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- Volume 11 (2007)
- numéro 4
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Cucumis melo L. subsp. agrestis (Naudin) Pangalo (Cucurbitaceae) : nécessité de clarification sur le statut de la sous-espèce
1La confusion de nomenclature qui prévaut au sein de la famille des Cucurbitaceae appelle de plus en plus à la révision de plusieurs genres et espèces (Jeffrey, 1990 ; 2005). La diversité de forme, de taille, de couleur des organes des espèces de cette famille de plus de 825 espèces (Jeffrey, 1990 ; Schippers, 2004) rend difficile le choix des caractères discriminants au sein de chaque espèce. De ce fait, il y a actuellement une confusion entre les cultivars de Cucumis melo présents sur le continent africain (Djé et al., 2006). Le polymorphisme au sein de Cucumis melo (Tahir, Oluoch, 2004) requiert une caractérisation approfondie pour l’établissement des formes et des variétés. Cependant Cucumis melo subsp. agrestis (Naudin) Pangalo (Pangalo, 1933 ; 1950) est connue et décrite et sa taxonomie souffre de peu d’insuffisance.
2Les échantillons de C. melo subsp. agrestis (syn. C. melo var. Agrestis) rapportés dans la version révisée de la Flore de l’Afrique de l’Ouest sont décrits comme suit (Hutchinson, Dalziel, 1954, p. 213) :
3« Fruits smooth or at most green-lined of hairy; a ground trailer; leaves broadly ovate, widely cordate at base, 5-lobed to about 1/3 their length or hardly lobed, denticulate… ». « Fruit globose, obovoid or oblong, longitudinally striped with green ».
4Cette description est bien évidemment celle de l’échantillon présenté à la figure 1. La Flore du Sénégal (Berhaut, 1975, p. 249) est plus informative et décrit l’espèce comme :
5« Plante herbacée annuelle rampante, à feuille alterne et à vrille simple. Limbe cordiforme long et large de 5 à 9 cm, peu lobé sur les côtés, plutôt profondément et irrégulièrement sinueux ; base moyennement cordée et sommet largement arrondi. Base trinervée, 3 à 4 autres nervures secondaires sur le sommet de la médiane. Fruit ovoïde, de la grosseur d’un œuf de pigeon, à poils hirsutes dans le jeune âge, puis à poils doux et ras. Long de 3 à 4 cm, large de 2 à 3 cm, la surface est ornée de bandes longitudinales de taches vert foncé ».
6Pour Hutchinson, Dalziel (1954) et Berhaut (1975) il s'agit d'une variété décrite par Naudin (1859). Mais en réalité la variété décrite par Naudin a été élevé au rang de sous-espèce par Pangalo (1933, 1950).
7« La forme sauvage de C. melo est distinguée comme la sous-espèce agrestis, montrant des poils courts sur l’ovaire, ainsi que le diamètre de la tige, les fleurs et les fruits comparativement plus petits que la forme cultivée (sous-espèce melo) dont l’ovaire possède des poils plus longs avec le diamètre de la tige, les fleurs et les fruits plus grands » (Tahir, Oluoch, 2004). Les figures 2 et 3 présentent un ovaire fécondé et un fruit en développement de C. melo subsp. melo. D’après Berhaut (1975), le fruit de agrestis est long de 3 à 4 cm et large de 2 à 3 cm. Selon cet auteur, le fruit a la taille d’un œuf de pigeon. Les caractères de cette espèce tels que décrits par Djé et al. (2006) correspondent mieux aux caractères botaniques de la sous-espèce melo qu’à ceux de la sous-espèce agrestis (Tahir, Oluoch, 2004). Sept jours après la nouaison, le fruit de l’espèce décrite dans Djé et al. (2006) dépasse 3 cm de longueur et 2 cm de diamètre. La grosseur du fruit à la nouaison et son statut de plante cultivée indiquent bien qu’il s’agit d’une variété du melon africain de la sous-espèce melo et non une variété de la sous-espèce agrestis comme l’indiquent les auteurs.
