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Université et politiques de localisation urbaine en Algérie
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L’université algérienne a connu depuis 1962 différentes politiques d’implantation de ses locaux. Le réseau universitaire qui a été mis en place progressivement compte 109 établissements qui se localisent dans 51 villes accueillant 1 546 243 étudiants en 2021. Les équipements du réseau ont été au départ d’anciens locaux récupérés. Progressivement, il s’est étoffé par la création de campus universitaires. Leur localisation s’est déplacée de la ville vers la périphérie de la ville pour arriver jusqu’à former des pôles universitaires. La dernière évolution dans ce domaine est la ville universitaire de Constantine. Le campus a été mis en avant dans les politiques urbaines locales, car bien que la politique algérienne soit centralisée, elle est par contre accommodante dans la localisation des équipements qui est laissée à l’appréciation des autorités locales. Ces dernières l’utilisent comme une forme de marketing urbain pour améliorer l’image de la ville.
Abstract
The university in Algeria has been created recently. It has known different policies of establishment. The university network that has been gradually implemented account 109 institutions located in 51 cities. They have 1,546,243 students in 2021. This prestigious equipment did not initially have significant dimension, because of its assignment in old building. Subsequently, urban policies allowed the creation of university campuses on the outskirts of the city to form university poles. The latest development in this field is the university town of Constantine. The campus has been put forward in local urban policies because although Algerian policy is centralized, we can also say that it lets the choice to the local authorities in the location of the equipment. Which uses it as a kind of urban marketing to give the city a beautiful image.
Table of content
INTRODUCTION
1La création des universités est devenue depuis plusieurs décennies une des préoccupations majeures des autorités nationales, quelle que soit l’orientation de l’économie qui a été anciennement socialiste et actuellement libérale. En effet, le budget octroyé à ce secteur est supérieur à 6 % du budget du pays, tout en se plaçant à la 5e position durant ces 20 dernières années selon les lois des finances paraissant au journal officiel. Le ministère de tutelle dispose d’importantes prérogatives : la validation des programmes, celle des filières et des diplômes, le recrutement et la gestion des ressources humaines ainsi que l’acquisition des équipements pédagogiques et scientifiques. En plus des financements, il veille sur l’opportunité et les délais de réalisation des infrastructures. Cependant, il délègue aux autorités locales outre le choix du lieu d’implantation des campus, leur consistance, c’est-à-dire leur intégration dans la politique de localisation urbaine locale en s’appuyant sur le code communal (1966, 1990, 2011). Cette nouvelle donne n’est pas sans impact sur le tissu urbain et sa morphologie, créant ainsi plusieurs cas de figure allant de la simple récupération de locaux à la création d’une ville universitaire.
2Dans ces conditions, comment s’est construit le réseau universitaire algérien ? Comment les autorités locales ont elles implanté les équipements universitaires dans le cadre de leur politique urbaine ?
I. LES OUTILS D’ANALYSE
3Nous examinerons la politique universitaire en Algérie qui a été établie depuis les années 1960. Elle est fondée sur une doctrine officielle, à savoir « l’universalité de l’enseignement, l’équité, l’égalité et la gratuité ». Dans son contenu, toutes les disciplines y sont enseignées, l’accès à l’université est conditionné par la réussite à l’examen du baccalauréat. La formation y est gratuite et son accès n’est soumis à aucune discrimination (de genre, économique, sociale, territoriale). Le réseau universitaire national a connu 3 dates importantes qui ont influencé directement les politiques d’implantation et de promotion des structures universitaires. Elles correspondent à l’instauration de cartes universitaires qui s’inscrivent dans un cadre précis.
4La chronologie de la multiplication des établissements universitaires s’est accompagnée d’un processus particulier quant à leur localisation et à la forme des campus universitaires qui ont été laissés à l’appréciation des autorités locales. De cette relative liberté sont nées des situations différentes de localisation des campus globalement au nombre de 6. La majorité de ces types de localisation n’est pas l’apanage exclusif des autorités locales algériennes, puisque dans beaucoup de pays se retrouve ce processus qui consiste globalement d’abord à implanter une université dans le tissu urbain ou à défaut le localiser à la périphérie de la ville, en l’absence d’assiette foncière dans la ville, construire le campus en milieu rural.
5Brièvement, certains sont une récupération d’anciens locaux répartis indifféremment dans la ville, d’autres structurent le tissu de la ville (Bourdin et Campagnac, 2014). Ils peuvent également être soit implantés à la périphérie de la ville avec l’objectif d’être un point d’attraction du front urbain en formation, soit en dehors des limites de la ville et en plein milieu rural. La création de pôles universitaires implantés sur un axe important de la ville et l’expérience de la ville universitaire figurent aussi parmi les contextes spatiaux.
