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Effets des amendements locaux sur les rendements, les indices de nutrition et les bilans culturaux dans un système de rotation coton-maïs dans l'ouest du Burkina Faso
Notes de la rédaction
Reçu le 9 novembre 2007, accepté le 11 mars 2008
Résumé
Pour évaluer les effets des amendements sur les rendements et les bilans culturaux, une étude a été conduite durant deux années sur un sol ferrugineux tropical en culture continue depuis 20 ans. Trois amendements (compost, phosphate naturel du Burkina et dolomie) ont été apportés à des sols et comparés à un sol témoin non amendé dans un dispositif en blocs de Fisher comportant quatre répétitions. L'évaluation de la nutrition minérale du cotonnier (Gossypium hirsutum L.) et du maïs (Zea mays L.) a été faite. Les rendements des cultures et les productions de matière sèche ainsi que les bilans culturaux ont été déterminés. Les amendements par le compost, le Burkina phosphate et la dolomie ont amélioré les quantités de matière sèche des cotonniers de 5 à 13 % et celles du maïs, de 2 à 10 % par rapport au sol non amendé. L'apport de 6 t.ha-1 de compost a amélioré de façon significative, par rapport au sol témoin non amendé, les rendements en coton graine et en maïs grain. L'apport de 1,5 t.ha-1 de dolomie a augmenté de façon significative le rendement en maïs. L'application de 0,3 t.ha-1 de Burkina phosphate n'a influencé ni les rendements en coton et en maïs, ni les productions de matière sèche. Comparativement au sol témoin, les apports au sol de compost, de Burkina phosphate et de dolomie n'ont pas influencé les teneurs en azote, en phosphore et en potassium des plants de cotonniers et de maïs. Au 70e jour après les semis, les indices de nutrition des cotonniers en phosphore, potassium et soufre ont révélé une bonne nutrition aussi bien sur le sol témoin que sur les sols amendés. La déficience de la nutrition azotée a été par contre plus marquée sur les sols amendés (IN < 80) que sur le sol témoin (IN = 84). Les apports d'engrais minéraux aux sols amendés et au sol témoin ont permis d'obtenir des bilans culturaux positifs pour le phosphore (+ 45 à + 100 kg.ha-1) et le soufre (+ 5 à + 24 kg.ha-1). Les sols amendés par le Burkina phosphate et la dolomie sont plus déficitaires en azote et en potassium que le sol témoin. L'étude a montré que le compost associé aux engrais minéraux permet d'obtenir des bilans culturaux du sol positifs en N, P et S.
Abstract
Effects of local amendments on yields, nutrition indexes and mineral balances in a cotton-maize rotation system in the west of Burkina Faso. After 20 years of continuous cropping system on a tropical ferruginous soil, the effects of three amendments on crop yield and nutrients uptake were studied for two years in this system. Compost, phosphate rock and dolomite amendments at respectively the rate of 6, 0.3 and 1.5 t.ha-1 were compared to the control soil not amended. The experimental design was a block Fisher with three amendments and four replications. Cotton (Gossypium hirsutum L.) and maize (Zea mays L.) mineral nutrition were determined as well as their yields. These plants dry matter productions were measured after harvesting. Results showed that compost, phosphate rock and dolomite application to soil improved the dry matter production of cotton and maize plants. Soil amendment with 6 t.ha-1 of compost significantly improved cotton seed and maize production. In the same time, the application of 1.5 t.ha-1 of dolomite limestone significantly increased maize yield. The application of phosphate rock (0.3 t.ha-1) had no effect on cotton or maize yields as well as their dry matter production. Compost, phosphate rock and dolomite application to soil had no influence on cotton and maize plants contents in N, P and K. Seventy days after sowing, the amendments did not improve cotton nutrition indexes which revealed a good nutrition for P, K and S. Nutrition indexes indicated that N deficiencies in cotton plants with amended soils (IN < 80) were more important than those observed with cotton plants grown on control soil (IN = 84). The application of mineral fertilizer to the control soil or to amended soils gave positive balances for nutrients like P (45 to 100 kg.ha-1) and S (5 to 24 kg.ha-1), while soils amended with phosphate rock and dolomite showed a high deficit for N and K, compared to the control soil. The study showed that compost combined to mineral manures could improve soil fertility due to the nutrients excess balances in N, P and S.
