aim of this paper is to characterize the place of geography in the construction of this concept from the point of view of space and geographical scales.

Index by keyword : energy transition, Multi-Level perspective, renewable energies, socio-technical system, territorialization

I. Introduction

1Le système énergétique dominant est confronté à deux limites inhérentes à ses propriétés : la raréfaction des énergies fossiles et fissiles conventionnelles à long terme (Battiau, 2008 ; Deshaies et Baudelle, 2013) et le réchauffement climatique (Merlin, 2008 ; Tsayem-Demaze, 2009, 2011). Ces propriétés, la hausse soutenue de la demande énergétique mondiale – due à l’effet combiné de la croissance démographique et au développement des pays émergents et des Suds – ainsi que le maintien à un niveau élevé de la consommation énergétique des pays du Nord, nous interrogent sur la durabilité de notre système et, plus largement sur la durabilité de notre modèle de développement.

2L’idée de la nécessité d’un changement de modèle de développement n’est pas récente. Elle a commencé à prendre forme en Occident, à la fin des années 1960, à travers les réflexions du Club de Rome débouchant à l’époque sur la publication d’« Halte à la croissance » (1972). À la même époque, un début de mobilisation internationale institutionnalisée par la conférence de Stockholm (1972) marque la prise de conscience, à l’échelle des politiques mondiales, de la nécessité d’un changement de modèle (Tsayem-Demaze, 2009, 2011). Cependant, il faut attendre la publication de « Notre avenir à tous » (1987) puis la conférence de Rio (1992) pour assister à la large diffusion de la nécessité d’un changement de modèle de développement (Jégou, 2007b, Brunel, 2009). Le développement durable, se substituant à l’écodéveloppement (Sachs, 1977), s’impose alors progressivement dans les discours et comme objet de recherche de la géographie (Jégou, 2007a). Malgré l’entrée en crise du concept (Theys, 2014), la réflexion sur la durabilité de notre modèle de développement et en particulier sur la durabilité de notre système énergétique révèle la diffusion du concept. La conscientisation de la question énergie-climat conduit à penser le développement des énergies nouvelles renouvelables (EnR) et l’amorce d’une nouvelle transition énergétique (Brücher, 2008 ; Smil, 2010 ; Fouquet et Pearson, 2012 ; Defeuilley, 2014). Cette transition énergétique doit déboucher sur un système énergétique durable. Dans le contexte européen, marqué par une forte dépendance énergétique et une insécurité des approvisionnements, s’ajoute la recherche d’une indépendance énergétique (Keppler, 2009).  

3L’objectif de cet article est de caractériser les apports de la géographie dans la construction du concept de transition énergétique. Nous nous intéresserons aux questions spatiales et scalaires dans un cadre européen en étudiant la territorialisation (Douillet, 2003 ; Reghezza-Zitt, 2012) du système électrique. Nous nous proposons également de montrer la possible utilisation par la géographie du Multi-Level Perspective (MLP) (Rip et Kemp, 1998 ; Geels, 2002, 2005, 2010) comme outil pertinent de son étude. Nous montrerons, tout d’abord, que nos sociétés occidentales ont déjà connu plusieurs transitions énergétiques au cours de leur histoire et réaliserons, ensuite, un état des lieux des recherches sur le concept de transition énergétique en montrant la place que peut prendre la géographie dans celles-ci. Nous définirons, enfin, la territorialisation du système électrique et des EnR comme une des conditions de la durabilité de la transition énergétique.

II. Les transitions énergétiques dans l’histoire : une approche pour appréhender la transition énergétique en cours ?

4Le développement durable doit générer un nouveau modèle de développement ainsi qu’un nouveau système énergétique capable de résoudre « l’équation de Johannesburg » (Chevalier, 2004). Un système énergétique est « la combinaison originale de diverses filières de convertisseurs qui se caractérisent par la mise en œuvre de sources d’énergie déterminées et par leur interdépendance » (Debeir et alii, 2013). Tout système énergétique se caractérise par une élasticité technique, des résurgences de technologies anciennes, une concurrence entre les filières et une variation de son aire géographique d’approvisionnement. Le nouveau système énergétique nécessite une transition que tout le monde s’accorde à nommer transition énergétique. Nous pouvons définir une transition comme le passage d’un état de chose [initial] à un autre [à venir]. Dans le cas de la transition énergétique émergente, l’état initial correspond à un système énergétique carboné limité en ressources tandis que l’état à venir correspond à un système énergétique décarboné durable. Une telle transition ne pourra se limiter à un ensemble de substitutions énergétiques. Elle prendra la forme d’un ensemble de ruptures majeures dans le système socio-technique actuel – que nous définissons comme les « relations entre les systèmes techniques et l’ensemble de ce qui est généralement entendu sous le vocable de « contexte » ou d’« environnement », et qui va de l’organisation sociale aux représentations du monde physique et naturel, en passant par les modèles culturels » (Akrich, 1989) – et de substitutions énergétiques. Nous pensons, avec Fouquet (2010), que l’étude des transitions énergétiques dans l’Histoire constitue un cadre d’analyse pertinent de cette transition énergétique.