6Pour les illustrer, nous avons élaboré une grille de 5 paramètres. Le premier identifie la ville qui abrite le campus, le deuxième est la population de la ville au recensement de 2008, car le poids démographique a un rôle important dans toute entreprise de développement. Le troisième paramètre concerne le rang de la ville dans la hiérarchie urbaine, car de sa position dans la hiérarchie dépend sa dotation en infrastructure universitaire ; quant au quatrième paramètre à savoir la conférence régionale universitaire, celui-ci est un indicateur relatif au grand découpage territorial du pays en 3 grandes régions (ouest, centre, est) et qui est un élément d’appréciation des grands équilibres régionaux. Le cinquième paramètre fait référence au milieu géographique en raison de l’extrême diversité des milieux naturels du pays allant de la façade maritime méditerranéenne au nord, jusqu’au désert saharien au sud et par la même celle de la répartition de la population avec une densité élevée dans le nord et une très faible densité dans le sud. En outre, cet indicateur, comme le précédent, permet d’évaluer le degré de couverture du pays par les établissements universitaires.
7Ces paramètres, parmi tant d’autres, sont la traduction des principes politiques énoncés précédemment, à savoir l’équité et l’égalité dans la formation supérieure sur l’ensemble du territoire national. C’est un des éléments sur lequel s’appuie l’aménagement du territoire national. Son application a été progressive à partir de la première carte universitaire.
8Cette grille nous a permis de saisir à travers la chronologie du développement du réseau universitaire les différentes politiques de localisation pratiquées. Le Tableau 1 présente les exemples choisis.
Caractéristiques des campus |
Ville |
Nombre d'habitants (2008) |
Rang de la ville |
conférence régionale universitaire |
Milieu géographique |
La récupération d’anciens locaux |
Alger |
2 364 230 |
Métropole |
Centre |
Littoral |
Oran |
609 940 |
Métropole |
Ouest |
Littoral |
|
Constantine |
418.672 |
Métropole |
Est |
Atlas Tellien |
|
Annaba |
342 703 |
Métropole |
Est |
Littoral |
|
Le campus dans le tissu urbain |
Batna |
289 504 |
Grande ville |
Est |
Hautes Plaines |
Laghouat |
134 373 |
Grande ville |
Centre |
Atlas saharien |
|
Mostaganem |
144 138 |
Grande ville |
Ouest |
Littoral |
|
La création d’un campus à la périphérie de la ville |
Sétif |
252 127 |
Grande ville |
Est |
Hautes Plaines |
Tipaza |
15 180 |
Petite ville |
Centre |
Littoral |
|
Tindouf |
45 610 |
Petite ville |
Ouest |
Sahara |
|
La création d’un campus en milieu rural |
Ghardaïa |
92 937 |
Ville moyenne |
Centre |
Sahara |
Mila |
63 251 |
Ville moyenne |
Est |
Atlas Tellien |
|
El Bayadh |
85 577 |
Ville moyenne |
Ouest |
Hauts Plateaux |
|
La création d’un "pôle universitaire" implanté sur un axe important de la ville |
Tlemcen |
124 525 |
Grande ville |
Ouest |
Atlas Tellien |
Ouargla |
116 307 |
Grande ville |
Centre |
Sahara |
|
Oum El Bouaghi |
67 201 |
Ville moyenne |
Est |
Hautes Plaines |
|
La création d’une ville universitaire |
Ali Mendjeli — Constantine |
418.672 |
Métropole |
Est |
Atlas Tellien |
Tableau 1. Présentation des différentes caractéristiques des campus retenus. Source : Recensement général de la population et de l’habitat (2008) + traitement personnel
9De ce fait, ce sont 18 infrastructures universitaires situées dans 16 villes de taille ou de rang différents (de la métropole à la petite ville) qui ont été retenues. Elles sont inscrites au sein des 3 conférences régionales universitaires (ouest, centre, est) qui sont des instances consultatives. Ces 18 établissements appartiennent aux 5 grands milieux géographiques du pays (le littoral, l’Atlas tellien, Les Hautes Plaines-Hauts Plateaux, l’Atlas saharien et le Sahara).
II. LA GENÈSE DU RÉSEAU UNIVERSITAIRE ALGÉRIEN DÈS 1962 : LE CAMPUS CRÉÉ À PARTIR DE LA RÉCUPÉRATION D’ANCIENS LOCAUX
10En 1962, le réseau universitaire algérien se composait de la seule université d’Alger fondée en 1909 comme l’indique le site internet de l’université Alger 1 (2020). Elle regroupa 4 facultés ou écoles, à savoir médecine-pharmacie, sciences, lettres et droit. En outre, il y avait moins d’une demi-douzaine d’écoles d’ingénieur (polytechnique, agronomie, architecture ...). Oran et Constantine, qui sont deuxième et troisième ville du pays, ont été dotées chacune d’une annexe universitaire dépendante de l’université d’Alger en 1961. Ces annexes universitaires d’Oran et de Constantine sont promues au rang d’université successivement en 1967 et 1969. Selon la carte universitaire établie par le centre de recherche en économie CREAD pour le ministère de l’Enseignement supérieur et la Recherche scientifique (CREAD-MESRS, 2006), le nombre d’étudiants est passé de 2 725 en 1962 à 12 110 en 1969.
Carte 1. Répartition des universités et des centres universitaires en 1977
11Dans les années 1970 (CREAD-MESRS, 2006), 2 types de structures universitaires ont été créées, à savoir l’université et le centre universitaire. Ce sont 3 universités qui ont vu le jour, la première à Alger en 1974, université des Sciences et Techniques Houari Boumediene, la deuxième à Oran en 1975, université des Sciences et Techniques d’Oran, et la troisième à Annaba en 1975. Ces créations ont répondu aux besoins des populations métropolitaines, puisqu’au recensement de 1977, Alger comptait 1 353 000 habitants, Oran avait 495 000 habitants, Constantine 345 000 habitants et Annaba 249 000 habitants. L’effectif national des étudiants s’élevait à cette date à 50 183 étudiants selon Cherrad (2016) (Carte 1).