Table des matières
1. Introduction
1Dans les systèmes de culture à base de cotonnier et de céréales qui prédominent dans la plupart des pays d'Afrique sub-saharienne, la fertilisation minérale seule ne permet pas de maintenir la fertilité des sols (Bado, 2002 ; Mills et al., 2003). Les techniques de gestion de la fertilité pratiquées par les agriculteurs conduisent à un épuisement rapide des sols (Yemefack et al., 2004). Dans la zone cotonnière ouest du Burkina Faso, la mise en culture des sols se traduit par une perte annuelle de 2 à 4 % de la matière organique pour atteindre le seuil de non réponse aux engrais minéraux après 12 à 15 ans de culture continue (Berger et al., 1987 ; Dakouo, 1991 ; Hien et al., 1994). Les travaux de Dakouo (1994) ont montré que les carences potassiques apparaissent au bout de 6 à 7 ans sur les sols ferrugineux et seulement après 4 ans sur les sols ferrallitiques.
2Par ailleurs, malgré l'accroissement spectaculaire de la production cotonnière au Burkina Faso, l'apparition fréquente de symptômes de déficience minérale sur le cotonnier dénote de fortes dégradations de fertilité qui entrainent par conséquent une baisse des rendements (Braud, 1987). Pourtant sur des sols dégradés et acides, Zougmoré et al. (2003) ont montré l'intérêt d'associer à la fumure minérale, des fumures organiques combinées au phosphate naturel tricalcique du Burkina appelé Burkina phosphate. Les amendements jouent en général un rôle important sur diverses propriétés du sol permettant de justifier leur utilisation (Piéri, 1989 ; Lompo et al., 1995 ; Gascho et al., 2001 ; FAO, 2004). La baisse des rendements en coton graine est susceptible de mettre en cause la rentabilité du coton qui est pourtant la principale source de devises du pays.
3Dans un tel contexte, le problème d'intensification et de gestion durable de la fertilité du sol constituent une priorité. La présente étude a été réalisée sur un sol ferrugineux tropical dégradé en vue d'évaluer l'intérêt des amendements locaux à base du compost, du Burkina phosphate et de la dolomie dans la perspective d'améliorer les productions et de maintenir durablement la fertilité des sols dans un système de culture coton-maïs.
2. Matériel et méthodes
2.1. Le site d'étude et le matériel végétal
4L'étude a été conduite sur la station de recherches agricoles de Farako-bâ située à une altitude de 405 m. Les coordonnées géographiques de cette station indiquent une longitude de 4°20 W et une latitude de 11°06 N. Le climat est de type sud soudanien et les pluviométries enregistrées sont de 816,7 mm en 2004 et de 869,4 mm en 2005. L'étude a été implantée sur un sol ferrugineux tropical de texture limono-argileuse. Les teneurs en limon, argile et sable sont respectivement de 71,2 %, 15,9 % et 12,9 % sur 0-20 cm de profondeur. Ce sol est non seulement pauvre en matière organique (0,8 %), mais il est acide avec un pH de 5,4 et carencé en phosphore (P Bray 1 = 0,72 mg.kg-1) et en potassium disponible (23,5 mg.kg-1). La somme des bases échangeables (2,48 cmol+.kg-1) et la CEC (4,5 cmol+.kg-1) révèlent la pauvreté du complexe absorbant du sol en réserves minérales.
5Le matériel végétal utilisé est composé d'une variété de cotonnier FK 37 qui est vulgarisée et cultivée dans la zone cotonnière ouest du Burkina Faso. Une variété améliorée de maïs FBC 6 d'un cycle de 110 jours a été également utilisée. Ces deux variétés (FK 37 et FBC 6) ont été cultivées dans une rotation biennale coton-maïs.
