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Cláudia Feijó da Silva, Diego Luiz Vivian, Jean Baptista, Luciane de Oliveira Almeida, Tony Boita & Treyce Ellen Goulart

LA CHARTE DES MISSIONS : document du Réseau des Points de mémoire et des Initiatives Communautaires en Mémoire et Muséologie sociale du Rio Grande do Sul (Repim-RS)1

(Hors-série n° 2)
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1Le Réseau des Points de mémoire et des Initiatives Communautaires en Mémoire et muséologie sociale de l’État du Rio Grande do Sul2 (Repim-RS) a été créé le 27 juin 2012. Le même jour a eu lieu sa première rencontre dans la ville de Rio Grande, où a été approuvée la création d'un conseil des membres des communautés qui représenteraient ce réseau pour une période d'un an. Le Repim-RS comprend des représentants d'initiatives communautaires dans les domaines de la mémoire et de la muséologie sociale, ainsi que des Points de mémoire3, des universitaires, des militants et des techniciens de l'Institut brésilien des musées (Ibram/MinC). En 2012 et 2013, parallèlement aux réunions, le réseau a organisé des ateliers, des cercles de discussion et des formations aux appels à projets à l’intention de diverses communautés. En 2014, en partenariat avec le Programme d'extension en défense du patrimoine communautaire des communautés Furg Comuf4, il a publié un livre où ces expériences sont présentées par des membres et des responsables de ces communautés (baptista & silva 2013).

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La Charte des missions

3La deuxième rencontre du Repim-RS s'est tenue le 25 août 2012 à l'École publique Padre António Sepp, dans la ville de São Miguel das Missões. 

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5Vingt-neuf représentants de communautés ont participé à cette réunion. Parmi ceux-ci, des intellectuels et des militants œuvrant dans le domaine de la muséologie sociale du Rio Grande do Sul, ainsi que des membres de l'équipe technique de l'Ibram/MinC. Une fois les principaux thèmes discutés, la Charte des Missions a été élaborée. Elle concerne la définition du concept de communauté, des principes de base de l'établissement de partenariats et d'autogestion, les fonctions du Repim-RS et d'autres dispositions. Les lignes directrices des activités du Réseau ont fait l’objet de débats lors de différentes réunions (la première Réunion du Repim-RS, le Séminaire Histoire et Communautés – ANPUHRS – et le Groupe de travail Pontos de Memória do Conexões Ibram).

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7Pour faire connaître le contenu de cette Charte, nous présentons ici son texte intégral :

  • Considérant l'importance et la nécessité d'étendre et d’animer le programme des Points de mémoire dans le contexte du Rio Grande do Sul ;

  • Réaffirmant l'importance de la mise en réseau et de la stimulation qu’elle produit, en particulier dans le cas du Repim/RS ;

  • Se basant sur les principes de la Charte du Réseau des Points de mémoire et des Initiatives Communautaires en Mémoire et Muséologie Sociale, Brasília, DF, 2012, où l'autonomie, la décentralisation, la diversité et la coopération en réseau sont les fondements de ce Réseau ;

  • Respectant les accords internationaux, en particulier le rapport de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée (2001), qui exhorte les pays signataires à maximiser les avantages de la diversité dans toutes leurs institutions afin de combattre le racisme, la xénophobie et la discrimination qui leur est associée ;

  • Considérant la Convention 169 de l'Organisation internationale du travail (1989) et la Déclaration universelle des peuples autochtones, qui garantissent le droit à l'auto-reconnaissance et à la consultation libre, préalable et éclairée des communautés ;

  • Respectant les résolutions adoptées par la Table Ronde de Santiago du Chili, la Convention de la Biodiversité de 1992, promulguée par le Décret nº 2.519/1998, les décrets et lois en vigueur sur le territoire brésilien, en particulier les articles 215 et 216 de la Constitution fédérale, le Statut de l'égalité raciale, la Loi 11.340/03 (Loi Maria da Penha), la législation brésilienne sur les personnes handicapées, notamment le décret législatif nº 186 et le décret n° 6.040, le décret nº 5.051, la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, la Loi nº 10.741, la Loi de l'État du Rio Grande do Sul 11.872, le Statut de l'enfant et de l'adolescent, le Décret-loi des directives et bases de l’éducation, en particulier les lois 10.639/03 et 11.645/08 qui, ensemble, garantissent le droit à la mémoire des communautés indigènes, afro-brésiliennes et périphériques ;

  • En s’appuyant sur l'axe sectoriel Musées communautaires et écomusées du Plan national sectoriel des musées 2010-2020, en particulier les thèmes transversaux 01 - Gestion des musées ; 02 - Préservation, acquisition et démocratisation des collections ; 03 - Formation et renforcement des capacités ; 04 - Éducation et action sociale ; 05 - Modernisation et sécurité ; 06 - Économie muséale ; 07 - Accessibilité et durabilité environnementales ; 08 - Communication et expositions ; et 09 - Recherche et innovation.