12Quant au deuxième type, à savoir le centre universitaire, c’est un établissement de moindre taille que l’université, car il ne regroupe que quelques instituts et départements. Ainsi, en 1977, les centres universitaires de Batna, Blida et Tizi Ouzou ont été créés, bientôt suivis par ceux de Tlemcen, Sétif, Sidi Bel Abbes. Cet essaimage des centres universitaires à travers le pays s’est effectué en respectant un seuil démographique puisque leur ville avait une population supérieure à 100 000 habitants. Cette politique volontariste de diffusion a pour objectif de doter les grandes villes en établissements universitaires en 1982, le nombre des étudiants s’est accru pour se hisser à 90 145 inscrits dans 12 établissements.
13À l’échelle locale, cet effort a été amorcé par une politique de récupération et de réaffectation de locaux au profit de l’enseignement supérieur, que ce soit pour les universités ou bien pour les centres universitaires. Notre choix s’est porté sur les 4 métropoles que sont Alger, Oran, Constantine et Annaba. Les infrastructures récupérées sont d’anciennes casernes militaires dans les cas d’Alger « Bouzaréah » (Cherrad, 2009), d’Oran (Senia) selon le site internet (etudiant-algerien.com, 2017), et de Constantine (Casbah) selon le site internet de l’université Constantine. Il en fut de même pour les locaux appartenant à certains ministères comme ceux de l’industrie à Annaba (Sidi Amar) selon le site internet de l’université d’Annaba et de l’éducation nationale à Constantine (Médersa). Ces infrastructures récupérées appartiennent en majorité à l’armée, car il n’y avait pas d’établissements civils vides.
14Les sites d’implantation de ces établissements universitaires sont différents puisque ceux de Constantine se localisent dans le centre-ville alors que celui d’Alger est dans un faubourg de la ville. Si ces cas précédents se situent dans le tissu urbain, les deux autres sont distincts, étant donné que celui d’Oran se trouve dans la commune d’Es Senia qui est limitrophe à celle d’Oran et il en est de même pour celui d’Annaba qui est implanté dans la commune limitrophe de Sidi Amar. Ces noyaux initiaux du système universitaire sont devenus les campus centraux de leurs universités, siège du rectorat, à l’exemple de l’université Alger 2 (Bouzaréah), de l’université d’Oran-Es Senia et de l’université d’Annaba. Par contre, en ce qui concerne l’université de Constantine, ses 2 campus (Casbah et Médersa) ont été rétrocédés à leurs propriétaires initiaux à la suite de la création du campus central Frères Mentouri (Figure 1).
15Cette politique de récupération a été rapidement abandonnée pour une nouvelle politique de création et d’implantation de campus universitaires qui répondent à certains critères dont la disponibilité du foncier domanial. Cela a abouti à plusieurs variantes de localisation et d’attribution de fonction, allant d’un simple équipement structurant de la ville jusqu’à un pôle universitaire participant au marketing de la ville.
Figure 1. La récupération d’anciens locaux
III. LA 1E CARTE UNIVERSITAIRE « LE RÉSEAU UNIVERSITAIRE » (1983) : LE CAMPUS UNIVERSITAIRE CRÉÉ DANS LE TISSU URBAIN ET À LA PÉRIPHÉRIE DE LA VILLE
16À partir de 1983, la 1e carte universitaire (CREAD-MESRS, 2006) a recommandé l’étalement et l’enrichissement du réseau universitaire de nouveaux types d’établissements. Il s’agit, de 6 Écoles Normales Supérieures (ENS) et de 35 Instituts Nationaux d’Enseignement Supérieur (INES) dont l’accès s’effectue obligatoirement avec le baccalauréat. Certains sont localisés dans les villes universitaires précédemment citées alors que d’autres sont implantés dans des villes qui en étaient dépourvues telles que Biskra, Mostaganem, Tiaret. Ce mouvement s’inscrit dans le cadre d’une politique spatiale volontariste qui est en relation directe avec l’aménagement du territoire, car elle répond, à partir d’un ensemble de paramètres, à la logique politico-économique qui préconisait fortement la lutte contre les disparités régionales. Ainsi tous les ensembles naturels, à savoir le littoral, l’Atlas Tellien, les Hautes Plaines-Hauts Plateaux, l’Atlas saharien et le Sahara sont couverts à divers degrés. Sur le plan administratif, ce sont 21 chefs-lieux de wilaya sur 48 qui sont dotés d’équipements universitaires. En 1988, les effectifs atteignent 181 350 étudiants.
17Dès 1989 (CREAD-MESRS, 2006), trois grandes opérations ont été menées pour l’agrandissement du réseau universitaire et la promotion de ses établissements. Elles consistent en l’élévation des centres universitaires en universités, le regroupement des INES en centres universitaires et la création de nouveaux INES. Ces 3 opérations ont été réalisées durant les 2 décennies (1989-2008) comme suit :
18• la promotion des 6 centres universitaires créés en 1977 en 6 universités en 1989.