2.2. Amendements et engrais minéraux
6La dolomie qui est utilisée comme un amendement par les services agricoles du Burkina Faso est extraite d'un gisement du pays. Cet amendement, composé de 27 % de CaO et 19 % de MgO, présente une granulométrie comprise entre 53 et 106 µm pour 34 % de ce produit. Le phosphate naturel tricalcique du Burkina (Burkina phosphate) contient 25 % de P2O5 et 35 % de CaO ; plus de la moitié de ce produit (52,6 %) a une granulométrie comprise entre 53 et 106 µm. Le compost utilisé a été obtenu à partir des tiges de cotonnier préalablement broyées à l'étable et mélangées aux déjections des bœufs puis compostées en fosse. Ce compost présente un rapport C/N de 17 et sa composition, déterminée à partir de la matière sèche, indique 38,8 % de matière organique, 1,3 % de N, 0,3 % de P2O5, 0,3 % de S et 1,2 % de K2O.
7L'engrais minéral coton renfermant les éléments N, P, K, S et B de formule 14-23-14-6-1 et l'urée CO (NH2)2 (46 % N) ont été utilisés.
2.3. Dispositif expérimental et conduite de l'étude
8L'étude a été implantée sur un sol sous culture continue depuis 20 ans. En première année d'étude en 2004, quatre amendements ont été apportés sur l'essai conduit selon un dispositif statistique en blocs de Fisher comportant quatre répétitions. Les traitements étudiés sont :
9– témoin sans amendement,
10– 6 t.ha-1 de compost,
11– 0,3 t.ha-1 de Burkina phosphate,
12– 1,5 t.ha-1 de dolomie.
13Un labour a été effectué dès la première décade du mois de juin. Le compost, le Burkina phosphate et la dolomie ont été appliqués sur des parcelles élémentaires de 160 m2 (10 lignes de 20 m x 0,80 m). Ces amendements ont été enfouis par un hersage avant le semis du cotonnier qui a été réalisé le 22 juin 2004. En deuxième année, la culture mise en place a été le maïs semé le 4 juillet 2005 (sans amendement) mais avec uniquement des apports d'engrais minéraux. Les semis du cotonnier et du maïs ont été réalisés à 40 cm entre les poquets et 80 cm entre les lignes et le démariage, réalisé à deux pieds par poquet, est intervenu 15 jours après la levée. La fumure minérale a été apportée à raison de 44 N, 34,5 P2O5, 21 K2O, 9 S et 1,5 B2O3 par hectare sur le cotonnier en première année ainsi que sur le maïs en deuxième année. La récolte du coton a été effectuée en novembre 2004 et celle du maïs, en octobre 2005, soit environ 110 jours après le semis.
2.4. Paramètres mesurés et analyses
14On a réalisé à 30, 45 et 60 jours après le semis, des prélèvements de pétioles en vue de pratiquer des diagnostics pétiolaires pour suivre l'évolution des teneurs des cotonniers en azote et en phosphore. Au 70e jour après les semis, un diagnostic foliaire (Braud, 1984) a été réalisé pour évaluer les indices de nutrition globale des cotonniers en azote, phosphore, potassium et soufre. Ces indices de nutrition en azote (IN), en phosphore (IP), en potassium (IK) et en soufre (IS) sont déterminés à partir des formules suivantes (Braud, 1984) :
15IN = -1,65 + 14,55 x N + 3,84/P + 1,42 x p
16IP = 82,29 - 5,87/P + 12,45 x S + 1,45 x p
17IK = 93,11 - 71,08/K + 2,25/S + 2,99 x f
18IS = 99,60 - 6,58/S + 11,3/P + 1,24 x f
19où N, P, K et S, exprimés en %, représentent la teneur de ces éléments dans la matière sèche ; p exprimé en g, est le poids sec de 30 feuilles séchées à 70 °C à l'étuve et f, une constante, correspond au niveau de floraison des plants au 70e jour après les semis. La nutrition est alors estimée optimale pour un élément donné, si l'indice est supérieur à 100, bonne si l'indice est compris entre 90 et 100, déficiente si l'indice est compris entre 80 et 90 et carencée si l'indice est inférieur à 80.
