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Perspectives ethnographiques sur les enfants & l'enfance / Ethnographic Perspectives in Children & Childhood / Perspectivas etnográficas sobre los niños & la infancia

2034-8517

 

ya que 05 febrero 2011 :
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Élodie Razy

Enfants dans la guerre en Ukraine : une lecture critique à partir des médias

(N° 10 (2021-2022) / Issue 10 (2021-2022))
Débats et Controverses
Open Access

2022

Cet article est distribué suivant les termes et les conditions de la licence CC-BY (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/deed.fr)

Introduction

1Comme toute crise, qui plus est extrême, la guerre en Ukraine déstabilise et amène à reconsidérer ce qui passait aujourd’hui pour un acquis, la paix sur le sol européen, au prix d’une amnésie, saine diront certains, aveugle diront d’autres, des conflits qui se sont joués à nos portes ces dernières décennies. Cette brèche qui s’ouvre de manière si rapide et étendue, visible dans la mobilisation des Européens (Union Européenne et citoyens des États-membres confondus), reposerait, selon la théorie en vogue dans les écoles et les milieux journalistiques, sur la loi du « mort-kilomètre »1 : plus la distance qui nous séparerait des victimes serait grande, moins on se sentirait concerné par leur sort.

2Cette « loi » n’est qu’en partie vérifiable, en général, et ici en particulier, dans la mesure où d’autres facteurs, non mesurables kilométriquement, et sujets à controverses pour certains, entrent en ligne de compte : la menace directe perçue (3ème guerre mondiale, guerre atomique) à laquelle les Européens sont soumis après 76 ans de paix, la possible identification (proximité culturelle, mode de vie), mise en exergue par l’extrême-droite en pointant de manière plus ou moins explicite certaines caractéristiques partagées (« blancs », catholiques), qui trace une frontière au sens physique et symbolique entre « bons réfugiés » et « mauvais migrants », nécessairement économiques, bien que les faits contredisent cette assertion (cf. les réfugiés fuyant la guerre en Syrie, par exemple) et que les causes des migrations soient toujours intriquées.

3Qu’en est-il des enfants ? Si le cas de l’Ukraine fait l’objet de la présente controverse, ce n’est pas parce qu’il serait plus important que d’autres, mais parce qu’il peut faire écho à tous les conflits passés et actuels, ici et ailleurs. Puisse l’exemple de cette guerre faire office de caisse de résonance pour tous les conflits qui voient l’enfance frappée en plein cœur, prise en otage à dessein car les symboles, à portée positive ou négative, qui lui sont associés font facilement recette sur le plan émotionnel.

Pourquoi les enfants de la guerre en Ukraine ?

4Si ces questions sont bien présentes dans les médias, on observe une moindre prise en compte – et si le sujet est traité, un moindre recul – lorsqu’il s’agit du cas des enfants qui occupent différentes places de victimes ou d’acteurs dotés d’agentivité dans le traitement médiatique.

5Le suivi de l’actualité dans divers médias depuis le début du conflit permet de mettre en exergue l’enjeu politique que représente l’enfance en temps de guerre. Si les guerres se jouent sur les champs de bataille où l’on trouve des hommes comme des femmes, les combats se livrent également au plus près des enfants et des femmes qui ne sont pas sur le front, au cœur des villes et des villages, dans l’intimité des foyers devenus lieux de torture ou lointain souvenir. Le « droit en temps de guerre » (Cumi 2020[2014]) existe, mais, on le sait, il est rarement respecté, preuve en est la dénonciation sans fin des « crimes de guerre » à travers le monde, dont les femmes, mais bien sûr les enfants2, sont les victimes toutes désignées, au mépris, également, de la Convention internationale des droits de l’enfant.

6Tour à tour victime ou héro, il convient de dépasser les grandes figures identificatoires, dont les médias se font le relai, afin de dépasser la simple indignation et de mieux saisir les enjeux sous-jacents à la convocation de l’enfance dont le statut ambivalent et la position liminale se conjuguent souvent de manière apparemment contradictoire avec une vision « […] idéalisée, un âge d’or par essence situé dans le passé et perdu […] également synonyme d’espoir pour l’avenir. Porteuse de potentialités inscrites dans le futur, aussi bien à l’échelle individuelle que collective, sociale que politique, même si c’est le plus souvent sous une forme incantatoire (Martin et al. 2016) » (Suremain & Razy 2022). C’est bien au carrefour de ces représentations de l’enfance complexes qu’il convient d’appréhender les enfants de la guerre en Ukraine pour saisir les ressorts des multiples mobilisations dont ils font l’objet.