19• de 1992 à 1998 s’est opéré le regroupement des INES en centres universitaires dans les villes qui en avaient été pourvues (Tiaret, Laghouat, Oum El Bouaghi, Mostaganem…) et en parallèle, s’est effectuée la création de nouveaux INES dans les villes dépourvues d’équipements universitaires (Adrar, El Tarf, Mascara…).
20• de 2001 à 2007 (CHERRAD, 2016), débute l’opération de la promotion de centres universitaires en universités (Laghouat, Adrar, Tiaret, Skikda, Guelma, Msila, Chlef et Ouargla), ainsi que celle d’INES en centres universitaires (El Oued, Djelfa) ; ensuite a lieu la création de nouveaux centres universitaires (Khenchela, Khemis-Miliana et Tamanrasset).
21Durant cette décennie, le mouvement volontariste s’est poursuivi et il a abouti à la formation d’un réseau universitaire comprenant 27 universités, 16 centres universitaires auxquels il faut ajouter 15 écoles nationales supérieures et écoles normales supérieures. Ces dernières, dont la création remonte aux décennies antérieures, sont réparties ainsi : 12 à Alger et les 3 autres à Oran, Constantine et Blida. Leur présence renforce le dispositif universitaire dans ces villes (Carte 2). En 2009, le nombre d’étudiants est alors de 1 034 313. Sur le plan territorial, ce sont 40 villes qui abritent des établissements universitaires de taille et de statut différents.
Carte 2. Répartition des universités et des centres universitaires en 2007
22Cette politique de création et de développement rapide des établissements universitaires s’est traduite à l’échelle locale par 2 tendances majeures dans les politiques de localisation, à savoir la création de campus universitaires dans le tissu urbain ou bien à la périphérie immédiate de la ville. Dans la première tendance, l’existence de réserve foncière dans la ville a été mise à profit par les autorités locales pour réaliser le campus universitaire, alors que dans la seconde, le recours à la périphérie de la ville a été l’option nécessaire pour la réalisation du campus universitaire.
23Dans le premier type d’implantation qui est celui du campus universitaire dans le tissu de la ville, des mutations spatiales et fonctionnelles apparaitraient à court et à long terme (Laperrière et Sokoloff, 1994). À court terme, il modifie et structure son proche tissu urbain comme l’explique Miossec (2019), de même qu’il génère une certaine forme d’attractivité (présence de petits commerces, de services). À moyen et à long terme, un processus de transformation et d’adaptation de son environnement s’établit par la création d’espaces de consommation (cafétéria, restaurant, bureau de reprographie) pouvant aboutir à la création d’un environnement adapté à la vie des étudiants (hébergement, consommation, loisirs, culture). Il comprendrait même l’installation des nouvelles startups pour les jeunes diplômés, ce qui aura un impact certain dans le développement local (Tremblay et Vieira, 2012). Par ailleurs, des résidences pour les enseignants peuvent être construites dans le voisinage, créant ainsi une certaine animation. C’est un large éventail que nous retrouvons dans les relations université-ville.
24Dans le cas algérien, le campus universitaire est le qualificatif d’un site disposant d’équipements pédagogiques, scientifiques, administratifs, de restauration et parfois d’hébergement pour les étudiants, car la législation ne le définit pas.
25Le campus installé dans le tissu urbain a très peu d’impact sur son environnement mis à part sa densification et l’installation de petits commerces. Ce faible impact s’explique en partie par la garantie de l’octroi d’une chambre en cité universitaire que donne l’État à tout étudiant habitant à plus de 50 km de son université. Par conséquent, ces étudiants ne procèdent pas à des locations de chambre dans les environs du campus. En plus, le règlement strict des cités universitaires qui interdit la sortie des étudiantes de leur résidence après 18 heures, pour des raisons sécuritaires, limite fortement leur vie nocturne. Généralement, il n’existe pas de lieu de détente pour les étudiants. En définitive, l’insertion des campus dans le tissu urbain reste un phénomène mineur.
26Pour illustrer ce cas, nous prenons les exemples des campus des universités de Batna, Mostaganem et Laghouat (Figure 2) aux caractéristiques exposées dans le Tableau 1. Notons que ce type de campus se retrouve en premier lieu dans les universités des 4 métropoles du pays.
27Dans le cas de la ville de Batna, c’est le campus de la faculté de Droit et des Sciences Politiques qui a été choisi. Il se situe dans sa partie sud-ouest et il est limité au nord par la route de Biskra et de l’habitat, au sud par le quartier Haï Chouhada, à l’est par le lotissement Ben Abdellah et à l’ouest par un centre de formation professionnelle. L’environnement immédiat de cette faculté est caractérisé essentiellement par des cafétérias, fast-food, kiosques et supérettes, c’est-à-dire des commerces de proximité en liaison avec les étudiants et nullement des espaces de loisirs pour eux.