20Sur le maïs, les prélèvements foliaires ont été réalisés à 60 et 80 jours après les semis, selon la méthode de diagnostic foliaire décrite par Loué (1984). Le tiers central des feuilles est retenu pour la détermination des teneurs en azote, phosphore et potassium. La déficience du maïs est indiquée par des teneurs en N, P et K respectivement inférieures à 2,75 %, 0,24 % et 1,70 %. La nutrition du maïs est bonne lorsque les teneurs en N sont comprises entre 2,76 et 3,5 %, en P comprises entre 0,25 et 0,40 % et en K supérieures à 2,25 %.
21Les échantillons de plantes de cotonnier et de maïs ont été analysés au laboratoire du Bureau National des Sols (BUNASOLS) du Burkina Faso. Les rendements et les productions de matière sèche ont été déterminés à la récolte. Le bilan cultural a été déterminé en deuxième année d'expérimentation. Ce bilan a été calculé à partir des éléments minéraux (N, P, K et S) apportés par les fumures et ceux exportés par les cultures.
22Les données recueillies ont été soumises à une analyse de variance (ANOVA) à l'aide du logiciel XL STAT 6.1.9. Le test de Fisher a été utilisé pour la comparaison des moyennes lorsque l'analyse de variance révèle des différences significatives entre les traitements au seuil de probabilité de 5 %.
3. Résultats
3.1. Effet des fumures sur la biomasse aérienne et les rendements des cultures
23La biomasse aérienne produite par les tiges de cotonniers sur le sol témoin non amendé (Fm) et sur les sols amendés ne diffère pas de façon significative, même si une augmentation de biomasse de 5 à 13 % due aux apports d'amendements par rapport au sol non amendé est observée (Tableau 1). La biomasse aérienne du maïs a été significativement accrue sur le sol amendé en compost (FmCom). Sur les sols amendés, l'augmentation de la production de biomasse a varié selon le type d'amendement, de 138 à 458 kg.ha-1 par rapport au sol témoin non amendé. Les amendements par le compost, le Burkina phosphate et la dolomie ont amélioré les quantités de matière sèche des cotonniers et du maïs (Tableau 1).
24Les amendements, associés à la fumure minérale, ont permis d'améliorer les rendements en coton graine et maïs grain par rapport au témoin fertilisé par la fumure minérale seule (Fm) (Tableau 1). L'apport de 6 t.ha-1 de compost a amélioré de façon significative les rendements en coton graine de 249 kg.ha-1 et les rendements en maïs grain de 575 kg.ha-1 par rapport aux rendements obtenus sur le sol témoin non amendé. Les apports du compost à 6 t.ha-1 et de la dolomie à 1,5 t.ha-1 ont un effet supérieur sur les rendements du coton et du maïs par rapport à la dose de 0,3 t.ha-1 de Burkina phosphate. L'effet de la dolomie n'a pas été significatif en première année sur le rendement en coton. Par contre, en deuxième année, les arrière-effets de la dolomie ont permis d'améliorer les rendements du maïs de façon significative.
25Les amendements apportés ont amélioré les rendements du coton graine de 2 à 16 % et du maïs grain de 9 à 18 %, mais aussi les quantités de matière sèche par rapport au sol témoin non amendé.
3.2. Effet des fumures sur la nutrition minérale du cotonnier et du maïs
26Evolution des teneurs en azote et en phosphore du cotonnier et valeurs des indices de nutrition. Après l'application de la fumure minérale sur les sols amendés et le sol témoin, les teneurs en azote et en phosphore des cotonniers ont augmenté entre 30 et 45 jours après les semis mais elles ont par contre baissé à 60 jours (Tableau 2). Au 30e jour après les semis, les teneurs en azote des cotonniers des sols amendés sont supérieures à celles des cotonniers du sol témoin qui est de 3,25 %, alors qu'aux 45e et 60e jours, on observe les teneurs en azote les plus élevées pour les plants du sol témoin. Ainsi au 60e jour, les teneurs en azote des cotonniers sur les sols amendés se situent autour de 2,4 %, alors que les teneurs des cotonniers du sol témoin (Fm) sont de 2,79 %. Les amendements n'ont pas influencé les teneurs en phosphore des cotonniers à 30, 45 et 60 jours.