Des enfants « déjà nés » aux enfants « à naître » : au-delà de l’indignation émotionnelle face à l’agresseur

7Priver l’autre de descendance, ou de sa descendance, marquer celle-ci du sceau de la mort, de la violence et de la honte, effacer l’origine. Toutes intentions qui passent par divers moyens visant à anéantir affectivement, socialement et symboliquement, mais également jusqu’aux confins du corps sujet/personne (Razy 2012), ce qui fait communauté, de l’échelle de la famille à celle de la Nation, de la petite à la grande histoire, du présent au futur, individuel comme collectif.

8Tous les enfants sont touchés par la guerre à différents niveaux3, mais certains, d’une manière particulière. Enlever des enfants et les faire adopter est un grand classique en la matière : des enfants enlevés sous le nazisme aux bébés volés pendant la dictature en Argentine4, pour ne prendre que deux exemples du XXème siècle, les efforts déployés démontrent les enjeux identitaires, souvent nationalistes, et la logique de terreur à l’œuvre : s’approprier, effacer, remplacer. En Ukraine, cette pratique, présentée comme une « action humanitaire » par le pouvoir russe, concernerait notamment des enfants placés en institution. Elle semble avoir commencé en Crimée en 20145 et fait l’objet d’une enquête de l’ONU pour le cas de l’Ukraine6. Le sort réservé à des enfants vivant dans des zones occupées ou pro-russes – envoyés en colonie de vacances en Russie, parfois par leurs parents, pour être protégés –, est également encore flou7. Autre moyen, même fin d’anéantissement, avec une profondeur historique et un caractère universel qui ne se laissent pas démentir : parmi les viols recensés, la moitié concernerait des enfants8. Sortir les enfants de l’enfance par la violence sexuelle comme arme de guerre, et ainsi dénier aux enfants toute existence, aussi bien en tant qu’individus que chaînons dans la succession des générations, mais également, membres d’une communauté locale et citoyens d’une Nation, ainsi piétinée, traverse tous les conflits.

9Aux côtés de ces enfants nés, ciblés par des actes de guerre, d’autres moyens sont mobilisés qui concernent les enfants à naître ou à peine venus au monde. Dans le cas des viols de femmes, aux conséquences bien connues, s’ajoute le risque de mettre au monde l’enfant de l’ennemi. Dans un pays où maternité et construction de la Nation, avec « la figure mythique de la Berehynia véritable héroïne de la nation » et « protectrice de la patrie » (Lance 2017), sont étroitement liées, on mesure les effets dévastateurs d’une telle naissance sur l’enfant, sa mère et son entourage, lorsque l’IVG est impossible ou non acceptée pour des raisons religieuses, par exemple. Les enfants à naître, attendus par leurs parents, et leur mère n’échappent pas non plus à ces actes de guerre lorsque maternités et hôpitaux pédiatriques sont ciblés par des frappes militaires, pas plus que les nouveau-nés ou les enfants malades pris en charge, ou encore les écoles, ces bâtiments sensés servir de refuges à l’armée.

10Cette liste mortifère non-exhaustive dit à elle seule à quel point les enfants constituent un objectif militaire central inavoué, et donc un enjeu politique dans la volonté de domination et d’anéantissement de l’autre.

11À l’inverse, on assite à la mise en avant d’enfants porteurs de messages dont l’exposition renvoie à une supposée agentivité.

L’enfance glorifiée : le point de vue de l’agressé porté et revisité par les médias

12Plusieurs figures d’enfants héros ont été relayées par les médias. La première évoquée ici concerne Hassan, 11 ans, arrivé seul à la frontière slovaque après un périple de 1 000 km dont l’histoire a inondé les médias, sous forme écrite comme vidéo9. Il ne s’agit de remettre en cause ni l’horreur de sa situation ni le courage dont il a fait preuve, mais de dépasser l’émotion qu’a suscitée son histoire afin de comprendre à quel point son cas est exemplaire des conceptions occidentales de l’enfance : pour le dire de manière caricaturale, un enfant de 11 ans n’est pas sensé pouvoir se débrouiller seul, qui plus est dans un contexte de guerre ; c’est là le rôle des adultes, au sein de l’institution familiale et de l’institution scolaire. Parce que ce qu’il a vécu entre en contradiction avec le modèle dominant incarné aujourd’hui dans la figure de l’enfant onusien (Suremain & Bonnet 2014), Hassan interroge le destin d’autres enfants pour lesquels on ne se pose pas les mêmes questions, qu’on ignore sciemment ou dont on ne connaît pas l’existence, dans nos propres sociétés ou ailleurs dans le monde.