28Dans la ville de Laghouat, c’est le campus qui abrite la faculté des Sciences Économiques, Commerciales et de Gestion, l’Institut des Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives et l’École Normale Supérieure qui a été choisi. Il se localise dans la partie centrale de la ville et en bordure de la route nationale n°1 qui la traverse du nord au sud. Ce campus est limité au nord par les directions de l’éducation nationale et celle de la jeunesse et des sports ainsi que par une salle des sports, au sud et à l’est par un parc, à l’ouest il est limité par la cité des 300 logements. Le campus n’a pas un réel impact sur son environnement, car paradoxalement les activités, les services et les commerces sont ceux d’un centre-ville d’un chef-lieu de wilaya (vente de pièces détachées automobiles, meubles, quincaillerie). Il n’y a pas de relation entre le campus et son environnement. Par contre, il participe au rayonnement de la ville par sa localisation centrale.
Figure 2. Le campus universitaire dans le tissu urbain
29En ce qui concerne la ville de Mostaganem, c’est le campus de la faculté de Droit et des Sciences Politiques qui a été retenu. Il se localise dans la partie sud-ouest de la ville dans le quartier Salamandre. Au nord, c’est le terrain de l’entreprise portuaire qui le limite, au sud et à l’ouest, c’est l’habitat du quartier Salamandre et à l’est, il y a l’école des beaux-arts et un hôtel. L’environnement est caractérisé par la présence de multiples services, surtout celui de la restauration, en raison de la proximité du front de mer et du campus.
30Finalement, l’insertion de campus universitaire dans le tissu de la ville n’a eu pour effet que sa densification et la création de quelques services qui répondent aux besoins des étudiants
31Dans la seconde tendance qui est celle de l’implantation du campus universitaire à la périphérie de la ville, elle est un phénomène presque général qui est dû à la disponibilité du foncier domanial. En outre, cette localisation est envisagée par les autorités locales comme étant l’un des points forts du futur front d’urbanisation (Cherrad, 2009). L’ancrage du campus universitaire à la périphérie de la ville favoriserait théoriquement une relation directe avec la nouvelle extension urbaine. Celui-ci devrait recevoir les services et les commodités pour un bon fonctionnement de la vie universitaire.
32Dans le cas algérien, ces types de campus sont le point de départ d’une extension urbaine qui ne répond que partiellement aux besoins de la communauté universitaire. À ce titre, ce sont les campus des villes de Sétif, Tipaza et Tindouf qui sont examinés (Figure 5). Les critères ont été présentés dans le Tableau 1. Par ailleurs, ce type de campus se retrouve en premier lieu dans les 4 métropoles du pays (Figure 3).
33La ville de Sétif dispose de 2 universités, dont l’université Sétif 2 installée dans un seul campus comprenant 3 facultés et des résidences universitaires. L’ensemble de réalisation très récente est implanté au nord-est de la ville. Il fait figure d’avancée extrême de la ville dans cette partie. Le campus est limité dans sa partie septentrionale et orientale par une voie de contournement appelée « Déviation vers Constantine » et dans sa partie occidentale par le boulevard N°3. L’environnement immédiat de cette université est assez particulier étant donné sa localisation périphérique. Ainsi sa partie nord est en contact avec le monde rural et ses activités agricoles (céréaliculture) alors que pour sa partie ouest, ce n’est qu’au-delà d’une vaste parcelle encore en friche que sont établis des cafétérias, fast-food, kiosques et supérettes, c’est-à-dire des commerces de proximité en liaison avec les étudiants. La zone située au sud de l’université a été bâtie après sa création. Si le campus a eu pour effet de densifier son environnement, celui-ci par contre ne sert que partiellement l’université.
34La ville de Tipaza possède un centre universitaire, de création récente, localisé dans son extension sud-est. Ce centre universitaire est limité au nord par un grand parc d’attractions, au sud par une alternance de terrains en friche et d’habitats, à l’est par des équipements et à l’ouest par de l’habitat. L’environnement constitué par des équipements administratifs, des services et de l’habitat ne lui permet pas d’avoir des relations fortes avec le campus. C’est uniquement dans sa partie occidentale que l’environnement avec des cafétérias, fast-foods et supérettes, c’est-à-dire des commerces de proximité, est en rapport avec les étudiants. Le centre universitaire a contribué à la création de cette extension sans qu’elle ne s’adapte à ses besoins. La liaison avec l’environnement est réduite.
Figure 3. Le campus universitaire à la périphérie de la ville
35Quant à la ville de Tindouf, son centre universitaire construit récemment est situé dans sa partie méridionale. Il est limité au nord et au sud par de vastes parcelles non exploitées, à l’est par un terrain de jeu et à l’ouest par de l’habitat. Son implantation à la périphérie de la ville s’est effectuée avec des équipements dont sont dotés les chefs-lieux de wilaya (siège de la wilaya, directions techniques de wilaya...). Dans ces conditions, les cafétérias, fast-food, kiosques et supérettes, c’est-à-dire les commerces de proximité en liaison avec les étudiants, sont peu nombreux. Ce centre universitaire qui était sur le front de la périphérie se retrouve désormais largement au centre de cette partie méridionale. Cependant son environnement n’est pas totalement au service des étudiants.
36Ces 3 exemples de campus reflètent le volontarisme de l’État à l’égard de ce secteur, mais aussi le manque de planification spatiale quant à leur implantation à la marge de la ville. L’absence d’une affectation réfléchie, d’un aménagement coordonné, ne contribue pas à un développement harmonieux de l’environnement.