27Les indices de nutrition en azote IN, en phosphore IP, en potassium IK et en soufre IS sont présentés dans le tableau 3. La nutrition azotée des cotonniers dont les indices varient entre 76,7 et 85,4 a été déficiente pour l'ensemble des sols, amendés ou non. Les indices de nutrition en azote sur les sols amendés par le compost (IN = 78,3) et le Burkina phosphate (IN = 76,7) ont des valeurs plus faibles que celles observées sur les cotonniers du sol témoin (IN = 85,4) (Tableau 3). Les indices de nutrition des cotonniers en phosphore (IP > 100), en soufre (IS > 100) et en potassium (IK > 90) n'ont pas été influencés par les amendements apportés. Les amendements par le compost, le Burkina phosphate et la dolomie n'ont pas amélioré les indices de nutrition, mais ils semblent par contre induire un effet dépressif sur la nutrition azotée.
28Evolution des teneurs en azote, en phosphore et en potassium du maïs. Aux 60e et 80e jours après les semis, les teneurs en azote et en phosphore indiquent que la nutrition minérale du maïs a été peu influencée par les amendements de la première année et par la fumure minérale apportée, sauf pour le potassium où les plus fortes teneurs sont observées sur les plants du sol témoin (Fm) au 80e jour (Tableau 4). Au 60e jour après les semis, les plants des sols amendés ont des teneurs en azote (2,69 à 2,91 %) plus élevées que celles des plants du sol témoin (2,58 %). Au 80e jour, c'est le contraire avec des teneurs des plants de maïs en azote plus faibles sur les sols amendés.
29Sur les sols amendés, la nutrition azotée du maïs est déficiente au 80e jour étant donné que les teneurs en azote sont inférieures à 2,75 %. Aux 60e et 80e jours, sur le sol témoin et les sols amendés, les teneurs du maïs en phosphore et potassium respectivement supérieures à 0,5 et 2,5 % dénotent une bonne nutrition phosphatée et potassique pour cette culture. En considérant les teneurs des plants de maïs, la nutrition minérale à 60 et à 80 jours a été satisfaite aussi bien sur le sol témoin que sur les sols amendés pour le phosphore et le potassium, alors qu'elle a été déficiente pour l'azote.
3.3. Exportations des éléments minéraux par les cultures de coton et de maïs
30Exportations minérales par les productions de coton graine et de maïs grain. Les amendements par le compost et par la dolomie, associés à la fumure minérale, ont entrainé des exportations plus importantes d'azote, de phosphore et de potassium par les productions de coton graine et de maïs grain (Tableau 5). Les quantités de soufre et de phosphore prélevées au sol par les récoltes n'ont pas été influencées par les fumures appliquées ni en première année sur le cotonnier, ni en deuxième année sur le maïs. Les quantités d'azote (26,2 kg.ha-1) et de phosphore (9,5 kg.ha-1) exportées par le coton sur le sol amendé par le Burkina phosphate ont été inférieures à celles prélevées sur le sol témoin non amendé. A l'exception du Burkina phosphate, les autres amendements (compost et dolomie) ont contribué à augmenter les quantités d'azote, de phosphore, de potassium et de soufre prélevés par le coton et le maïs.
31Exportations d'éléments minéraux par les tiges de cotonnier et de maïs. Les quantités de phosphore et de soufre exportées par les tiges de cotonnier et de maïs restent négligeables par rapport à celles de l'azote et du potassium. Comparé au sol témoin, l'apport de la dolomie a augmenté les quantités d'azote, de phosphore et de potassium exportées par les tiges de cotonnier (Tableau 6). La dolomie a aussi accru les exportations d'azote, de potassium et de soufre par les tiges de maïs en deuxième année. L'exportation de l'azote par les tiges de cotonnier a été significativement inférieure avec le Burkina phosphate (12,7 kg.ha-1) par rapport au sol témoin (18,9 kg.ha-1). Comparativement au sol témoin non amendé, l'apport du compost a induit une augmentation des exportations en potassium de 42 et 30 % respectivement par les tiges de cotonnier et de maïs. Les quantités de potassium exportées par les tiges de cotonnier et de maïs sur le sol témoin demeurent inférieures à celles prélevées sur les sols amendés.