A. Les transitions énergétiques-ruptures dans l’Histoire

5Nous proposons de qualifier de transition énergétique-rupture les transitions énergétiques correspondantes à des substitutions énergétiques majeures et à des ruptures d’ampleur dans le système socio-technique. Smil (2010) identifie dans l’Histoire deux transitions énergétiques majeures que nous classons dans cette catégorie : [1] la transition combinée du passage des énergies biomasses aux énergies fossiles et du passage de la force animale à la force mécanique ; [2] l’invention puis la diffusion de l’énergie électrique. Leur diffusion mondiale s’est étalée sur plusieurs siècles et se poursuit actuellement dans certaines régions du monde. En effet, ces deux transitions se sont réalisées dans les pays du Nord au cours des révolutions industrielles successives mais n’ont été amorcées que dans la seconde-moitié du 20e siècle dans les pays émergents et des Suds.

6Pour la première, le passage progressif, au cours des révolutions industrielles, des énergies biomasses aux énergies fossiles fait intervenir de multiples facteurs. Dans une étude de cette transition au Royaume-Uni, Solomon et Krishna (2011) ont pu identifier ces facteurs : il s’agit d’un ensemble de processus combinés liés à l’urbanisation, au commerce, aux innovations technologiques et à la découverte d’importants gisements de charbon. Cette transition énergétique « a aussi été la réponse aux défis pressants de pénuries répétées d’énergie, de terres, de ressources » (Debeir et alii, 2013). Le choix du Royaume-Uni comme terrain d’étude est pertinent car c’est le premier pays au monde à avoir connu la Révolution Industrielle faisant ainsi émerger une société dont les caractéristiques se diffuseront dans tous les pays du Nord. C’est également dans ce pays que se sont développées l’ensemble des technologies énergétiques associées. Fouquet (2010) a également analysé cette transition à travers les utilisations des ressources énergétiques (chauffage, énergie, transport et éclairage). Il a pu identifier près de quatorze substitutions énergétiques et ainsi démontrer que les deux facteurs les plus importants de cette transition énergétique furent la capacité à fournir des services énergétiques à meilleur prix et de meilleure qualité. Il a montré également que la réalisation de ces caractéristiques dépend obligatoirement d’une chaîne d’innovations technologiques et énergétiques concomitantes.

7Pour la seconde, l’invention puis la diffusion de l’énergie électrique, principalement dans les pays du Nord au cours du 20e siècle, s’expliquent par trois facteurs : [1] une efficacité énergétique supérieure aux énergies fossiles ; [2] une meilleure productivité ; [3] et une réelle flexibilité dans ses utilisations domestiques et industrielles (Smil, 2010). Smil (2010) a identifié également deux phases distinctes dans cette seconde transition énergétique-rupture. La première, qui a eu les conséquences les plus importantes, est l’utilisation massive d’énergies fossiles pour générer l’énergie électrique. La seconde est l’apparition et le développement, progressivement, d’un mix-énergétique diversifié pour générer l’énergie électrique. Dans cette seconde phase, l’électricité n’est plus uniquement produite à partir d’énergies carbonées mais aussi à partir d’énergies décarbonées.

8Loin d’être restreinte à des substitutions énergétiques successives et à des changements de « paradigme technologique » (De Brandt, 2002), ces deux transitions sont des « processus de changement multidimensionnels relatifs aux technologies, aux marchés, aux industries, aux politiques mais aussi aux valeurs et comportements » (Jaglin et Verdeil, 2013). Elles s’inscrivent donc bien dans ce que nous avons appelé une transition énergétique-rupture. Elles incluent des ruptures du système socio-technique qui ont fait muter une société rurale et proto-industrielle en une société urbaine et industrielle. De telles transitions ne peuvent s’inscrire que dans une longue durée.

B. Les transitions énergétiques-substitutions dans l’Histoire

9Se distinguant des transitions énergétiques-ruptures, par une absence de rupture du système socio-technique et une inscription dans le système énergétique dominant, les transitions énergétiques-substitutions se caractérisent par l’introduction de nouvelles énergies, des technologies associées combinées à des réajustements du système socio-technique dominant. Une courte durée suffit à ce que ces nouvelles énergies entrent en concurrence ou se substituent aux énergies du système énergétique initial.  