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9Sur la base de cet ensemble de considérations, nous avons établi les lignes directrices suivantes pour le Réseau des Points de mémoire et des initiatives communautaires du Rio Grande do Sul (Repim-RS) :

  • Le Repim-RS conçoit les communautés comme un groupe ou des groupes de personnes en situation de vulnérabilité sociale unis par des liens historiques liés aux aspects territoriaux, ethniques, culturels et/ou sexués, notamment lorsqu'ils sont déplacés ou organisés pour la défense et la promotion du droit à la mémoire et l'histoire, ainsi qu’à d’autres thèmes liés aux droits humains et culturels ;

  • Le Repim-RS vise à assurer que la relation entre les communautés et les institutions partenaires (universités, entreprises et organismes publics) soit établie par un contrat formel qui respecte les principes suivants : que les communautés soient les protagonistes des projets dans leur conception, leur exécution et leur évaluation ; que les partenariats se basent sur le dépassement de la vulnérabilité sociale, en particulier par la création de contreparties visant au développement durable et par l'engagement à surmonter les inégalités ; que les fonds collectés au nom des communautés et en raison de leurs vulnérabilités soient reversés à celles-ci, renforçant leurs espaces de mémoire et d'éducation par des équipements et l’apport de ressources suffisantes ; que des formations renforcent les qualifications des responsables et de la jeunesse, en apportant une assistance aux communautés dans la production de leurs propres projets et pour leur reddition de comptes ; que les boursiers des projets universitaires, de même que le personnel à recruter, soient principalement des membres des communautés où les projets sont réalisés ; que les bénéficiaires de bourses pour des projets universitaires soient sélectionnés par la communauté, en particulier par le Conseil de gestion des Points de Mémoire ; que le droit à l'image et le droit à la propriété intellectuelle soient respectés dans la production d'images, de musique et de textes lors des activités, tant pour ce qui est produit par les enfants que par les autres membres des communautés ; que la production universitaire soit orientée en fonction des intérêts des communautés, générant des produits qui représentent des avancées pour celles-ci ; que la production académique écrite et audiovisuelle soit restituée à la communauté sous forme imprimée et numérique ; que la production intellectuelle sur la communauté fasse appel à des auteurs issus de celle-ci, par leurs propres travaux ou comme co-auteurs dans la production académique, les événements, congrès, séminaires et forums ; que les objectifs, les méthodes, le budget, les argumentaires et les thèmes des projets soient construits sur la base des intérêts de la communauté ; que la Convention 169 de l'OIT soit respectée et qu'aucune étude ou intervention dans les communautés ne puisse être effectuée sans son autorisation expresse au moyen de documents sonores, visuels et écrits et autres formes d'expression communautaire ; que la recherche-action soit le principe méthodologique des activités entreprises en faveur de la mémoire communautaire ;

  • Le Repim-RS estime que la gestion des Points de mémoire se doit de respecter les principes suivants : que l'émancipation et l'indépendance de la communauté soient garanties ; que le Statut et le Règlement intérieur des Points de mémoire et des initiatives communautaires soient construits de manière communautaire, ne permettant pas aux intervenants extérieurs d'être électeurs, mais plutôt des collaborateurs externes ; que les partenaires et l'État promeuvent les échanges entre les membres des Points de mémoire et des initiatives communautaires en muséologie sociale ; que se créent des mécanismes pour surmonter l'assistancialisme interne et externe ; que les Points de mémoire soient dotés d’un conseil de gestion communautaire horizontal, composé de dirigeants appartenant à la communauté ; que soient représentés et communiqués aux organismes publics, réseaux et mouvements sociaux, les points positifs et négatifs de leurs Points de mémoire et initiatives communautaires en mémoire et muséologie sociale ; que les Points de mémoire rendent publique leur production, en sauvegardant les principes du droit d'auteur ;