IV. LA 2E CARTE UNIVERSITAIRE (2008) : CRÉATION DE CAMPUS EN MILIEU RURAL, DE PÔLES ET DE VILLES UNIVERSITAIRES
37En 2008, un premier élan a consisté en la promotion de 8 centres universitaires en universités et surtout en la création de 8 centres universitaires (Ain Temouchent, Mila, Tipaza…), de 4 annexes universitaires et de 12 écoles supérieures. Dès lors, la totalité des 48 wilayas du pays dispose d’une université ou bien d’un centre universitaire.
38L’année 2010 est marquée par une dernière impulsion qui a consisté en la promotion et la restructuration des établissements universitaires (Cherrad, 2016). Ce fut la promotion des centres universitaires en universités (Ain Temouchent, Relizane, Tissemsilt, Tamanrasset). Quant à la restructuration des grandes universités, ce furent celles d’Alger et de Constantine qui ont été scindées en 3 universités et celles d’Oran, de Batna, de Blida et de Sétif en 2 universités. Les annexes universitaires de Maghnia (Tlemcen), d’Aflou (Laghouat) et de Barika (Batna) ont été promues en centres universitaires. En dernier lieu, 23 écoles supérieures et 5 écoles normales supérieures ont vu le jour.
Carte 3. Répartition des universités et des centres universitaires en 2021
39Durant cette période, aux 2 tendances précédentes se sont ajoutées 3 nouvelles tendances de localisation des établissements universitaires, à savoir l’implantation en milieu rural, la formation de pôle universitaire et la réalisation d’une ville universitaire. Cette multiplication des tendances s’explique par le développement du réseau universitaire qui désormais couvre les 48 wilayas (Carte 3).
40L’implantation de campus en dehors des limites de la ville est la première tendance qui est due au manque de foncier domanial dans la ville concernée ou bien à sa périphérie immédiate. Cette politique de localisation des campus reste marginale à l’échelle du pays. Les distances entre le campus et le centre-ville sont variables allant de 4,6 km pour celui de Mila jusqu’à 20 km pour celui de Ghardaïa (Figure 4). Cet isolement du campus en milieu rural le prive des commodités de la ville. Cette situation influe négativement sur la vie des étudiants et plus généralement sur les relations université-ville. Les campus des villes de Mila, Ghardaïa et El Bayadh sont examinés selon les critères de sélection présentés dans le Tableau 1.
41L’université de Ghardaïa est située au sud-est de la ville et en bordure de la route nationale N°1. La distance qui la sépare de la ville est de l’ordre de 20 km. Elle a été d’abord un centre universitaire fondé en 2005, puis par la suite transformé en université en 2012. Cette situation résulte de l’absence de foncier domanial à Ghardaïa ainsi que d’une topographie inappropriée pour des équipements d’une telle envergure étant donné que la ville se situe dans une vallée assez étroite. Le campus universitaire qui se trouve entre la zone industrielle et l’aéroport est limité dans ses parties orientale et septentrionale par une bande de reboisement forestier, au-delà de laquelle s’étale le désert, à l’ouest par de l’habitat et au sud par l’Unité de Recherche Appliquée en Énergies Renouvelables. Le campus est très aéré en raison des espaces inoccupés, car les équipements ont été réalisés en 2 phases essentielles. Son implantation hors de la ville est caractérisée par un environnement pauvre, indigent, en services pour les étudiants (cafétérias, fast-food, kiosques et supérettes).
42La ville de Mila possède depuis 2008 un centre universitaire qui est à l’ouest de la ville et à plus de 4 km. Cette localisation en pleine campagne résulte de l’absence de foncier domanial à proximité de la ville. Le campus se présente comme un îlot sur un promontoire entouré par des parcelles consacrées à la céréaliculture. Cependant, il est à relever l’avancée du front d’urbanisation depuis Mila sur plusieurs centaines de mètres. Ce centre universitaire, loin de la ville, est dépourvu d’un environnement en relation avec les besoins de ses utilisateurs.
43La ville d’El Bayadh possède un centre universitaire créé en 2011. Il a été bâti à une dizaine de kilomètres du centre-ville, en raison de l’absence de foncier domanial. Longeant la route nationale N°47 il est implanté en pleine campagne. Le campus est limité à l’ouest par une bande de reboisement forestier alors qu’au nord, à l’est et à l’ouest, ce sont des terrains de roches dures qui s’étendent. Son environnement ne possède aucun équipement ou commerce de proximité en rapport avec les besoins des étudiants. Ce centre universitaire est un exemple de campus situé totalement en dehors de la ville et à une distance relativement conséquente. Cette localisation est défavorable à la mise en place d’un environnement.
44La distance, la topographie et le climat sont les facteurs qui jouent un rôle cardinal, influent quant au rattachement du campus à la ville. Cependant, leur éloignement ne peut pas être perçu comme un élément strictement négatif, car disposant encore de beaucoup d’espaces libres à leur proximité, ils pourraient attirer et fixer de l’habitat, des unités de production et des centres de recherche dédiés à leur environnement socioéconomique.