3.4. Bilans culturaux
32En considérant les éléments minéraux apportés au sol par les fumures d'une part et, d'autre part, les exportations par le coton et le maïs, le bilan cultural pour le phosphore et le soufre est positif pour les sols amendés et le sol témoin (Tableau 7). Après deux années d'application des fumures minérales sur les sols amendés et sur le sol témoin, les bilans culturaux sont positifs pour le phosphore (+ 45,7 à + 100 kg.ha-1) et le soufre (+ 5 à + 24 kg.ha-1).
33L'apport de compost entraine un bilan cultural positif pour l'azote (+ 14,8 kg.ha-1) alors que ce bilan est négatif sur le sol témoin non amendé (- 51,4 kg.ha-1). Les sols amendés par la dolomie et le Burkina phosphate ont également été déficitaires en azote (Tableau 7).
34Le bilan potassique est négatif pour l'ensemble des sols (sols amendés et sol témoin), mais ce déficit est plus accentué pour les sols amendés par le Burkina phosphate (- 67,1 kg.ha-1) et la dolomie (- 71,8 kg.ha-1).
35Les apports de Burkina phosphate et de dolomie n'ont pas réduit les déficits en azote et en potassium par rapport au sol témoin non amendé. En revanche, le compost utilisé à 6 t.ha-1 a permis de réduire le déficit en potassium qui demeure inférieur à celui du sol témoin. L'apport du compost a permis d'obtenir des bilans culturaux positifs de + 14,8 kg.ha-1 pour l'azote, de + 62,7 kg.ha-1 pour le phosphore et de + 24 kg.ha-1 pour le soufre.
4. Discussion
36Les améliorations des rendements en coton graine et en maïs grain sur les sols amendés en 1re et en 2e année montrent que les amendements appliqués présentent un effet positif sur ce sol dégradé et acide. Cela confirme les travaux de Dridi et al. (1999) et de Gascho et al. (2001) qui ont mis en évidence des augmentations sensibles de rendements après les apports d'amendements organiques et de dolomie sur des sols acides. L'augmentation des rendements des cultures et des quantités de matière sèche produite sur les sols amendés en compost et en dolomie a occasionné des exportations d'éléments minéraux plus importantes que celles observées sur le sol témoin.
37Durant la croissance végétative des cultures, notamment entre 30 et 80 jours après les semis, les amendements apportés ont peu influencé la nutrition minérale du cotonnier et du maïs en 1re et en 2e année. La faible influence des fumures sur les teneurs en azote et en phosphore des cotonniers entre 30 et 60 jours suggère que les amendements n'ont pas amélioré de façon sensible la disponibilité des nutriments par rapport au sol témoin non amendé. Les travaux de Bado et al. (1993), Lompo et al. (1995) et FAO (2004) soulignent un effet réduit des phosphates naturels et de la dolomie à cause d'une solubilisation lente et d'une faible réactivité. Les teneurs en azote et en phosphore des cotonniers ont baissé entre 45 et 60 jours après les semis alors que Braud (1987) a montré que les quantités d'éléments minéraux mobilisés par le cotonnier augmentaient constamment durant sa phase de croissance végétative. Cette diminution des teneurs en azote des cotonniers au 60e jour sur les sols amendés et le sol témoin serait liée à un phénomène de dilution dû à l'accroissement plus rapide du volume et du poids des feuilles que leur teneur en azote (Braud, 1987). Les indices de nutrition ont montré que la nutrition minérale du cotonnier était globalement satisfaite pour tous les éléments nutritifs, à l'exception de l'azote au 70e jour. Sur les sols amendés, la déficience en azote plus accentuée que sur le sol témoin dénote un effet dépressif imputable selon Richard (1980) et Braud (1987) aux compétitions entre l'azote et le soufre ou entre l'azote et le phosphore. La nutrition potassique des cotonniers a été bonne dans l'ensemble et les teneurs en potassium étaient nettement supérieures à 6 %, alors que le niveau critique pour cet élément défini par Braud (1987) est de 4,4 % à 75 jours après les semis.