  • Le Repim-RS s’engage à : établir un conseil horizontal pour son fonctionnement, fondé sur le travail d’agents capables de concentrer, promouvoir et renforcer les Points de mémoire et les initiatives communautaires en muséologie sociale ; élaborer un programme annuel en partenariat avec les communautés pour répondre aux demandes de formation des Points de mémoire et des initiatives communautaires en muséologie sociale ; fournir une formation et des qualifications en Mémoire et Muséologie sociale ; intégrer un nombre toujours croissant de représentants de communautés et de chaque conseil des Points de mémoire ; mettre en place un observatoire qui veille sur les principes du programme des Points de mémoire, produisant des rapports publics sur les conditions de chaque action ; divulguer et promouvoir des formations visant à la diffusion de l’appel à projets des Points de mémoire, entre autres ; créer des événements, des séminaires, des réunions et des échanges pour assurer le débat, l'échange d'information et les liens communautaires ;

  • Le Repim-RS demande au Ministère de la Culture de créer des appels à projets spécifiques, dont le système d'évaluation soit adapté aux membres et aux habitants des  communautés, de préférence en des lieux qui possèdent des Points de mémoire et des initiatives communautaires en matière de mémoire et de muséologie sociale, en respectant le caractère singulier de l'expression des communautés qui souffrent d'exclusion historique fondée sur des critères territoriaux, ethniques, culturels et/ou de genre ;

  • Le Repim-RS demande l'intervention du Ministère de la Culture ainsi que du Ministère de l'Education (MEC) pour la création de formations de premier cycle universitaire en Muséologie, mettant l’accent sur la Muséologie Sociale et dispensées en cours du soir ; de telles formations étant directement impliquées dans la justice sociale et la correction des inégalités sociales, par la reconnaissance et la défense de la mémoire des communautés.

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Personnes qui ont participé à la rédaction de la Charte

11Andréia Becker, Arthur Boderode Becker, Bedati Finokiet, Cláudia Feijó da Silva, Daniela Pioner, Diego Luiz Vivian, Eduíno de Mattos, Emílio L. Dos Costa, Fernanda Brunetta Figueiró, Geanine Vargas Escobar, Hélio B. Silveira, Izolina E. Anhaia, Jean Baptista, José Herter, Juliana Medeiros, Luciane de Oliveira Almeida, Manuela Garcia, Marcelle Pereira, Marcia Reck da Silva, Marcia Vargas, Marly Cuesta, Ritiéli Pilar, Teresa Dutra, Teresinha Beatriz Medeiros, Tony Boita, Treyce Ellen Goulart, Valter Braga, Vera Lucia Dreilich da Silva, Zoé Pariso.

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Bibliographie

Baptista Jean & Silva Cláudia Feijó da (orgs.), 2013 : Práticas comunitárias e educativas em memória e museologia social, Rio Grande, FURG.

Notes

1 Traduction : Chloé de Sousa Veiga.

2 NdT : Rio Grande do Sul est l’État le plus méridional du Brésil. Il fait frontière avec l’Uruguay au sud, l’Argentine à l’ouest, et l’État brésilien de Santa Catarina au nord. Sa capitale est Porto Alegre.

3 NdT : Le programme des Pontos de Memória (« Points de mémoire ») a été mis en place en 2009 par l'Institut brésilien des musées (Ibram, Instituto Brasileiro de Museus), en partenariat avec le Ministère de la culture et l'Organisation des États ibéro-américains (OEI). Cette initiative s'adressait aux divers groupes sociaux au Brésil qui n'ont habituellement pas la possibilité de raconter et d'exposer leur propre histoire, leur mémoire et leur patrimoine, afin que ceux-ci soient reconnus et valorisés comme une partie intégrante de la mémoire sociale brésilienne.

4 NdT : Les programmes d’extensions universitaires, tel ce Programa de Extensão em Defesa do Patrimônio Comunitários Comunidades Furg-Comuf, sont des interventions réalisées par les universités qui se donnent comme objectif de connecter les connaissances académiques avec celles des communautés, mobilisant des méthodologies dialogiques en vue de promouvoir la démocratisation de la société.

Pour citer cet article

Cláudia Feijó da Silva, Diego Luiz Vivian, Jean Baptista, Luciane de Oliveira Almeida, Tony Boita & Treyce Ellen Goulart, «LA CHARTE DES MISSIONS : document du Réseau des Points de mémoire et des Initiatives Communautaires en Mémoire et Muséologie sociale du Rio Grande do Sul (Repim-RS)1», Les Cahiers de Muséologie [En ligne], Hors-série n° 2, p. 215-221 URL : https://popups.uliege.be/2406-7202/index.php?id=1299.