10Depuis les années 1990, nous assistons à une multiplication d’études sur des transitions énergétiques-substitutions dans l’Histoire, toutes amorcées après la Seconde Guerre mondiale. À titre d’exemple, nous pouvons évoquer le passage du charbon et pétrole au gaz naturel, aux Pays-Bas, à la suite de la découverte du gisement de Groningen en 1959 (Van Der Woude, 2003 ; Verbong et Geels, 2007 ; Solomon et Krishna, 2011) ou bien encore le choix de la France de développer une filière électronucléaire dans les années 1970 en réponse à son niveau élevé de dépendance au pétrole (Ikenberry, 1986 ; Taylor et alii, 1998 ; Solomon et Krishna, 2011 ; Evrard, 2013). Cette transition énergétique-substitution française doit sa réussite à un environnement politique favorable, des ressources financières disponibles considérables et une réelle maîtrise technologique, dans le contexte du premier choc pétrolier qui révélait la dépendance énergétique française. Pour atténuer cette dépendance, l’État lança, en 1974, un programme électronucléaire et facilita sa mise en œuvre par l’entreprise publique Électricité de France. Les programmes successifs ont donné ses principales caractéristiques actuelles au système énergétique français (Figure 1) et plus particulièrement à son système électrique (Figure 2). De cette transition, a découlé une décarbonisation involontaire du mix-électrique français réduisant la portée de l’injonction climatique pour la France. Notons que les transitions énergétiques-substitutions se sont toutes réalisées dans un cadre national s’appuyant sur une ressource et/ou une culture technologique nationale spécifique. Des choix politiques nationaux forts et des fonds considérables ont permis leur accomplissement sur une courte durée en développant massivement des technologies émergentes.

Figure 1. Évolution du mix-énergétique français entre 1973 et 2013 (en Mtep)

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Figure 2. Évolution du mix-électrique français entre 1973 et 2013 (en %)

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C. Transitions énergétiques dans l’Histoire et espace

11La Révolution Industrielle a nécessité et permis le passage, sur une longue durée, d’un système agro-énergétique à un système industrialo-énergétique aux conséquences spatiales majeures. Ce passage marque : [1] la fin du primat des énergies biologiques au profit des énergies fossiles (Debeir et alii, 2013) et [2] donc l’abandon progressif de sources énergétiques diffuses, à faibles densités, au profit de sources énergétiques concentrées, à fortes densités (MacKay, 2009). La Révolution Industrielle correspond donc au passage d’une energy from space à une energy for space (Brücher, 2001, 2008).

12Le système agro-énergétique pré-industriel reposait exclusivement sur des sources énergétiques dépendantes de l’énergie solaire pour lesquelles la quantité d’énergie produite est proportionnelle à l’aire d’approvisionnement, soit la surface terrestre irradiée. Les capacités de transport, et donc d’importation des ressources, étant limitées, l’énergie est produite, alors, à partir de ressources locales ce qui limite les concentrations de population (Deshaies et Baudelle, 2013). Cela se traduit, pendant la période de proto-industrialisation, par une dispersion des industries au fil de l’eau et dans les forêts, au plus près des sources énergétiques (Debeir et alii, 2013).

13Le système industrialo-énergétique se caractérise par une double concentration : [1] une concentration des lieux de production d’énergies fossiles et fissiles à haute densité et [2] une concentration des lieux de consommation. Ce système repose donc sur l’établissement de réseaux de transport d’énergie performants liant lieux de production et de consommation. Son efficacité n’est plus « tributaire de la surface de production locale [mais repose sur] la capacité de la société à accéder aux gisements d’énergie fossile locaux ou éloignés » (Deshaies et Baudelle, 2013). L’émergence successive de nouvelles filières énergétiques, au cours de transitions énergétiques-substitutions ont accru l’aire d’approvisionnement du système.

14Les transitions énergétiques-ruptures et les transitions énergétiques-substitutions se différencient par leur intensité et leur temporalité. Si les premières conduisent à des ruptures majeures du système socio-technique, les secondes conduisent à des réajustements du système socio-technique. Les premières relèvent d’un mouvement global complexe tandis que les secondes relèvent, dans toutes les études recensées, d’une volonté politique nationale assumée. Nous pouvons nous interroger sur la pertinence d’utiliser cette typologie des transitions énergétiques dans l’Histoire comme cadre d’analyse du concept de la transition énergétique. Les mutations prévisibles qui semblent affecter ou devoir affecter le système socio-technique dans la transition énergétique en cours montrent qu’aux gradients d’intensité et de temporalité, il faudra ajouter un gradient scalaire pour appréhender le concept dans sa globalité.   