13En effet, autre lieu, autre réalité, dans les crises (migratoires ou de guerre) comme dans des situations quotidiennes habituelles dans différentes sociétés, l’âge calendaire auquel sont associées des connaissances et des compétences n’est pas calqué sur ce modèle que nous connaissons, lui-même cohabitant dans nos propres sociétés avec d’autres : des enfants migrant seuls en Afrique ou vers l’Europe comme en Amérique centrale vers les États-Unis aux enfants-soldats à travers le monde. Les considère-t-on comme dotés d’agentivité ? Et qu’en est-il des communautés indiennes d’Amérique latine où ce qu’on appellerait une certaine autonomie des enfants est constitutive d’un modèle d’éducation et où les enfants contribuent, dès leur plus jeune âge, à leur communauté (Díaz Barón 2010 ; Morelli 2017).

14Aux côtés d’Hassan, qui a quitté l’Ukraine en héros, la vidéo devenue virale d’une petite fille chantant « Libérée, délivrée », la chanson accompagnant le dessin animé « La Reine des neiges », croise deux mondes, celui de la culture enfantine et celui de la guerre. Présentée comme « un symbole de résistance »10, elle dévoile un autre point de vue sur le conflit, celui d’une enfant vivant en partie dans un bunker, et émeut les internautes tout en étant perçue comme un soutien des Ukrainiens et des troupes. Ce rôle se confirme avec les codes plus attendus et politiques, ceux de l’hymne ukrainien qu’elle chante en Pologne après avoir fui son pays.

15Cet exemple montre à quel point enfance et avenir de la Nation sont intimement liés dans l’imaginaire des ukrainiens comme des médias occidentaux au sens large, qui plus est en temps de guerre où les symboles sont davantage mobilisés. Cependant, si la question de l’instrumentalisation de la parole de l’enfant se pose dans les deux cas présentés, il est impossible, en l’état des connaissances, de mesurer la part d’agentivité exercée par ces enfants-là dans cette exposition médiatique.

Quel prisme pour l’enfance et les enfants de la guerre ? 

16Considérés comme vulnérables et victimes avérées ou potentielles privées d’agentivité, les enfants sont en même temps dotés d’une sorte de pouvoir imaginaire en raison de l’espoir dont ils sont porteurs pour l’avenir, comme cela a été montré. Les quelques exemples évoqués pourraient être complétés par bien d’autres. Les enfants nés en Ukraine de la gestation pour autrui que leurs parents d’intention ne peuvent venir chercher vivent également cette guerre : qu’ils soient contraints de rester avec la femme qui les a portés pour d’autres ou qu’ils soient pris en charge dans une pouponnière11. Les enfants soldats, figure ambivalente par essence, dont les chiffres à travers le monde inquiètent12, semblent certes absents d’Ukraine. Si l’Ukraine n’en présente en effet pas de cas avéré, bien que des adolescents aient été mis en avant dans les médias au tout début du conflit13, certains enfants jouent cependant à la guerre, rompant ainsi avec leur enfance, telle que supposée par les adultes14 : on pourrait dire qu’ils jouent à la guerre « pour de vrai ». Quant à ceux qui ont fui l’Ukraine, laissant leur vie derrière eux, et devenus réfugiés, plus chanceux que d’autres certes, mais vivant néanmoins les difficultés lorsqu’on « repart à zéro ». Enfin, celles que l’on pourrait appeler les victimes collatérales, présentées sous divers vocables dans les médias, sont les enfants et adolescents européens. Sans être au cœur des combats, la circulation de l’information et les fake news aidant, ils sont pour beaucoup inquiets : faut-il leur parler ou non de la guerre15 ? Comment prendre en compte des troubles qui les affectent en raison de cette situation incertaine et source d’inquiétude16 ? Quel rôle jouent les médias spécialisés ciblant les enfants, dès 6 ans17, aux côtés des réseaux sociaux où se mêlent appels à soutenir les enfants ukrainiens, commentaires et vidéos à l’origine douteuse, comme c’est le cas sur Tik Tok ?

17On le voit, lire la guerre à travers le prisme des enfants dans les médias nécessite de saisir les conceptions complexes de l’enfance à l’œuvre en temps de crise et, en retour, nous éclaire sur la présence de ces mêmes figures, ailleurs dans la guerre, mais également en temps de paix, ici.

Bibliographie

18Cumi D. 2020[2014] Manuel de droit de la guerre. Bruxelles : Bruylant.

19Díaz Barón M. 2010 « La exploración asistida: orientación del conocimiento en la educación inicial de indígenas Cubeo y Ticuna del Amazonas » (61-76), In M. Díaz Barón & S. Vásquez (eds.) Contribuciones a la antropología de la infancia. La niñez como campo de agencia, autonomía y construcción cultural. Bogotá : Editorial Pontificia Universidad Javeriana.

20Kévonian D. 2009 « Histoires d’enfants, histoire d’Europe : l’Organisation internationale des réfugiés et la crise de 1949 », Matériaux pour l’histoire de notre temps, 95 : 30-45.