8En effet, C. melo subsp. agrestis est largement distribuée dans les milieux naturels des régions phytogéographiques soudano-guinéenne et soudanienne de l’Afrique de l’Ouest (Achigan Dako, observations personnelles). Nous avons collecté l’espèce dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest entre 2005 et 2007 : Bénin, Togo, Mali, Ghana, Sénégal, Guinée, Niger (Figure 4). C. melo subsp. agrestis est une plante sauvage qui colonise divers habitats en Afrique de l’Ouest (Berhaut, 1975). On la retrouve dans le couloir sec dahoméen sur la côte béninoise. En régions soudaniennes, nous avons noté sa présence sur les terrains vagues autour des agglomérations, dans les jachères cultivées, les savanes herbeuses ou arbustives. Elle est abondamment présente dans la Haute Guinée, de Siguiri à Kouroussa, dans les zones de pâturage de Matiakoali (Burkina Faso), dans la savane herbeuse de Porga (Bénin), sur des terrains vagues à Buipe au Ghana, etc. La plante est retrouvée dans les mêmes habitats que d’autres espèces de Cucurbitaceae telles que Mukia medaraspatens (L.) M. Roem., Zehneria thwaitesii (Schweinf.) Jeffrey. Burkill (1985) reconnaît aussi l’existence des formes sauvages et spontanées de Cucumis melo en Afrique de l’Ouest. L’auteur avance d’ailleurs que le centre d’origine de l’espèce pourrait bien être l’Afrique. Dans la Flore du Bénin, Adjakidjè (2006) indique que cette espèce est savanicole, probablement originaire de l’Afrique occidentale.
9Il faut donc retenir que la forme de « C. melo cultivée en Côte d’Ivoire et consommée comme pistache » (Djé et al., 2006) est certainement différente de la forme sauvage, non cultivée et rencontrée dans les phytorégions guinéenne, soudano-guinéenne et soudanienne de l’Afrique de l’Ouest (Berhaut, 1975 ; Achigan Dako, observations personnelles).
10Plus particulièrement, cette phrase de Djé et al. (2006), aux pages 116 et 117 « Cucumis melo var. agrestis est pourtant une plante cultivée dont les graines à l’état séché sont consommées dans plusieurs régions africaines » doit être considérée avec prudence puisque la plante décrite n’est pas la sous-espèce agrestis même si celle-ci est présente en Côte d’Ivoire d’après la base de données du Département d’Agriculture des Etats-Unis (USDA, 2006). L’espèce décrite par Djé et al. (2006) n’a pas les caractéristiques botaniques de la forme sauvage agrestis pour être ainsi dénommée. Il ne nous paraît donc pas justifié de soutenir que C. melo var. agrestis est une variété cultivée. Il est plus indiqué de soutenir qu’il existe une variété cultivée de C. melo en Côte d’Ivoire et ceci est également valable pour d’autres pays de la sous-région.
11Des travaux de séquençage au moyen de l’ITS (Internal Transcribed Spacers) de l’ADN ribosomal sont en cours à l’Institut de Génétique de Gatersleben (Allemagne) sur les accessions cultivées et sauvages de C. melo collectées en Afrique de l’Ouest. Ceci pourrait contribuer à appuyer les arguments botaniques qui différencient les formes sauvages et les formes cultivées.
Bibliographie
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Berhaut J. (1975). Flore illustrée du Sénégal. Dicotylédones. Tome III. Connaracées à Euphorbiacées. Dakar, Sénégal : Gouvernement du Sénégal, Ministère du Développement rural et de l’Hydraulique, Direction des Eaux et Forêts, 634 p.
Burkill HM. (1985). The useful plants of West Tropical Africa. 2nd ed. Vol. 1. Families A-D. Kew, UK : Royal Botanical Gardens, 960 p.
Djé Y., Kouonon LC., Zoro Bi AI., Gnamien GY., Baudoin JP. (2006). Etude des caractéristiques botaniques, agronomiques et de la biologie florale du melon africain (Cucumis melo L. var. agrestis Naudin, Cucurbitaceae). Biotechnol. Agron. Soc. Environ. 10 (2), p. 109–119.
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Tahir IM., Oluoch MO. (2004). Cucumis melo L. In Grubben GJH, Denton OA. (eds). Plant resources of tropical Africa 2. Vegetables. Wageningen, Netherlands: PROTA Foundation/ Leiden, Netherlands: Backhuys Publishers/ Wageningen, Netherlands: CTA, p. 243-284.
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White F. (1983). The vegetation of Africa. A descriptive memoir to accompany the Unesco AETFAT/UNSO vegetation map of Africa. Paris: UNESCO, 356 p.
Pour citer cet article
A propos de : G. Enoch Achigan-Dako
Université d’Abomey-Calavi. Faculté des Sciences agronomiques. Laboratoire de Biologie végétale. Abomey-Calavi (Bénin) – Leibniz Institute of Plant Genetics and Crop Plant Research. Department of Genebank. Gatersleben (Germany). E-mail : dachigan@gmail.com
A propos de : Jean-Pierre Baudoin
Unité de Phytotechnie tropicale et Horticulture. Faculté universitaire des Sciences agronomiques de Gembloux. Passage des Déportés, 2. 5030 Gembloux (Belgique).