III. La transition énergétique en cours : définitions, courants et modèle

15Si le terme de « transition énergétique » a été forgé au tournant des années 1980 dans le monde germanophone (Krause et alii, 1980), il faut attendre le début des années 2000 pour assister à une multiplication des travaux sur celle-ci (Coenen et alii, 2012) et plus particulièrement sur « les mécanismes et les phases de changement sociotechnique » (Jaglin et Verdeil, 2013) nécessaires à sa réalisation. Ce concept émergent présente une polysémie générant des modèles de transition opposés et inconciliables.

A. Définitions et dénominations du concept : une approche scalaire

16Nous avons sélectionné plusieurs définitions de la transition énergétique en cours que nous avons renvoyées, quand cela était possible, à un niveau scalaire de référence (Figure 3). En effet, Smil (2010) la définit, de manière générique, sans référent scalaire comme « change in the composition (structure) of primary energy supply, the gradual shift from a specific pattern of energy provision to a new state of an energy system » (Smil, 2010). Rojey (2008) la définit également sans référent scalaire comme « le passage qui va nous amener d’un modèle basé aujourd’hui à 80 % sur les énergies fossiles vers un nouveau modèle énergétique, dans lequel les énergies non carbonées seront dominantes » (Rojey, 2008). Bigot (2013) la définit, quant à lui, à l’échelle mondiale. Elle s’appuie pour lui sur « le tryptique « sobriété, efficacité et décarbonisation » […] [et] requiert de passer d’un modèle mondial basé à plus de 80 % sur l’usage des énergies fossiles qui s’épuisent vers un modèle où domineront de manière complémentaire les énergies renouvelables et nucléaires » (Bigot, 2013). Bouchard (2009) la définit, explicitement, à l’échelle nationale, dans le contexte des petits États et territoires insulaires (PETI), comme « le passage du régime énergétique ancien (ou préénergies fossiles) à un régime énergétique nouveau (ou posténergies fossiles) » (Bouchard, 2009). David (2011) présentant les travaux de l’association française NégaWatt, la définit, également, à l’échelle nationale comme l’activation simultanée de « trois leviers – sobriété énergétique, efficacité énergétique et développement des renouvelables […] [permettant d’] aller vers la satisfaction durable des besoins d’énergie de la France, en se passant à termes de toutes les ressources primaires non renouvelables » (David, 2011). Bourez (2013) la définit explicitement, à l’échelle locale dans le contexte des territoires ruraux de l’Ardèche comme un ensemble d’évolutions « des pratiques, des technologies, des économies et des politiques » (Bourez et alii, 2013). S’ajoutant aux différences de niveaux scalaires de références, d’autres facteurs telles la temporalité, la composition du mix-énergétique et les répercutions socio-économiques différencient fortement ces définitions.

Figure 3. Les références scalaires des définitions de la transition énergétique

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17Si la variété des définitions du concept est faible, le nombre de dénominations est, quant à lui, très important. Nous tenterons ici de les présenter en les rapportant à un niveau scalaire (Figure 4). Ainsi, Bradshaw (2010) s’interroge sur les voies à suivre pour assurer la sécurité des approvisionnements, répondre à une demande énergétique croissante et générer un système énergétique décarboné à l’échelle mondiale, nommant cette transition « global energy dilemmas ». À la même échelle, c’est sous la dénomination de « troisième révolution industrielle » que Rifkin (2012) présente les cinq piliers de la transition énergétique. Chevalier, Derdevet et Geoffron (2012) utilisent la dénomination « nouvelle frontière » pour définir la gageure de construire des systèmes énergétiques sobres et renouvelables. À l’échelle régionale et nationale, les travaux de Deshaies (2006, 2007) sur la problématique « énergie et environnement » peuvent être identifiés comme des études portant sur la transition. À l’échelle nationale et locale, c’est la dénomination de « croissance verte » qui est utilisée dans de multiples travaux, la croissance verte apparaissant comme une mise en œuvre du concept de développement durable associé à celui de transition énergétique (Crifo et alii, 2012 ; Chevalier, 2013). À l’échelle locale, de nombreux travaux de prospective et d’analyse d’expérimentations utilisent le terme de « transition postcarbone » pour décrire des villes ou des sociétés postcarbones (Allio et alli, 2013 ; Emelianoff et Mor, 2013 ; Theys et Vidalenc, 2013). Jaglin et Verdeil (2013) préfèrent, quant à eux, le terme de « changements énergétiques » à celui de transition énergétique. Toujours à l’échelle locale, c’est sous le terme de « transition vers le facteur 4 » qu’un certain nombre de travaux identifie la transition énergétique dans les territoires (Mor, 2011 ; Chanard et alii, 2011 ; Baratier et alii, 2013).