21Lance D. 2017 « Mettre à distance la maternité : La gestation pour autrui en Ukraine et aux États‑Unis », Ethnologie française, 47 : 409-420

22[URL : https://doi.org/10.3917/ethn.173.0409]

23Morelli C. 2017 « The river echoes with laughter : a child-centred analysis of social change in Amazonia », Journal of the Royal Anthropological Institute, 23(1) : 137-154.

24Razy É. 2012 « Pratique des sentiments et petite enfance à partir du pays soninké (Mali). Du modèle à la constellation » (105-126), In D. Bonnet, C. Rollet & Ch.-É. de Suremain (eds.) Modèles d’enfances. Successions, transformations, croisements. Paris : Éditions des Archives Contemporaines.

25Suremain (de) Ch.-É. & Bonnet D. 2014 « L’enfant dans l’aide internationale :  Tensions entre normes universelles et figures locales », Autrepart (numéro spacial « L’enfant du développement »), 72 : 3-21

26[https://doi.org/10.3917/autr.072.0003]

27Suremain (de) Ch.-É. & Razy É. 2022 « Les ‘enfants cachés’ des générations futures et de la patrimonialisation (Mexique et France) », In Situ. Au regard des sciences sociales 3 : [URL : http://journals.openedition.org/insituarss/1782 ; DOI : https://doi.org/10.4000/insituarss.1782

Notes

1 https://blogs.mediapart.fr/marouane-bakhti/blog/030322/la-loi-du-mort-kilometre-et-la-resurgence-dun-racisme-bien-ancre

2 https://www.unicef.org/media/123036/file/25%20Years%20Children%20in%20Armed%20Conflict%20French.pdf

3 https://www.rtbf.be/article/guerre-en-ukraine-les-enfants-de-la-ligne-de-front-11128413

4 https://www.lalibre.be/international/2017/04/28/je-faisais-partie-des-500-bebes-voles-par-la-dictature-argentine-mes-parents-sont-portes-disparus-6HQRFJHHWFHD5ENKVSCERZ5MKI/

5 https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-temps-du-debat/enlevements-d-enfants-en-ukraine-un-crime-de-guerre-comme-les-autres-5527036

6 https://news.un.org/fr/story/2022/06/1121792

7 https://www.rts.ch/info/monde/13441119-les-autorites-ukrainiennes-reclament-plus-de-7000-enfants-partis-en-vacances-en-russie.html

8 https://fr.euronews.com/2022/06/06/l-onu-confirme-un-premier-decompte-de-124-viols-en-ukraine-la-moitie-sur-des-enfants

9 https://www.lalibre.be/international/europe/2022/03/06/un-refugie-ukrainien-de-11-ans-arrive-tout-seul-en-slovaquie-PMYPSU5W65BC3CTXXLEK5ENROM/

10 https://information.tv5monde.com/video/ukraine-une-petite-fille-devient-un-symbole-de-la-resistance?xtor=SEC-7-GOO-[INFO_SE]-[119843614474]-S-[]&gclid=Cj0KCQiA_P6dBhD1ARIsAAGI7HDreiIyBY0rLKi0QIZG1s9XU1TH8h5klx0pdboZQNQgCbsXxHflvq0aApiMEALw_wcB

11 https://www.arte.tv/fr/videos/109256-000-A/ukraine-gpa-en-temps-de-guerre/

12 https://www.unicef.org/media/123036/file/25%20Years%20Children%20in%20Armed%20Conflict%20French.pdf

13 https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-en-ukraine/ukraine-a-marioupol-des-adolescents-remettent-les-tranchees-en-etat-et-se-preparent-a-la-guerre_4970271.html

14 https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-en-ukraine/en-ukraine-des-enfants-jouent-a-la-guerre-pres-de-la-ligne-de-front-et-traquent-les-russes-contre-desbonbons_5181967.html

15 https://www.letemps.ch/societe/conflit-explique-aux-ados-lavis-principaux-interesses

16 https://www.lapresse.ca/societe/2022-03-05/guerre-en-ukraine/la-goutte-de-trop-pour-des-ados.php

17 https://lepetitquotidien.playbacpresse.fr/article/des-enfants-dun-pays-en-guerre-retournent-a-lecole

Para citar este artículo

Élodie Razy, «Enfants dans la guerre en Ukraine : une lecture critique à partir des médias», AnthropoChildren [En ligne], N° 10 (2021-2022) / Issue 10 (2021-2022), URL : https://popups.uliege.be/2034-8517/index.php?id=3613.

Acerca de: Élodie Razy

Professeur d’anthropologie, Faculté des Sciences Sociales, Institut de recherche en sciences sociales-Laboratoire d’anthropologie sociale et culturelle, Université de Liège (Belgique), elodie.razy@uliege.be