Figure 4. Le campus universitaire en milieu rural
45La deuxième tendance d’implantation de campus universitaire, qui a consisté en la création de « pôle universitaire » dans certaines villes, est une occasion à multiples buts et incidences. Cette terminologie de « pôle universitaire » n’a aucun fondement institutionnel comme celle du campus. Il est utilisé par les autorités locales et la communauté universitaire pour désigner un établissement universitaire de grande taille qui se compose de locaux pédagogiques, administratifs, et d’autres destinés à la recherche et à l’hébergement. En raison de l’absence d’un texte qui définit précisément le pôle universitaire (taille, composante), celui-ci désigne autant un vaste campus qu’un groupement de campus.
46Ses caractéristiques sont le produit de la combinaison entre la politique nationale de dotation des universités en équipements et la politique urbaine locale. En effet, elle permet de démarquer le pôle universitaire du campus universitaire et ainsi élever symboliquement les villes qui en sont dotées des autres villes abritant uniquement des campus universitaires. Autrement dit, les autorités locales adoptent une forme sommaire de marketing territorial dans leur politique urbaine. L’assiette foncière réservée au pôle universitaire est d’une part démesurée et d’autre part, elle se situe sur un axe routier important à l’entrée de ville. En réalité, ces aspects ont d’autres fonctions puisqu’une telle réserve foncière peut grandement faciliter le développement de l’université par la construction de nouveaux équipements.
47La forme « pôle universitaire » a été adoptée en premier lieu dans les 4 métropoles et par la suite dans les villes possédant de grandes universités. Les campus des villes de Tlemcen, d’Ouargla et d’Oum El Bouaghi (Figure 5) sont examinés selon les paramètres contenus dans le Tableau 1.
Figure 5. Le pôle universitaire implanté sur un axe important de la ville
48L’université de Tlemcen comprend 5 sites, dont un pôle universitaire appelé « Nouveau Pôle ». Il se situe à la périphérie nord-ouest de la ville et il est traversé par la route nationale N°22c qui relie la ville de Tlemcen à l’autoroute est-ouest. Ce pôle est limité dans sa partie nord et ouest par cette route nationale, à l’est par des terrains agricoles et au sud par une caserne. Il s’étend sur 105 hectares environ et comprend 5 facultés, des laboratoires de recherche, une bibliothèque centrale, un plateau technique et 3 cités universitaires. Ce pôle se présente sous l’aspect d’un ensemble multidisciplinaire rehaussant le niveau et le prestige de l’université de Tlemcen. Il dispose d’un potentiel qui lui permet de devenir une université autonome.
49Le pôle universitaire d’Ouargla est établi dans la partie sud-ouest de la ville en bordure de la route nationale N°49. Il est limité au nord par cette dernière, au sud par des équipements et de l’habitat, à l’est par une zone industrielle et à l’ouest par des terrains nus. Ce pôle qui est formé par 3 campus accolés les uns aux autres constitue l’université d’Ouargla. Le plus ancien se trouve dans la partie orientale et le plus récent dans la partie occidentale. Ce pôle universitaire qui s’étale sur 90 hectares environ est occupé par le rectorat, un auditorium, 10 facultés, 2 instituts en plus de la bibliothèque centrale, des laboratoires de recherche et 4 cités universitaires, consistant ainsi en l’ensemble des structures de l’université.
50L’université d’Oum El Bouaghi comprend 4 campus et une annexe répartis sur les 3 villes d’Oum El Bouaghi, Ain Beida et Ain M’Lila. Dans la ville d’Oum El Bouaghi, ce sont 3 campus qui forment le pôle universitaire. Ce dernier, traversé par la route nationale N°10, se situe à l’entrée ouest de la ville. Il est limité au nord par une voie mécanique d’évitement appelée rocade nord, au sud par un ensemble d’habitations dénommé « Pôle urbain Macomades » (Cherrad, 2020a), à l’est par de l’habitat et des équipements, à l’ouest par de l’habitat et des terrains encore nus. Ce pôle universitaire qui occupe une superficie de 74 hectares environ regroupe le rectorat, l’auditorium, la bibliothèque centrale, 6 facultés, 2 instituts et des laboratoires de recherche ainsi que 2 cités universitaires.
51Le pôle universitaire, au même titre que le campus universitaire localisé dans la périphérie, va agir dans 2 domaines. Le premier consiste en une action d’implantation et de structuration de la périphérie urbaine, alors que le second est la formation d’un mouvement d’attraction puisqu’il aura tendance à agréger dans l’étalement urbain des secteurs économiques et sociaux. Cependant, l’environnement demeure indigent et peu en relation avec le pôle universitaire.
52La dernière tendance d’organisation des campus qui est entrevue par les autorités locales est la création d’un grand campus universitaire appelé « ville universitaire ». Il disposerait de toutes les commodités urbaines (commerces, services, loisirs) et il serait un pôle d’excellence dans l’enseignement, l’innovation et la recherche dans le cadre de la promotion de la métropole constantinoise. Son implantation à la limite de la ville nouvelle Ali Mendjeli (Ballout, 2014), qui est située dans la périphérie de Constantine, répond à des paramètres de marketing de la métropole tels que l’entrée de ville, la proximité de l’autoroute et de l’aéroport, l’utilisation du tramway comme moyen de déplacement favorisé (Figure 6).