Figure 4. Les références scalaires des dénominations de la transition énergétique

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B. Les deux courants du concept : transition faible et transition forte

18Si la polysémie peut provenir de l’échelle à laquelle on essaie de définir le concept, elle découle surtout des différentes conceptions développées sur le degré de bouleversement qu’elle impliquera dans nos sociétés. En effet, à l’image des travaux sur le développement durable qui opposent une durabilité faible à une durabilité forte, ceux sur la transition énergétique émergente opposent, quant à eux, une transition faible à une transition forte. L’activité économique pouvant être définie comme l’utilisation d’un capital qui se compose d’un capital naturel et d’un capital construit, la durabilité pose la question de la substitution du capital naturel par le capital construit. Pour les tenants de la durabilité faible, cette substitution est possible tandis que pour les tenants de la durabilité forte, cette substitution est imparfaitement réalisable voire impossible (Mancebo, 2007).

19Si la question du degré de substitution entre capital naturel et construit constitue le point de divergence entre tenants de la durabilité faible et tenants de la durabilité forte, c’est la question du degré de confiance accordé à la technique pour résoudre l’équation énergétique qui constitue le point de divergence entre partisans d’une transition faible et partisans d’une transition forte. Nous proposons d’assimiler la transition faible aux transitions énergétiques-substitutions et la transition forte aux transitions énergétiques-ruptures. Les partisans d’une transition faible postulent qu’une simple substitution d’énergies de stock par des énergies de flux est possible. Grâce à de multiples innovations technologiques, l’émergence d’un mix-énergétique décarboné ou renouvelable permettra au modèle de développement et au système énergétique dominants de perdurer (Rojey, 2008 ; Safa, 2013). Les partisans de la transition forte pensent qu’au-delà de la simple substitution d’énergies de stocks par des énergies de flux, de profonds changements socio-techniques accompagneront nécessairement la transition (Dubois, 2009 ; Rumpala, 2010, 2013 ; Raineau, 2011). Notre travail s’inscrit dans cette dernière conception.

20La transition énergétique émergente doit conduire notre société à passer d’un système énergétique carboné, à ressources finies à forte densité énergétique, à un système énergétique décarboné, exploitant des ressources à « faible densité énergétique ». La pression démographique impose également une baisse importante de la consommation d’énergie par habitant. Les incertitudes des évolutions technologiques ne permettent pas de prédire la construction d’un système énergétique dans lequel lieux de production et de consommation se confondraient. Ces trois évolutions du système énergétique se feront sur la longue durée en trois phases successives (Figure 5) : [1] une phase de déstabilisations du système dominant à forte inertie sous la pression des contraintes énergie-climat globales ; [2] une phase de mutations du système dominant caractérisée par des ruptures majeures du système socio-technique incluant des substitutions énergétiques ; [3] et une phase de stabilisations d’un nouveau système durable qui s’imposera comme le nouveau système énergétique dominant. Nous nous situons actuellement dans la première phase.

Figure 5. Les trois temps de la transition énergétique en cours

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C. Le Multi-Level Perspective (MLP) : un modèle pertinent pour la géographie dans l’analyse de la transition énergétique ?

21La transition énergétique « doit conduire à une profonde refonte des systèmes sociotechniques énergétiques » (Jaglin et Verdeil, 2013). Ce concept de « système socio-technique » (Akrich, 1989) s’est construit sur ceux de « régime technologique » (Nelson et Winter, 1977) et de « système technique » (Rip et Kemp, 1998). Le concept de régime technologique codifie les règles formelles et informelles régissant la production, en s’intéressant aux groupes sociaux impliqués dans la production. Le concept de système socio-technique intègre au régime technologique d’autres groupes sociaux extérieurs au monde de la production mais interagissant entre eux et avec lui.

22Un certain nombre de travaux récents ont essayé de modéliser différentes transitions sociotechniques (Van den Bergh et alii, 2011). Parmi ceux-ci, le modèle du MLP apparaît comme pertinent pour la construction du concept de transition énergétique en géographie (Rip et Kemp, 1998 ; Geels, 2002, 2005, 2010). Cet outil d’analyse, utilisé dans le cadre de l’Histoire des Techniques et des Sciences de l’innovation, propose « une organisation des univers sociotechniques en trois niveaux » (Jaglin et Verdeil, 2013). Le niveau micro –« Technological niches » – est formé de niches technologiques qui sont de véritables lieux d’innovation placés à l’abri de la pression des marchés. Le niveau meso – « Socio-technical regime » – est constitué par le régime socio-technique défini plus haut. Le niveau macro – « Landscape » – correspond à l’environnement le plus large affectant les évolutions du régime socio-technique (mondialisation, problèmes environnementaux, changements de mentalités).

