depuis le 01 novembre 2014 :
Visualisation(s): 598 (33 ULiège)
Téléchargement(s): 308 (8 ULiège)
print        
Albert PISSART

Les viviers des Hautes Fagnes et du Pays de Galles : Nouvelles connaissances et hypothèses

(53 (2009/2) - Varia)
Article
Open Access

Document(s) associé(s)

Version PDF originale

Résumé

Les dépressions fermées entourées d’un rempart qui existent dans les Hautes Fagnes en Belgique sont, depuis 1956, interprétées comme des traces de buttes périglaciaires. Considérées d’abord comme des traces de pingos, il a été montré par la suite qu’il s’agit de traces de lithalses (palses minérales), c’est-à-dire des restes de buttes formées de glace de ségrégation comme il en existe en très grand nombre au Québec septentrional et quelques-unes en Laponie. Des restes de lithalses sont très rares dans le monde et sont seulement connues en Belgique, au Pays de Galles et en Hudsonie. En Belgique, l’apparition des lithalses uniquement sur les hauts plateaux a été expliquée par le climat plus rude qui existait en altitude au cours du Dernier Dryas. Nous montrons ici qu’un autre facteur intervient car ces formes sont presque toutes localisées sur des roches quartzitiques altérées du massif cambro-ordovicien de Stavelot. Elles seraient en relation avec de petites nappes aquifères localisées dans des sables d’altération. De semblables conditions lithologiques ne sont pas présentes sur les plateaux voisins de l’Eifel à la même altitude et ce fait explique pourquoi des traces de lithalses n’y existent pas.

Dans une deuxième partie, au vu des études récentes réalisées au Canada et de nos connaissances en Belgique, la croissance des lithalses ne se ferait pas seulement par un soulèvement vertical du sol mais aussi, au moins pour certains, par croissance latérale. Cinq arguments sont présentés pour défendre cette thèse : 1) les formes en plan très régulières (circulaires ou ovales) de nombreuses lithalses actuelles et de traces de lithalses, sont inexplicables par un simple soulèvement vertical du sol ; 2) une extension latérale des lithalses est évidente dans des remparts de traces de lithalses des Hautes Fagnes ; 3) les déplacements des sédiments vers les remparts ne peuvent pas être dus seulement à des processus de versants vu la très faible pente de la surface des lithalses ; 4) si une érosion importante s’était produite au sommet des lithalses, des phénomènes thermokarstiques auraient provoqué leur fusion ; 5) la position oblique en profondeur des lentilles de glace au sein d’une lithalse de Hudsonie est un indice très sérieux d’une croissance latérale. La figure 15 montre comment probablement les lithalses grandissent et avec certitude comment elles disparaissent.

La troisième partie du présent article est consacrée aux traces de lithalses allongées de Belgique et du Pays de Galles. Les images Google Earth montrent que des formes très semblables existent dans le Québec Nordique. Au Pays de Galles, de nombreuses lithalses allongées selon la pente sont apparues par évolution d’abrupts périglaciaires que nous avons décrits en 1963 sous le nom de terrasses de cryoturbation. Des lobes de ces abrupts ont évolué selon la pente en des traces de lithalses. De telles formes sont nombreuses au Pays de Galles. La transition entre les abrupts lobés et les lithalses allongées selon la pente établit le passage d’une forme à l’autre et constitue un argument supplémentaire en faveur d’une croissance latérale des lithalses.

Index de mots-clés : abrupts périglaciaires, glace de ségrégation, Hautes Fagnes, lithalses, palses minérales, Pays de Galles, Québec nordique

Abstract

The ramparted depressions that exist on the Hautes Fagnes Plateau in Belgium, first interpreted in 1956 as the remnants of pingos are best explained as remnants of lithalsas (i.e., mineral palsas), formed from ice segregation within frozen ground (permafrost) of Younger Dryas age. These features have only been described previously from Belgium, Wales and Ireland. Their location, above 500 m a.s.l. in Belgium, reflects the cold Younger-Dryas climate that have existed at that altitude but it is unclear why similar features did not form on the adjacent Eifel Plateau at the same altitude. We demonstrate here that lithalsas form in most cases on weathered quartzitic rocks of the Cambro-Ordovician massif of Stavelot, and probably are associated with local hydrological conditions.

The second part of the paper, using observations made on the Hautes Fagnes and from Northern Québec, Canada, demonstrates that some lithalsas form by, first, vertical upheaving and, second, lateral enlargement. Five facts support the hypothesis: 1) many present and remnants of lithalsas have a regular shape; 2) there is evidence of (limited) side growth in ramparts of the lithalsa traces in the Hautes Fagnes (Belgium); 3) the present day lithalsas have a very flattened shape which restricts the transferring of raised material towards the rims; the lithalsas in the Hautes Fagnes were not high; 4) if important erosion had occurred on the lithalsas, it would have triggered thermokarstic phenomena; 5) within the three lithalsas studied by Calmels in Hudsony, ice lenses are positioned at a slant. Figure 15 illustrates how probably lithalsas grow and decay.

The third part of the paper concerns numerous elongate lithalsa remnants which are known In Belgium and in Wales. Google Earth images clearly show that elongated lithalsa remnants have close relatives in Hudsony. In Wales, a lot of elongated lithalsas have developed from lobate cryoturbation benches we described in 1963. These benches have become, laterally, lithalsa traces, growing longer according to the slope. In Wales, the places where traces of lithalsas can be seen are more numerous than previously realized. Transition from lobate terraces to lithalsas provides evidence of a side growth of these periglacial mounds and represents another argument for the lateral enlargement of lithalsas.

Index by keyword : frost thrusting, Hautes Fagnes, lithalsas, mineral palsas, northern Quebec, periglacial benches, segregation ice, Wales

Pour citer cet article

Albert PISSART, «Les viviers des Hautes Fagnes et du Pays de Galles : Nouvelles connaissances et hypothèses», Bulletin de la Société Géographique de Liège [En ligne], 53 (2009/2) - Varia, URL : https://popups.uliege.be/0770-7576/index.php?id=1084.

A propos de : Albert PISSART

Professeur émérite

Rue Lavaux, 29

B-4130 Esneux

Université de Liège

Unité de Géographie Physique et Quaternaire

Station scientifique des Hautes Fagnes

Publications 39bis, 40bis et 41bis

Appels à contribution

Appel à publications (vol. 83 et 84) ouvert

Plus d'info