A propos de : Cláudia Feijó da Silva

Titulaire d’une licence en Histoire (PUCRS, 2006), d’une spécialisation en Gestion, Orientation et Supervision des Écoles (PUCRS, 2017) et d’un master en Éducation (UFRGS, 2013), Cláudia Feijó da Silva a été consultante et coordinatrice du Musée communautaire et du Point de Mémoire de Lomba do Pinheiro à Porto Alegre, ainsi que du Centre d’actions éducatives du Réseau des éducateurs de musées du Rio Grande do Sul (REMRS). Elle a également été membre du Conseil consultatif du Programme des Points de Mémoire de l’Institut brésilien des musées (IBRAM). Auteure de divers articles portant sur l’éducation dans les musées et la Muséologie sociale, elle a publié, en tant que consultante et chargée de la conservation du l’Écomusée d’Itaipu (Itaipu Binacional), le livre commémoratif des 30 ans de cette institution. Elle est actuellement administratrice au sein du Réseau d’enseignement public de l’État de Rio Grande do Sul.

A propos de : Diego Luiz Vivian

 Titulaire d’un bachelor de l'Université fédérale de Rio Grande (2004), d'un diplôme d’enseignement de l'Université luthérienne du Brésil (2005) et d’un master en histoire de l'Université fédérale de Rio Grande do Sul (2008), Diego Luiz Vivian possède une expérience professionnelle dans les domaines de la recherche historique, de l'éducation, des musées et du patrimoine culturel. Entre 2010 et 2020, il a travaillé au sein du Musée des missions (IBRAM) à São Miguel das Missões, Rio grande do Sul, en tant qu'historien, chef de service et directeur. Il occupe actuellement le poste de technicien en matière culturelle auprès de la Coordination technique de la Surintendance de l'Institut du patrimoine historique et artistique national (Iphan-RS).

A propos de : Jean Baptista

Titulaire d’un doctorat en histoire ibéro-américaine et post-doctorant à l'Institut d'études sur le genre, la sexualité et le féminisme (IGSF) de l’université McGill à Montréal (Canada), Jean Baptista est actuellement professeur à l'Université fédérale de Goiás, où il enseigne dans le cadre du programme de troisième cycle en anthropologie sociale et du cursus de bachelor en muséologie. Il est également membre du Réseau LGBT de mémoire et muséologie sociale au Brésil, ainsi que de la revue en ligne Memória LGBT.

A propos de : Luciane de Oliveira Almeida

Diplômée d’enseignement en histoire de l'Université régionale intégrée d'Alto Uruguai e das Missões (URI), campus de Santo Ângelo de l’État de Rio Grande do Sul (2011), Luciane de Oliveira Almeida a été membre du Réseau des jeunes pour le patrimoine culturel mondial (REJUPAM/IPHAN/UNESCO) et dispose d’une expérience professionnelle en tant qu'enseignante et chercheuse dans le domaine de l'Histoire. Elle est également titulaire d'un diplôme d’aptitude en langue des signes brésilienne (LIBRAS) et d’un diplôme de troisième cycle en traduction/interprétation et enseignement de cette langue (2017 à 2019), travaillant comme traductrice et interprète de langue portugaise et LIBRAS.

A propos de : Tony Boita

Muséologue, titulaire d’un master en anthropologie et poursuivant une recherche doctorale en communication à l'Université fédérale de Goiás, Tony Boita est rédacteur en chef de la revue Memória LGBT+ et membre du réseau LGBT de muséologie sociale au Brésil. Il a publié en 2020 l’ouvrage Museologia LGBT: Cartografia das Memórias LGBTQI+ em acervos, arquivos, patrimônios, monumentos e museus transgressores, et est actuellement en charge de la direction du Museu das Bandeiras, du Musée d'art sacré de Boa Morte et du Musée Casa da Princesa (Ibram/Mtur) à Goiás.

A propos de : Treyce Ellen Goulart

Titulaire d’une maîtrise en éducation et diplômée en histoire de l’Université fédérale de Rio Grande, Treyce Ellen Goulart étudie les relations ethniques et raciales, l'intersectionnalité du genre, de la race et de la classe, les féminismes noirs, la décolonialité et l'intellectualité noire. Elle dispose d’une expérience professionnelle dans le travail avec les minorités, la justice sociale et la réalisation de formations et d'ateliers en lien avec la mise en œuvre de la loi 10.639/03 sur les études raciales à l'école, les féminismes des femmes noires et la décolonialité.