23Le MLP « conceptualise l’avènement du changement à partir de mécanismes de déstabilisation du niveau intermédiaire […] qui, dans les fenêtres d’opportunité ainsi ouvertes, suscitent des processus de concurrence et de sélection des innovations » (Jaglin et Verdeil, 2013). Le MLP permet de séquencer les transitions sociotechniques en quatre phases successives. Dans la première phase, des innovations émergent au niveau micro plus ou moins indépendamment des deux autres niveaux. Dans la seconde phase, ces innovations trouvent leurs premiers débouchés sur des marchés de niche jusqu’à ce que les différents groupes du régime socio-technique se les approprient via de nouvelles productions et de nouveaux usages. Dans la troisième phase, ces innovations entrent en concurrence avec le régime socio-technique dominant et se substituent à ce dernier quand celui-ci subit des pressions internes et/ou des pressions externes provenant du niveau macro. Dans la quatrième phase, ces nouvelles technologies remplacent les anciennes technologies dominantes créant progressivement un nouveau régime socio-technique. À partir de cet outil, Geels et Schot (2007) ont dégagé quatre éléments fondamentaux qui définissent les véritables transitions sociotechniques : [1] de multiples changements et co-évolutions dans le régime sociotechnique ; [2] de multiples interactions entre les acteurs de ce régime et des acteurs d’autres régimes ; [3] des ruptures technologiques majeures se diffusant lentement ; [4] et un processus long d’une durée comprise entre 40 et 50 années.  

24Ce modèle s’inscrivant dans un cadre espace-temps, il s’agit pour nous d’explorer la possibilité d’associer, aux trois niveaux du modèle, des échelles géographiques. Bien que certains travaux aient déjà rejeté cette identification (Coenen et alii, 2012), des recherches pourraient être menées, selon nous, pour tester l’identification suivante : le niveau macro à l’échelle mondiale (contraintes énergie-climat) ; le niveau meso à l’échelle régionale et nationale (politiques énergie-climat européennes et nationales, modes de production, mentalités, etc) ; et le niveau micro à l’échelle locale (technopôle, SPL, etc).

25Utilisé avec succès dans l’analyse de transitions sociotechniques anciennes et contemporaines, le modèle a été utilisé comme cadre d’analyse dans des recherches de nature prospective sur la transition énergétique en cours (Shackley et Green, 2007). Ces analyses débouchent  sur une démarche de « transition management » qui identifie, pour les acteurs concernés, les dynamiques existantes pouvant leur permettre de réaliser leurs objectifs (Rotmans et alii, 2001 ; Rumpala, 2010). Ces dynamiques trouvant le plus souvent une expression à l’échelle locale, l’étude de la territorialisation du système électrique et des EnR s’impose à la géographie.  

IV. Évolution du système électrique et transition énergétique en cours : quelles limites des EnR imposent-elles à sa territorialisation ?

26La transition énergétique en cours émerge dans un contexte d’ouverture à la concurrence et de libéralisation des systèmes électriques nationaux qui remet en cause le modèle monopolistique intégré. Ce modèle, composé de structures à fortes capacités productives placées sous l’égide d’un État-providence centralisateur et planificateur, mute, malgré une forte inertie, en un modèle concurrentiel à structures aux capacités productives plus variées régulées par un État plus décentralisé et libéral (Evrard, 2013). Dans ce nouveau cadre, l’étude des nouveaux rôles pouvant être joués par les territoires locaux dans la reconfiguration du système électrique semble une perspective prometteuse pour la géographie.

A. Les mutations du système électrique : vers une résurgence de l’échelle locale ?

27En 1882, l’Edison Electric Illuminating Company of New York produit, distribue et vend de l’électricité aux consommateurs du quartier de Wall-Street à New-York. Cette expérience pionnière pose les bases du système et du modèle électriques intégrés qui se diffuseront dans le monde (Grand et Veyrenc, 2011 ; Finon, 2013). Elle inscrit l’industrie de production d’électricité dans la catégorie des industries de réseau (Crozet, 2003).

28À l’image de celui-ci, les premiers systèmes électriques intégrés s’inscrivent à l’échelle locale traduisant la territorialisation du système. Au début du 20e siècle, standardisation des technologies et amélioration du transport de l’électricité conduisent à la constitution de systèmes électriques régionaux. Après la Seconde Guerre mondiale, la réorganisation et l’interconnexion des systèmes électriques régionaux mettent en place un système électrique national (Bouneau et alii, 2007 ; Grand et Veyrenc, 2011). La nécessaire régulation des systèmes électriques locaux puis régionaux et l’importance des investissements indispensables à l’électrification – vecteur du développement et de la structuration du territoire national – expliquent cette évolution scalaire et la prise en main du système par l’État. La nationalisation des systèmes électriques nationaux européens donne naissance au modèle monopolistique intégré qui repose sur le tryptique « nationalisation-monopolisation-planification » (Grand et Veyrenc, 2011). Les systèmes électriques nationaux ont donc connu une double intégration verticale et horizontale que l’on peut caractériser par : [1] une centralisation du système électrique ; [2] une dissociation entre lieux de production et de consommation ; [3] et un retrait du rôle des territoires devenus simples territoires-supports.