53La ville universitaire qui couvre 170 hectares (Cherrad, 2020b) se situe au nord-est de la ville nouvelle Ali Mendjeli. Son programme a consisté en la réalisation de 44 000 places pédagogiques réparties en 9 structures de 4000 places et une de 8 000 places ; une bibliothèque centrale, un auditorium, un centre de recherche, le siège du rectorat, 38 000 lits pour 19 cités universitaires de 2000 lits, 4 restaurants universitaires, 1500 logements de fonction, un centre multifonctionnel, une mosquée et un complexe sportif. En 2021, seuls les équipements pédagogiques et d’hébergement (cités universitaires et 480 logements de fonction) ainsi qu’un restaurant universitaire ont été achevés, alors que le centre de recherche reste en cours de réalisation. Les infrastructures d’animation de la vie universitaire qui devaient engendrer une ville universitaire n’ont pas été réalisées et celle-ci n’est en fait qu’un campus de grande taille. Cependant, ce campus a eu un effet d’attraction puisque dans son environnement immédiat, les autorités locales ont érigé une autre école supérieure et un nouveau centre de recherche.
Figure 6. La ville universitaire à Constantine
54En 2021 (ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique MESRS, 2020), le réseau universitaire implanté dans les 51 villes du pays est doté de 109 établissements composés de 54 universités, 9 centres universitaires, 35 écoles nationales supérieures, 11 écoles normales supérieures. Ils assurent la formation de 1 546 243 étudiants.
55Cette carte universitaire (Carte 3) qui s’est mise en place progressivement s’est inscrite dans le cadre de l’aménagement du territoire, car elle couvre l’ensemble du territoire national et ses différents milieux géographiques et en réalisant au moins un établissement universitaire dans chaque wilaya, globalement, il y a une correspondance entre le statut de l’établissement et la taille de la ville telle que définie par la loi relative à l’aménagement et au développement durable du territoire de 2001 ainsi que la loi d’orientation de la ville de 2006 :
56- les 4 métropoles (Alger, Oran, Constantine et Annaba) ayant une population de plus de 300 000 habitants disposent au minimum d’une université et de 3 écoles supérieures avec la nette prédominance d’Alger.
57- les grandes villes au nombre de 28, ayant une population comprise entre 100 000 et 300 000 habitants, connaissent des situations différentes puisque 25 d’entre elles possèdent au moins une université, alors que les 3 autres ne possèdent aucun établissement universitaire.
58- les villes moyennes au nombre de 13 sur un total de 61, ayant une population comprise entre 50 000 et 99 000 habitants, disposent d’un établissement universitaire.
59- l es petites villes au nombre de 6 sur un total de 178, ayant une population inférieure à 50 000 habitants, sont pourvues également d’un établissement universitaire.
CONCLUSION
60Le réseau universitaire algérien qui a amorcé sa constitution par la récupération de locaux parfois inadaptés à sa fonction (caserne, locaux préfabriqués…) s’est rapidement développé sous l’impulsion d’un volontarisme étatique ininterrompu. La multiplication des campus, qui est le corollaire de la massification des effectifs étudiants, s’est réalisée en prenant en considération les préoccupations de l’aménagement du territoire (ensembles naturels, zone frontalière, taille et rang des villes…). Ce processus qui a affecté progressivement l’ensemble du pays a abouti à une trame dans laquelle ne figurent que les localisations des campus au niveau des villes chefs-lieux de wilaya. Au niveau local, les autorités ont construit des campus sans les programmer au préalable dans les instruments d’urbanisme (plan directeur d’aménagement et d’urbanisme, plan d’occupation du sol) alors qu’ils devaient l’être en raison de leur importance, de leur taille et de leur coût financier.
61La conséquence de cette situation paradoxale a permis aux autorités locales d’avoir plus de liberté, dans le choix des sites d’implantation qui, dans beaucoup de cas, répondaient plutôt à leurs propres objectifs. Il s’en est suivi que dans certaines villes, les campus sont implantés dans le tissu urbain, ce qui a permis sa restructuration. Dans d’autres villes, le site choisi étant à sa périphérie, il a contribué à la formation d’un front urbain. Parmi les cas extrêmes, il existe des campus presque complètement isolés, car implantés en pleine campagne et à l’opposé des pôles universitaires situés sur un axe important de la ville ce qui va contribuer à son marketing et à l’amélioration de son image.
62L’essor de ce secteur présente tout de même des enjeux dont certains sont immédiats alors que d’autres sont plus lointains. Les politiques urbaines locales ne se sont pas souciées des besoins intérieurs et extérieurs essentiels à la vie quotidienne de la communauté universitaire, car ces campus ainsi que leur environnement immédiat sont faiblement dotés en commodités et services. À une échéance un peu plus lointaine, les effets d’éloignement des campus de la ville ou de la saturation des quartiers sont à craindre, car ils peuvent engendrer des problèmes imprévus, inopinés. Dans le tissu urbain, l’effet de sa densification engendre pour sa part des problèmes de circulation, de même que la distance entre le campus et la ville risque de créer les conditions d’une coupure, d’une fracture, aboutissant à un espace marginalisé si leurs liaisons sont défectueuses.
BIBLIOGRAPHIE
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To cite this article
About: Mohammed Mounir CHERRAD
Docteur, Maitre de Conférences B
Université Salah Boubnider Constantine 3 – Algérie
mounir.cherrad@univ-constantine3.dz