38La nutrition minérale du maïs en 2e année a été marquée par l'accroissement des teneurs en azote, en phosphate et en potassium des plants de maïs cultivés sur le sol témoin non amendé au 80e jour après les semis. Cela suggère que sur les sols amendés en première année, le transfert des éléments nutritifs des feuilles vers les épis du maïs a été plus important que sur le sol témoin non amendé. De ce fait, la forte mobilisation des éléments minéraux a appauvri les feuilles et entrainé ainsi une baisse des teneurs en azote, en phosphore et en potassium du maïs au 80e jour sur les sols amendés. Les sols amendés par le compost ou la dolomie ont permis une nutrition azotée correcte du maïs à 60 jours, alors qu'au niveau du sol témoin et du sol amendé par le Burkina phosphate, cette nutrition était, selon Loué (1984), déficiente.
39Bien que la nutrition minérale du cotonnier et du maïs soit peu influencée, les amendements ont augmenté les exportations d'éléments minéraux par une amélioration des rendements et de la production de matière sèche du cotonnier et du maïs. Les bilans culturaux sont déficitaires pour l'azote et le potassium, ce qui suggère que les prélèvements de ces deux éléments par les cultures au niveau du sol n'ont pas été compensés par les fumures appliquées. Après l'apport de la dolomie, les déficits importants du sol en azote et en potassium suggèrent que la dolomie a stimulé l'absorption de l'azote et du potassium par les cultures, sans pour autant compenser les exportations. Tout en confirmant les travaux de Dognin et al. (1981) sur les bilans minéraux, les résultats de cette étude suggèrent que le bilan cultural pourrait être amélioré par la réduction des exportations d'éléments minéraux causée notamment par la biomasse aérienne des cultures.
5. Conclusion
40Sur le sol témoin non amendé, la nutrition minérale des cotonniers entre le 30e et le 70e jour, comme celle du maïs à 60 et 80 jours après les semis, ne diffère pas de celle observée sur les sols amendés en compost, en Burkina phosphate et en dolomie. Cependant, les apports d'amendements associés aux fumures minérales ont amélioré les rendements en coton et en maïs ainsi que les productions de matière sèche qui, par conséquent, ont entraîné une augmentation des exportations minérales. Après deux années de culture, les sols amendés en Burkina phosphate et en dolomie se sont appauvris davantage en azote et en potassium que le sol témoin. Le compost est l'amendement permettant des bilans culturaux positifs à même de préserver la fertilité du sol dans ce système de culture coton-maïs.
41Remerciements
42Les auteurs remercient le Professeur Guinko Sita, responsable du Laboratoire de Biologie et Ecologie végétales de l'Université de Ouagadougou, pour sa collaboration scientifique dans la réalisation de ce travail. Leurs remerciements s'adressent également à l'équipe de recherche du Programme Coton de l'Institut de l'Environnement et de Recherches Agricoles (INERA) du Burkina pour sa contribution technique et à la Filière Coton qui a financé l'étude.
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Pour citer cet article
A propos de : Bazoumana Koulibaly
Institut de l'Environnement et de Recherches Agricoles (INERA). Programme Coton. 01 BP 208. BF-Bobo-Dioulasso 01 (Burkina Faso). E-mail : bazoumana@hotmail.com
A propos de : Ouola Traoré
Institut de l'Environnement et de Recherches Agricoles (INERA). Programme Coton. 01 BP 208. BF-Bobo-Dioulasso 01 (Burkina Faso).
A propos de : Déhou Dakuo
Société Burkinabé des Fibres Textiles (SOFITEX). Direction du Développement de la Production cotonnière. BP 147. BF-Bobo-Dioulasso (Burkina Faso).
A propos de : Prosper N. Zombré
Université de Ouagadougou. Unité de Formation des Sciences de la Vie et de la Terre. Laboratoire de Biologie et Ecologie végétale. 03 BP 7021. BF-Ouagadougou 03 (Burkina Faso).