29En 1978, aux États-Unis, la loi dite Public Utility Regulatory Policies Act (PURPA) amorce la remise en cause du modèle monopolistique intégré en imposant aux opérateurs historiques le rachat de l’électricité produite par des opérateurs émergents (Chevalier, 2004), initiant ainsi l’ouverture à la concurrence et la libéralisation des systèmes électriques nationaux. Ces évolutions s’appuient sur la théorie des marchés contestables (Baumol et alii, 1982) qui remet en cause celle, dominante, des monopoles intégrés. L’ouverture à la concurrence remet en cause l’intégration horizontale des systèmes monopolistiques intégrés quand le processus de dissociation, lié à la libéralisation, remet en cause leur intégration verticale. En Europe, ces processus s’accompagnent d’une ouverture à la concurrence de la production et de la fourniture d’électricité, d’une dissociation du transport et de la distribution et de la création d’une autorité de régulation veillant à l’accès des tiers au réseau (Chevalier, 2004). Ces évolutions ont vu l’apparition et la réapparition de deux échelles dans les systèmes électriques nationaux : [1] une échelle régionale avec l’inclusion d’entreprises électriques étrangères ; [2] et une échelle locale avec l’émergence de nouveaux acteurs électriques qui symbolise une nouvelle territorialisation. Ces évolutions et la complexification des systèmes électriques nationaux dues au développement des EnR accélèrent la construction d’un système électrique intégré européen.

30Cette intégration des systèmes électriques nationaux à l’échelle européenne ne peut cependant pas ignorer l’échelle locale qui devient un niveau scalaire important au sein de cette reconfiguration. Dunsky (2004) a isolé quatre facteurs interagissant dans cette reconfiguration : [1] l’innovation technologique permettant la miniaturisation et la décentralisation des unités de production d’électricité renouvelable ; [2] la rupture de l’intégration verticale et horizontale du système électrique ; [3] la conscientisation de la société aux problèmes environnementaux et [4] la mutation des économies des pays du Nord avec la substitution d’un capital naturel par un capital construit. La conscientisation ouvrant à la mobilisation d’acteurs locaux et l’informatisation pourrait permettre une production décentralisée et une gestion intelligente des systèmes électriques.

B. La territorialisation des EnR : une des conditions d’une transition énergétique réussie ?

31La territorialisation observable des systèmes électriques et en particulier des EnR pourrait ainsi, faire de l’échelle locale, l’échelle-clé de la transition énergétique et sa prise en compte une des conditions de sa réussite (Dunsky, 2004 ; Raineau, 2011 ; Rumpala, 2013). Douillet (2003) définit le concept de territorialisation comme « relativement flou quant à ce qu’il désigne ; se confondant parfois avec la décentralisation ou la déconcentration, il évoque aussi plus largement la montée en puissance des « acteurs locaux » ou la valorisation de la « proximité » » (Douillet, 2003). Les travaux de Reghezza-Zitt (2012) affinent cette approche et postulent qu’il ne s’agit pas d’une simple décentralisation ni d’une déconcentration mais d’une réinscription à l’échelle locale qui « aspire à adapter les cadres spatiaux de l’action publique à la nouvelle réalité des territoires, en opérant un changement d’échelle » (Reghezza-Zitt, 2012). Or, des travaux tempèrent ce qui apparaissait comme une évidence.

32Ces travaux ont analysé ce niveau scalaire à l’aune des différentes dimensions du concept de développement durable : [1] la redistribution des richesses produites, [2] la gouvernance et [3] les rapports du global au local. Dubois et Thomann (2012) montrent que l’implantation de centrales photovoltaïques au sol (CPVS) dans les territoires du Sud de la France, qui est présentée comme un vecteur de développement durable, conduit à une redistribution très imparfaite de la richesse produite à toutes les échelles géographiques. Ils mettent en évidence une polarisation de la richesse produite. Grijol (2012) évoque également des ambiguïtés sur la gouvernance locale des projets de parcs éoliens dans les territoires locaux français et montre qu’il existe une confusion entre information des populations et concertation prenant en compte l’intérêt de toutes les parties prenantes. Cette ambiguïté est en partie liée aussi au caractère polysémique de cette notion (Chevalier, 2003). Bridge, Bouzarovski, Bradshaw et Eyre (2013) pensent que la transition énergétique émergente conduira à une nouvelle géographie des systèmes énergétiques qu’ils caractérisent comme « géographiquement enchâssés ». Des contraintes technologiques interdisent, actuellement, de penser une territorialisation complète de la transition énergétique en cours. Les interconnexions des réseaux électriques, à différentes échelles géographiques sont nécessaires car elles permettent à ceux-ci de s’équilibrer les uns les autres. D’autre part, le caractère fatal de la production d’électricité photovoltaïque et éolienne impose des interconnexions à des niveaux supra-locaux. La redéfinition d’un système énergétique à l’échelle locale ne peut, ainsi, pas être pensée, en dehors de cette interdépendance entre tous les systèmes énergétiques aux différentes échelles. La territorialisation nécessaire à la transition énergétique doit donc, selon nous, se penser dans une dimension multiscalaire. C’est donc cette dimension multiscalaire qu’il faut convoquer si on veut penser les limites au déploiement des EnR.

C. Les limites au déploiement des EnR

33La transition énergétique en cours marque un retour à des energy from space. La puissance produite redevient proportionnelle à la surface de production. La limitation de l’espace énergétique est ainsi posée. Le déploiement actuel des EnR ne s’effectue pas en terrain vierge, il entre en concurrence avec l’ensemble des activités anthropiques. À ce problème de concurrence spatiale, s’ajoute une inégale répartition des ressources disponibles sur les territoires (Brücher, 2008). Ces limitations tempèrent la vision optimiste de certains travaux désignant l’énergie solaire comme substitut aux énergies de stock (Scheer, 1999, 2005). En France, le niveau d’irradiation solaire varie d’un facteur 2 entre le Nord et le Sud du territoire. En conséquence, les CPVS sont principalement concentrées dans le Sud de la France. Ces deux facteurs limitent actuellement la capacité à construire un système énergétique dans lequel aires de production et aires de consommation se confondraient. D’ailleurs, des projets récents – les parcs éoliens off-shore en Mer du Nord et dans la Manche ou le projet Desertec – dissocient complètement aires de production et aires de consommation en utilisant des espaces sans concurrence anthropique et optimisant les ressources.   

34À ces limites spatiales, s’ajoutent des limites technologiques. Les EnR mettent en œuvre, à ce jour, des technologiques de conversion énergétique présentant un faible rendement comparativement aux énergies dominantes. De plus, l’intégration des EnR dans un système électrique pose des problèmes importants du fait du caractère intermittent de ces sources. Il existe un écart important entre la production des EnR et leur capacité installée dû à leur faible facteur de charge. En 2013, les EnR représentaient 11 % de la capacité de production électrique de la France pour une production réelle de moins de 5 % (Deshaies, 2013, 2014).

35Renvoyant à des limites de concurrence spatiale, des limites sociales au déploiement des EnR apparaissent ces dernières années. Dubois et Thomann (2012) décrivent le mouvement de protestation contre la construction de plusieurs CPVS à Curbans, dans les Alpes-de-Haute-Provence (France). L’association Clarency mettant alors en cause le projet dans un combat pour la biodiversité locale. Deshaies (2013) décrit une initiative citoyenne contre un projet de construction d’éoliennes dans la forêt du Soonwald, en Rhénanie-Palatinat (Allemagne). Cette lutte se cristallisait autour des effets catastrophiques des éoliennes pour les paysages.

V. Conclusion

36Le système énergétique dominant confronté « aux murs » de la finitude des ressources énergétiques et des conséquences de l’effet de serre anthropique, est contraint à une nouvelle transition énergétique. Comme lors de la construction du concept de développement durable, le concept de transition énergétique passe progressivement d’une phase exclusivement constituée de discours à un objet d’étude de la recherche scientifique. Centrale dans les questionnements géographiques, les questions spatiales et scalaires traversent l’étude et les tentatives de modélisations des transitions énergétiques historiques.

37Si la constitution des modèles monopolistiques intégrés nationaux, après la Seconde Guerre mondiale, a transformé les territoires locaux en territoire-support du système électrique national et a posé l’échelle nationale comme référent, la transition énergétique en cours semble réintroduire l’échelle locale. Elle esquisse une nouvelle territorialisation du système électrique dans un contexte d’intégration électrique européenne. Cette réinscription à l’échelle locale, caractéristique spécifique des EnR, semble pouvoir faire des acteurs locaux les nouveaux énergéticiens du 21e siècle. Les travaux à venir devront identifier dans quelle intégration scalaire l’échelle locale rendra possible l’accomplissement de la transition énergétique, tout en sachant que chaque échelon devra jouer un rôle dans la reconfiguration du système énergétique. Nous pensons donc qu’une transition réussie devra s’intégrer dans une dynamique multiscalaire.

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Pour citer cet article

Kévin Duruisseau, «L’émergence du concept de transition énergétique. Quels apports de la géographie ?», Bulletin de la Société Géographique de Liège [En ligne], 63 (2014/2) - Varia, URL : https://popups.uliege.be/0770-7576/index.php?id=3932.

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